- Esaïe 43
23.11.2008
Dieu est prêt à tout pour nous sortir de notre détresse.
Es 43 : 1-4 Mt 13 : 44-46
Chères paroissiennes, chers paroissiens,
Comment être armés contre les épreuves qui nous tombent dessus ? "Un malheur est si vite arrivé" nous dit la sagesse populaire. Vous êtes nombreux aujourd'hui à ce culte à avoir vécu un deuil dernièrement, d'autres ont vécu des chagrins, des séparations, la perte d'un emploi, une désillusion ou des inquiétudes. Comment surmonter les épreuves ?
En disant cela — qu'on se comprenne bien — je ne dis pas qu'il faut tourner la page, passer par dessus la peine en quelques minutes. Je pense à la façon de vivre l'épreuve, la traverser, mais sans perdre espoir, sans se laisser submerger, anéantir, sans se voir perdre pied et tout abandonner.
Le prophète Esaïe nous donne quelques pistes dans le message qu'il adresse au peuple d'Israël. "Maintenant Israël, le Seigneur te dit…" (Es 43:1). Dans ce "maintenant" il y a la prise en compte de la situation réelle du peuple d'Israël lorsque le prophète parle. Dans ce "maintenant" le peuple est en exil à Babylone. Il a dû tout quitter : son pays, ses maisons, sa liberté, son autonomie. C'est dans cette situation de déracinement, de perte des repères que Dieu s'adresse à son peuple, celui qu'il a créé, celui qu'il a formé et il lui dit : "N'aie pas peur, je te libère, je t'ai appelé par ton nom, tu es à moi !"
Dieu rappelle qu'il est à l'origine, de la vie, de la création (Gn 1:1); qu'il est à l'origine de la vie de l'être humain, qu'il a formé à partir de la terre (Gn 2:7). Le Dieu de notre origine ne nous a pas oublié, il nous reconnaît, aussi bien dans le sens qu'il peut mettre un nom sur notre visage, qu'une reconnaissance de paternité : "Tu es à moi", tu viens de moi.
Dans notre exil, dans notre deuil, dans nos peines, nous ne sommes pas abandonnés à nous-mêmes, nous ne sommes pas délaissés, lâchés. Dieu est présence auprès de nous, de chacun d'entre nous. Et cette présence est assortie d'une promesse : "Quand tu traverseras l'eau profonde, je serai avec toi, quand tu passeras les fleuves, tu ne te noieras pas. Quand tu marcheras au milieu du feu, il ne te brûlera pas, les flammes ne te toucheront pas." (Es 43:2).
La vie n'est pas présentée comme un long fleuve tranquille. Oui, il y a des tempêtes, des abîmes, des traversées périlleuses, des enfers effrayants. Mais ces épreuves ne nous noieront pas, ne nous consumeront pas. Il est possible de les traverser et d'en émerger. Il est possible de les vivre et d'y survivre, plus même, de découvrir qu'on peut même en ressortir grandi, plus fort, même si cela apparaissait impossible au début du chemin.
Le prophète cite trois épreuves, les eaux profondes, les fleuves et le feu. A tout israélite, lecteur de la Torah, cela rappelle trois épisodes du cheminement des hébreux. Les eaux profondes rappellent la traversée de la Mer Rouge, qui a englouti les armées égyptiennes, première épreuve traversée avec succès par les hébreux. Le feu rappelle la révélation du Sinaï, épreuve initiatique, mais terrifiante. Les fleuves rappellent les traversées du Jourdain, une fois joyeusement pour entrer dans la terre promise, et une fois tristement pour partir en exil à Babylone.
Le prophète en appelle au souvenir des épreuves déjà traversées et surmontées pour affronter les épreuves du présent. Souvenons-nous comme nous avons été soutenus, accompagnés, relevés précédemment. Nous avons tous un bagage de confiance auquel nous pouvons revenir pour vivre la peine d'aujourd'hui.
Cette promesse de traversée est appuyée sur les secours reçus dans le passé. Elle est accompagnée d'une promesse d'avenir. Une promesse qui repose sur l'être de Dieu et sur les actions qu'il prépare. "Moi, le Seigneur, je suis ton Dieu. Moi, le Dieu saint d'Israël, je suis ton sauveur. Pour payer ta libération, je donne l'Egypte, je donne l'Ethiopie et Séba en échange de toi." (Es 43:3).
Dieu affirme que ce qu'il a fait lors de la sortie d'Egypte, l'Exode, il va le refaire pour sortir de Babylone. Il y aura une fin à l'Exil. Ce que Dieu a fait pour mettre un terme à l'esclavage en Egypte et à Babylone, il le renouvelle chaque fois que nous sommes éprouvés. Il vient à nous pour nous sauver de nos détresses.
Le prophète utilise ici l'image du rachat, de la rançon. Dieu est prêt à payer cher pour nous sortir des griffes du malheur. Pour le petit Israël, qui n'a même plus de terres, Dieu est prêt à donner des pays immenses, l'Egypte, l'Ethiopie et le royaume de la reine de Saba !
Cela donne un sens nouveau aux paraboles de Jésus. L'homme des paraboles, ce n'est pas nous qui devons nous efforcer de chercher le Royaume de Dieu et tout abandonner pour lui. Ces paraboles nous parlent de Dieu et de son attitude vis-à-vis de nous. Dieu est cet homme qui vend tout ce qu'il a pour acquérir le champ dans lequel il a repéré un trésor ou le marchand qui a déniché une perle incroyable.
Le trésor, la perle rarissime, c'est nous, dans notre détresse, dans notre chagrin. Dieu est décidé à tout troquer pour nous acquérir et nous ramener à la lumière.
Et la déclaration d'Esaïe se termine par un chant d'amour. "Oui, je tiens beaucoup à toi, tu es précieux et je t'aime. C'est pourquoi je donne des peuples à ta place, des êtres humains en échange de toi." (Es 43:4).
Dieu tient à nous comme à la prunelle de ses yeux, il est prêt à tout pour nous sortir de nos enlisements. Dieu nous repêche quand nous nous noyons dans nos larmes. Dieu nous guide sur le gué lorsque nous devons traverser des passages trop mouvementés dans nos existences. Dieu nous raffermit dans les moments où la douleur nous brûle.
Nous ne sommes pas seuls, Dieu nous tend les bras et nous secourt.
Amen
© Jean-Marie Thévoz, 2008