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Genèse 8. L'alliance avec Noé

(23.10.2005)

Genèse 8

L'alliance avec Noé

Genèse 5:28-32, 7:11-16.        Genèse 7:24, 8:1, 5-12, 15-21a.       Genèse 9 : 8-16

télécharger le texte : P-2005-10-23.pdf

Chères paroissiennes, chers paroissiens,

La lecture de la bible n'est pas facile, ou plutôt la compréhension des textes bibliques n'est pas facile. Vous avez entendu la lecture de passages choisis de l'épopée de Noé et de son arche. L'histoire de Noé est bien connue de tous, même des plus petits puisque le cortège des animaux entant dans l'arche est le sujet prétexte à dessiner de nombreux animaux.

Mais malgré cette connaissance générale de l'histoire, le texte biblique nous est difficilement compréhensible. Il est trop invraisemblable, il y a trop de choses incroyables. Pourquoi veut-on nous aire croire qu'on peut mettre tous les animaux de la terre dans un bateau ? Avec les connaissance que nous avons aujourd'hui nous savons que c'est irréaliste. Et puis comment l'eau pourrait-elle recouvrir les plus hautes montagnes ? La science nous montre que c'est impossible. Et puis, pourquoi sauver les animaux, si c'est pour les sacrifier à la sortie de l'arche ? Et puis vous avez entendu l'âge que le texte donne à Noé, et à son père. Des nombres à trois chiffres. A 500 ans, Noé a ses enfants, à 600 ans il construit l'arche, à 950 ans, il meurt… Qu'est-ce que c'est que ce charabia !

C'est si loin de la réalité que le texte perd toute crédibilité ! Oui, à moins que… à moins que l'écrivain ne le fasse exprès, pour nous dire des choses ! Il faut cesser de penser qu'aujourd'hui — parce que nous avons intenté la voiture et l'ordinateur — nous sommes plus intelligents que les homme des siècles ou des millénaires précédents.

Celui qui a écrit le récit de Noé n'était pas un naïf qui ne se rendait pas compte de la bizarrerie de son texte. Il a écrit cela, comme cela, pour dire quelque chose à ses lecteurs. en utilisant ces bizarreries, il fait des clins d'œil au lecteur, lui disant : ne me lis pas au premier degré, je ne raconte pas des événements, de l'Histoire, j'essaie de produire du sens, j'essaie de t'amener à dépasser la réalité de ce que tu vois pour passer de l'autre côté du miroir.

En fait, il existe deux réalités : il y a la réalité des apparences et il y a la réalité au-delà des apparences, au-delà de la surface des choses. Et cette deuxième réalité est plus vraie que la réalité de surface… La réalité du sens est plus importante que la réalité des atomes. Le rédacteur continue en disant : Toi, mon lecteur, j'aimerais t'apprendre à voir au-delà de la surface, à voir en profondeur, à voire quelque chose derrière le monde des yeux. C'est pourquoi je vais te faire voir l'arc-en-ciel. En le voyant — comme autant de lumière transformée par le prisme des gouttes d'eau — tu va le voir comme un signe d'une autre réalité, dans le ciel.

Le texte biblique n'est pas une photo de la réalité de surface, mais une peinture à déchiffrer pour découvrir le sens des choses et des événements. Noé n'est pas un personnage historique, ce n'est pas un héros antique, c'est nous. Le texte ne parle pas de hier, mais d'aujourd'hui.

Le monde de Noé, c'est un monde où la violence des hommes est présente partout, rendant le monde inhabitable. C'es un monde menacé par le chaos, le déchaînement des forces naturelles, illustrées dans ce récit par la grande inondation. C'est un monde menacé par des forces énormes que l'être humain ne peut pas contenir. Moi, je trouve que cela ressemble beaucoup au monde actuel ! Vous ne trouvez pas ?

Je crois que l'arche de Noé, aujourd'hui, représente le monde habitable, les terres émergées habitées par les humains. Nous sommes tous embarqués, humains et animaux, sur le même bateau, sur des flots menaçants. Ces menaces sont énumérées tous les jours dans les journaux et le TJ. Mais nous sommes tous sur le même bateau et nous partageons et partagerons tous le même sort. C'est l'expérience que des jeunes de notre Région ont vécu lors de leur voyage à Madagascar, cet été et dont ils nous parleront tout à l'heure.

Nous ne pouvons pas nous permettre des divisions ou des privilèges à l'intérieur de l'arche. Les lions ne doivent pas avoir carte blanche pour se nourrir parmi les gazelles ou les zèbres embarqués ! A l'intérieur de l'arche nous devons construire la solidarité, tendre une main d'amitié entre personnes, entre pays, entre le Nord et le Sud, comme l'on fait les jeunes de nos paroisses à Madagascar.

L'histoire de Noé débouche sur une promesse, une promesse qui s'adresse à la création toute entière : Il y a un avenir pour tous. Dieu établit une alliance inconditionnelle avec la création, une alliance qui garantit le maintien de l'univers et des rythmes naturels contre le chaos.

Cette alliance avec Noé est la première alliance que nous présente le texte biblique lorsque nous le lisons en suivant l'ordre des libres bibliques. C'est une alliance universelle où rien n'est demandé à l'être humain en contre partie. D'autres alliances suivront :

- celle avec Abraham, une alliance personnelle, marquée du signe de la circoncision,

- celle avec Moïse et le peuple d'Israël, marqué du signe du repas de la Pâque,

- puis celle du retour de l'Exil, une alliance avec tous les meurtris et les exilés de la terre, marquée par le signe du culte du Temple,

- enfin, la nouvelle alliance qui récapitule toutes les précédentes, celle que dieu fait avec chaque être humain à travers Jésus-Christ, et qui est à la fois personnelle à travers le baptême, communautaire à travers la Cène et universelle à travers l'Eglise.

Revenons à cette promesse faite à Noé. Elle est accompagnée d'un signe : l'arc-en-ciel. Ce n'est pas l'arc-en-ciel (réalité physique) qui garantit la promesse, elle est le signe que Dieu place pour se rappeler et nous rappeler qu'il tiendra sa promesse de ne pas anéantir le monde. Dieu assure un univers stable, mais c'est à nous d'assurer le ménage à l'intérieur de l'arche ! c'est à nous d'y faire régner la paix plutôt que d'y laisser régner la loi de la jungle où le plus fort dévore le plus faible.

Aujourd'hui, nous avons donc une responsabilité écologique et une responsabilité de justice sociale et économique.

Il me semble que si le récit de l'épopée de Noé, avec toutes ses bizarreries, nous apprend cela, le texte biblique, alors, n'a pas trop vieilli. en décollant de la surface des choses, pour plonger dans la réalité qui se cache sous les apparences, le texte biblique prend sens et donne du sens à notre vie aujourd'hui.

Amen

© Jean-Marie Thévoz, 2022

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