(25.9.2005)
1 Rois 19
Dieu rectifie son image devant Elie
1 Rois 19 : 1-14
télécharger le texte : P-2005-09-25.pdf
Chers catéchumènes, chers parents et paroissiens, parce qu'on reste en apprentissage et en découverte toute sa vie…
Nous allons accompagner Elie dans son voyage, ce matin, l'accompagner dans un double voyage, le voyage qu'il fait avec ses pieds et le voyage qu'il fait dans sa tête et dans son cœur. Il y a toujours une part initiatique dans les voyages qui sont décrits dans la Bible, voyages auxquels nous sommes invités à participer.
Mais que se passe-t-il ? Elie est en danger de mort. Elie est un prophète de Dieu, du Dieu d'Israël et — dans une sorte de défi, de concours entre prophètes — il a montré la supériorité du Dieu d'Israël sur les baals, des dieux de la nature et de la fécondité. La reine Jézabel — qui tenait pour les baals — est furieuse et elle a averti Elie qu'il ne survivra pas à sa colère. Alors Elie s'enfuit. Il quitte le Mont Carmel (au nord d'Israël) et va jusqu'à Beersheva, à la pointe sud du Royaume de Juda. Plus au sud, il n'y a que le désert. Pourtant, il continue à marcher encore une journée, parce qu'il est désespéré.
Lorsqu'on est désespéré on n'est plus très logique puisqu'à ce moment il se couche sous un genêt pour y mourir, alors qu'il s'enfuyait pour sauver sa vie. Physiquement et matériellement Elie n'a plus rien à craindre. Il n'est plus dans le Royaume de Jézabel, il est à plus de 200 km d'elle. Il n'y a plus de danger pour lui, mais c'est son moral qui craque. Il est abattu, il ne voit plus de raison de vivre. Il est sorti vainqueur de sa compétition, mais ça n'en vaut pas la peine. Elie s'endort dans cet état d'esprit désespéré.
Mais voilà que pendant son sommeil, il est réveillé par un ange (c'est un mot codé, dans la Bible, pour signaler qu'il arrive quelque chose de mystérieux qui ne s'explique pas par la logique humaine). Et voilà qu'il y a à côté de lui un pain et un pot d'eau. Et par deux fois, Elie va être invité à manger, à se restaurer, manger et prendre des forces. La présence de l'ange nous indique que c'est Dieu qui est à l'origine de ce cadeau et de cette force.
Dans le désespoir d'Elie, Dieu intervient, il lui offre une autre issue que la mort. Dieu lui dit : "Ta vie vaut encore la peine d'être vécue. Tu n'as pas échoué. Prends des forces, tu as un voyage en perspective." Je ne sais pas si Elie en a été ravi, après les 200 km qu'il a déjà parcouru, il lui en reste encore 300 jusqu'à destination ! Mais le récit nous dit : "Avec les forces retrouvées dans ce repas, Elie marcha 40 jours et 40 nuits jusqu'à l'Horeb, la montagne sacrée." (1 R 19:8)
Parenthèse : Comprendre la bible, c'est faire des liens entre les textes, c'est pourquoi il est important de lire la bible — même plusieurs fois — pour mettre les textes en dialogue. 40 jours et 40 nuits, c'est une longue durée, à mettre en lien avec les 40 ans passés par le peuple hébreu au désert avec Moïse ou les 40 jours que Jésus passe dans le désert au moment des tentations. L'Horeb / Sinaï, la montagne sacrée, est le lieu de la révélation où Moïse a reçu les Tables de la Loi.
Donc, tous les signaux nous indiquent que ce voyage d'Elie va être le lieu d'une révélation importante sur Dieu, aussi importante que celle faite à Moïse. Elie vient de vivre son "exode" comme les hébreux pourchassés par le Pharaon et nourris avec la manne et les cailles au désert.
Quelle est cette importante révélation ? Vous l'avez entendu dans la lecture : il y a trois manifestations impressionnantes de phénomènes naturels, une tempête (cyclone, force 5), puis un tremblement de terre, enfin un incendie, et à chaque fois cette phrase : "mais le Seigneur n'y était pas présent" (1 R 19 :11-12). Enfin, il se manifeste dans un léger souffle, un bruit ténu, un murmure. Alors Elie reconnaît la présence de Dieu dans ce léger souffle, dans ce murmure.
On a l'impression que Dieu remet les pendules à l'heure en disant : "Je ne suis pas un super-baal. Je ne suis pas le Dieu de la nature au-dessus des baals. Ne te trompe pas Elie. Je suis complètement différent. Je ne suis pas dans les phénomènes naturels."
Dieu n'est pas Monsieur Météo. Il ne s'occupe pas d'envoyer la pluie ou le soleil, ou de répandre des épidémies ou distribuer les maladies. Dieu n'est pas de ce côté-là.
Vous aurez déjà fait un grand pas dans votre catéchisme si vous comprenez cela : Dieu n'intervient pas dans la météo, ni dans notre biologie. Dieu est différent et intervient différemment. Il est intervenu dans le désespoir d'Elie pour lui redonner le goût de vivre. Il intervient — de manière mystérieuse — dans nos vies pour que nous ayons de la confiance, de l'espérance et du bonheur. Mais il ne le fait pas en ôtant les cailloux du chemin, en raccourcissant notre route ou en nous envoyant l'autobus ! Dieu n'est pas le Père Noël !
Il y a des gens qui ont tout pour être heureux et qui ne le sont pas. Il leur manque une parole qui donne sens à leur vie. Peut-être, ces personnes n'ont-elles pas entendu à l'oreille ce murmure, cette parole qu'une mère dit à son enfant pour le rassurer ou le consoler, qu'un père dit à son fils ou à sa fille pour lui redonner confiance en soi, ces paroles qui donnent l'énergie de vivre.
La source de toutes ces paroles est en Dieu. Il appelle chacun à venir se relier à cette Source pour être abreuvé et restauré. Et il appelle à ce que chacun devienne aussi un messager (un ange ?) pour que ces murmures d'amour qui partent de la Source parviennent à leurs destinataires.
Le catéchisme (et pour les adultes le programme 7+1 par ex.) est ce temps de l'apprentissage de la géographie du chemin vers la Source, afin que chacun puisse entreprendre ce voyage vers la Source des murmures qui donnent l'énergie de la Vie.
Amen
© Jean-Marie Thévoz, 2024