(26.9.2004)
Luc 11
Croire en la force de la vie et en la générosité de Dieu, même si la vie est cruelle
Luc 18 : 1-8. Luc 11 : 5-9
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Chers catéchumènes, chers parents, chères paroissiennes, chers paroissiens,
Jésus aimait parler en paraboles, c'est-à-dire avec des petites histoires tirées de la vie quotidienne, mais qui nous disent des choses profondes sur Dieu, sur la vie, sur l'être humain. Des petites histoires dans lesquelles nous pouvons nous reconnaître.
C'est vrai, qui ne pesterait pas d'être réveillé à 3 heures du matin par un voisin à qui il manquerait des oeufs pour une omelette ou une aspirine ! Mais enfin, puisqu'on est réveillé, autant les lui donner, non ? Et Jésus de conclure : A combien plus forte raison, Dieu qui est généreux, donnera-t-il à celui qui demande ? (Lc 11:13)
Les deux paraboles vont dans le même sens et soulignent que Dieu donne, que Dieu est généreux.
Mais peut-on croire ces histoires, peut-on croire Jésus sur ce point lorsqu'on voit le monde tel qu'il est aujourd'hui ? Quelle place Dieu a-t-il dans le monde ? Est-il seulement là ?
Pour essayer de répondre à cette question, il faut faire une sorte de détour, par la pensée. Provisoirement, nous allons remplacer le mot "Dieu" par l'expression "la Vie" et nous demander ce que nous pensons de "la Vie" que nous vivons, de "la Vie" qui s'étend devant nous.
Quelles sont nos croyances envers "la Vie"? Est-ce que nous croyons que "la Vie" nous offre du bonheur de façon illimitée ? ou plutôt qu'il faut lutter pour en obtenir une parcelle ?
Est-ce qu'on pense :
• "la Vie" est calculatrice et compense toujours un bonheur par un malheur (ou un malheur par un bonheur)
• "la Vie" on peut lui faire confiance, "tout problème trouve sa solution"
• "la Vie" me laisse libre de choisir mon chemin ou bien "tout est déjà écrit"
• on a trois voeux (comme dans les contes de fées) ou moins, ou plus, jusqu'à l'infini ?
Certains font confiance en "la Vie" et repartent avec énergie après chaque échec ou chaque coup dur. D'autres se découragent et trouvent "la Vie" trop injuste. Certains sont frappés durement par les épreuves, les malheurs et d'autres semblent épargnés, sans que ces derniers puissent être pensés meilleurs que les autres.
Il en ressort que ce qu'on a appelé "la Vie" a comme deux visages. D'un côté, il y a tous les événements qui arrivent, notamment tout ce qui est du côté du malheur. Aussi belle que soit la nature lorsque nous regardons un paysage ou un coucher de soleil, c'est aussi elle qui a concocté les virus, microbes et autres cancers. Il y a donc une "nature cruelle" qui fait partie de "la Vie", à quoi l'on peut ajouter la part de violence humaine que l'humanité génère.
D'un autre côté, il y a toutes les belles choses qui nous sont offertes gratuitement et tout ce que les humains ont produit, créé et font chaque jour pour que la nature cruelle et l'injustice des hommes n'aient pas le dessus. J'appellerai tout cela "la force de la vie" qui lutte pour que ce qu'il y a de plus humain dans l'homme ait le dessus contre les forces de destruction (naturelles ou humaines).
Ces deux côtés de "la Vie" existent dans notre monde, au loin, comme en nous-mêmes. Nous abritons ces deux aspects en nous-mêmes et nous les retrouvons dans le monde. La question est maintenant de voir ce que nous voulons choisir, en quoi nous voulons croire.
Allons-nous croire que de toute façon les forces de destruction sont les plus fortes ? Alors nous pouvons déjà baisser les bras. Mais quelle vie s'étend alors devant nous ?
Ou bien allons-nous croire que la force de la vie — même si nous savons qu'elle est fragile — peut concurrencer l'injustice et la nature cruelle ?
La foi, c'est croire dans cette force de vie, c'est croire que notre désir de vie est plus fort qu'un prétendu destin, c'est avoir fondamentalement foi que malgré les obstacles, les échecs, les malheurs, la vie humaine a un sens et une valeur.
Les paraboles de Jésus ne minimisent pas les obstacles, le juge obtus ne va pas se laisser amadouer et devenir tout à coup gentil, pourtant — même si c'est par lassitude — il va rendre la justice à la pauvre veuve. On peut voir en elle une précurseure d'Amnesty International qui envoie sans se lasser des milliers de lettres pour faire libérer des prisonniers d'opinion. Et ça marche !
Si ça marche avec des adversaires, combien plus cela marchera-t-il avec Dieu, puisqu'il est déjà favorable à ce que la justice soit rendue, à ce que chacun soit nourri. Mais cela demande foi et engagement. La foi, c'est la confiance que cela vaut la peine de demander, de prendre le risque de frapper à la porte.
L'engagement, c'est de le faire et de continuer avec ténacité — malgré les refus et les échecs sur la route.
Pendant le parcours de catéchisme, vous découvrirez que la foi chrétienne n'est pas "obéir à une longue liste de choses" mais développer une confiance dans la vie, dans la force de la vie que Dieu donne à tous ceux qui la demandent. "Demandez et vous recevrez" (Luc 11:9).
Amen
© Jean-Marie Thévoz, 2024