(28.8.2005)
Marc 13
Des sujets d'inquiétudes qui doivent nous mobiliser
Ezéchiel 33:1-9. Marc 13:28-37
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Chères paroissiennes, chers paroissiens,
Vous avez entendu les deux lectures bibliques de ce matin. d'un côté la parole de Dieu adressée au prophète Ezéchiel, où Dieu lui dit qu'il lui donne le rôle de guetteur, de sentinelle, et les paroles de Jésus à ses disciples auxquels il annonce des temps difficiles et où il les exhorte à rester réveillés, vigilants. Je pense que ce rôle de sentinelle vigilante appartient maintenant à toute l'Eglise. L'Eglise a un rôle à tenir dans le monde et dans notre société, un rôle d'observateur, de guetteur pour voir ce qui se passe autour de nous et donner l'alerte pour que chacun puisse agir.
Je ne vais pas prêcher ce matin sur la fin du monde et utiliser cette peur comme un outil, un levier. Ce n'est pas la fin du monde, mais tout de même, il y a de quoi se tenir en alerte. Nous vivons un temps où l'inquiétude se fait grandissante, où la question "où va le monde ?" surgit de plus en plus souvent. Et ces inquiétudes se manifestent à diverses échelles, de l'avenir de la planète au niveau le plus local.
A. Les inondations de la semaine écoulée, nous rappellent que nous ne maîtrisons pas le climat dans ses déchaînements, même si nos comportements — en tant que société et qu'individus — contribuent au réchauffement de la planète. Nous ne pouvons pas rester indifférents à ces changements que nous provoquons, ni en tant qu'individus, ni en tant qu'Eglise.
Le monde nous a été confié par Dieu pour que nous en prenions soin et que nous le gardions vivable et habitable pour nos enfants. En tant que chrétiens — pour Dieu, pour nous et pour les générations qui nous suivent — nous avons à nous mobiliser pour sauver la planète. Il est de notre responsabilité à tous d'agir et d'inviter notre société à agir pour la sauvegarde de la création. Chaque geste compte, nous ne pouvons pas attendre que notre voisin commence, nous sommes ceux qui doivent montrer l'exemple, montrer le chemin pour être suivis.
B. Un deuxième sujet d'inquiétude que j'aimerais partager est à l'étendue de notre pays ou de notre canton, c'est le devenir de notre société. On nous a dit et rabâché les oreilles sur le XXIe siècle qui serait spirituel ou religieux. Ce qu'on voit, c'est qu'il est de plus en plus matériel et matérialiste.
Ce qui compte — aux yeux du monde — c'est que les entreprises fassent des profits de plus en plus considérables, raflent des parts de marché toujours plus étendues, fassent des bénéfices chaque année plus grands que l'année précédente, peu importe que ce soit au prix de licenciements ou de conditions de travail toujours plus dures. Les gens ne comptent pas, seuls les chiffres sont importants, comme si les entreprises ne servaient pas d'abord à donner du travail.
Ou alors, dans un autre registre, ce qui compte — et on mesure les ravages parmi les plus jeunes — c'est de se conformer à la mode, avoir l'apparence du moment, ou encore atteindre la célébrité. L'apparence est aujourd'hui plus importante que la personnalité et le caractère !
L'Eglise a autre chose à proposer, quelque chose de plus durable qu'une envolée de la bourse ou la brusque montée d'une célébrité éphémère. L'être humain a besoin de confiance, a besoin d'espérance, a besoin de relations qui s'inscrivent dans la durée. La relation à Dieu et aux autres — dans une atmosphère de vérité, de confiance et d'authenticité — est une base bien plus solide pour construire une personnalité, par exemple à l'adolescence, que les modèles offerts par la télévision.
Vous qui êtes là aujourd'hui, vous n'avez même pas besoin que je vous le dise, puisqu'en venant ici vous montrez que la quête du sens est une de vos préoccupations. Cependant, il est important que nous nous mobilisions pour le faire savoir autour de nous. Combien de personnes autour de vous savent-elles que Dieu donne un sens à votre vie ?
L'Eglise — ici en terre vaudoise — est en train de dépérir tranquillement de la timidité des chrétiens. Pendant les six dernières années l'Etat de Vaud a diminué le budget de l'Eglise et près de 20%, sans que personne ou presque ne proteste. Votre tâche n'est pas de faire du lobbying politique, mais l'Eglise ne peut pas s'exprimer seulement par la voix de ses pasteurs. Tous les croyants doivent porter témoignage du fait que leur foi enrichit leur vie.
C. Troisième sujet de préoccupation qui doit nous mobiliser : la paroisse et nos villages. Là j'aimerais d'abord remercier ceux qui sont engagés dans la paroisse, parce que leur dévouement est admirable et remarquable. Dans ce qui suit, je ne demande pas un effort à ceux qui sont déjà engagés, j'en appelle plutôt — et je m'en excuse — aux absents de ce matin.
Ce que je constate, c'est qu'il devient de plus en plus difficile de trouver de nouvelles personnes qui s'engagent, que ce soit pour le Conseil paroissial, pour le culte de l'enfance, le catéchisme ou des visites. J'observe aussi un démotivation des parents vis-à-vis de l'Eglise, en ce sens qu'ils n'inscrivent plus leurs enfants au culte de l'enfance ou au catéchisme, — même des personnes par ailleurs proches de l'Eglise.
Pourtant, l'Eglise et les chrétiens ont des choses à dire sur l'éducation des enfants aujourd'hui. Peut-on se contenter de laisser la télé élever nos enfants ? L'Eglise est porteuse de valeurs qui aident à construire une personnalité d'enfant et de jeune de meilleure qualité que la télé-réalité ou la rue !
Nous l'avons vu, on ne sait pas où va le monde. Face à ces incertitudes, chacun a d'autant plus besoin d'être armé d'une personnalité solide, prête à affronter les difficultés, les revers et les malheurs qui se dressent sur la route de chacun. Là aussi nous pouvons nous mobiliser pour dire autour de nous en quoi le vie du Christ nous a aidé à affronter et surmonter les écueils de l'existence. Vous êtes porteurs d'une expérience très riche, apprenez à la transmettre en n'hésitant pas à en mentionner la Source.
Enfin, une dernière préoccupation toute locale et circonstancielle, ma collègue Anne Lelièvre est en arrêt de travail pour une grossesse difficile. Nous ne savons pas quand et pour combien de temps un remplaçant pourra venir me seconder pour les tâches pastorales. Là aussi nous aurons besoin de l'appui de tous.
J'ai énuméré quelques-unes de mes inquiétudes que je crois partagées par une partie au moins de la population. Pour moi l'inquiétude, le souci, est un signal d'alarme pour nous mettre à agir. Il y a dans ces inquiétudes aussi une part d'espérance : nous avons dans l'évangile, dans l'Eglise, une richesse, une sagesse, un trésor à partager.
Ne nous refermons pas sur nous-mêmes, soyons des sentinelles, des sentinelles de l'évangile. C'est-à-dire des sentinelles qui avons des bonnes nouvelles à annoncer. Nous n'alertons pas sur des désastres ou des catastrophes. Nous avons à attirer l'attention de tous pour dire : voyez, venez, il y a là un trésor pour nous et pour nos enfants, un trésor de sens, un trésor de vie !
Amen
© Jean-Marie Thévoz 2024