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  • Matthieu 28. Comment nourrir l'âme de nos enfants ?

    Matthieu 28
    7.10.2012
    Comment nourrir l'âme de nos enfants ?

    Dt 6 : 4-7    Matthieu 28 : 16-20

    Téléchargez la prédication ici :P-2012-10-07.pdf

    Chères paroissiennes, chers paroissiens, 
    La semaine dernière, je suis tombé sur un article dans 24Heures qui avait pour titre : "Les jeunes baissent les bras face à l'adversité." (27.9.2012, p.29) Une enquête, menée sur Vaud et Genève, montrait que la plupart des jeunes — lorsqu'ils affrontent une situation difficile — sont résignés, ils ressentent un sentiment d'impuissance, d'absurdité et de solitude. Ils se sentent démunis, découragés.
    Je retiens le sentiment d'impuissance et la solitude. D'où cela vient-il ? Certainement qu'une part vient de la situation de notre monde. Tout est globalisé et cela donne le sentiment que notre sort se joue ailleurs et que nous avons bien peu d'influence sur les grands problèmes de ce monde — la finance, la crise, le climat etc…
    Cependant, les générations précédentes — et je pense à celles qui ont traversé la Première et la Seconde guerre mondiale — n'avaient pas plus de prise que nous sur les événements mondiaux. Malgré tout, ils gardaient espoir et n'ont pas baissé les bras !
    Qu'est-ce qui a changé entre les grands-parents d'alors et les jeunes d'aujourd'hui ? 
    Entre toutes les choses qui ont changé, et elles sont nombreuses, je vais choisir l'éducation. Avant la généralisation de l'école, les enfants apprenaient à imiter les gestes des parents et reprenaient le métier familial. Le fils du boulanger devenait boulanger.
    Avec l'école, on s'est mis à apprendre des contenus, des données : les langues, les dates importantes de l'histoire, les tables de multiplications,  des poésies. Il fallait accumuler du savoir.
    Aujourd'hui, avec Internet, il devient plus important de savoir où chercher et trouver les données, sans les accumuler. Mes numéros de téléphones sont dans mon portable, plus dans ma tête. 
    Je n'ai rien contre cette évolution du savoir lorsqu'il concerne le cerveau. Par contre, je pense que cela commence à poser un problème sérieux en ce qui concerne l'âme. Quand je parle d'âme, c'est un raccourci commode pour parler de la personnalité, du sentiment d'être, d'être une personne, de vivre une vie qui a du sens.
    Ce sens, le sens de l'existence, nous avons à le construire en nous-mêmes et par nous-mêmes. Nous ne pouvons pas aller le chercher sur Internet. Le sens de notre existence ne se trouve pas à l'extérieur de nous-mêmes. Notre personnalité — notre sens d'être un tout — doit être à l'intérieur de nous-mêmes. L'iCloud convient à l'ordinateur, Internet convient au cerveau, mais pas à l'âme.
    Pour avoir le sentiment que notre vie a un sens, nous devons pouvoir raconter notre vie comme une histoire qui a du sens, qui fait sens, où les différents épisodes de notre vie se tiennent, sont liés par quelque chose.
    Le Christianisme propose de voir sa vie tenue entre les mains de Dieu, d'un Dieu aimant et bienveillant, d'un Dieu qui nous aide à porter ce que nous devons porter et qui porte à notre place ce qui est insupportable. Un Dieu qui a vécu une vie humaine pour savoir de l'intérieur de quoi il s'agit et qui nous dit, au moment de repartir : "Je suis avec vous, tous les jours, jusqu'à la fin des temps." (Mt 28:20)
    Je crois que pendant ces 20 ou 30 dernières années, il y a eu un déficit dans la transmission de ce message de confiance et d'espoir. En ne parlant plus aux enfants de ce "Dieu avec nous" on a fait passer ce message implicite : Vous êtes seuls dans l'univers. Il n'y a personne à appeler au secours. Il n'y a personne qui puisse vous venir en aide.
    Cela n'aide pas à vivre. Cela n'aide pas à avoir confiance, ni à chercher de l'aide. Cela n'aide pas à garder l'espoir. Pas étonnant, dès lors, que les jeunes élevés ainsi baissent les bras devant l'adversité. On ne leur a pas permis d'avoir accès à la source de l'espérance. On les a privés de secours, on les a privés d'une source d'expérience : je veux parler des histoires bibliques.
    Nous avons vu que le sens de notre existence vient de la possibilité de raconter sa propre histoire comme un récit où les épisodes sont liés les uns aux autres par quelque chose qui leur donne une direction, un sens.
    Les histoires de la Bible — mais on peut y ajouter la mythologie ou les contes — sont un trésor d'expériences humaines qui disent comment avant nous, d'autres personnes ont surmonté leurs difficultés. Pensez à Joseph vendu par ses frères comme esclave, qui se retrouve intendant du palais de Potifar, puis jeté en prison sur une accusation fausse et qui rencontre en prison celui qui va le faire connaître au Pharaon, qui le nommera Premier ministre (Genèse 37—45). Ou l'histoire de Daniel dans la fosse aux lions (Daniel 6).
    Des histoires riches en symboles qui disent que nous sommes gardés, accompagnés, guidés. Ces histoires — racontés aux enfants — nourrissent leurs âmes d'expériences qui donnent espérance et confiance. Des histoires qui disent que lorsque nous nous sentons impuissants, Dieu prend le relais. Ce n'est pas à nous de sauver le monde, nous avons juste à faire notre petite part de travail.
    Parents, grands-parents, vous n'avez plus à faire l'école à vos enfants ou petits-enfants, mais vous avez à nourrir leur âme, à enrichir leur être, leur personnalité. Racontez des histoires — celle de votre famille, celles de la Bible, celles des contes — racontez des histoires qui vont devenir une bibliothèque mentale d'expériences humaines dans laquelle vos enfants et petits-enfants pourront puiser, au fur et à mesure de leur croissance.
    Ils auront ainsi une réserve d'histoires pleines de sens pour affronter l'adversité sans baisser les bras. Dans l'impuissance, ils se sauront secourus, dans la solitude, ils se sauront accompagnés. Transmettons ensemble la promesse de Jésus "Je suis avec vous, tous les jours, jusqu'à la fin des temps."
    Amen
    © Jean-Marie Thévoz, 2012