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nathanaël

  • La découverte de soi mène à la découverte du Père

    Jean 1

    24.9.2017

    La découverte de soi mène à la découverte du Père

    Jean 1 : 35-42        Jean 1 : 43-51

     

    Télécharger la prédication : P-2017-09-24.pdf

    Chers frères et soeurs en Christ,

    Nous poursuivons notre redécouverte de l’Evangile selon Jean, avec ces récits des appels des disciples. Comme souvent, l’évangéliste Jean écrit un texte en deux parties, deux étapes qui ont des parallèles entre eux, mais qui montrent surtout une progression dans la révélation de Jésus au monde.

    Ces deux récits où Jésus rencontre, recrute de nouveaux disciples ont plusieurs similitudes. C’est chaque fois une rencontre et cette rencontre est la conséquence d’un témoignage. Jean Baptiste dit à ses propres disciples qui est Jésus « Voici l’agneau de Dieu » (Jn 1:36). André dit à son frère « Nous avons trouvé le Messie » (v.41). Philippe dit à Nathanaël « Nous avons trouvé celui dont Moïse et les prophètes parlent, c’est Jésus, le fils de Joseph, de Nazareth » (v.45). La progression se voit dans le fait que le flambeau des témoignages passe des mains de Jean Baptiste dans les mains des disciples eux-mêmes. Dans chacun des récits, un disciple en amène un autre vers Jésus.

    Dans chacun des récits, on trouve la même phrase : —« Venez et vous verrez » dit Jésus aux deux disciples. « Viens et tu verras » dit Philippe à Nathanaël qui est plutôt sceptique. La découverte de qui est Jésus, commence, certes, par un témoignage, une information, mais elle ne s’accomplit que dans un déplacement décidé et une observation personnelle. Il faut se décider une fois à aller voir, à aller observer, constater. Il faut une envie de découverte, ne serait-ce qu’un début de curiosité : « Où demeures-tu ? » ou le besoin de confronter son doute : « Peut-il sortir quelque chose de bon de Nazareth ? » A partir de là, chacun doit pouvoir constater par lui-même. C’est la liberté que donne le Christ : faites l’expérience par vous-mêmes de ce que je donne, de ce que je révèle. La progression se marque aussi par les paroles de Jésus à la première approche des disciples. Aux premiers il demande « Que cherchez-vous ? » Au second, il dit « Suis-moi ! »

    Le dernier parallélisme que je veux relever — et qui est le plus important et le plus marquant — ce sont les paroles transformatrices de Jésus. Dans le premier récit, André amène son frère Simon à Jésus et le texte raconte : « Jésus le regarda et lui dit : Tu es Simon, le fils de Jean, tu porteras le nom de Céphas, qui signifie Pierre. » (v.42)

    On sait de l’Evangile selon Marc (Mc 3:16) que Jésus a renommé Simon du nom de Pierre. Mais là, Jésus fait plus. Selon le récit, ils ne se sont jamais vus, mais Jésus regarde Simon et il lui dit qui il est et de qui il est le fils et il lui donne — j’ai envie de dire — un totem, un nom qui a une signification en rapport avec sa personne profonde. Jésus révèle à Simon qu’il est un rocher, un roc, une montagne de pierre. Il lui révèle à lui-même son être et sa vocation.

    Comment puis-je dire cela à partir de cette petite phrase ? Parce que c’est justement le même phénomène qui se passe avec Nathanaël dans la deuxième partie du récit. Un parallèle et une progression en même temps.

    « Jésus regarde Nathanaël qui venait à lui et il dit à son propos : « Voici un véritable Israélite en qui il n’est point d’artifice. » « D’où me connais-tu ? » lui dit Nathanaël ; et Jésus de répondre : « Avant même que Philippe ne t’appelât, alors que tu étais sous le figuier, je t’ai vu. » (v.47-48)

    Jésus a vu Nathanaël, il l’a regardé comme il a regardé Simon. Et Jésus a vu clair en lui. Jésus voit la vraie nature de Nathanaël et il le révèle au monde : « Voici un véritable israélite, il n’y a rien de faux en lui. » Nathanaël se reconnaît dans les paroles de Jésus, il en est bouleversé. Tout ça parce que Jésus l’a vu. Le texte dit « Je t’ai vu sous le figuier » et je vous en ai déjà parlé en juin dernier (P-2017-06-25).

    Aujourd’hui, je vais prendre le texte au sens littéral. Sous le figuier, sous ton figuier, cela veut dire dans la cour de ta maison, chez toi, dans ta vie quotidienne, dans ton intimité. Jésus lui dit en quelque sorte : j’ai vu qu’entre ta vie personnelle et ta vie publique, là devant moi, tu ne changes pas, tu n’as pas de façade, tu n’as pas de secret, tu es authentique. Et Nathanaël se sent reconnu, accepté, compris. Peut-être même — maintenant que Jésus l’a dit — mieux compris qu’il ne se percevait lui-même auparavant.

    Avec Simon, avec Nathanaël — plus tard avec Nicodème et avec la Samaritaine — Jésus se manifeste comme le révélateur de l’être profond de chacun. L’évangéliste Jean nous montre Jésus comme ayant une connaissance profonde, intime de chacun de ses disciples. Une connaissance qui ne s’accompagne d’aucun jugement, pas même pour les cinq maris de la Samaritaine.

    L’évangéliste Jean va plus loin dans sa façon de raconter, il montre que cette révélation du disciple à lui-même par Jésus conduit le disciple à reconnaître la vraie personne de Jésus. Alors, le disciple se met à confesser sa foi en Jésus. Nathanaël, qui doutait que quoi ce soit de bon puisse sortir de Nazareth, en vient à confesser : « Maître, tu es le Fils de Dieu » ce qui est la confession de foi la plus parfaite pour l’évangéliste Jean.

    On voit donc que ces deux récits d’appel de disciples répondent à la question : « Comment devient-on chrétien ? » L’évangéliste répond qu’on devint chrétien par un chemin qui passe par la mise en marche, par curiosité ou par quête (« Venez »), par l’observation et l’expérience (« Voyez »), mais surtout par la rencontre avec la personne de Jésus qui nous révèle à nous-mêmes dans notre vérité.

    Jésus se montre comme le Révélateur, de notre personne et du Père. Et parce qu’il peut nous révéler à nous-mêmes, il peut aussi nous révéler le Père. C’est le chemin que font les disciples. Ils reconnaissent en Jésus celui qui peut leur révéler les clés de leur existence, cette existence qui est tendue entre eux-mêmes et le Père.

    Jésus lui-même fait le lien entre la révélation de soi-même et la révélation du Père lorsqu’il dit à Nathanaël : « Parce que je t’ai dit que je t’avais vu sous le figuier, tu crois. Tu verras des choses bien plus grandes. » Et Jésus ajoute : « En vérité, en vérité, je vous le dis, vous verrez le ciel ouvert et les anges de Dieu monter et descendre au-dessus du Fils de l’homme. » (v.50-51)

    La découverte de soi mène à la découverte du Père, et vice versa. Calvin l’avait bien compris puisqu’il ouvre son Institution de la Religion Chrétienne par ces mots : « Toute la (…) sagesse est située en deux parties : c’est qu’en connaissant Dieu, chacun de nous aussi se connaisse. (IRC I, I, 1.) La foi naît de ce sentiment d’avoir été totalement compris par le Père et d’être dorénavant englobé dans sa vie et son amour. Alors le ciel s’ouvre et nous pouvons voir le Père à travers le Fils.

    Cette parole sur le ciel ouvert répond à celle qui termine le prologue « Personne n’a jamais vu Dieu. Mais le Fils unique (…) l’a fait connaître » (Jn 1:18). Le Fils unique est plus grand que Jacob sur qui montaient et descendaient les anges dans son songe (Gn 28:12) (allusion à la parole de la Samaritaine : « es-tu plus grand que Jacob ? » Jn 4:12). Par la foi, à travers le Fils de Dieu, le croyant a accès aux réalités divines et à la vraie vie. C’est ce que l’évangéliste Jean expose et développe dans tout son Evangile.

    Amen 

    © Jean-Marie Thévoz, 2017

  • Je t'ai vu quand tu étais sous le figuier

    Jean 1

    25.6.2017

    Je t'ai vu quand tu étais sous le figuier

    Genèse 3 : 1-8       Jean 1 : 43-50

    Télécharger le texte : P-2017-06-25.pdf

     

    Chers frères et soeurs en Christ,

    "Je t'ai vu quand tu étais sous le figuier !" dit Jésus à Nathanaël. Voilà la phrase qui bouleverse Nathanaël. Voilà la phrase qui change sa vie, qui le fait découvrir Jésus, qui lui fait reconnaître l'être divin en Jésus. "Je t'ai vu quand tu étais sous le figuier !" Qu'y a-t-il là de bouleversant, d'extraordinaire pour que cela décide Nathanaël à tout abandonner pour suivre Jésus ? Pourquoi cette parole est-elle décisive ?

    Une interprétation rabbinique nous dit que "être sous le figuier" c'est étudier la Torah, l'Ecriture. Il n'y a pas de doute que Nathanaël devait connaître les Ecritures. Son ami Philippe — pour lui présenter Jésus — lui dit avoir "trouvé celui dont Moïse a parlé dans le livre de la Loi et dont les prophètes ont aussi parlé" (Jn 1:45). Et quand Philippe lui dit que Jésus vient de Nazareth, il s'étonne — sceptique — "peut-il venir quelque chose de bon de Nazareth ?" (Jn 1:46) puisque Nazareth n'est jamais mentionnée dans l'Ancien Testament.

    Certainement, Nathanaël a étudié la Bible, "il a été sous le figuier," mais cela ne suffit pas pour lui faire reconnaître Jésus comme le Messie. Heureusement, Philippe l'invite à venir voir par lui-même : "Viens et vois !" Et c'est en venant, en rencontrant Jésus qu'il va entendre cette parole qui l'interpelle : "Je t'ai vu sous le figuier !"

    Dans l'Ancien Testament, le figuier (souvent avec la vigne) est évoqué comme signe de sécurité, d'un pays en paix (1 R 4:25; 2 R 8:31; Mi 4:4). La menace, c'est d'être privé de son figuier et de sa vigne, par la destruction ou la nécessité de fuir sa maison ou son pays (Jér 5:17; Os 1:12; Jl 1:7). Il semble que chaque habitant pouvait avoir un figuier et quelques plants de vigne dans son jardin. C'est là qu'on exerce l'hospitalité envers ses voisins et ses amis (Za 3:10). Viens boire un verre chez moi, sous la tonnelle, dit-on chez nous. Viens boire un verre sous mon figuier devait-on dire en Israël.

    Le figuier évoque donc le jardin de sa maison, le chez soi, l'aspect de la vie privée, son jardin secret. Lorsque Jésus dit à Nathanaël qu'il l'a "vu sous le figuier" il semble que Nathanaël comprend que Jésus l'a vu alors qu'il pensait ne pas être vu. Jésus a vu en lui quelque chose de personnel, quelque chose que Nathanaël porte en lui, sans le révéler à personne, mais que Jésus a découvert et lui révèle en retour. C'est à mettre en parallèle avec le récit de la Samaritaine lorsqu'elle dit de Jésus : "Il m'a dit tout ce que j'ai fait" (Jean 4:39). Jésus voit ce qu'il y a dans le cœur de Nathanaël.

    Cela paraît extrêmement menaçant, non ? N'avons-nous pas tous quelque chose à cacher au fond de nous-mêmes ? Mais il ne faut pas oublier que Jésus a abordé Nathanaël en lui disant ces mots : "Voici un véritable Israélite, il n'y a rien de faux en lui !" (Jn 1:47) Ouf pour Nathanaël, il semble qu'il n'y avait rien de noir en lui, mais en nous ? Nous qui nous connaissons de l'intérieur, n'avons-nous pas à trembler d'être percé à jour par Jésus ? C'est là qu'il faut revenir au premier emploi du figuier dans la Bible.

    Adam et Eve, découvrant leur vulnérabilité fondamentale après avoir goûté du fruit défendu dans le jardin d'Eden, s'habillent avec des feuilles de figuier. "Je t'ai vu sous le figuier !" pourrait aussi vouloir dire : "Je vois en toi se refléter Adam dans son égarement, le vieil homme peureux, honteux et gêné." C'est comme si Nathanaël entendait Jésus lui dire : "Je reprends avec toi l'histoire de l'humanité exactement là où elle avait déraillé."

    Jésus ne vient pas accabler Nathanaël, Jésus ne vient pas nous accabler avec son regard sur nos vies, non, comme Jean Baptiste l'a proclamé : "Jésus est l'agneau de Dieu qui ôte le péché du monde" (Jn 1:29).Si Jésus nous voit "sous le figuier" c'est-à-dire dans notre condition de vulnérabilité, de fragilité humaine, avec nos zones d'ombre et nos fautes, c'est pour nous sortir de là. Il vient à nous avec sa compréhension fondamentale de notre parcours de vie : y mettre sa lumière pour panser nos plaies, pour soigner ce qui nous fait mal, pour nous sortir de notre misère.

    Lorsque Nathanaël entend Jésus lui dire : "Je t'ai vu sous le figuier !" Nathanaël se sent compris. Il se sent compris et accepté jusqu'au fond de lui-même. Il se sent relevé. Il doit se dire : "je me sens remplis de fautes, mais il n'en tient pas compte, il ne tient compte que de mes efforts à être droit, il ôte mon péché, il me soulage de mes poids.

    Il me connaît jusqu'au fond de moi-même — même ce que je ne voudrais avouer à personne — mais il ne me le fait pas peser, il m'en délivre, alors je peux marcher avec lui, le suivre partout où il m'entraînera." Nathanaël peut mettre sa confiance en Jésus. Jésus l'a accepté tel qu'il est, il reçoit sa foi et il promet à Nathanaël de confirmer, d'affermir sa foi : il va découvrir de plus grandes choses encore. Jésus inaugure la nouvelle création, fondée sur le pardon (le pardon originel, comme le dit Lytta Basset) et l'amour infini de Dieu. Une création qui commence au cœur de chacun d'entre nous quand nous acceptons que Jésus nous voit sous notre figuier.

    Amen

     

    © Jean-Marie Thévoz, 2017