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Genèse 8. Après le Déluge, Dieu décide de changer


Genèse 8

18.2.2007

Dieu décide de changer

Extraits de Genèse 6-7-8 Voir la note "Déluge, premier récit"    Osée 2 : 20-22


Chères paroissiennes, chers paroissiens,
Combien de fois n'entendons-nous pas des gens dire : "Si Dieu existait, il mettrait fin aux guerres, il mettrait fin à la violence des humains!" Ces personnes ont raison de s'interroger sur la présence du mal, et du mal radical, dans notre monde. Mais quand on demande que Dieu éradique le mal de la surface de la terre, on ne sait pas ce qu'on demande !  On ne sait pas le risque qu'on prend ! On ne sait pas si nous en apprécierions les conséquences ! Et si Dieu nous prenait au mot ?
S'il fallait éradiquer toute violence, ne faudrait-il pas détruire toute vie sur terre, comme le récit du Déluge nous le rapporte ?  Et pas seulement les humains, les animaux aussi ! La loi de la nature est violente : manger ou être mangé. La nature si adorable que nous contemplons est aussi cruelle. Le coucou que nous aimons entendre chanter ne grandit qu'en chassant les oisillons du nid où il prend place. Et la guêpe qui pond ses œufs dans le corps d'une chenille qui va être dévorée de l'intérieur…
L'être humain — quel qu'il soit — a toujours une part d'ombre en lui-même. Cette part d'ombre est bien cachée par le vernis social, mais on a vu —pendant l'invasion américaine en Irak — les pillages des banques et des musées dès que le pouvoir s'est effondré.
Le récit du Déluge dans la Bible essaie de trouver une réponse à ce problème de la présence du mal dans le monde. Comment expliquer sa présence et que nous puissions malgré tout vivre avec ce mal ? Il est à remarquer que ce récit est le contraire d'un paradis perdu.
Le récit dit que nous vivons dans un deuxième temps de l'histoire et que le premier temps —antédiluvien, avant le Déluge — était un enfer de violence et de confusion. Un tel enfer de violence et de confusion que Dieu a décidé de l'anéantir et de donner la possibilité d'un nouveau départ. Ce récit du déluge est donc un texte pour les rescapés que nous sommes, depuis Noé.
Quelques mots sur la composition du texte du Déluge (Gn 6-9). Dans la Bible, ces 4 chapitres nous relatent deux récits du Déluge qui ont été entremêlés. Un texte ancien — celui qui est présenté plus haut — qui est de la même plume que Gn 2-3 l'histoire d'Adam et Eve, l'arbre et le serpent, Gn 4 Caïn et Abel et Gn 11, l'histoire de la tour de Babel. L'autre texte, qui date probablement de l'Exil, est de la même plume que le poème de la création de Gn 1 et les généalogies de Gn 5 et 10. Les deux récits du Déluge ont des accents théologiques différents. Aujourd'hui, je ne m'attache qu'au récit le plus ancien.
Dans ce récit, il est intéressant de voir les places et les rôles respectifs de Dieu et de Noé. Dans le début de notre texte, c'est Dieu qui est aux commandes. Il constate la domination du mal, il est attristé, il prend la décision double d'anéantir la vie sur terre et de sauver Noé, sa famille et les animaux. Dans ce récit, l'arche est déjà prête. Noé peut embarquer. Dernier geste de Dieu : il ferme la porte de l'arche. Noé est passif jusqu'à la fin des 40 jours du Déluge.
Après les 40 jours de décrue, Noé se met à agir en ouvrant la fenêtre et en procédant au lâcher des oiseaux. Puis il ôte le toit de l'arche pour faire sortir sa famille et les animaux. Enfin, il offre un sacrifice à Dieu. Ainsi, au fil du récit, Dieu laisse la place à l'être humain, il donne à l'être humain le pouvoir sur sa destinée et sa vie, il se fait moins intervenant. Cependant, Dieu n'abandonne pas Noé et les humains. A la suite du sacrifice de Noé, Dieu énonce sa promesse de maintenir les rythmes de la nature (l'arc-en-ciel et le thème de l'alliance appartiennent à l'autre récit). Voici la promesse de Dieu :
« Désormais je renonce à maudire le sol à cause de l'homme. C'est vrai, dès sa jeunesse l'homme n'a au cœur que de mauvais penchants. Mais je renonce désormais à détruire tout ce qui vit comme je viens de le faire. »
22 Tant que la terre durera,
semailles et moissons,
chaleur et froidure,
été et hiver,
jour et nuit
ne cesseront jamais. (Gn 8: 21b-22)
Ce qui est intéressant dans cette promesse, c'est que Dieu reconnaît que le mal persiste ! Le mal est inscrit dès le début au fond du cœur de l'être humain. Quel constat décevant. En quelque sorte, le Déluge a raté sa mission, cela n'a servi à rien. Quel gâchis !
Oui, l'être humain et les lois de la nature n'ont pas été changées, alors Dieu prend un décision incroyable, inouïe : il décide que — puisque l'être humain ne change pas malgré le châtiment — c'est lui Dieu qui va changer ! Dieu change de stratégie pour modifier sa relation à l'être humain, il renonce à détruire, il renonce à sa puissance, à sa force pour contraindre l'être humain au changement.
Dieu réalise : "on ne peut pas changer l'autre," aussi faut-il changer soi-même d'abord pour que la relation change. Alors Dieu change, il ne sera plus le maître et l'homme l'esclave. Dieu a choisi d'ouvrir la relation au partenariat. Plus fort encore, Dieu choisit la formule du mariage. Dieu renonce à l'obéissance et à la soumission de l'être humain, il veut un mariage d'amour.
Dieu engage — à la suite du Déluge — une entreprise de conquête amoureuse, une démarche de séduction. Cette conquête, il l'entreprend en prenant la décision d'aimer l'être humain tel qu'il est. Il décide de laisser exister l'être humain tel qu'il est et de l'aimer ainsi quelle que soit la route qu'il emprunte.
N'est-ce pas aussi le chemin que nous sommes invités à suivre : aimer les autres sans vouloir les changer ? C'est ainsi qu'Osée peut dire ces paroles de la part de Dieu envers son peuple :

"Israël, c'est pour toujours que je t'obtiendrai en mariage. Pour t'obtenir, je paierai le prix : la loyauté et la justice, l'amour et la tendresse." (Osée 2:21)
Oui, ce n'est pas le Déluge que Dieu nous envoie, mais une déclaration d'amour.
Amen

© 2007, Jean-Marie Thévoz

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