Luc 23
6.4.2012, Vendredi-saint
Luc présente la mort de Jésus comme une erreur judiciaire
Luc 23 : 22-56
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Chères paroissiennes, chers paroissiens,
Nous sommes face au mystère de la mort de Jésus, face au mystère de la croix. Un mystère, pas une énigme, car nous savons comment cela s'est passé. L'enquête est close, les faits sont établis, nous savons comment Jésus est mort. Ce qui reste un mystère, c'est pourquoi est-il mort ?
Les apôtres dans leurs lettres, puis les quatre Evangélistes, nous livrent chacun des pistes d'interprétation, pour répondre à la question "Pourquoi est-il mort ?"
Le mystère ne signifie pas qu'il n'y a aucune réponse. L'existence du mystère signifie plutôt qu'aucune de ces réponses n'épuise le sujet. Même, toutes ces réponses ensemble ne comblent pas nos interrogations.
Comment cela a-t-il pu arriver, que l'humanité présente puisse faire exécuter le Fils de Dieu ? Chacun de nous a besoin d'aborder ce mystère et de trouver une réponse qui le satisfasse, une réponse qui fasse sens, pour soi.
En rédigeant le récit de la Passion, l'Evangéliste Luc apporte la réponse de sa communauté Le fruit de méditations, de réflexions, d'études des Ecritures et de la vie de Jésus.
Dans son récit du procès et de la mort de Jésus, Luc met en évidence l'innocence de Jésus. Par trois fois, Pilate déclare qu'il ne trouve aucun raison de condamner Jésus (Luc 23:4, 14, 22). Ensuite, seul Luc rapporte le dialogue entre les deux malfaiteurs sur les croix. L'un accusant Jésus et l'autre protestant : "Pour nous cette punition est juste (…), mais lui n'a rien fait de mal." (v.41). Enfin, troisième témoignage — une fois que Jésus est mort — l'officier romain déclare : "Réellement, cette homme était juste" (v.47). Ainsi Luc nous présente-il la mort de Jésus comme une erreur judiciaire, comme la mise à mort d'un innocent, d'un juste.
Et Luc montre les conséquences catastrophiques pour l'humanité et la création tout entière. Luc est le seul à parler des femmes qui suivent Jésus sur le chemin de Golgotha et à rapporter les paroles de Jésus : "Ne pleurez pas à cause de moi ! Pleurez plutôt sur vous et vos enfants" (v. 28). Jésus met en évidence que son exécution n'est que la figure, la mise en exemple de toutes les mises à mort injustes à venir dans l'Histoire. Ou si l'on regarde en miroir, il avertit qu'il nous faudra regarder les malheurs, les victimes futures comme son propre martyre.
On peut penser ici à toutes les femmes et tous les enfants, victimes collatérales des conflits violents, ou celles directement visées et abusées, utilisées, pour faire plier et décourager les aspirations à la liberté. Dans ces femmes et ces enfants, c'est la Passion du Christ qui se répète. Et chaque fois que ces martyres se répètent, c'est le ciel qui s'obscurcit sur toute la terre, de midi à trois heures. Métaphore pour dire la tristesse de Dieu de voir des humains torturés et maltraités.
Ainsi, dans son récit de la Passion, Luc nous montre toute la noirceur du monde en train d'assassiner le Juste, celui qui venait apporter la lumière aux humains. En ce moment, le Juste est réduit à l'impuissance, la lumière s'éteint, le mal triomphe.
Il y a cependant, dans le récit de Luc, trois lampes qui brillent dans cette obscurité : ce sont les trois paroles de Jésus sur la croix.
1) "Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu'ils font" (v.34). Jésus demande à son Père de ne pas ajouter du malheur au malheur. La situation est déjà assez sombre pour ne pas y ajouter des punitions supplémentaires. La culpabilité est évidente, les hommes se punissent assez eux-mêmes en agissant comme cela. Il n'y a rien à y ajouter.
2) Sur la croix, Jésus répond en ces termes à la demande du malfaiteur qui reconnaît l'innocence de Jésus : "Je te le déclare, c'est la vérité, aujourd'hui tu seras avec moi dans le paradis" (v. 43). Une parole de délivrance et d'espérance. Il y a une issue pour ceux qui savent identifier où est le mal et où est le bien, pour celui qui sait distinguer entre le bourreau et la victime.
Le récit de la Passion lui-même doit nous servir de grille de lecture, de grille d'interprétation dans notre lecture des nouvelles du monde. Nous devons apprendre à distinguer victimes et bourreaux. Jésus sur la croix, se tient résolument aux côtés des victimes, victimes tant des malheurs que de l'injustice.
3) Au moment de mourir, Jésus crie : "Père, je remets mon esprit entre tes mains" (v.46). Une parole de confiance, une parole de certitude, le Père est là, près du Fils, les bras ouverts. Quand toute la violence du monde et des humains s'est liguée contre Jésus, il n'est pas seul, il n'est pas abandonné. Dieu est de son côté, il peut se réfugier en Lui et Lui remettre sa vie.
Ces trois paroles illustrent, dans ces sombres événements, trois repères qui vont permettre de traverser la nuit de la mort et préfigurer Pâques : le pardon, l'espérance et la confiance.
Le pardon sur le passé, sur notre passé, pour se relever comme le paralytique et nous mettre en marche à la suite de Jésus. L'espérance qui nous assure un avenir, l'espérance du royaume de Dieu, qui nous donne un but et une tâche pour mettre un peu de lumière dans notre monde obscur. La confiance pour notre présent, confiance dans la bonté, la bienveillance de Dieu qui veille sur nous comme un Père lorsque nous traversons l'obscurité.
La mort du Juste nous montre l'obscurité du monde, mais le Juste a allumé les lampes — au cœur de cette obscurité — du pardon, de l'espérance et de la confiance.
Amen
© Jean-Marie Thévoz, 2012
Commentaires
c'est un super commentaire cela me permet d'avancer dans mon évangélisation
j'ai aimé