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Revenir sur sa vie pour y reconnaître la trace de la présence de Dieu

(7.7.2002)

Luc 17

Revenir sur sa vie pour y reconnaître la trace de la présence de Dieu

Lévitique 14 : 1-9.      Luc 17 : 11-21

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Chères paroissiennes, chers paroissiens,

Le récit de la guérison des 10 lépreux — que nous rapporte Luc — nous parle aussi de reconnaissance : la reconnaissance d'un homme qui réalise qu'il est guéri et revient sur ses pas pour remercier Jésus.

Cependant, soyons prudent de ne pas tomber dans le piège d'une lecture trop rapide où Luc nous donnerait simplement une leçon de politesse du genre : "Alors ? qu'est-ce qu'on dit ? Allons, mon petit, dis merci au Monsieur !"

Jésus ne dit pas au lépreux : "Lève-toi et va; ta politesse t'a sauvé." Il dit "Lève-toi et va; ta foi t'a sauvé." Il n'est pas question ici de la politesse de dire merci, mais de la foi de cet homme, même s'il est bien question de reconnaissance. Examinons cela.

Luc a rattaché à ce récit de guérison une discussion de Jésus avec des pharisiens sur la question de la venue du Royaume de Dieu. Les pharisiens sont curieux de savoir quand le Royaume de Dieu doit venir, comment il viendra, à quels signes on le reconnaîtra. Et voilà que Jésus leur répond — quelle déception ! — que "le Royaume de Dieu ne vient pas de telle façon qu'on puisse le voir" (Luc 17:20). Le Royaume de Dieu n'est pas observable, localisable, il n'est pas ici ou là, mais — ô surprise — il est déjà là, parmi vous, à votre portée.

Le récit de la guérison des 10 lépreux est le signe qui a déjà été posé de cette présence parmi nous, à notre portée du Royaume de Dieu. Pour voir le Royaume de Dieu, il faut se retourner, regarder en arrière, revenir sur ses pas (dans le texte) et le reconnaître comme l'a fait le dixième lépreux. Revenons donc sur ce qui se joue dans ce récit de guérison.

Comme le veulent la loi et les précautions médicales, les lépreux doivent se tenir à l'écart de la communauté. C'est pourquoi ils interpellent Jésus de loin. Dans un premier temps, Jésus ne semble pas s'approcher d'eux, il leur dit simplement d'aller se présenter aux prêtres comme cela est prescrit dans la loi de Moïse — le texte que nous avons entendu tout à l'heure.

Le récit ne nous dit rien sur la guérison elle-même, quand elle se passe, comment elle arrive. On n'en sait rien, cela n'a aucune importance dans le récit. Ce qui a de l'importance, c'est qu'un homme, tout à coup, réalise qu'il est guéri. Littéralement : "il se voit guéri" (Luc 17:15). Il prend conscience de ce qui lui arrive, il réalise qu'il a été guéri, transformé.

Probablement que les 9 autres lépreux se sont aussi aperçu qu'ils sont guéris maintenant. Mais un seul relie cette guérison à son histoire et au passage de Jésus dans sa vie ! Cet homme revient en arrière sur sa vie, sur son parcours, sur son histoire et y reconnaît la trace de l'action divine. Il relit son histoire, il la passe en revue avec un regard neuf pour y reconnaître, y identifier, ce que Dieu y a semé.

N'avez-vous jamais entendu quelqu'un dire : "à voir mon parcours, comment les événements se sont enchaînés, ce qui m'est arrivé, je vois maintenant que j'ai été guidé" ou "cela n'est pas arrivé par hasard, Dieu m'a accompagné." Voilà la démarche de foi du dixième homme, reconnaître dans sa vie la trace de Dieu et venir lui rendre grâce de cette présence.

La reconnaissance dont il est question dans ce récit de guérison a donc bien deux natures. D'un côté, reconnaître, identifier l'action cachée de Dieu dans mon existence. Une action cachée parce que le Royaume de Dieu n'est pas visible, évident, démontré. Mais une action reconnaissable — après coup — parce que le Royaume de Dieu est déjà là, déjà présent parmi nous, en nous. De l'autre côté la reconnaissance dans le sens de la gratitude, venir rendre grâce de cette découverte de la présence mystérieuse de Dieu dans nos vies.

Cette double reconnaissance est l'expression de la foi, de la confiance que Dieu est présent dans nos vies, qu'il nous guide et que nous pouvons l'y découvrir si nous regardons notre vie en revenant sur nos pas.

Et les 9 autres alors ? Pourquoi ne font-ils pas le même chemin puisqu'ils ont été guéris eux aussi ? Je pense que les 9 autres n'ont reconnu en Jésus qu'un guérisseur professionnel. Il a fait son travail, il les a guéris, et il n'y a pas de quoi revenir là-dessus — pensent-ils.

La guérison s'explique par le pouvoir de guérisseur de Jésus, de la même façon que nos guérisons par la médecine s'expliquent par le pouvoir médical de la médecine moderne — et il n'y a pas à mêler Dieu dans tout ça !

Et neuf personnes sur 10 sortent de l'hôpital sans revenir sur leur histoire et sans se poser la question : "Mais que vais-je faire de ma guérison, de la santé et des jours qui me sont donnés en plus ?"

Peut-être aurons-nous quelques minutes au milieu de nos vacances pour nous demander : "Que faisons-nous de nos guérisons?"

Amen

© Jean-Marie Thévoz, 2022

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