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  • Genèse 9. Dieu s’engage unilatéralement en faveur de l’humanité.

    Genèse 9
    15.3.2015
    Dieu s’engage unilatéralement en faveur de l’humanité.

    Genèse 9 : 8-17    Deutéronome 31 : 9-13    Jean 15 : 12-15

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    Chères paroissiennes, chers paroissiens,
    Plusieurs histoires se croisent dans ce récit du Déluge. C’est un récit complexe qui essaye de répondre à plusieurs questions existentielles. La terre, telle que nous la connaissons, peut-elle disparaître ? Une civilisation peut-elle être balayée de la surface de la terre ? Qu’est-ce qu’il plus dangereux, la violence de la nature ou bien celle des humains ? Là-dedans comment Dieu se situe-t-il ? Est-il pour ou contre nous ?
    Ce récit  construit un certain nombre de réponses à ces questions sur la base d’une catastrophe appelée le Déluge. Les récits de déluges se retrouvent dans les mythes de quasi toutes les civilisations, au point il est justifié de penser qu’il y a bien des faits réels derrière ces récits. Oui, il y a bien eu des catastrophes liées à une montée des eaux dans le passé, des catastrophes qui ont laissé des traces dans les cultures de nos civilisations ; ces traces sont dans nos récits de déluges.
    Et aujourd’hui on découvre de plus en plus (autour de la Méditerranée par exemple) de cités englouties sous quelques mètres d’eau, en Grèce à Pavlopetri, au sud du Péloponèse, en Israël à Atlit Yam, face au Mont Carmel, par exemple. Des cités néolithiques qui ont été submergées par la montée des eaux de la Méditerranée et que les archéologues explorent actuellement. Ces engloutissements ont marqué les mémoires, ont été racontés, parfois amplifiés, surtout interprétés pour trouver un sens, pour donner des significations.
    Dans notre tradition biblique, nous héritons du récit de l’arche de Noé qui cherche à mettre en lumière la fragilité des communautés humaines et le rôle de Dieu. Le récit commence par l’expérience de la violence humaine. L’être humain est violent. L’être humain commet et subit l’injustice, jusqu’à la destruction de toute possibilité de vie. Triste constat, mais constat réaliste, hélas ! L’être humain est capable de détruire par lui-même tout ce qu’il a bâti, c’est le constat que nous faisons aujourd’hui. Nous sommes notre propre déluge ! En fait nous pouvons tout à fait nous passer de Dieu, nous pouvons nous détruire par nous-mêmes, sans aide extérieure !
    Mais le récit fait intervenir Dieu de plusieurs façons. D’abord avec sa tristesse (Gn 6:6) «Dieu fut attristé et regretta d’avoir fait les humains sur la terre. » Puis ça colère (v. 7) « Il faut que je balaye de la terre les humains que j’ai créé. » Et finalement avec de l’attachement (v. 8) « Mais Noé bénéficiait de la bienveillance du Seigneur. » Ainsi dans un premier temps, Dieu use de sa toute-puissance pour balayer le mal de la surface de la terre, tout en gardant une bouture, pourrait-on dire, pour faire repartir (avec Noé et sa famille et les animaux de l’arche) la vie sur la terre.
    Ce qui est intéressant dans ce récit, c’est de voir la transformation que Dieu opère sur lui-même ! Après ce premier temps de destruction dans la rage, il décide que ce n’est plus possible d’agir à nouveau ainsi. Il se limite lui-même ! Il se met des barrières à lui-même. Il renonce à sa toute-puissance. Une toute-puissance qui pouvait aller dans toutes les directions. Il limite sa puissance, il la coupe en deux en quelque sorte. C’est-à-dire qu’il décide — c’est ce que nous dit ce récit — de l’orienter uniquement vers la vie, vers le maintien de la vie.
    Dieu s’engage unilatéralement en faveur de l’humanité. Il restreint son pouvoir et sa force pour ne l’utiliser qu’en faveur de la vie de l’humanité. C’est le sens de cette alliance avec Noé, l’alliance « noachique ».
    Comme — dans la fiction du récit — Noé et sa famille sont les seuls survivants du Déluge, il représente toute humanité. Dieu fait donc une alliance (une première alliance) avec toute l’humanité. Dieu n’est pas le dieu d’un seul peuple, mais d’abord celui de toute l’humanité. Il a pour souci l’humanité entière, la planète entière. Pas de communautarisme, pas de favoritisme, c’est une alliance globale, et c’est pourquoi Dieu choisit un signe reconnaissable par tous — universellement — l’arc-en-ciel. C’est un signe qu’il lie l’eau et la lumière, les nuages effrayants et les rayons rassurants du soleil.
    Si tous les humains, n’importe où sur la planète, peuvent être témoins de l’apparition d’un arc-en-ciel, en fait le signe est placé dans les cieux — nous dit le récit— comme rappel pour Dieu lui-même de son engagement à ne pas faire disparaître l’humanité de la surface de la terre. Dieu se place à lui-même un rappel — en cas de pluie — de ne pas laisser les écluses du ciel à nouveau inonder la terre. Bien sûr, nous ne vivons plus avec ces images et ses représentations d’une terre qui pourrait être noyée sous les eaux, comme une pomme dans une cuvette d’eau! Mais la particularité de ce récit, c’est de placer Dieu à nos côtés et pas du côté des violences de la nature, c’est un pas important. Un pas qui est prolongé et développé peu à peu au fil du récit de toute la Bible.
    Cette première alliance est un geste unilatéral de Dieu envers l’humanité. Dieu s’engage et ne demande rien en retour à Noé ou à l’humanité. Mais ce n’est que le début de l’histoire que Dieu veut tisser avec l’humanité. Mais le premier geste vient de Dieu. Il fait le don à l’être humain de la création et de son maintien. Dieu fait le serment de toujours utiliser son pouvoir en faveur de sa création et de l’humanité. Mais Dieu va continuer à se rapprocher de l’être humain.
    Garantir que l’humanité ne sera pas détruite à nouveau par un Déluge ne suffit pas. La violence humaine n’a pas été éradiquée, elle subsiste. Il y a donc tout un chemin pédagogique que Dieu va faire avec l’être humain pour lui apprendre à maîtriser sa violence — personnelle et institutionnelle. Dieu va le faire au travers de l’alliance avec Abraham, puis avec Moïse et le peuple d’Israël en lui donnant la Loi. Puis à travers l’enseignement de Jésus, en enseignant aux humains que l’amour et le don de soi sont la voie suprême vers la paix. Tout au long de ce parcours, Dieu ne fait pas cavalier seul. Toujours à nouveau il fait alliance avec l’être humain pour l’inclure dans le processus. Dieu appelle l’être humain à participer à cette tâche de pacification. Dieu s’engage, mais il attend de nous un engagement.
    Un engagement qui commence par une conversion intérieure, c’est-à-dire réaliser que la transformation du monde commence par notre propre transformation. La pacification du monde commence par notre pacification. Le développement de la justice dans le monde commence par nos choix de comportements justes. La sauvegarde de la création commence — comme nous le rappelle la campagne de Carême— par nos gestes quotidiens de consommation équitable.
    Dieu s’est engagé à respecter la création, mais aujourd’hui la menace ne vient pas de lui, mais de nous. Engageons-nous à notre tour à lever les yeux au ciel, à voir l’arc-en-ciel et à diriger chacun de nos choix pour que la vie continue à s’épanouir sur la terre, pour l’humanité et pour tous les êtres vivants sur la planète.
    Amen.

    Sur Pavlopetri : http://fr.wikipedia.org/wiki/Pavlopetri
    http://www.ascadys.net/article-video-pavlopetri-la-cite-engloutie-112210796.html
    Sur Atlit Yam : http://fr.wikipedia.org/wiki/Atlit_Yam

    Sur la variation des niveaux des mers :
    http://co2climate.e-monsite.com/pages/le-niveau-des-mers-de-la-planete-a-toujours-varie-il-n-a-jamais-ete-stable.html
    © Jean-Marie Thévoz, 2015