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corneille

  • L'esprit d'ouverture de Dieu dépasse ce que les disciples imaginaient

    pour le dimanche 3 mai 2020

    Actes 10

    L'esprit d'ouverture de Dieu dépasse ce que les disciples imaginaient.

    Esaïe 12 : 1-6.       Actes 10 : 34-48

    télécharger le texte : P-2020-05-03.pdf

     

    Chers frères et soeurs en Christ,

    Le livre des Actes des Apôtres est notre seule source — dans la Bible — à propos de ce qui s'est passé après la résurrection de Jésus, sur les débuts du mouvement chrétien. Ce que l'on peut constater, c'est que les disciples de Jésus — dynamisés par la résurrection et les apparitions de Jésus — se sont mis à prêcher, à annoncer la bonne nouvelle — l'évangile — à Jérusalem d'abord, puis en Judée.

    Des persécutions — le mouvement chrétien n'était pas toujours apprécié par les traditionalistes ! — ont poussé les premiers chrétiens à sortir des frontières du pays d'Israël. Ils sont allés dans les villes des régions voisines ou plus éloignées, retrouvant-là les communautés juives de la diaspora.

    Il existait des synagogues avec des communautés juives dans toutes les grandes villes de l'Empire romain autour de la Méditerranée. Les apôtres et leurs compagnons s'adressaient donc en premier lieu à leurs coreligionnaires, parce qu'ils n'avaient pas l'impression ou la conscience d'être les missionnaires d'une nouvelle religion ! Les disciples sont persuadés d'être de bons juifs, simplement des juifs qui ont trouvé le Messie en Jésus.

    L'opposition que les disciples rencontrent dans les synagogues est d'abord une surprise, mais cela ne sera pas leur plus grande surprise ! Ils découvrent petit à petit que le message de Jésus rencontre un écho favorable chez les non-juifs, les païens. Alors se pose le problème — pour les disciples et les apôtres — de savoir si les "païens" peuvent entrer dans l'alliance que Dieu avait faite avec le peuple d'Israël.

    Le livre des Actes mène une large réflexion sur cette question : "Peut-on inclure les païens dans les appelés de Dieu ?" Dans le récit du livre des Actes qui précède celui que vous avez entendu, Pierre reçoit une vision accompagnée de ce message :

     

    "Ne considère pas comme impur ce que Dieu a déclaré pur !" (Ac 10:15)

    Cette déclaration va ouvrir la porte à des rencontres entre juifs et païens, entre Pierre et Corneille, un officier romain, probablement originaire d'Italie. C'est à partir de ces événements-là que Pierre peut commencer son discours dans la maison de Corneille en disant :

     

    "Maintenant, je comprends vraiment que Dieu n'agit pas différemment selon les personnes." (Ac 10:34)

    L'auteur du livre des Actes insiste lourdement pour dire que la décision vient vraiment de Dieu, plutôt que des disciples ou de Pierre. Pierre lui-même doit être convaincu par une vision et une voix qui vient du ciel. Ensuite l'auteur relève que "Les chrétiens d'origine juive qui étaient venus avec Pierre étaient très étonnés de ce que le saint esprit donné par Dieu se répande aussi sur les hommes non-juifs." (Ac 10:45)

    Pourquoi l'auteur du livre des Actes insiste-t-il tellement sur l'esprit de fermeture des disciples et l'esprit d'ouverture, d'accueil de Dieu ? N'est-ce pas parce que c'est un trait caractéristique et permanent de l'être humain et que cet auteur écrit cette histoire aussi pour ses contemporains et au-delà pour nous également ? Combien de fois n'avons-nous pas l'esprit plus étroit que celui de Dieu (et nous ne nous en rendons pas compte !) ?

    L'Evangile de Luc et le livre des Actes des Apôtres prêchent l'universalisme de Dieu en Jésus, c'est-à-dire l'acceptation de tous dans l'alliance de Dieu. Nous avons, nous aussi, à redécouvrir chaque jour cette grandeur de Dieu à l'égard de tous et à notre égard. Dieu est plus grand que nos pensées, nos catégories, nos classements. Nous n'avons pas à projeter sur lui nos étroitesses, nos limitations, notre propension à juger et nos incapacités à nous ouvrir.

     

    Ce qui est dit de l'universalisme de Dieu à l'égard de tous vaut aussi — au niveau individuel — de l'acceptation inconditionnelle de toute notre personnalité par Dieu. Dieu est plus grand que nos défauts, nos insuffisances, nos échecs ou nos erreurs. Là où nous manions le jugement — autant à l'égard des autres que de nous-mêmes — Dieu vient avec son pardon et son amour.

    Oui, il y a en chacun de nous des parts d'ombre, des pensées, des gestes, des attitudes, des comportements, des paroles dont nous ne sommes pas fiers, que nous voudrions effacer et ne pas reproduire. Et souvent — à cause de cela — nous nous disons que Dieu ne peut pas nous aimer vraiment. Et pourtant — comme le dit un auteur anonyme : "Je n'ai jamais tant besoin d'être aimé(e) que lorsque je ne le mérite pas."

    Cela devrait pouvoir être dit et être vécu dans chaque couple, entre enfants et parents, entre proches, par chacun d'entre nous. Eh bien, Dieu est plus grand que quiconque et il sait abandonner tous les reproches, toutes les barrières pour laisser libre cours à son amour sans limite.

    Ainsi, rien ne peut empêcher quiconque de s'approcher de Dieu et d'être accueilli pleinement par lui. Ainsi chacun peut confesser avec le prophète Esaïe :

     

    "« Seigneur, je veux te louer : j'avais mérité ta colère,

    mais tu ne m'en veux plus, tu m'as réconforté.

    Voici le Dieu qui m'a sauvé, je me sens en sécurité, je n'ai plus peur.

    Ma grande force, c'est le Seigneur; il est mon sauveur. »

    Avec joie vous puiserez aux sources du salut.

    Ce jour-là vous direz : « Louez le Seigneur, dites bien haut qui est Dieu,

    annoncez à tout le monde quels sont ses exploits,

    rappelez à tous quel grand nom est le sien. »

    Son nom, son amour est plus grand que tout. Nous ne sommes jamais tant aimés que lorsque nous en avons besoin.

    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2020

     

  • Dieu fait tomber les barrières

    Actes 11

    14.10.2018

    Dieu fait tomber les barrières

    Actes 11 : 1-12        Actes 11 : 13-18

     

    télécharger le texte : P-2018-10-14.pdf

     

    Chers frères et sœurs en Christ,

    Le livre des Actes des Apôtres est notre seule source — dans la Bible — à propos de ce qui s'est passé après la résurrection de Jésus, sur les débuts du mouvement chrétien. Ce que l'on peut constater, c'est que les disciples de Jésus — dynamisés par la résurrection et les apparitions de Jésus — se sont mis à prêcher, à annoncer la bonne nouvelle — l'évangile — à Jérusalem d'abord, en Judée puis au-delà.

    Des persécutions — le mouvement chrétien n'était pas toujours apprécié par les traditionalistes ! — ont poussé les premiers chrétiens à sortir des frontières du pays d'Israël. Ils sont allés dans les villes des régions voisines puis bien plus loin, retrouvant-là les communautés juives de la diaspora.

    Il existait des synagogues avec des communautés juives dans toutes les grandes villes de l'Empire romain autour de la Méditerranée. Les apôtres et leurs compagnons s'adressaient donc en premier lieu à leurs coreligionnaires, parce qu'ils n'avaient pas l'impression ou la conscience d'être les missionnaires d'une nouvelle religion ! Les disciples sont persuadés d'être de bons juifs, simplement des juifs qui ont trouvé le Messie en Jésus.

    L'opposition que les disciples rencontrent dans les synagogues est d'abord une surprise, mais cela ne sera pas leur plus grande surprise ! Ils découvrent petit à petit que le message de Jésus rencontre un écho favorable chez les non-juifs, les païens. Alors se pose le problème — pour les disciples et les apôtres — de savoir si les "païens" peuvent entrer dans l'alliance que Dieu avait faite avec le peuple d'Israël.

    Le livre des Actes mène une large réflexion sur cette question : "Peut-on inclure les païens dans les appelés de Dieu ?" Dans le récit du livre des Actes qui précède celui que vous avez entendu, Pierre reçoit une vision accompagnée de ce message : "Ne considère pas comme impur ce que Dieu a déclaré pur !" (Ac 10:15 et 11:9) Cette déclaration va ouvrir la porte à des rencontres entre juifs et païens, entre Pierre et Corneille, officier romain, probablement originaire d'Italie.

    C'est à partir de cette vision et de la venue de l’Esprit saint sur Corneille et sa famille que Pierre peut soutenir — contre les autres apôtres : “Dieu leur a accordé le même don que celui qu’il nous a fiat quand nous avons cru au Seigneur Jésus-Christ : qui étais-je pour m’opposer à Dieu ?” (Ac 11:17)

    L'auteur du livre des Actes, Luc, insiste lourdement pour dire que la décision vient vraiment de Dieu, plutôt que des disciples ou de Pierre. Il faut trois choses pour que Pierre soit convaincu (i) une vision (ii) une voix qui vient du ciel et (iii) la descente de l’Esprit saint sur ces païens.

    Pourquoi Luc insiste-t-il tellement sur l'esprit de fermeture des disciples et l'esprit d'ouverture, d'accueil de Dieu ? N'est-ce pas parce que c'est un trait caractéristique et permanent de l'être humain et que cet auteur écrit cette histoire aussi pour ses contemporains et au-delà pour nous également ? Combien de fois n'avons-nous pas l'esprit plus étroit que celui de Dieu (et nous ne nous en rendons pas compte !) ?

    La place que prend cet épisode dans le livre des Actes, le nombre et la répétition, dans le récit même des interventions divines — visions, paroles, anges, parlé en langue, descente de l'Esprit saint — pour justifier cette ouverture, montre que la résistance, au sein de l'Eglise primitive a dû être forte.

    Toute la vie d'un croyant juif de l'époque est construite sur la distinction du pur et de l'impur. Les païens n'en tiennent pas compte et ils sont donc considérés comme souillés. Si l'on veut appartenir au peuple de Dieu, il faut distinguer ce que Dieu a déclaré pur et ce qu'il a déclaré comme interdit. C'est la base de la vie pieuse. Cela a conduit les juifs à vivre une vie séparée des autres, n'entrant pas dans les maisons des romains (c'est ainsi que les autorités juives ne voulaient pas entrer dans le palais de Ponce Pilate, Jn 18:28), partageant encore moins leurs repas — la nourriture ayant pu être consacrée aux idoles.

    Pierre ressort donc transformé de la maison de Corneille, c'est presque un récit de la conversion de Pierre ! Il y a chez lui un véritable changement de mentalité, un changement de vision du monde. Pierre passe d'un monde cloisonné où chaque peuple, où chaque ethnie, où chaque culture vit séparée l'une de l'autre — ce qu'on appelle le communautarisme aujourd'hui — à une société ouverte où chacun peut non seulement se croiser, mais se rencontrer, se toucher, se rassembler et manger à la même table !

    Mais Pierre n'est pas au bout de son chemin. Il a fait son chemin personnel, mais il doit encore convaincre l'ensemble de la communauté. Avec ironie, Luc montre par là que les obstacles ou les résistances au message de Dieu sont souvent plus forts à l'intérieur de l'Eglise qu'à l'extérieur. A ce moment-là (mais est-ce seulement à ce moment-là ?) l'Eglise n'a pas tellement envie de devenir universelle. L'Eglise n'a pas tellement envie de changer, de s'ouvrir. -- Pour nous aujourd'hui cela paraît tout naturel, normal que l’Eglise soit universelle. Mais pour l'Eglise d'alors, cette position de Pierre est comparable à un politicien qui offrirait le passeport suisse à toute personne qui en ferait la demande, sans autre condition que de prononcer la phrase : "J'aime la Suisse." Vous imaginez les réactions que cela entraînerait ?

    "Ne considère pas comme impur ce que Dieu a déclaré pur." (Ac 11:9). Cette phrase a façonné le christianisme et n'a pas fini de déployer ses effets. Elle est un défi pour tous les chrétiens et elle est un défi pour toutes les autres religions.

    Cette phrase signifie d'abord l'abolition de toutes les barrières entre les humains. C'est l'abolition de toutes les discriminations entre humains et comme telle à la source de la Déclaration universelle des droits humains qui déclare que toute personne a des droits "sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d'opinion politique ou de toute autre opinion, d'origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation." (Article 2).

    Cela nous interroge sur les barrières que nous maintenons en place dans l'Eglise ou dans la société. Plus important pour nous aujourd'hui — en tant qu'Eglise — cela nous rappelle que cette abolition des barrières est voulue par Dieu lui-même, ce qui signifie que nous ne devons pas, que nous ne pouvons plus ériger des barrières au nom de Dieu, au nom du culte ou au nom de la religion.

    C'est un véritable défi pour notre XXIe siècle qui voudrait que chacun vive chez soi et qu'on ne mélange pas les communautés différentes ! Pour rester fidèles à Dieu, apprenons à faire tomber toutes les barrières.

    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2018