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d) Pentateuque

  • Mon visage est le visage de Jésus pour celui qui me regarde

    (10.11.2002)

    Exode 33

    Mon visage est le visage de Jésus pour celui qui me regarde

    Exode 33 : 18-23.      Matthieu 25 : 31-45

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  • De quoi avons-nous faim ?

    (19.9.2004)

    Deutéronome 8

    De quoi avons-nous faim ?

    Deutéronome 8 : 1-6.      Jean 6 : 47-51      Matthieu 6 : 16-18

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  • Le combat de Jacob, blessure et bénédiction

    (4.7.2004)

    Genèse 32

    Le combat de Jacob, blessure et bénédiction

    Genèse 32 : 23-32.      Ephésiens 1 : 3-6

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  • "C'est ici la maison de Dieu, la porte du ciel !"

    (12.6.2005)

    Genèse 28

    "C'est ici la maison de Dieu, la porte du ciel !"

    Genèse 28:10-19.       Matthieu 21 : 12-15

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  • Culte des familles, d'Abraham à Jésus avec Dieu

    (1.4.2001)

    Lévitique 26

    Culte des familles, d'Abraham à Jésus avec Dieu

    Lévitique 26 : 9-12

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  • L'alliance avec Noé

    (23.10.2005)

    Genèse 8

    L'alliance avec Noé

    Genèse 5:28-32, 7:11-16.        Genèse 7:24, 8:1, 5-12, 15-21a.       Genèse 9 : 8-16

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  • Le péché ? Une attitude de méfiance à l'égard de la bienveillance de Dieu

    (26.7.1998)

    Genèse 3

    Le péché ? Une attitude de méfiance à l'égard de la bienveillance de Dieu

    Genèse 3 : 1-7.       Romains 8 : 1-4.   Marc 7 : 14-19. 

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    Chères paroissiennes, chers paroissiens,

    Nous avons vu lors des deux précédentes prédications (12 et 19.7.98) comment Dieu avait créé le monde et l'être humain en recherchant le bonheur de l'humanité. Ce récit de création est immédiatement suivi du récit de l'irruption du péché dans le monde. Je vais essayer de vous parler du péché, même si c'est un sujet difficile; on a beaucoup de souvenirs, de mauvais souvenirs où le péché a été brandi pour nous culpabiliser. En effet, lorsqu'on parle de la chute de l'humanité, on cherche trop souvent le ou les coupables. Je voudrais éviter ce piège. Essayons d'oublier nos idées toutes faites pour nous concentrer sur le message du texte qui commence ainsi :

    "Le serpent était le plus rusé de tous les animaux sauvages que le Seigneur avait faits" Gn 3:1

    Après l'homme, les arbres, les animaux et la femme, une nouvelle figure apparaît dans la création, celle du serpent, "le plus rusé de tous les animaux que le Seigneur avait faits". C'est le serpent qui prend l'initiative du dialogue, c'est le serpent qui convainc la femme et l'homme de manger du fruit défendu. Plus tard, lorsque Dieu interrogera l'être humain sur ce qui s'était passé, l'homme dira : "c'est ma femme", et la femme "c'est le serpent". Dans quelque sens qu'on prenne cette histoire, on butte sur le serpent qui est désigné comme l'origine du mal, la cause de tout. Bien sûr, certains n'ont pas manqué de rajouter que si Dieu a fait le serpent, on peut rejeter la faute sur Dieu lui-même.

    Je crois que la figure du serpent est placée là — volontairement dans le texte — pour indiquer que la poursuite d'un responsable, d'un fautif est inutile. C'est une voie sans issue, une fausse route. L'important est ailleurs que dans la cause, l'origine. L'important, c'est le mécanisme qui a déclenché l'irruption du péché dans le monde.

    Mystérieusement, la possibilité du mal était déjà là, rampante et tapie (Gn 4:7) dans le monde, de la même manière que le malheur peut tomber à l'improviste sur n'importe qui, à n'importe quel moment, sans cause, sans faute de la part de quiconque.

    L'important est donc de porter notre regard sur ce qui se passe, sur le mécanisme qui met en route ce qu'on appelle le péché. Ce mécanisme est visible dans le dialogue mené par le serpent. Que dit-il ?

    v1. "Est-il vrai que Dieu vous a dit : “vous ne devez manger aucun fruit du jardin ?”

    Entendez-vous ce que fait le serpent ? Il met systématiquement en doute ce que Dieu a dit.

    v2. La femme répondit au serpent : “Nous pouvons manger les fruits du jardin. v3. Mais quant aux fruits de l'arbre qui est au centre du jardin, Dieu nous a dit : «Vous ne devez pas en manger, pas même y toucher, de peur d'en mourir»”.

    La femme est au clair sur ce que Dieu a dit et elle rectifie correctement le commandement de Dieu.

    v.4 Le serpent répliqua “ Pas du tous, vous ne mourrez pas. Mais Dieu le sait bien : dès que vous en aurez mangé, vous verrez les choses telles qu'elles sont, vous serez comme lui, capables de savoir ce qui est bien ou mal.”

    Alors le serpent utilise une autre ruse. Il suggère habilement que Dieu agit envers l'être humain avec une intention autre que celle qu'il affiche, avec une intention mauvaise.

    L'intention positive, favorable de Dieu à l'égard de l'homme et de la femme que nous avons vue dans le récit de création qui précède, l'attention de Dieu au bonheur de l'être humain, cette bonté de Dieu est transformée par le serpent en une intention perverse de Dieu.

    Dieu n'agit pas pour votre bien, dit le serpent, il ne cherche qu'à protéger son pouvoir (sur la vie ou la connaissance). L'abondance à laquelle vous croyez n'est qu'un leurre, une illusion pour vous cacher tout ce que vous pourriez avoir et devenir !” Le serpent fait croire à l'être humain que Dieu n'a qu'une intention : les priver de la vraie vie. Il instille la méfiance envers Dieu. Et cela marche, hélas ! A ce moment-là de l'histoire de l'humanité comme aujourd'hui. La méfiance envers Dieu s'installe et ils goûtent à l'arbre de la confusion du bien et du mal.

    Ce qu'on appelle le péché, ce n'est pas un acte ou un autre que la morale réprouve, c'est une attitude fondamentale de méfiance envers Dieu et envers les autres. Le péché n'est pas d'avoir mangé du fruit défendu, mais d'avoir mis en doute l'intention bonne de Dieu.

    Vous avez entendu dans la lecture de l'évangile que Jésus a dit : "ce n'est pas ce qui entre dans l'homme qui le rend impur, mais ce qui sort de lui, de son coeur" (Mc 7:15). Se méfier de ce qu'on mange, de ce qu'on reçoit, c'est se méfier des autres. Et Jésus nous invite à faire confiance à ce qu'on reçoit. Mais il nous invite à nous méfier de ce qui sort de nous, c'est-à-dire de toutes les occasions où nous répétons le mal qu'on nous a fait, que nous avons subi.

    Maintenant que le fruit est consommé, que la méfiance s'est installée entre l'être humain et Dieu : que faire, que Dieu peut-il faire ? Il y a deux pistes suivies :

    1) Vous vous souvenez que j'avais interprété l'arbre de la connaissance du bien et du mal comme l'expérience (courante dans le monde) de la confusion du bien et du mal (prédication du 12.7.98). Bien et mal sont inextricablement entremêlés dans le monde depuis cette histoire. Pour pallier à cette confusion, Dieu a donné sa loi, le Décalogue, de manière à ce que les humains puissent distinguer le bien du mal. Mais ce moyen est loin de réconcilier l'homme avec Dieu. La loi peut même faire empirer le problème de la méfiance (cf. Rm 7): celui qui dit la loi n'est-il pas un obstacle à la liberté ? On le voit souvent dans les rapports entre les parents et les enfants. Lorsqu'un parent dit "non", il est facile pour l'enfant de trouver le parent "méchant", utilisant son pouvoir contre lui.

    2) Il fallait donc que Dieu fasse quelque chose d'autre pour mener à la réconciliation, pour restaurer la confiance brisée. Comment peut-on restaurer la confiance ? Le premier pas ne peut pas venir de celui qui se méfie. Le premier pas ne peut qu'aller à la rencontre de celui qui s'est détourné. Cela ne peut être qu'un don gratuit, bienveillant, qui témoigne d'une volonté de réconciliation, un amour offert gratuitement.

    C'est ce que Dieu a fait en envoyant son Fils dans le monde, pour vivre une vie d'être humain (Rm 8:3) et donner sa vie pour ses amis. Voilà l'acte d'amour gratuit, le geste de réconciliation que Dieu nous offre. A nous d'accepter ou de refuser cette offre, à nous de décider de faire confiance ou non, cette confiance qu'on appelle dans notre vocabulaire d'Eglise : la foi.

    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2021

     

  • La loi protège la part de l'étranger, de la veuve et de l'orphelin

    (21.6.1998) Pour le dimanche des réfugiés

    Deutéronome 24

    La loi protège la part de l'étranger, de la veuve et de l'orphelin

    Deutéronome 24 : 17-22.      Romains 12 : 9-13.     Luc 6 : 6-11.

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    Chères paroissiennes, chers paroissiens,

    Cette semaine j'ai eu le plaisir de passer dans les classes primaires pour parler avec les enfants de leur programme d'histoire biblique. En fait, c'est l'occasion pour les enfants de poser au pasteur toutes les questions qui les préoccupent sur la bible, Dieu, Jésus, ou le métier de pasteur. Ces enfants n'ont pas peur de poser leurs questions et certaines sont de véritables colles !

    J'ai été frappé par le nombre de questions qui tournent autour de la filiation, de la généalogie, des origines. Quand ou comment Dieu est-il né ? Qui est le père d'Abraham ? Qui est le père de Jésus, Dieu ou Joseph ? Ces questions reflètent nos interrogations à tous : d'où venons-nous ? A quoi nous rattachons-nous ? Qu'est-ce qui nous inspire et nous guide ? Quelles sont nos racines ?

    Bien sûr, nous faisons la différence entre nos généalogies biologiques et nos généalogies culturelles et spirituelles. En tant que chrétiens et croyants, nous aimons nous rattacher aux généalogies bibliques, à Abraham, le prototype du croyant en marche — comme j'en ai parlé dimanche dernier.

    Alors, sommes-nous bien des enfants d'Abraham sur le plan de la foi ? Sommes-nous bien des enfants de Moïse sur le plan de notre obéissance pratique, de notre éthique ? Sommes-nous des frères et des soeurs de Jésus qui est venu accomplir la loi et les prophètes ?

    Vous avez entendu quelques prescriptions tirées du livre du Deutéronome. Ces prescriptions sont accompagnées de la raison, du moteur qui motive à les respecter et à les mettre en pratique :

    "Souvenez-vous que vous avez été esclaves en Egypte, et que le Seigneur votre Dieu vous a libérés." (Dt 24:18)

    Il y a là deux éléments fondamentaux. Le premier, c'est que l'obéissance — spécialement à des prescriptions qui concernent la justice et la solidarité — est motivée par la conscience d'avoir été soi-même dans une situation de souffrance, d'injustice, d'oppression et de dénuement. La conscience du mal subi (symboliquement le séjour en Egypte) est essentielle pour s'ouvrir à la souffrance de l'autre, pour que notre coeur et notre esprit puisse compatir et exprimer sa sympathie, sa solidarité.

    Nous avons tous des blessures intérieures, des souffrances affichées ou secrètes. Nous avons tous eu notre temps d'esclavage en Egypte ou notre main droite paralysée. De cette souffrance, si possible guérie, nous pouvons puiser des forces et des trésors de compassion.

    Le deuxième élément fondamental est la libération. Dieu a libéré son peuple de l'esclavage. Et Dieu donne sa loi comme moyen de ne pas retourner en esclavage, comme moyen de maintenir cet espace de liberté instauré par Dieu. La loi n'est pas un carcan, mais la condition du maintien de la liberté de tous. L'ensemble des lois écrites doit bien garder cet objectif en vue, sous peine de tomber dans le légalisme, c'est-à-dire un système où la loi opprime au lieu de libérer et protéger.

    C'est bien ce qui se passe lorsque Jésus est confronté aux Pharisiens, qui l'épient pour voir s'il transgressera le grand commandement du sabbat. Jésus se permet d'interroger la loi écrite au nom de sa visée libératrice et solidaire :

    "Que permet notre loi ? de faire du bien le jour du sabbat ou de faire du mal ? de sauver la vie d'un homme ou de la détruire ?" (Luc 6:9).

    Pour apprécier des prescriptions qui se contredisent, Jésus commence par replacer l'homme au centre. Physiquement, devant ses adversaires il replace au centre l'homme souffrant. Ensuite Jésus interroge la visée fondamentale de la loi, la volonté première de Dieu : enfermer l'homme dans son mal ou le libérer de l'oppression du mal subi ?

    Le commandement de Dieu que Jésus met en pratique par sa guérison crée un espace de vie au sein du chaos que le mal répand, crée un espace de vie pour les plus faibles, les plus démunis. Jésus guérit l'homme, parce que la loi n'a pas à détruire sa vie, mais que son rôle est de favoriser la vie, son rôle est d'assurer un espace de vie.

    Cette attitude n'est pas sans provoquer des réactions, le texte nous dit même que cela remplit de fureur une partie des spectateurs qui, dès lors, vont chercher le moyen d'éliminer Jésus. La fonction de la loi, protectrice de la part du pauvre — ne pas revenir chercher les épis oubliés dans le champ — est détestée par eux qui voudraient avoir les mains libres pour maximaliser la rentabilité de leur travail au détriment des plus faibles et des plus démunis. Les prises de positions de Jésus contre les lois injustes ou inhumaines provoquent la colère, comme aujourd'hui lorsque les Eglises relayent fidèlement les paroles de Jésus à propos de situations présentes.

    Selon notre réaction, se repose la question de notre filiation. A qui nous rattachons-nous, pratiquement, dans nos comportements, dans nos choix politiques et économiques ? En ce dimanche dédié aux hommes et aux femmes qui ont dû fuir leur pays pour se réfugier chez nous ou ailleurs, serons-nous sensible à ces paroles du Deutéronome ?

    "Lorsque vous moissonnerez, si vous avez oublié une gerbe dans le champ, vous ne retournerez pas la prendre; vous la laisserez pour les étrangers, les orphelins et les veuves. Alors le Seigneur votre Dieu vous bénira dans tout ce que vous entreprendrez." (Dt 24:19).

    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2021

     

  • Cheminer avec Abraham

    (14.6.1998) Pour l'Abbaye des Laboureurs de Bussigny

    Genèse 12

    Cheminer avec Abraham

    Genèse 12 : 1-7.       Luc 24:13-27.

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    Chers frères et soeurs en Christ,

    Ce matin, nous allons faire route, cheminer avec Abraham. Ce matin, vous vous êtes mis en route, en cortège pour venir ici et vous reformerez un cortège plus tard pour aller à la fête et j'espère que ce personnage d'Abraham vous accompagnera sur votre route.

    Abraham, c'est l'ancêtre par excellence, ancêtre des croyants, ancêtre des trois religions monothéistes. Par son fils Isaac, il est reconnu comme ancêtre par le peuple d'Israël et par les chrétiens. Par son fils Ismaël, il est reconnu comme ancêtre par les musulmans.

    Ancêtre de trois religions, mais qui connaît ses actes religieux ? Il n'était ni moine, ni prophète. Abraham, c'est l'homme qui voyage, qui part de Charan en Chaldée (dans le sud de l'Irak actuel), qui va en Palestine, puis en Egypte, remonte au Liban, retourne en Egypte, etc... Abraham, c'est l'homme toujours en route, toujours en chemin. Pourtant les carnets de route d'Abraham sont moins passionnants que ceux d'Ella Maillard ou Nicolas Bouvier !

    Ce ne sont pas les voyages d'Abraham qui nous intéressent, mais le voyage initiatique que ces déplacements représentent. Il faut lire les pérégrinations d'Abraham comme représentatifs d'un parcours spirituel, un voyage à l'intérieur de soi-même, un voyage de l'âme sur les sentiers de l'existence.

    Nous avons entendu tout à l'heure dans la Bible, le départ d'Abraham :

    "Va, pars, quitte ton pays, ton clan, la maison de ton père, pour aller dans le pays que je te montrerai." (Gn 12:1).

    Abraham entend un appel au départ, assorti d'une double promesse : (1) recevoir un pays, (2) recevoir une large bénédiction pour toute sa vie, une bénédiction qui s'étend aux générations futures. L'appel d'Abraham à partir n'est pas une incitation à l'abandon, à la fuite en avant. C'est une invitation à chercher son propre projet, au milieu de tous ceux qui se présentent à nous. Il s'agit de cherche le fil de sa propre existence, chercher sa propre vocation.

    Vous avez certainement remarqué, il y a tout autour de nous des gens qui ont des idées sur ce qu'on devrait faire, sur ce qu'on devrait être, sur la meilleure façon de réagir, sur ce qu'on devrait acheter, etc. Nos parents avaient des projets pour nous. Les publicitaires ont des projets pour nous. Les partis politiques ont des projets pour nous ! Qui sommes-nous ? Qui suis-je ? Vais-je suivre l'un ou l'autre de ces projets ? Ou bien vais-je faire moi-même mon chemin ? Est-ce que nous nous laissons balader ou est-ce que nous dirigeons notre vie en fonction de notre vocation profonde ?

    Dieu nous appelle à quitter les cadres tout faits, les vies toutes programmées, pour répondre à l'appel du large, à l'appel de nos talents, de notre vocation. Certes, ce n'est pas facile, c'est désécurisant de quitter ainsi les chemins battus, mais n'est-ce pas le prix de la liberté, le prix de la vraie vie, de la vie qui vaut vraiment la peine d'être vécue ?

    On n'avance pas assis dans son fauteuil ! On avance en se levant, en se donnant un but, une route.

    Cette marche, ce cheminement porte une promesse, la promesse de trouver de vrais moments, une vraie vie. Bien sûr, on peut aussi marcher comme les disciples dont nous avons entendu le récit, qui s'éloignent de Jérusalem, avec le désespoir d'avoir vu mourir Jésus, et ils s'en vont, sans joie, sans espoir, inconscient de la présence de Jésus les accompagnant sur leur chemin.

    A nous de choisir notre route, notre façon de marcher, en qui nous plaçons notre confiance, notre foi. Abraham est devenu le prototype de l'homme de foi parce qu'il a regardé en avant, il a osé partir, affronter l'inconnu pour aller à la découverte de lui-même. Comme le laboureur, il a planté sa charrue et il n'a cessé de regarder devant lui pour voir où il allait faire son sillon. On ne fait pas de sillon droit, en regardant en arrière.

    Quand vous reprendrez le cortège, quand vous reprendrez votre voiture ou votre vélo pour aller au travail ou en commission, demandez-vous : où vais-je ? Est-ce que je vais à reculons, en regardant en arrière ? Ou est-ce que je vais en avant, là où mon coeur, ma vocation m'appelle ? Vais-je où se trouve la promesse de la vraie vie ?

    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2021

  • Le Christ en croix est le repère que Dieu a élevé pour être vu de tous

    pour le dimanche 7 juin

    Nombres 21

    Le Christ en croix est le repère que Dieu a élevé pour être vu de tous

    Nombres 21 : 4-9.      Ephésiens 5 : 1-2.       Jean 3 : 7-15

    télécharger le texte : P-2020-06-07.pdf

    Chers frères et soeurs en Christ,

    Dimanche dernier, dimanche de Pentecôte, nous avons vu comment — par le don de l'Esprit saint — Dieu a manifesté sa volonté de faire de nous des fils, ou des filles, et non des esclaves dans notre relation avec lui. Ce rang de fils, auquel Dieu nous élève, nous place comme héritiers et cogestionnaires du monde avec Dieu. Ce rang de fils, ou de fille, nous dit également à quelle communion, avec Lui, Dieu nous invite. En nous faisant fils, il reconnaît notre liberté, notre autonomie à diriger notre vie, à choisir notre chemin de vie.

    J'avais utilisé l'image du voilier, à ce propos, parce que le voilier peut prendre toutes sortes de routes sur l'eau pour parvenir à la destination qu'il s'est fixée, selon les vents qui soufflent. Dieu ne nous fixe pas la route à prendre, mais il nous invite à choisir une destination : aller à Lui pour trouver la vraie vie.

    Pour aller vers cette destination, Dieu a placé un repère — comme un phare qui guide le voilier dans la nuit — c'est le Christ qui a été élevé sur la croix.

    Presque tous les jours, nous entendons dans les médias que notre société est déboussolée, qu'elle est sans repères, que nos jeunes n'ont plus de repères et partent à la dérive. Oui, c'est vrai — mais en partie seulement. Si nos jeunes manquent de repères, c'est que notre génération n'ose plus leur dire où on en trouve. Ou pire, c'est que notre génération a perdu ses repères, mais n'ose pas le dire et reporte la faute sur ses enfants.

    Or les repères sont toujours-là, mais on ne les trouve plus attrayants parce qu'apprendre à les connaître, les assimiler, les intégrer cela demande un effort sur soi-même, cela demande des changements d'attitudes, des transformations et — mot tabou — des renoncements. Suivre un repère, se tenir à une ligne de conduite, ce n'est pas facile, cela demande des efforts.

    C'est exactement ce qui se passe avec les Israélites qui se trouvent avec Moïse dans le désert. Ils posent la question : "Pourquoi nous avoir fait sortir d'Egypte ?" Etait-ce pour nous faire mourir dans le désert ?" (Nbr 21:5).

    La voie de la liberté n'est pas toujours plus facile que de rester dans le confort de l'esclavage où tout est décidé, tracé pour vous. Il y a des moments où le malheur ne semble pas plus effrayant que le changement.

    Max Frisch avait cette phrase superbe et effrayante :

    "Quand on a encore plus peur du changement que du malheur,
    comment éviter le malheur?"

    C'est la situation des Israélites au désert, c'est la situation de Nicodème face à Jésus. Il y a souvent des situations comme cela dans nos vies, où le changement nous fait plus peur que le malheur.

    Dans cette situation, Dieu dit à Moïse de faire un serpent en bronze et de le fixer en haut d'une perche, bien visible, avec cette promesse :

    "Quiconque aura été mordu et le regardera aura la vie sauve !" (Nbr 21:8)

    Dieu ne propose pas un antidote, un vaccin ou un sérum au venin du serpent, il commande à Moïse de placer bien en vue la cause du malheur et de le regarder pour être sauvé. Est-ce à dire qu'il faut regarder le malheur bien en face pour en sortir ? Pourquoi pas ? C'est peut-être en regardant lucidement en face le mal, la souffrance, l'échec, que nous pouvons recevoir le vrai désir et l'énergie de lui préférer le changement.

    Ce qui est plus étonnant encore, c'est que l'évangéliste Jean reprend cette image du serpent sur la perche et y substitue Jésus élevé sur la croix ! Jésus, le Christ en croix, est le repère que Dieu a élevé pour être vu de tous, pour que nous puissions nous diriger d'après lui vers notre destination qui est une vie pleine, une vie en abondance, une vie riche en relations, ce que l'Evangile appelle la vie éternelle.

    Jésus sur la croix est celui qui porte tous nos malheurs, tous nos échecs et celui qui nous indique un chemin vers le bonheur. Lui qui a vécu le plus grand changement imaginable : mourir et revenir à la vie, lui nous invite à le regarder lorsque nous hésitons entre le malheur et le changement.

    Nous sommes invités à regarder le Christ, sa vie, son enseignement, sa mort et sa résurrection, pour naître de nouveau, pour naître par l'Esprit.

     

    Dans notre lassitude,

    regarder au Christ

    pour voir renaître notre énergie.

     

    Dans nos échecs,

    regarder au Christ

    pour retrouver l'espérance.

     

    Dans nos colères, notre énervement,

    regarder au Christ

    pour refaire provision de patience.

     

    Dans nos envies de vengeances,

    regarder au Christ

    pour recevoir le pardon et pardonner à notre tour.

     

    Lorsque l'ombre nous envahit,

    regarder au Christ

    pour voir resurgir la lumière.

     

    Lorsque le malheur semble gagner,

    regarder au Christ

    pour recevoir la vraie vie.

    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2020

  • Saynète : Le roi Salomon

    8.3.2020

    1 Rois 3

    Saynète : Le roi Salomon

    1 Rois 3 : 4-28       1 Corinthiens 3 : 16-17

    télécharger les textes : Saynète 2020-03-08.pdf        P-2020-03-08.pdf

     

    Saynète des enfants :

    1. Salomon enfant joue avec son épée sur la musique « je voudrais déjà être roi »

    Narratrice : Nous allons vous raconter l’histoire de Salomon, fils du roi David.

    Salomon enfant: Je suis Salomon, le fils du roi ; plus tard je serai le roi du monde.

     

    2. David est sur son trône. A ses côtés les gardes, Salomon jeune et Nathan le prophète.

    Narratrice : Plusieurs années ont passé. Salomon a bien grandi et va devenir roi à son tour. Venez avec nous assister à son couronnement. Le prophète Nathan va verser de l’huile sacrée sur le nouveau roi.

    David : Mon fils bien-aimé, tu as acquis de l’expérience et de la sagesse ; il est temps maintenant d'être désigné officiellement comme le prochain roi. Le prophète Nathan va te bénir.

    Salomon s’approche de Nathan pour oindre le jeune roi Salomon.

    La foule : Vive le roi Salomon ! Vive le roi Salomon ! Vive le roi Salomon !

    La foule acclame le nouveau roi avec de la musique.

     

    3. David est couché sur un lit et Salomon debout à ses côtés.

    Narratrice : Le temps passe, David est très vieux et il va bientôt quitter ce monde. Il parle avec Salomon et lui transmet ses dernières volontés…

    David : Mon fils, moi je m’en vais où va tout ce qui est terrestre. Sois fort et sois un homme ! Observe l’ordre de Dieu en marchant dans ses voies et en gardant ses commandements écrits dans la Loi de Moïse.

    Salomon : Mais… je ne suis pas encore assez grand, je n’ai pas assez d’expérience, je ne vais pas savoir faire. J’ai besoin de toi et de tes conseils.

    David : Je te fais confiance, tu vas gagner en expérience. Mais surtout confies-toi en Dieu; demande-lui toujours ce dont tu as besoin. Il te guidera. Fais-lui confiance.

    Narratrice : David meurt et il est enterré avec ses pères, ses ancêtres. Salomon prend sa succession.

     

    4. Salomon est couché dans son lit. Il dort.

    Narratrice : Salomon est devenu roi. Il s’est marié. Il s’occupe maintenant des affaires du pays comme il peut. Un soir qu’il dort, il fait un rêve.

    Dieu : Salomon, Salomon, écoute : Demande-moi ce que tu veux ; je te le donnerai.

    Salomon : ô Dieu, tu as été bon avec mon père David car il était un roi juste et bon. Moi je suis un roi débutant, je suis tout jeune et je ne sais pas gouverner. Donne-moi donc un esprit ouvert et un cœur attentif à mon peuple.

    Dieu : Tu ne me demandes pas la richesse, tu ne me demandes pas de vivre longtemps, tu ne me demandes pas la mort de tes ennemis, mais tu me demandes l’intelligence et la sagesse pour bien gouverner. Alors, je vais te donner ce que tu demandes et je te donnerai en plus la richesse, une longue vie et la paix dans ton royaume.

     

    5. Salomon est assis sur son trône. Il a un garde de chaque côté.

    Narratrice : David avait construit le palais royal du temps de son vivant mais à cause des guerres il n’a pas pu construire le temple de Dieu à Jérusalem. Maintenant qu’il n’y a plus de guerre, Salomon va pouvoir accomplir cette mission.

    Salomon : Qu'on fasse venir mes architectes ! Je vais faire construire le temple de Jérusalem.

    Les architectes arrivent avec leurs aides qui portent le plan. Ils déroulent un très grand plan.

    Architecte 1 : Voici notre projet majesté. Comme vous nous l'avez demandé - Majesté - nous avons prévu un Temple magnifique. Le Temple sera constitué de trois espaces. D'abord une grande cour tout public. Elle pourra accueillir le peuple et les visiteurs de tous les pays. Tout le monde y aura accès.

    Architecte 2 : Ensuite, il y aura le bâtiment du Temple lui-même. Il sera allongé, de 30 mètres de long sur 10 mètres de large et de 15 mètres de hauteur. En pierre à l'extérieur et tout tapissé de bois précieux à l'intérieur. Le Temple sera réservé au peuple d'Israël, à ceux qui vénèrent notre Seigneur Dieu. C'est là qu'aura lieu le culte.

    Architecte 1 : Enfin le troisième espace sera une pièce entièrement fermée, plus petite, qui contiendra l'arche de l'alliance avec les tables de la Loi. Elle sera toute tapissée d'or fin. Cet endroit est réservé à Dieu seul. Personne ne peut y entrer, sauf le grand-prêtre une seule fois par année pour obtenir le Grand Pardon pour tout le peuple.

    Architecte 2 : Nous vous proposons - Majesté - de voir avec le roi du Liban pour obtenir le bois de cèdre et les objets en bronze pour le culte. Les plans sont prêts. Nous attendons les ordres pour commencer à bâtir ce Temple magnifique qui honorera grandement le Dieu d'Israël.

    Salomon adulte: Vous avez bien travaillé, je suis content d'accomplir la promesse de mon père David et de faire construire un Temple à Jérusalem. Que les travaux commencent !

     

    6. Salomon, les gardes et les experts.

    Salomon : Ce sera vraiment un beau temple, un temple magnifique, un temple digne de mon règne...

    Deux femmes arrivent en se disputant et en tirant un bébé chacune vers soi.

    Femme 1 : C’est mon enfant !!

    Femme 2 : Lâche-le ; il est à moi.

    Femme 1 : Menteuse ! Je vais me plaindre au roi.

    Salomon : Silence !! Que se passe-t-il ?

    Femme 1 : Nous allons tout vous expliquer. Nous habitons dans la même maison sans personne d’autre avec nous.

    Femme 2 : Nous avons accouché à quelques jours près. Pendant la nuit nous avions chacune notre bébé à côté de nous. Son bébé est mort. Pendant que je dormais, elle a échangé nos bébés.

    Femme 1 : Non, ce n'est pas vrai, tu mens !!

    Femme 2 : Quand je me suis réveillée, j’ai vu que ce n’était pas mon bébé.

    Femme 1 : C’est le contraire. C’est mon enfant qui est vivant.

    Femme 2 : Non, c’est le mien qui est vivant.

    Salomon : STOP !! Je vais juger votre affaire mais je vais d’abord consulter mes experts. Quelle solution est-ce que vous proposez ?

    Expert 1 : Il faut attendre que l’enfant soit assez grand pour voir à quelle mère il ressemble.

    Expert 2 : Je propose d’aller voir dans la maison s’il y a des traces qui nous permettent de voir dans quel lit l’enfant est mort.

    Expert 3 : Je propose que les deux mères gardent l’enfant à tour de rôle.

    Salomon : Hum hum, hum…. Ça va prendre beaucoup de temps tout ça. Gardes ! amenez-moi mon épée !

    Salomon : Je vais couper l’enfant en deux, chacune en aura une moitié.

    Femme 2 : NON !!!!! Laissez-le vivre ! Donnez-lui l’enfant vivant.

    Femme 1 : Il ne sera ni à moi, ni à toi, coupez-le en deux !

    Salomon : Donnez l’enfant vivant à cette femme. C’est celle qui voulait que l’enfant vive qui est la vraie mère.

    Applaudissements de la foule - tous les enfants et les catéchumènes - Chant d’allégresse.

    © Paroisse St-Jean (EERV) - Lausanne, 2020

    (Le droit de publication commerciale est réservé, le droit de jouer la saynète est libre, merci de citer la source.)

     

    Message :

    Chers frères et soeurs en Christ,

    Salomon est le roi qui a construit le premier Temple de Jérusalem, nous dit la Bible. Ce Temple est divisé — comme le sera plus tard le Temple reconstruit par Hérode, celui qu'a fréquenté Jésus — en trois espaces.

    Ces trois espaces sont imbriqués les uns dans les autres, comme des boîtes ou des poupées russes. Le plus grand espace est une grande cour, à ciel ouvert, qui accueille tout le monde. C'est l'espace public, pour les croyants comme pour les visiteurs. A l'intérieur de cette cour se trouve le bâtiment du Temple. Seuls les prêtres entrent dans ce bâtiment, dans cet espace. C'est un espace réservé. A l'intérieur de ce bâtiment se trouve une chambre plus petite, qui est le lieu saint, même le saint des saints, un espace où étaient placées l'arche de l'alliance et les tables de la Loi. C'est le lieu sacré de la présence divine. Personne n'a le droit d'y entrer, sauf un prêtre, qui y entre une fois par année pour le Grand Pardon. Voilà pour l'architecture et l'organisation du Temple de Salomon.

    Mais voilà que l'apôtre Paul nous dit que nous sommes — nous-mêmes — le Temple de Dieu et que l'Esprit saint habite en nous. Paul nous invite à faire une analogie entre le Temple et nous, nos personnes, nos corps. C'est ce que les enfants ont représenté sur les deux panneaux que vous pouvez voir derrière moi. Le coeur y représente l'espace sacré.

    Notre coprs est notre interface avec le monde, avec notre environnement. C'est par notre corps, nos sens, que nous entrons en relation avec les autres. Notre relation au monde se joue aussi en trois espaces : un espace public, un espace personnel et un espace privé, sacré. Notre espace public commence à peu près à une distance de coude autour de nous. Nous ne sommes pas génés quand un inconnu se place à cette distance. Par contre cela nous dérange s'il se colle à nous ou s'il vient s'asseoir sur nos genoux. Il serait clairement entré dans notre espace personnel. Notre espace personnel est comme une bulle proche de notre corps. C'est un espace réservé, personne n'a le droit d'y entrer sans notre accord, notre consentement.

    Et puis nous avons un espace tout à fait privé, intime, celui de nos pensées secrètes. C'est là que se trouve notre être profond, ce qui fait que nous sommes uniques. Personne ne peut y entrer sauf nous-mêmes. Nous y habitons — et mystérieusement, c'est aussi là que Dieu habite en nous. C'est un espace que Dieu protège en nous — c'est pourquoi l'apôtre Paul dit que si quelqu'un voulait détruire cet espace en nous, Dieu s'en prendrait à lui pour nous défendre. Nous sommes le Temple de Dieu, Dieu habite en nous parce qu'il trouve que nous avons de la valeur. Dieu trouve que c'est le plus beau lieu où habiter. Nous valons tous infiniment, nous sommes précieux aux yeux de Dieu.

    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2020

  • La croix est le paratonnerre qui attire sur elle la violence du monde.

    Genèse 4

    23.2.2020

    La croix est le paratonnerre qui attire sur elle la violence du monde.

    Genèse 4 : 1-11.      Matthieu 5 : 2-24

    télécharger le texte ici : P-2020-02-23.pdf

     

    Chers frères et soeurs en Christ,

    Comme vous le savez, j'aborde la question de la violence dans le programme d'études bibliques de cette année, sous le titre : “La violence dans la Bible : un problème ?” La violence est présente dans la Bible, dans nombres de récits, comme elle l'est dans notre monde. La Bible n'est pas hors du monde, elle reflète la réalité quotidienne de la vie humaine.

    Mais la Bible a aussi un regard sur la violence. Elle ne se contente pas de mettre en scène des hommes violents, des violences étatiques ou même de la violence divine — dans une Histoire (l'Exil) lue comme punition de Dieu. Dans ses récits de violence, l'écrivain biblique prend une position, pose un regard particulier sur les actes de violence décrit. Et c'est cela qu'il est intéressant d'analyser. De quel côté se situe le narrateur biblique ?

    Les violences guerrières ou l'exploitation économique des multi-nationales nous paraissent vraiment hors de notre portée. Aussi, je souhaite aujourd'hui que nous nous concentrions sur les violences qui nous touchent ou dont nous sommes ou nous pourrions être les acteurs, ici, dans nos environnements, sur les violences qui nous concernent, qu'elles soient subies ou commises, à la maison, sur la route, à l'école ou au travail. Pour cela, il est important de comprendre les mécanismes de la violence.

    Vous avez entendu deux textes bibliques qui parlent de la violence, l'un dans l'Ancien Testament, l'histoire de Caïn et Abel et l'autre dans le Nouveau Testament, où Jésus met en garde sur les commencements, les racines de la violence.

    Caïn et Abel, c'est l'histoire d'un meurtre, d'une violence ultime, qui est décortiquée. Le texte nous montre les étapes qui conduisent à la violence. Au départ, deux hommes différents, mais frères. Différents parce que l'un, Caïn, est cultivateur, l'autre, Abel est berger, éleveur. Chacun a son domaine d'activité, ce qui réduit la rivalité possible. Ils peuvent cohabiter et prospérer l'un à côté de l'autre, ensemble, sans se marcher sur les pieds, tout va bien.

    Les choses se gâtent lorsqu'ils décident de faire la même chose et de comparer les résultats. Tous deux, comme en miroir, font une offrande. L'une est acceptée, l'autre pas. Pourquoi cela se passe-t-il comme cela ? Pourquoi Dieu prend-il, nous dit le texte, cette décision ? Le texte ne nous le dit pas. L'offrande étant dépendante de la prospérité, tout au plus peut-on penser que Caïn a subi un revers et Abel a-t-il eu une bonne année.

    On ne sait rien des faits. Par contre on nous parle précisément de ce que Caïn ressent : "Caïn éprouva un profond dépit (du ressentiment), il faisait triste mine !" (Gn 4:5). Caïn vit une émotion très forte, il ne se sent pas reconnu pour ce qu'il a fait, il se sent probablement rejeté, il se sent dévalorisé par la réussite de son frère, il est fâché, il devient jaloux. Assurément Caïn a subi un tort, une violence. Cette violence ressentie, il va la diriger vers son frère, ce qui aboutira au meurtre.

    Entre la colère ressentie... et le meurtre, il y a cependant un espace dans lequel se glisse un petit dialogue, une phrase qui montre que le meurtre n'est pas inévitable, inéluctable, nécessaire : "Si tu réagis comme il faut, tu reprendras le dessus; sinon le péché est comme un monstre tapi à ta porte. Il désire te dominer, mais c'est à toi d'en être le maître." (Gn 4:7). Le mot "péché" peut être remplacé ici par "violence". "La violence est comme un monstre tapi à ta porte". La violence que tu as subie, tu as le choix de la laisser dominer sur toi ou de lui résister ! La violence commise n'est jamais une fatalité, mais toujours le résultat d'un choix intérieur.

    L'origine de la violence est mystérieuse, personne ne veut dire qu'il en est — lui — le commencement. On a toujours l'impression d'être d'abord victime et que cela justifie l'acte violent qu'on va commettre en réaction.

    Caïn se sent victime du rejet de son offrande et il légitime par là son acte meurtrier. Mais le narrateur est assez habile pour nous dire qu'il tient pour Abel, contre Caïn. Dieu parle à Caïn pour retenir sa colère et son geste fatal, pas pour le justifier.

    C'est là qu'on voit que la violence se manifeste comme une spirale. La violence surgit, comme un malheur qui arrive et qu'on subit. Mais il nous appartient de savoir si on veut être un élément dans cette spirale pour transmettre cette violence plus loin. Nous pouvons rarement éviter d'être touchés par la violence, mais nous pouvons éviter de la transmettre.

    La violence, dans son cycle, va en augmentant. On connaît le mécanisme dans les cours de récréation. L'un dit un mot un peu haut, l'autre profère une injure, il s'en suit une tape, puis un coup et c'est la bagarre déchaînée.

    C'est pourquoi Jésus peut dire que celui qui injurie son frère est aussi coupable que le meurtrier. L'un et l'autre sont acteurs dans le même processus de violence qui n'a pas de fin. Pas de fin... sauf ? Sauf si quelqu'un démasque le procédé et joue le rôle du paratonnerre.

    Je crois que c'est ce que Jésus a fait en mourant sur la croix. La croix est le paratonnerre qui attire sur elle la violence du monde. Il n'y avait aucune bonne raison que Jésus soit mis à mort, sauf qu'il a pris sur lui la violence du monde pour nous en délivrer, pour nous apprendre comment nous sortir du cycle infernal de la violence. En termes d'Eglise, cela se dit "Sur la croix, Jésus a pris sur lui tous nos péchés, pour que nous vivions".

    Jésus, durant toute sa vie, a rompu le cycle de la violence, il a accepté que la violence termine son chemin en lui. Il a refusé d'être un passeur de violence, un transmetteur de violence. Il a été un tel court-circuit au moyen du pardon. Même sur la croix, lieu ultime de la violence à son égard, Jésus a dit au sujet de ceux qui le condamnaient : “Père, pardonne-leur, car ils ne savant pas ce qu'ils font” (Luc 23:34).

    Nous aussi, dans nos situations de vie particulières, nous pouvons être les disciples de Jésus en décidant — à l'inverse de Caïn — que la violence ne passera pas par nous.

    Ce n'est pas un chemin facile, c'est un vrai défi, mais celui qui veut devenir le héros de sa propre vie n'a-t-il pas des défis à relever et des combats à gagner ? Dire non à la violence, en cessant de la transmettre, c'est marcher à la suite du Christ.

    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2020