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  • 2 Corinthiens 4. Ce qui est visible est provisoire, ce qui est invisible dure toujours.

    2 Corinthiens 4
    6.9.2015

    Ce qui est visible est provisoire, ce qui est invisible dure toujours.

    2 Corinthiens 4 : 16-18—5 : 1-5       Jean 3 : 12-17
    Télécharger le texte : P-2015-09-06.pdf


    Chères paroissiennes, chers paroissiens,
    Dimanche dernier nous avons entendu que Dieu sauve, sauvegarde notre être essentiel, sans toujours nous épargner les épreuves ou la maladie. Aujourd’hui j’aimerais continuer sur cette ligne, voir comment le Nouveau Testament parle de l’être intérieur.
    Or il se trouve que l’apôtre Paul utilise justement cette opposition « intérieur - extérieur » pour parler de notre condition humaine (2 Co 4:16). Paul vient de parler de la vulnérabilité physique. Il a parlé de notre condition humaine avec l’image des vases d’argile qui contiennent un trésor spirituel (v.7). Puis il parle des risques (physiques) liés à son apostolat — et on sait qu’il a été persécuté, battu, emprisonné et que cela a eu un retentissement sur sa santé. Mais il invite au courage en opposant l’extérieur — qui peut être touché, blessé — et l’être intérieur qui se renouvelle, que Dieu régénère. (v.16)
    Et Paul continue avec une image qui fait penser à une balance avec d’un côté la détresse présente qui ne fait pas le poids face à la gloire promise (v. 17). Le présent, que Paul appelle le visible, est provisoire, éphémère, impermanent. Alors que l’invisible, le monde de Dieu, est permanent, éternel, infini. Renoncer au visible contre l’invisible c’est comme échanger un parapluie contre une maison, face à la tempête.
    On a presque là le pari de Pascal : misez notre vie (si courte) pour gagner la vie nouvelle (éternelle) c’est un pari gagnant à tous les coups. Il suffit de miser pour gagner, il suffit de croire pour recevoir la vie éternelle.
    « Ce qui est visible est provisoire, ce qui est invisible dure toujours. » (v.18) C’est en ces termes que Paul parle de l’être extérieur et de l’être intérieur.
    Dans un deuxième temps, Paul change d’images pour approfondir sa pensée. Il va parler d’habits et d’habitat. Les verbes parlent d’habillement : se vêtir se dévêtir et se revêtir. Les noms parlent de tente pour le provisoire, de maison qui n’est pas faite de mains d’homme ou d’habitation céleste pour ce qui est d’ordre divin.
    Et Paul explique que nous gémissons dans nos habits ou notre habitation provisoire et que nous espérons être vêtus ou habiter dans l’habitation céleste que Dieu nous réserve.
    Paul laisse une ambiguïté dans le texte pour savoir si l’habit ou l’habitation céleste va remplacer ou recouvrir notre tente, notre corps terrestre. Pour lui l’important est ailleurs, l’important est dans la direction qui est impulsée par Dieu : c’est la vie qui va engloutir, absorber, recouvrir la mort.
    Il y a là un grand retournement — et c’est vraiment le sens de tout l’évangile et de toute la mission de Jésus : la vie l’emporte sur la mort malgré toutes nos images. C’est l’inversion de l’image de l’océan qui noie le marin ou l’image de la baleine qui engloutit Jonas. Non, avec Dieu, c’est la mort qui est engloutie (1 Co 15:54), c’est la vie qui contamine la mort. Les captifs sont libérés, les tombeaux s’ouvrent.
    Et la foi, c’est de croire à cette inversion des forces, c’est de croire que la force de vie que Dieu insuffle dans le monde l’emporte sur les forces de mort. Et cela malgré les apparences contraires, puisque nous restons vulnérables et mortels.
    Comment conjuguer cette force de la vie et nos vulnérabilités ? En fait, plus nous avons foi dans l’habitat du ciel, plus nous pouvons accepter notre vulnérabilité ici-bas, parce que nous savons qu’elle est vaincue, qu’elle n’a pas le dernier mot, qu’elle est provisoire et que le meilleur nous attend.
    La perspective d’une autre réalité (l’invisible) nous permet de traverser le provisoire (le visible), comme la perspective de la guérison nous permet de supporter l’hôpital, les douleurs et les désagréments des traitements. La foi crée une mise en perspective qui nous permet de mieux traverser le présent.
    Le problème, c’est que certains ont dénoncé cette perspective comme l’opium du peuple ! « La vie est dure, mais ne vous révoltez pas, vous aurez le paradis ! »
    Comment échapper à ce juste reproche, à ce risque existant de baisser les bras, d’avoir une acceptation résignée face au malheur ? Ce qui est reproché là, justement, c’est une acceptation passive de la réalité, une mise en attente. Or justement le christianisme a toujours eu une double attitude.
    A. D’un côté la confiance et l’acceptation en regardant l’invisible derrière le visible. C’est la part de Dieu, nous donner une espérance, préserver notre être intérieur, nous préparer une habitation céleste.
    B. Mais d’un autre côté, il y a notre travail, notre mission qui est d’agir et de servir dans la société, dans le monde. Agir, avec Jésus comme modèle, lui qui n’a cessé d’accueillir et de guérir partout où il passait. C’est la force de l’incarnation de nous rappeler que le corps et la vie physique n’est jamais méprisable. Même si la vie humaine, corporelle, est provisoire, elle ne peut être dédaignée, méprisée, négligée. Notre travail, c’est de soigner le monde et de favoriser la vie.
    Nous avons à le faire sur trois plans au moins.
    1. Sur le plan de notre être intérieur, favoriser la vie, la joie, la relation, aux dépens de la tristesse, de la dépression et de l’isolement.
    2. Sur le plan de nos relations et de la société. Tout être humain sur la terre a autant de valeur que moi, que chacun. Dieu ne fait pas de différences entre les personnes. Il ne privilégie pas le fort sur le faible. Il n’abandonne personne. Et c’est à nous de le manifester et de le rappeler aux puissants.
    3. Sur le plan de la planète, nous devons sauvegarder la vie — à tous les niveaux — parce que nous sommes tous interdépendants. Il n’y a pas de survie de l’humanité sans la survie des animaux, des plantes et des écosystèmes dont nous dépendons.
    Notre acceptation de notre réalité provisoire n’est pas une carte blanche pour la passivité. Au contraire cette dépréoccupation de notre sort — parce que notre être intérieur est garanti par Dieu — nous libère et nous apporte des forces nouvelles pour rendre notre monde meilleur. Accepter la condition humaine et notre vulnérabilité, nous pouvons le faire parce que Jésus-Christ lui-même l’a revêtue, mais comme lui nous devons agir pour humaniser notre monde qui en a bien besoin.
    Sachant que notre être intérieur est déjà sauvegardé auprès de Dieu, nous pouvons utiliser nos ressources pour humaniser le monde.
    Amen
    © Jean-Marie Thévoz, 2015