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pierre - Page 2

  • Matthieu 26. Le reniement de Pierre

    Matthieu 26
    14.3.1999
    Le reniement de Pierre
    Matthieu 26 : 31-35    Matthieu 26 : 69-75


    Téléchargez la prédication ici : P-1999-03-14.pdf

    Ce matin, j'étais juste réveillé de ce week end de cauchemar, quand deux des femmes de notre groupe, Marie de Magdala et l'autre Marie, ont brusquement fait irruption chez moi. Elles étaient dans un de ces états d'excitation, vous ne pouvez pas savoir. Elle ne cessaient de répéter :
    "Pierre, Pierre, Le tombeau est vide... le tombeau est vide..."
    Mais peut-on croire ces femmes. Elles étaient visiblement en état de choc. Elles sont noyées de chagrin. Ne se sont-elles pas trompées de tombe ? Il y a sûrement une explication logique à cela. Elles doivent être victimes d'une illusion due à leur peine. Nous sommes tous sous le coup de ce qui est arrivé il y a trois jours.

    Mais tout cela a commencé bien plus tôt.

    Vous vous souvenez, la dernière fois que je vous ai parlé, je me demandais si j'allais continuer à suivre Jésus ou retourner à mon bateau de pêche. Eh bien, il s'en est passé des choses depuis ce temps-là. Oui, j'ai continué à suivre Jésus...

    Encore deux fois, dans les mois qui ont suivi, il nous a dit que le Fils de l'homme devait souffrir, être rejeté et mourir. Je me demande comment Jésus pouvait vivre avec cette idée. Moi je n'arrivais pas à m'y faire. J'étais prêt à tout pour le protéger, pour le sauver.

    Enfin, ce qui est sûr, c'est que Jésus avait son plan. C'est ainsi qu'il y a quelques jours, il s'est dirigé vers Jérusalem. Il voulait être à Jérusalem pour le repas de la Pâque.

    Une fois arrivé à Jérusalem, je ne sais pas ce qui l'a pris. Je ne l'avais jamais vu comme cela. Vous savez, en Galilée, il accueillait tout le monde, on le voyait écouter tous ceux qui venaient vers lui, compatir aux misères de chacun, en guérir plusieurs. Là, à Jérusalem, il semblait avoir complétement changé. La dernière guérison qu'il ait faite, c'était un aveugle à la sortie de Jéricho. Dès qu'il est entré à Jérusalem, il est devenu agressif, violent même.

    Lorsque nous sommes monté au Temple pour la première fois de notre séjour, eh bien il s'est emparé de quelques cordages qui trainaient vers les marchands de bétail, il en a fait un fouet et il s'est mis à le faire tournoyer autour de lui. Quelle pagaie cela a mis ! Les agneaux et les chèvres couraient appeurés dans tous les sens. Le fouet brisait les cages des pigeons et des tourterelles, renversait les barrières des enclos. Vous auriez dû voir ça. Ensuite, il est allé vers les tables où des banquiers faisaient du change, il a renversé leurs tables avec toute la monnaie. La foule s'est précipitée pour ramasser ce qu'elle pouvait. Je n'ai jamais vu Jésus aussi en colère, c'était terrible. Il traitait tout le monde de voleurs et de profiteur. Si j'ai bien compris, il trouvait que les autorités avaient laissé ce Temple devenir une caverne de voleurs, alors que Dieu voulait que ce soit une maison de prière.

    Mais les jours suivants Jésus est quand même retourné au Temple. Chaque fois, devant la foule, il condamnait l'hypocrisie des chefs et des maîtres de la loi qui exigent des choses inaccessibles des gens. Il a été jusqu'à annoncer que ce Temple bâtit de main d'homme serait détruit ! Vous ne pouvez pas imaginer la fureur des gardiens du Temple.

    Ce tombeau vide, il doit bien y avoir une explication logique. Peut-être les gardiens du Temple sont-ils venu reprendre le cadavre pour le montrer à la populace. Pour bien montrer au peuple ce qui arrive à ceux qui menacent l'ordre établi.

    Ce tombeau vide, on dirait l'image de ce que nous sommes tous, aujourd'hui. Vidés, lessivés, fatigués par ce qui s'est passé ces trois derniers jours.

    Imaginez. Jeudi soir, nous avons tous soupé avec Jésus. Bon l'atmosphère était tendue. Nous étions de nouveau à Jérusalem et nous savions que toutes les autorités voulaient s'emparer de Jésus. Ils avaient peur d'une rébellion.
    Après avoir soupé, Jésus a pris du pain, il a remercié Dieu, il l'a rompu et nous l'a distribué en disant "prenez en tous, ceci est mon corps, donné pour vous". Après cela il a pris un coupe de vin, et après avoir remercié Dieu il nous l'a passée en disant : " Ceci est ma vie, donnée pour vous, buvez-en tous. Je ne boirai plus de vin, jusqu'à ce que je le boive nouveau avec vous dans le Royaume de Dieu". Nous avons mangé de ce pain, bu de cette coupe et nous nous sommes sentis tellement unis à lui. Nous faisions corps. Nous pensions que nous ne serions plus jamais séparés les uns des autres et surtout de Lui.

    Pourtant, c'est cette nuit-là, que Judas a trahit. Jésus l'avait d'ailleurs prévu. A la fin de ce repas il a dit : "L'un de vous me trahira !"  C'est à ce moment que Judas est parti brusquement. Alors moi je me suis levé et je me suis mis critiquer le comportement de Judas, et j'ai déclaré à Jésus que je ne l'abandonnerai jamais. Mais Jésus m'a alors dit : "Avant que le coq ne chante, tu me renieras trois fois.

    Juste après ce repas, Jésus nous a emmené pour prier avec lui au jardin de Gethsémané. Eh bien, je me suis endormi, une première fois. Jésus m'a réveillé et m'a dit : Pierre, tu ne peux pas prier une heure avec moi ? J'ai essayé, mais je me suis rendormi. Ce que je m'en veux. Mes prières n'auraient-elles pas pu modifier le cours des choses ?

    Ensuite, toute une troupe de soldat, avec Judas en tête, est venue arrêter Jésus. J'ai sorti mon épée, je voulais me rattraper, me racheter. J'étais prêt à mourir au combat pour Jésus. Mais Jésus m'a regardé, de son regard si chaleureux. Il m'a regardé comme s'il était touché de mes efforts pour le défendre, mais il m'a dit : "Rentre ton épée, car tous ceux qui prennent les armes mourront par les armes". J'ai obéis, mais bien à contre coeur. Quand est-ce que je pourrai enfin montrer que je suis au côté de Jésus, que je ne l'abandonnerai jamais ?

    J'ai suivi — de loin — la troupe qui emmenait Jésus. Ils ont emmené Jésus à la maison de Caïphe, le grand-prêtre. Je suis entré dans la cour pour voir ce qu'il se passerait. Là, il y avait des gardes et des serviteurs qui se tenaient prêt d'un feu. Je me suis mêlé à eux. Je les entendaient parler entre eux. Ils calomniaient Jésus, ils disaient que ces révolutionnaires il fallait les éliminer du pays et toute leur bande avec. Tout à coup, l'un de ces soldats m'a demandé si je n'avais pas des sympathies pour ce Jésus puisque j'étais Galiléen. Alors j'ai eu peur et j'ai dit que je ne le connaissait pas. Je me suis éloigné d'eux. Mais une servante qui était-là m'a encore demandé, par deux fois, si je ne faisait pas partie de la bande de Jésus. J'ai encore dit non. J'ai même juré que je ne le connaissais pas. Moi, Pierre, moi qui me croyait le meilleur des disciples, j'ai fait comme si je ne le connaissais pas. A ce moment-là un coq a chanté et je me suis souvenu que Jésus m'avait dit : "Avant que le coq ne chante tu m'aura renié trois fois". Là, je me suis écroulé, abattu par ma lâcheté, ma trahison. J'ai pleuré.

    Lorsqu'ils ont emmené Jésus sur le lieu de son exécution, j'ai suivi de loin, en me cachant. Ils l'ont cloué sur une croix — c'est la façon ordinaire d'appliquer la peine de mort pour les Romains. Je suis resté-là, à voir mes espoirs de vie meilleure mourir. Il y avait là quelques personnes et des soldats romains qui gardaient le lieu. Tout était fini.

    Pourtant, avant de mourir Jésus a prononcé une parole qui me revient. Il a dit :
    "Père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu'ils font".
    Ce pardon, n'est-il pas aussi pour moi ? Mon abandon n'est-il pas moins grave que le geste de ses bourreaux ? Oui, Jésus est capable de me pardonner à moi aussi.

    Un homme qui est capable de pardonner à ses bourreaux peut-il être abandonné de Dieu ?
    Comment Dieu peut-il rester indifférent à cette injustice ? Dieu ne pourrait-il pas décider de l'arracher à son tombeau ? Le tombeau vide ! Les femmes n'ont rien inventé ! Comment n'ai-je pas compris plus tôt. Excusez ! Je vous laisse ! Je veux aller voir de mes propres yeux ce qu'il en est de ce tombeau!

    (sortir en courant) - Jeu d'orgue.
    © Jean-Marie Thévoz, 2013

  • Actes 10-11. Et L'Eglise devint universelle...

    Actes 10-11

    15.8.2010

    Et l'Eglise devint universelle...

    Actes 10 : 24-48   Actes 11 : 1-18

    Télécharger la prédication : P-2010-8-15.pdf

    Chères paroissiennes, chers paroissiens,

    Le récit que vous venez d'entendre, aux chapitres 10 et 11 des Actes, est non seulement une petite merveille littéraire, c'est aussi le centre ou le sommet du livre des Actes des Apôtres. Le livre des Actes raconte l'expansion du christianisme de Jérusalem à Rome, comme l'accomplissement de l'ordre de mission donné aux disciples par les derniers mots de Jésus à l'Ascension : " Vous serez mes témoins, vous parlerez de moi à Jérusalem, dans la région de Judée et de Samarie et jusqu'au bout du monde." (Ac 1:8).

    Nous avons vu la prédication de Philippe en Samarie dimanche passé et aujourd'hui nous vivons l'entrée de l'Evangile dans le monde romain. Et bien cette entrée ne va pas de soi. Elle ne va pas de soi pour Pierre. Elle ne va pas de soi pour les apôtres et les frères restés en Judée, puisqu'ils demandent des comptes à Pierre à son retour de Césarée et que celui-ci doit raconter en détail ce qui s'est passé.

    La place que prend cet épisode dans le livre des Actes, le nombre et la répétition, dans le récit même des interventions divines — visions, paroles, anges, parlé en langue, descente de l'Esprit saint — pour justifier cette ouverture, montre que la résistance, au sein de l'Eglise primitive a dû être forte.

    Pierre lui-même a dû se laisser convaincre. Il a cette fameuse vision de la nappe remplie d'animaux purs et impurs et dans lesquels il doit se servir pour manger. Il a une réaction d'horreur : "Jamais ! Jamais je n'ai rien mangé d'impur ou d'interdit !" (Ac 10:14).

    Toute la vie d'un croyant juif de l'époque est construite sur la distinction du pur et de l'impur. Les païens n'en tiennent pas compte et ils sont donc souillés. Si l'on veut appartenir au peuple de Dieu, il faut distinguer ce que Dieu a déclaré pur et ce qu'il a déclaré comme interdit. C'est la base de la vie pieuse. Cela a conduit les juifs à vivre une vie séparée des autres, n'entrant pas dans les maisons des romains (c'est ainsi que les autorités juives ne voulaient pas entrer dans le palais de Ponce Pilate, Jn 18:28), partageant encore moins leurs repas — la nourriture ayant pu être consacrée aux idoles.

    Dans ce contexte, Pierre a cette vision de la nappe. Le récit nous dit alors que Pierre cherche encore la signification de cette vision. Il n'en voit pas tout de suite les conséquences. C'est à ce moment de sa réflexion qu'un romain le fait chercher.

    C'est avec six compagnons qu'il se rend chez Corneille. Entendant qu'un ange a parlé à Corneille, il ose entrer dans sa maison pour lui parler du Christ. Le lien entre la vision de la nappe et la demande de l'officier romain se fait petit à petit. Tout de vient clair lorsqu'il réalise que le Saint-Esprit est descendu sur Corneille et sa maison. Là, il voit que rien de fait plus obstacle à ce qu'il reçoive le baptême, c'est-à-dire qu'il entre dans l'Eglise, dans le peuple de Dieu.

    Pierre ressort donc transformé de la maison de Corneille, c'est presque un récit de la conversion de Pierre ! Il y a chez lui un véritable changement de mentalité, un changement de vision du monde. Pierre passe d'un monde cloisonné où chaque peuple, où chaque ethnie, où chaque culture vit séparée l'une de l'autre (ce qu'on appelle le communautarisme aujourd'hui) à une société ouverte où chacun peut non seulement se croiser mais se rencontrer, se toucher, se rassembler et manger à la même table !

    Mais Pierre n'est pas au bout de son chemin. Il a fait son chemin personnel, mais il doit encore convaincre l'ensemble de la communauté. Avec ironie, Luc, l'auteur des Actes, montre par là que les obstacles ou les résistances au message de Dieu sont souvent plus forts à l'intérieur de l'Eglise qu'à l'extérieur. A ce moment-là (mais est-ce seulement à ce moment-là ?) l'Eglise n'a pas tellement envie de devenir universelle. L'Eglise n'a pas tellement envie de changer, de s'ouvrir.

    Pierre va donc reraconter tout le parcours, sa vision, celle de Corneille, la rencontre, la descente du Saint-Esprit et le baptême à ceux qui doutent du chemin qu'il a pris. Et c'est comme si Pierre disait : moi aussi je ne voulais pas aller par ce chemin, moi aussi je suis le premier surpris, mais je n'ai rien pu faire, la volonté de Dieu s'est imposée à moi, les signes étaient là. Comment pourrais-je résister à la voix du ciel qui me disait : "Ne considère pas comme impur ce que Dieu a déclaré pur." (Ac 11:9). Et Pierre de conclure son plaidoyer : "Qui étais-je donc pour m'opposer à Dieu." (Ac 11:17).

    Les apôtres et les autres membres de l 'Eglise se rangent alors derrière Pierre. L'Eglise peut devenir universelle. Les barrières sont tombées.

    Pour nous aujourd'hui cela paraît tout naturel, normal. Mais pour l'Eglise d'alors, cette position de Pierre est comparable à la demande d'un politicien suisse d'offrir le passeport suisse à toute personne qui en ferait la demande, sans autre condition que de prononcer la phrase : "J'aime la Suisse et je respecterai ses lois." Vous percevez les réactions que cela entraînerait ?

    "Ne considère pas comme impur ce que Dieu a déclaré pur." (Ac 11:9). Cette phrase a façonné le christianisme et n'a pas fini de déployer ses effets. Elle est un défi pour tous les chrétiens et elle est un défi pour toutes les autres religions.

    Cette phrase signifie d'abord l'abolition de toutes les barrières entre les humains. C'est l'abolition de toutes les discriminations entre humains et comme telle à la source de la Déclaration universelle des droits humains qui déclare que toute personne a des droits "sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d'opinion politique ou de toute autre opinion, d'origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation." (Article 2).

    Cela nous interroge sur les barrières que nous maintenons en place dans l'Eglise ou dans la société. Plus important pour nous aujourd'hui — en tant qu'Eglise — cela nous rappelle que cette abolition des barrières est voulue par Dieu lui-même, ce qui signifie que nous ne devons pas, que nous ne pouvons plus ériger des barrières au nom de Dieu, au nom du culte ou au nom de la religion.

    C'est un véritable défi pour notre XXIe siècle qui voudrait que chacun vive chez soi et qu'on ne mélange pas les communautés différentes ! Pour rester fidèles, apprenons à faire tomber toutes les barrières.

    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2010

     

  • Actes 4. Obéir à Dieu plutôt qu'aux hommes.

    Actes 4.

    1er août 2010

    Obéir à Dieu plutôt qu'aux hommes.

    Actes 4 : 1-12,  Actes 4 : 13-21.

    Télécharger la prédication : P-2010-8-1.pdf

    Chères paroissiennes, chers paroissiens,

    Nous avons choisi — comme thème de prédications de l'été — de vous parler de l'apôtre Pierre. Ma collègue vous a fait découvrir ce personnage dans les Evangiles et je vais continuer avec le livre des Actes des Apôtres. Le livre des Actes des Apôtres pourrait presque s'appeler les Actes de Pierre et Paul. Ils en sont les principaux héros. Pierre dans les chapitres 1 à 15 et Paul dans les chapitres 13 à 26, avec l'inclusion de sa conversion au chapitre 9. Pierre et Paul se rencontrent lors du Concile de Jérusalem, dont je vous parlerai le 22 août.

    Ainsi, peu à peu, Paul supplante Pierre dans la construction du christianisme et du Nouveau Testament. Mais Pierre reste le premier des disciples, dans le temps, dans son parcours avec Jésus et dans la fondation de l'Eglise de Jérusalem.

    C'est lui qui prêche directement après la Pentecôte. Il enseigne dans le Temple — avec Jean. Et il guérit l'infirme qui siège devant la Belle-Porte (Ac 3). C'est cet épisode de guérison qui est à la base du premier conflit avec les autorités du Temple et qui nous est exposé dans ce chapitre 4.

    Luc fait ici preuve de son talent littéraire, dans sa façon de raconter l'épisode et de nous faire comprendre beaucoup de choses sur Pierre comme "entre les lignes." Luc utilise le timing de l'épisode qui nous intéresse. Rappelons l'horaire de ce conflit : Pierre prêche au Temple pendant la journée. Les autorités réagissent et arrêtent Pierre et Jean dans la soirée. Les apôtres passent la nuit en prison. Ils comparaissent le lendemain matin devant le Conseil. Cela ne vous rappelle-t-il rien ?

    Par cet horaire, Luc fait un parallèle entre la Passion de Jésus et ce premier conflit. On y voit une sorte de remake du procès de Jésus. C'est ainsi que s'accomplissent les annonces de persécutions que Jésus a faites à ses disciples. Luc souligne ainsi la communauté de destin entre les disciples et Jésus. Voyons cela dans le détail.

    Jésus avait annoncé à ses disciples : "Quand on vous conduira pour être jugés dans les synagogues, ou devant les dirigeants ou les autorités, ne vous inquiétez pas de la manière dont vous vous défendrez ou de ce que vous aurez à dire, car le Saint-Esprit vous enseignera à ce moment-là ce que vous devez exprimer." (Luc 12:11-12, voir aussi Luc 21:15).

    Et voici que Pierre — dont on se souvient la peur, voire la lâcheté, devant la servante pendant le procès de Jésus — Pierre est maintenant plein d'assurance. Il s'exprime, au grand étonnement de l'assemblée, avec clarté et avec des arguments qui font mouche, alors que les grands-prêtres pensent avoir à faire à des gens simples et sans instruction.

    Luc dit clairement d'où vient cette audace et cette assurance : "Pierre était rempli du Saint-Esprit" (v. 8). Ainsi, les promesses de Jésus s'accomplissent. Le Pierre du reniement d'avant la croix et la résurrection a été transformé et cette transformation vient de l'Esprit-Saint, l'Esprit de Jésus qui habite maintenant les disciples.

    Un autre "trait de caractère" de l'apôtre mis en évidence par Luc est l'honnêteté. Les autorités du Temple demandent à Pierre et aux disciples de ne plus parler de Jésus au Temple. Là, Pierre joue l'honnêteté, il joue cartes sur table : ce ne sera pas possible, "nous ne pouvons par renoncer à parler de ce que nous avons vu et entendu" (v. 20). Ce n'est pas de la contestation, ce n'est pas de la provocation, c'est juste un positionnement, une affirmation, un fait. Ce positionnement est ancré dans la certitude "qu'il faut obéir à Dieu plutôt qu'aux hommes" (v. 19).

    Affirmation si évidente, mais affirmation si problématique.

    Affirmation évidente pour le sanhédrin, mais problématique pour le sanhédrin vis-à-vis des prédicateurs de Jésus. Affirmation évidente aujourd'hui face aux violations des droits humains, mais affirmation problématique pour nous aujourd'hui lorsque ce sont les musulmans qui la prononcent pour obtenir des dérogations à nos lois.

    Affirmation problématique un 1er août où nous mettons justement en avant notre pays et nos lois. Qu'est-ce qui justifie cette phrase dans la bouche de Pierre. Qu'est-ce qui la rend acceptable dans la pratique — puisqu'il est difficile de la contester dans l'absolu ?

    Comment concilier : Dieu est au-dessus de nos lois, fussent-elles démocratiques, et : Tout le monde doit se soumettre aux lois et aux principes de la démocratie ? Je pense qu'on peut trouver quelques pistes dans le comportement de Pierre.

    Premièrement, Pierre demande juste une liberté, un droit à la liberté d'expression. Il faut distinguer le "droit-liberté" du "droit-créance". Le "droit-créance" demande une action, une prestation de la part du pouvoir. Le droit au travail, le droit au logement sont des "droits-créances". Les "droits-liberté" demandent une abstention de la part du pouvoir : s'abstenir d'empêcher ou de réprimer. La liberté d'expression que demande Pierre ne demande pas de prestation, juste de ne pas être empêché de parler.

    Deuxièmement, cette liberté d'expression n'est pas contraignante pour les autres, elle n'oblige pas à rester pour écouter. Chacun reste libre d'adhérer ou pas au message de Pierre.

    Troisièmement, les apôtres sont prêts à assumer les conséquences et les inconvénients de leurs discours ou de leur opposition à l'autorité. Ils sont prêts au martyre. C'est une résistance non-violente et non-agressive.

    Quatrièmement, Pierre ne définit pas un contenu précis à ce que Dieu demande. Il ne revendique pas cette obéissance sur des cas particuliers, un comportement, un rite ou une coutume; et il ne cherche pas à imposer cette volonté à d'autres. Il demande un espace de liberté dans l'espace public.

    Ce conflit entre autorités religieuses et Pierre persiste encore aujourd'hui entre les autorités civiles et les demandes religieuses, entre la pensée dominante et les courants minoritaires. Le partage n'est pas facile à faire, nous le voyons souvent dans nos journaux.

    Rappelons-nous que la pratique du Christianisme (dans son essence), à la suite de Jésus, a toujours été de chercher des voies d'ouverture et de non-violence où le chrétien renonce à son droit plutôt que de devenir intolérant.

    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2010