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disciple

  • Marie comprend le destin de Jésus

    Jean 12

    7.4.2019

    Marie comprend le destin de Jésus

    Romains 5 : 6-11     Jean 12 : 1-8

    télécharger le texte : P-2019-04-07.pdf

     

    Mon message va porter sur le récit de la femme qui verse du parfum sur les pieds de Jésus. Cependant, je n’ai pas voulu en faire un sujet de réflexion (nous l’avons fait lors de l’étude biblique). J’aimerais vous entrainer à l’intérieur du récit, au plus près des personnages, de leur vécu, de leur ressenti. J’ai imaginé qu’un serviteur, présent à ce souper, ayant assisté à cette scène, se rappelle ce qui s’est passé, ce qu’il a vécu.

    C’est une immersion à laquelle je vous invite. Si le cœur vous en dit, vous pouvez fermer les yeux et commencer à imaginer. C’était dans une salle à manger antique, les murs sont en terre crue, avec quelques alcôves. Les lits ont été rangés contre les murs pour permettre de balayer. Le serviteur se met à balayer… Il pense.

    « L'odeur n'a jamais disparu... Cela fait pourtant des années... Combien de temps cela fait-il ? J'étais déjà au service de Madame Marthe depuis un an lorsque c'est arrivé. Cela doit bien faire quinze ans maintenant. Mais je m'en souviens comme si c'était hier. Oui, chaque fois que je reviens dans cette pièce je sens l'odeur de ce parfum et tout me revient, aussi nettement que si c'était hier.

    Ce soir-là, j'étais de service (comme tous les soirs d'ailleurs. On n'avait pas de congé à cette époque !) Je supervisais le travail des servantes, sous la direction de Madame Marthe, car il y avait du monde à servir ce soir-là. Marthe et Marie recevaient beaucoup. Elles menaient grand train de vie avec leur frère Lazare.

    Ce soir-là, elles recevaient l'homme qui avait sorti leur frère Lazare de sa tombe. Une bien étrange histoire ! C'était Jésus, celui de Nazareth. Ce soir-là, il était revenu à Béthanie, avant de se remettre en route vers Jérusalem. C'était juste six jours avant la Pâque, et personne n’envisageait ce qui allait se passer. Personne... sauf peut-être Marie, qui avait comme un sixième sens avec Jésus. Il faut dire qu'elle l'avait tant écouté, elle pouvait passer des heures assise à ses pieds à l'écouter (même que cela énervait sa soeur !). Elle enregistrait toutes les paroles de Jésus. Elle l'avait pris pour maître de pensée, elle était pendue à ses lèvres.

    Ce soir-là, il y avait beaucoup de monde autour de la table. Il y avait Jésus, avec ses douze compagnons, et puis il y avait Marthe et Marie et Lazare qui mangeait tout près de Jésus. Mais ce n'était pas un repas ordinaire, on sentait une tension dans l'air, c'était palpable, c'était pesant comme si un orage était sur le point d'éclater.

    La discussion était très vive entre les disciples, car Jésus venait d'annoncer qu'il allait monter à Jérusalem pour la fête de la Pâque. Or chacun savait que les chefs des prêtres et les Saducéens voulaient arrêter Jésus. Ils avaient déjà voulu arrêter Lazare à cause du tumulte que faisaient tous ceux qui voulaient voir "l'homme qui était sorti de sa tombe après quatre jour" ! Dans la discussion j'entendais Jacques, le frère de Jésus, demander : "Pourquoi aller se jeter dans la gueule du loup ? Revenons l'an prochain à Jérusalem quand tout sera calmé." Mais Pierre répliquait : "Je ne laisserai pas Jésus être arrêté. J'ai quelques relations à Jérusalem, ou bien je me battrai et je défendrai mon maître !

    Jésus se tenait silencieux pendant cette discussion.

    Alors Judas pris la parole pour dire que, justement, il fallait que Jésus entre à Jérusalem. Son entrée serait un triomphe. Il voyait déjà la foule couper des rameaux aux arbres et les poser par terre pour faire un chemin, les autres étaler leurs manteaux comme un tapis rouge sous les pas de Jésus. Pour sûr, on pourrait même lui trouver un âne pour faire son entrée triomphale à Jérusalem, comme un vrai prophète. Une fois dans la ville, Judas se faisait fort de recruter une troupe d'hommes de mains pour écraser la petite garnison de Ponce Pilate et prendre le pouvoir. Ce serait l'occasion de se débarrasser une fois pour toute des romains.

    Judas en rajoutait : "Je tiens la caisse, on a de l'argent pour recruter, et puis voyez — il montra un vase contenant un parfum précieux qui était posé dans une alcôve, le parfum qui avait été acheté après la mort de Lazare et qui devait servir à embaumer son corps, mais dont on ne s'était pas servi puisque Jésus l'avait sorti de sa tombe — voyez, ce parfum, on pourrait le vendre et cela nous procurerait encore trois cents pièces d'argent avec lesquelles on pourrait recruter une bonne troupe de pauvres bougres qui se battraient pour nous." Judas s'était emporté, certains disciples criaient pour soutenir sa proposition, d'autres s'y opposaient, c'était un vrai tumulte, on ne s'entendait plus dans cette salle. Les uns après les autres, chaque disciple y allait de ses commentaires sur ce que Jésus devait faire.

    Depuis où j'étais, je voyais que Marie aurait voulu dire quelque chose, mais comment un femme pourrait-elle se faire entendre dans un tel brouhaha ? Alors, j'ai vu Marie s'approcher de l’alcôve, prendre le vase de parfum, s'approcher de Jésus, s'agenouiller devant lui et verser tout le parfum sur ses pieds. Personne n'avait remarqué les gestes de Marie, à part Jésus et moi. Mais l'odeur du parfum s'est répandu dans la pièce. Cela sentait tellement bon et tellement fort que le brouhaha s'est évanoui d'un coup et le silence s'est installé.

    Un silence que seul habitait encore le bruissement des cheveux de Marie sur les pieds de Jésus. Puis, comme elle relevait son visage, le silence fut rempli du regard que s'échangeaient Jésus et Marie. Le silence était complet, mais il était habité par ce regard et par cette odeur...

    C'est alors que j'ai compris ce que Marie devait avoir compris longtemps avant moi et que Jésus approuvait. J'ai compris quel devait être le destin de Jésus. Dans ce parfum, il y avait toute l'histoire que Jésus allait vivre dans les jours suivants.

    Ce parfum disait tout. Il disait la mort prochaine de Jésus. Il disait que Jésus acceptait cette mort. Jésus n'allait-il pas prendre la place de Lazare dans la tombe, puisqu'il recevait le parfum qui lui était destiné ? Jésus n'allait-il pas prendre la place de chacun de nous, dans la tombe qui nous était destinée, pour que nous vivions ?

    Ce parfum nous disait donc sa mort, une mort annoncée, une mort acceptée. Mais ce parfum répandu en ce jour, ce parfum — qui s'était écoulé sur les pieds de Jésus et répandu sur le sol de cette pièce qu'il embaume encore aujourd'hui — ce parfum ne pourrait plus servir pour prendre soin du corps de Jésus dans sa tombe !

    Qui l'a réalisé sur le moment même ? Marie sûrement, Marthe aussi. N'avait-elle pas entendu Jésus lui dire : —"Je suis la résurrection et la vie" lorsqu'ils se trouvaient ensemble devant le tombeau de Lazare ? Le parfum, dans ce moment de silence intense, disait tout, la mort et la résurrection.

    Et Jésus l'acceptait. Et Jésus était reconnaissant envers Marie d'avoir fait cesser le tumulte de ses disciples qui essayaient de le détourner de son destin.

    Qui comprenait mieux Jésus que les femmes qui l'accompagnaient ? Voilà, chaque fois que j'entre dans cette pièce, l'odeur de ce parfum me rappelle tout cela. Le parfum avait dit vrai, Jésus est mort, mais Dieu l'a ressuscité des morts, la tombe ne l'a pas retenu. Jésus a donné sa vie pour nous, la mort ne peut retenir personne dans la tombe, et Marie l'a cru avant nous tous. »

    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2019

     

  • Jean 1. Jésus se manifeste comme le révélateur de l’être profond de chacun

    Jean 1
    2.2.2014
    Jésus se manifeste comme le révélateur de l’être profond de chacun
    Jean 1 : 35-42       Jean 1 : 43-51
    Téléchargez ici le texte de la prédication : P-2014-02-02.pdf

    Chères paroissiennes, chers paroissiens,
    Nous poursuivons notre redécouverte de l’Evangile selon Jean, commencée dimanche dernier, avec ces récits des appels des disciples. Comme souvent, l’évangéliste Jean écrit un texte en deux parties, deux étapes qui ont des parallèles entre eux, mais qui montrent surtout une progression dans la révélation de Jésus au monde.
    Ces deux récits où Jésus rencontre, recrute de nouveaux disciples ont plusieurs similitudes. C’est chaque fois une rencontre et cette rencontre est la conséquence d’un témoignage. Jean Baptiste dit à ses propres disciples qui est Jésus « Voici l’agneau de Dieu » (Jn 1:36). André dit à son frère « Nous avons trouvé le Messie » (v.41). Philippe dit à Nathanaël « Nous avons trouvé celui dont Moïse et les prophètes parlent, c’est Jésus, le fils de Joseph, de Nazareth » (v.45). La progression se voit dans le fait que le flambeau des témoignages passe des mains de Jean Baptiste dans les mains des disciples eux-mêmes.
     Dans chacun des récits, un disciple en amène un autre vers Jésus. Dans chacun des récits, on trouve la même phrase : « Venez et vous verrez » dit Jésus aux deux disciples. « Viens et tu verras » dit Philippe à Nathanaël qui est plutôt sceptique.
    La découverte de qui est Jésus, commence, certes, par un témoignage, une information, mais elle ne s’accomplit que dans un déplacement décidé et une observation personnelle. Il faut se décider une fois à aller voir, à aller observer, constater. Il faut un envie de découverte, ne serait-ce qu’un début de curiosité : « Où demeures-tu ? » ou le besoin de confronter son doute : « Peut-il sortir quelque chose de bon de Nazareth ? » A partir de là, chacun doit pouvoir constater par lui-même. C’est la liberté que donne le Christ : faites l’expérience par vous-mêmes de ce que je donne, de ce que je révèle.
    La progression se marque par les paroles de Jésus à la première approche des disciples. Aux premiers il demande « Que cherchez-vous ? » Au second, il dit « Suis-moi ! »
    Le dernier parallélisme que je veux relever — et qui est le plus important et le plus marquant — ce sont les paroles transformantes de Jésus.
    Dans le premier récit, André amène son frère Simon à Jésus et le texte raconte : « Jésus le regarda et lui dit : — Tu es Simon, le fils de Jean, tu porteras le nom de Céphas, qui signifie Pierre. » (v.42) On sait de l’Evangile selon Marc (Mc 3:16) que Jésus a renommé Simon du nom de Pierre. Mais là, Jésus fait plus. Selon le récit, ils ne se sont jamais vus, mais Jésus regarde Simon et il lui dit qui il est et de qui il est le fils et il lui donne — j’ai envie de dire — un totem, un nom qui a une signification en rapport avec sa personne profonde. Jésus révèle à Simon qu’il est un rocher, un roc, une montagne de pierre. Il le révèle à lui-même, son être et sa vocation.
    Comment puis-je dire cela à partir de cette petite phrase ? Parce que c’est justement le même phénomène qui se passe avec Nathanaël dans la deuxième partie du récit. Un parallèle et une progression en même temps.
    « Jésus regarde Nathanaël qui venait à lui et il dit à son propos : « Voici un véritable Israélite en qui il n’est point d’artifice. » « D’où me connais-tu ? » lui dit Nathanaël ; et Jésus de répondre : « Avant même que Philippe ne t’appelât, alors que tu étais sous le figuier, je t’ai vu. » (v.47-48)
    Jésus a vu Nathanaël, il l’a regardé comme il a regardé Simon. Et Jésus a vu clair en lui. Jésus voit la vraie nature de Nathanaël et il le révèle au monde : « Voici un véritable israélite, il n’y a rien de faux en lui. » Nathanaël se reconnaît dans les paroles de Jésus, il en est bouleversé. Tout ça parce que Jésus l’a vu.
    Le texte dit « sous le figuier » et on a cherché plein de significations symboliques, moi aussi dans une prédication du 2.11.2008. Aujourd’hui, je vais prendre le texte au sens littéral. Sous le figuier, sous ton figuier, cela veut dire dans la cour de ta maison, chez toi, dans ta vie quotidienne, dans ton intimité. Jésus lui dit en quelque sorte : j’ai vu qu’entre ta vie personnelle et ta vie publique, là devant moi, tu ne changes pas, tu n’as pas de façade, tu n’as pas de secret, tu es authentique. Et Nathanaël se sent reconnu, accepté, compris. Peut-être même — maintenant que Jésus l’a dit — mieux qu’il ne le percevait auparavant de lui-même.
    Avec Simon, Avec Nathanaël — plus tard avec Nicodème et avec la Samaritaine — Jésus se manifeste comme le révélateur de l’être profond de chacun. L’évangéliste Jean nous montre Jésus comme ayant une connaissance profonde, intime de chacun de ses disciples. Une connaissance qui ne s’accompagne d’aucun jugement, pas même pour les cinq maris de la Samaritaine.
    L’évangéliste Jean va plus loin dans sa façon de raconter, il montre que cette révélation du disciple à lui-même par Jésus conduit le disciple à reconnaître la vraie personne de Jésus. Le disciple se met à confesser sa foi en Jésus.
    Nathanaël, qui doutait que quoi ce soit de bon puisse sortir de Nazareth, en vient à confesser : « Maître, tu es le Fils de Dieu » ce qui est la confession de foi la plus parfaite pour l’évangéliste Jean.
    On voit donc que ces deux récits d’appel de disciples répondent à la question : « Comment devient-on chrétien ? » L’évangéliste répond qu’on devint un chrétien par un chemin qui passe par la mise en marche, par curiosité ou par quête (« Venez »), par l’observation et l’expérience (« Voyez »), mais surtout par la rencontre avec la personne de Jésus qui nous révèle à nous-mêmes dans notre vérité.
    Jésus se montre comme le Révélateur, de notre personne et du Père. Et parce qu’il peut nous révéler à nous-mêmes, il peut aussi nous révéler le Père. C’est le chemin que font les disciples. Ils reconnaissent en Jésus celui qui peut leur révéler les clés de leur existence, cette existence qui est tendue entre eux-mêmes et le Père.
    Jésus lui-même fait le lien entre la révélation de soi-même et la révélation du Père lorsqu’il dit à Nathanaël : « Parce que je t’ai dit que je t’avais vu sous le figuier, tu crois. Tu verras des choses bien plus grandes. » Et Jésus ajoute : « En vérité, en vérité, je vous le dis, vous verrez le ciel ouvert et les anges de Dieu monter et descendre au-dessus du Fils de l’homme. » (v.50-51)
    La découverte de soi mène à la découverte du Père, et vice versa. Calvin l’avait bien compris puisqu’il ouvre son Institution de la Religion Chrétienne par ces mots : « Toute la (…) sagesse est située en deux parties : c’est qu’en connaissant Dieu, chacun de nous aussi se connaisse. (IRC I, I, 1.)
    La foi naît de ce sentiment d’avoir été totalement compris par le Père et d’être dorénavant englobé dans sa vie et son amour. Alors le ciel s’ouvre et nous pouvons voir le Père à travers le Fils. Cette parole sur le ciel ouvert répond à celle qui termine le prologue « Personne n’a jamais vu Dieu. Mais le Fils unique (…) l’a fait connaître » (Jn 1:18).
    Le Fils unique est plus grand que Jacob sur qui montaient et descendaient les anges dans son songe (Gn 28:12) (allusion à la parole de la Samaritaine : « es-tu plus grand que Jacob ? » Jn 4:12). Par la foi, à travers le Fils de Dieu, le croyant a accès aux réalités divines et à la vraie vie. C’est ce que l’évangéliste Jean va exposer et développer dans tout son Evangile.
    Amen
    © Jean-Marie Thévoz, 2014

  • Jean 9. Jésus ouvre les yeux de ses disciples sur leur propre pouvoir, il les mobilise, il les envoie.

    Jean 9
    4.9.2011
    Jésus ouvre les yeux de ses disciples sur leur propre pouvoir, il les mobilise, il les envoie.
    1 Jn 4 : 7-9    Rm 12 : 1-2     Jn 9 : 1-7

    téléchargez la prédication ici : P-2011-9-04.pdf

    téléchargez le projet général de DM-Echange et Mission à Madagascar dans l'enseignement

    Chères paroissiennes, chers paroissiens, chers invités,
    J'ai choisi le récit de cette guérison d'un aveugle par Jésus pour le message de ce matin parce que la personne que nous envoyons aujourd'hui en mission à Madagascar (par l'intermédiaire de DM-Echange et Mission) a trouvé sa vocation professionnelle dans le travail auprès des personnes handicapées. Son travail de fin d'étude traite de la représentation du handicap en Occident et à Madagascar.
    Questionner la représentation du handicap, c'est se demander quelle image mentale nous nous faisons du handicap, d'où il provient, quel sens il peut avoir. Et c'est exactement ce que nous trouvons comme questionnement dans la bouche des disciples : "Pourquoi cet homme est-il né aveugle ? A cause de son propre péché ou à cause de celui de ses parents ?" demandent les disciples (Jn 9:2).
    Les disciples ont une image mentale de l'origine du handicap, ils ont une représentation qui leur dit que le handicap est sûrement la conséquence d'une faute, d'un manquement.
    La représentation, c'est un peu comme un théâtre, intérieur à soi, dans lequel on joue une scène de rencontre avant qu'elle ne se produise. On fait une répétition générale pour se préparer (comme on préparerait un entretien d'embauche). Mais dans cette représentation théâtrale, on joue tous les rôles. Alors on invente le rôle de l'autre, ce qui donne une couleur à ce qui sera joué dans la réalité. Par cette représentation préalable, on influence la rencontre elle-même. Dans le meilleur des cas, notre représentation sera modifiée par la rencontre et l'on s'exclamera : "Ah, ben j'aurais pas cru ça de lui ou d'eux !"
    Les disciples ont donc une représentation du handicap qui repose sur une faute passé ("Est-ce à cause d'un péché…") Les disciples sont focalisés sur le passé, sur l'origine. S'ils trouvent l'origine du mal, ils seront rassurés et pourront se positionner face à cet homme — pensent-ils.
    Mais Jésus ne répond pas à la question de l'origine. Plus, il récuse l'idée qu'on puisse reporter la cause sur quelqu'un (la personne elle-même ou ses parents). Jésus donne une réponse énigmatique à la question des disciples. "Ce n'est pas à cause de… c'est pour que… pour que l'œuvre de Dieu puisse se révéler en lui !" (v.3)
    Jésus  nous détourne du passé et de l'origine pour nous orienter vers le présent et le futur. Ne cherchez pas dans le passé, faites quelque chose de ce présent pour améliorer la condition de cet homme. Et c'est ce que Jésus va faire en pétrissant de la boue à appliquer sur les yeux de l'aveugle. Ensuite, Jésus donne une tâche à l'aveugle pour le rendre participant de sa propre guérison. Il l'envoie se rincer les yeux à la piscine de Siloé.
    Les disciples avaient une représentation attachée au passé qui pouvait déboucher sur le reproche et qui aboutit à blâmer la victime. Jésus barre cette issue pour nous mobiliser dans le présent et pour nous pousser à une action constructive. Comme si Jésus disait : Cet homme est là pour que vous puissiez faire quelque chose pour lui !
    Jésus change la représentation des disciples face à cet homme. On peut même dire que Jésus ouvre les yeux de ses disciples sur leur propre pouvoir, il les mobilise, il les envoie.
    Pour moi, ce n'est pas un hasard que la personne guérie soit aveugle. Le récit veut nous ouvrir les yeux sur une réalité : Jésus est celui qui veut nous sortir de nos aveuglements. Le récit se veut porteur de notre guérison aussi, c'est pourquoi l'évangéliste Jean y insère cette parole de Jésus : "Je suis la lumière du monde." (Jean 9:5). Jésus est venu pour nous faire sortir de l'obscurité.
    C'est dans ce même sens que l'apôtre Paul nous dit : "Ne vous conformez pas aux représentations de ce monde, mais laissez Dieu vous transformer pour un changement complet de votre intelligence ! Vous pourrez alors comprendre ce que Dieu veut." (Rm 12:2).
    Ce changement complet de l'intelligence, c'est nous guérir de trois aveuglements, changer trois de nos représentations :
    (i) notre représentation de Dieu. Jésus est venu remplacer un Dieu comptabilisateur de nos manquements par un Dieu qui nous soutient comme un Père.
    (ii) Jésus est venu pour transformer notre vision des gens, des "autres" : comme nous sommes tous les enfants d'un même Père, nous pouvons rencontrer les autres comme des frères et des sœurs. Le monde ne tournerait-il pas plus rond si nous cessions de nous méfier les uns des autres ?
    (iii) Jésus vient changer notre idée de nous-mêmes. Ne sommes-nous pas constamment en train de nous faire des reproches à nous-mêmes, tournés vers le passé ? Nous nous accusons et nous condamnons, alors que Dieu ne nous condamne pas (Rm 8:33), mais nous accueille comme ses enfants. Il nous mobilise et nous envoie.
    Dieu nous offre de nous guérir de ces trois aveuglements; irons-nous nous laver à la piscine de Siloé ? Parce que nous avons notre part à faire en réponse à cette guérison ! Dans ce récit, Jésus barre le retour sur le passé, mais il ouvre un avenir en nous désignant le grand dessein de l'existence : "nous devons accomplir les œuvres de celui qui m'a envoyé" (Jn 9:4). A nous de réaliser le travail pour lequel nous sommes faits. A nous de réaliser la vocation à laquelle le créateur nous a appelé.
    Aujourd'hui, nous saluons la vocation et l'envoi d'une jeune femme pour un travail à Madagascar. Mais n'oublions pas que nous avons tous reçu un appel du Seigneur, une vocation et un envoi. Forts du "changement complet de notre intelligence" que Jésus nous propose, nous pouvons partir raffermis — comme de vrais enfants de Dieu — sur nos lieux de vie et de travail pour accomplir l'œuvre de Dieu.
    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2011