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  • Marc 15. La neutralité vis-à-vis de Jésus conduit à l'opposition à Jésus.

    Marc 15

    14.3.2010

    La neutralité vis-à-vis de Jésus conduit à l'opposition à Jésus.

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    1 Co 1 : 21-25    Mc 15 : 1-15

    Chers catéchumènes, chères paroissiennes, chers paroissiens,

    Le procès de Jésus, sa mise en accusation, son jugement, sa condamnation et son exécution, sont au cœur du christianisme. Si nous sommes chrétiens, c'est que nous croyons que cet homme, Jésus, condamné par tous et exécuté est bien le Christ, l'envoyé de Dieu, le révélateur de Dieu.

    Alors qu'est-ce qui se passe dans ce jugement, de procès qui est si important pour les chrétiens ? Si important, que la croix — un instrument de supplice — est devenu le signe du christianisme ?

    Nous allons accompagner Pilate dans son jugement, suivre son parcours pour comprendre ce qui arrive à Jésus et voir où nous nous situons dans ce parcours. Nous allons voir ce qui nous rapproche ou nous éloigne de Pilate.

    Pilate est appelé à juger une cause, un homme. Il n'a rien cherché, il est l'autorité suprême en tant que chef des romains à Jérusalem. Comme procurateur romain, il a seul le pouvoir de décider de la peine de mort C'est son boulot et il veut l'exercer au mieux.

    Ainsi donc, il entend ceux qui accusent et ensuite il interroge le prisonnier sur l'accusation qui est portée : "Es-tu le roi des juifs ?" (Mc 15:2). Je crois que c'est une question honnête de Pilate, une question factuelle. La réponse de Jésus n'est pas claire : "Tu le dis." Est-ce que c'est "Tu le dis, c'est juste" ou "Tu le dis, mais c'est faux" ? Ou encore : "Est-ce que c'est toi qui le dis ?"

    Alors Pilate se fâche devant ce silence de Jésus. Pilate se fâche parce qu'il a l'impression que Jésus ne voit pas tout le pouvoir que Pilate possède, un pouvoir de vie et de mort sur Jésus. Ce silence est une contestation du pouvoir de Pilate : une façon pour Jésus de dire : "Tu n'as aucun pouvoir, tu ne peux rien contre moi parce que j'ai déjà accepté de mourir, c'est moi qui ai déjà choisi et tu ne peux rien faire, ni me perdre, ni me sauver." Rien n'est plus vexant pour Pilate, lui le chef d'une province romaine !

    Mais Jésus reste toujours silencieux. Alors là, Pilate est vraiment ébranlé. Les traductions disent "étonné", mais c'est la même attitude décrite pour les gens qui sont étonnés, déconcertés, devant un miracle, devant quelque chose qui ébranle toutes nos certitudes, qui remet en cause tout ce qu'on a cru depuis toujours.

    Oui, Pilate est désarçonné devant cet accusé qui ne se défend pas, qui ne supplie pas, qui n'implore pas. C'est le monde à l'envers, Jésus est plein d'assurance et Pilate perd la sienne. Pilate perd pied et se demande comment sortir de cette situation. Une porte de sortie s'offre à lui avec la coutume de relâcher un prisonnier à Pâque.

    Pilate va proposer de relâcher Jésus plutôt que Barrabas, un meurtrier. Pilate entre dans un marchandage avec la foule : "Qui voulez-vous que je relâche ?" (Mc 15:9). Pilate croit garder le contrôle du pouvoir en proposant cet échange, mais en fait il est en train de donner son pouvoir à la foule. Pilate veut gouverner selon les sondages.

    Combien de fois agissons-nous aussi comme cela ? Que vont penser les autres si je dis cela ? Que vont penser les autres si je fais cela ? Mes amis, mes copains pensent cela, je ne vais pas dire le contraire, Suivons la mode, soyons tendances… suivons la foule.

    Alors Pilate fait son sondage pour se décider : "Que voulez-vous que je fasse de celui que vous appelez le roi des juifs ?" (Mc 15:12). Pilate a vraiment abdiqué. Il va se faire dicter sa conduite par la foule.

    De quoi dépend notre attitude face à Jésus ? Est-ce un choix personnel ou bien sommes-nous comme Pilate, dépendant de l'avis de la foule ?

    Jésus n'est pas à la mode. L'Eglise n'est pas tendance. Qu'est qui est tendance aujourd'hui ? Gagner des millions en écrasant les autres. Placer sa liberté avant celle des autres. Jouer à des jeux violents parce que c'est cool. S'éclater sans penser à l'avenir, sans penser à la planète. Alors : tous avec la foule, laissons tomber les responsabilités, replions-nous dans notre maison et que chacun se débrouille de son côté ? Et crions tous ensemble à Pilate ce qu'il doit faire : débarrasse-nous de ce Jésus, cloue-le sur une croix !

    Vous n'êtes pas tout à fait d'accord ? Ça vous gène un peu ? Je vous comprends, ça gène même un peu Pilate ! Oui, même Pilate trouve cela excessif. Il ne comprend pas les raisons de la foule, alors il leur demande quand même : "Qu'a-t-il fait de mal ?" (Mc 15:14). Pilate a un doute, plus qu'un doute. Pilate pense que Jésus est innocent de ce qu'on lui reproche. Pilate essaie de sauver Jésus. Pilate se rend compte de l'injustice qui se profile.

    Pilate essaie d'être neutre dans cette affaire. Il essaie de sauver Jésus, mais il ne peut pas prendre parti. Il ne veut pas risquer de contrarier la foule. Il ne peut pas risquer de se mettre le peuple à dos. Non, Pilate ne veut pas prendre de risque pour lui-même. Alors Pilate se soumet à la foule, il ne veut pas prendre le risque de s'engager pour Jésus. Il n'est pas contre Jésus, mais il ne veut pas s'engager pour lui, alors il l'abandonne à la mort.

    La neutralité vis-à-vis de Jésus conduit à l'opposition à Jésus. Ne rien faire, c'est faire quelque chose, laisser couler. Ne rien faire, c'est abandonner son pouvoir et sa liberté à la foule qui veut la mort de Jésus.

    Comme Pilate, plus que Pilate même, nous avons toutes les pièces en main pour juger Jésus et prendre parti. Sommes-nous avec lui ou contre lui ? Sommes-nous à ses côtés — avec les risques que cela comporte ? Sommes-nous à ses côtés pour lutter contre la violence aveugle, contre les violations des droits humains, contre l'exploitation, contre les injustices, contre la torture, contre la loi du plus fort.

    La croix au centre du christianisme, c'est ces luttes-là au sein de notre monde. Le procès de Jésus, c'est le rappel qu'on ne peut pas rester neutre — en dehors. On doit prendre parti, pour ou contre l'humanité qui souffre, pour ou contre l'individu condamné.

    Amen

  • Jean 1. "Voici l'agneau de Dieu qui ôte le péché du monde."

    7.3.2010

    "Voici l'agneau de Dieu qui ôte le péché du monde."

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    Esaïe 53 : 1-8, Apoc 7 : 9-12, Jn 1 : 23-29

    Chères paroissiennes, chers paroissiens,

    Le temps du Carême, temps de la Passion, est propice pour se redemander comment comprendre la mort annoncée de Jésus. Comment comprendre le parcours de Jésus, y compris sa mort ? Les évangiles et les lettres du Nouveau Testament nous proposent plusieurs interprétations, nous exposent plusieurs significations.

    L'évangéliste Jean nous propose de voir Jésus comme l'agneau de Dieu. Ce sont les mots qu'il met dans la bouche de Jean Baptiste : "Voici l'agneau de Dieu qui ôte le péché du monde" (Jn 1:29). Dans le récit de la Passion, l'évangéliste Jean associe la mort de Jésus au sacrifice de l'agneau de l'Exode. Enfin, l'Agneau est très présent dans l'Apocalypse, il règne en souverain auprès de Dieu.

    Dire de Jésus qu'il est l'agneau de Dieu permet de donner sens à la mort tragique de Jésus et permet de montrer comment la mort de Jésus ouvre au salut, offre une bénédiction à tous les humains.

    A. Dire que Jésus est l'agneau de Dieu, c'est associer Jésus à la Pâque juive, c'est faire un transfert de signification de l'un à l'autre. L'agneau pascal de la fête juive, c'est le rappel de l'Exode : un peuple en servitude va être libéré. Des êtres menacés de mort vont être sauvés. Le sang de l'agneau doit être badigeonné sur les montants et le linteau de la porte de la maison pour que la Mort passe son chemin.

    L'agneau doit être mangé — en famille — pour prendre des forces avant un voyage long et difficile qui doit mener en terre promise. Le sang et la chair de l'agneau donnent la vie, comme le corps et le sang du Christ consommés dans la Cène.

    Dans la fête de la Pâque, Dieu est encore en vis-à-vis des humains — en face, de l'autre côté de la barrière, à l'extérieur — mais il offre, à travers l'agneau, un moyen de protection, un élément protecteur.

    B. Lorsque Jean Baptiste dit de l'agneau de Dieu qu'il ôte le péché du monde, il fait référence aux poèmes du Serviteur souffrant qu'on trouve chez le prophète Esaïe : "Le serviteur a grandi comme une simple pousse, il était celui qu'on dédaigne, la victime, le souffre-douleur. Or il supportait le malheur qui aurait dû nous atteindre. Il a subi notre punition et nous sommes acquittés. Il s'est laissé maltraiter comme un agneau qu'on mène à l'abattoir." (Es 53:1-8 extraits).

    Le serviteur, l'agneau, est celui qui accepte de souffrir avec, qui souffre du malheur des autres, qui compatit. Même plus, il porte la douleur des autres, il accepte de se substituer aux autres. Il renonce à la force, à son droit, à la puissance. Il est celui qui chemine avec ceux qui souffrent, qui les accompagne sur leur chemin de douleur. Parfois il est celui qui se sacrifie pour leur éviter du mal. Combien de fois, comme parents, nous voudrions assumer ce rôle pour nos enfants, leur éviter les tourments et les malheurs. Nous pouvons les accompagner, être avec eux, plus rarement nous substituer.

    Jésus — comme l'agneau de Dieu — n'est plus dans le vis-à-vis, il est dans le compagnonnage, dans l'être-avec; Emmanuel, Dieu avec nous. Il chemine à nos côtés, nous accompagne et nous porte, sans que cela ne nous évite les écueils de la route. Mais nous ne sommes plus seuls sur notre chemin.

    Sur notre chemin terrestre, Jésus est à nos côtés; vers notre chemin céleste, Jésus se substitue à nous, il a endossé le poids de nos fautes et obtient pour nous l'acquittement pour tout ce qui nous accable et nous culpabilise.

    Pour nous suivre sur notre route terrestre, Jésus a renoncé à toute puissance divine, il a accepté notre impuissance humaine à changer les choses, à éviter le malheur et la mort. C'est en cela qu'il est un agneau et non un lion.

    C. Alors, il est bizarre de lire que l'Agneau de l'Apocalypse règne à la droite de Dieu et l'emporte sur tous les adversaires des humains ! Oui, dans l'Apocalypse, l'Agneau est un souverain, un juge qui réhabilite les victimes dans leur position, un maître qui efface les larmes et établit une terre nouvelle.

    Je crois qu'il y a, là, la révélation (c'est le sens du terme "Apocalypse" — en anglais ce livre s'appelle Revelation) d'un processus que nous pouvons aussi expérimenter. Jésus, comme agneau de Dieu, accepte l'impuissance de la condition humaine : nous pouvons certes faire beaucoup de choses, mais nous sommes impuissants à faire quoi que ce soit contre le malheur, le deuil, la mort. Nous sommes impuissants, nous n'avons pas de baguette magique.

    Mais si nous reconnaissons cette impuissance, si nous reconnaissons que nous ne pouvons rien faire, nous pouvons entrer dans une autre dimension, — quitter le pouvoir du faire quelque chose — pour entrer dans la dimension de l'être, de l'être avec les autres. Nous pouvons quitter l'illusion de la puissance pour accepter que nous ne pouvons qu'être-là, auprès de, à côté de, dans l'empathie, dans la compassion, dans l'accompagnement. Deux êtres qui partagent une même présence, une même souffrance.

    Je vous donne un exemple très concret. Il y a quelques années, la Gendarmerie vaudoise a réalisé que lorsqu'elle doit gérer un décès tragique, elle sait faire un tas de chose : sécuriser la place, appeler les secours, annoncer le décès. Mais une fois qu'il n'y a plus rien à faire et que le gendarme se retrouve face à quelqu'un qui pleure, il se sent impuissant. Alors la Gendarmerie a demandé de pouvoir passer le relais à un service des Eglises : l'assistance spirituelle d'urgence.

    Quand il n'y a plus rien à faire, il y a encore quelque chose qu'on peut faire : simplement être-là et accompagner la douleur, la souffrance du cœur. Simplement être en communion, en communion d'humanité.

    L'agneau de Dieu accepte cette impuissance pour réinvestir la puissance de l'être, l'être-là, l'être avec, l'être en communion. Reconnaître son impuissance à faire quelque chose, c'est se donner la possibilité de retrouver cette autre puissance, cette autre richesse que Dieu a placé au plus profond de chacun d'entre nous : être humain.

    L'agneau de Dieu nous précède, nous accompagne sur ce chemin-là.

    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2010

  • Jean 10. Cette parabole parle de notre combat pour garder la maîtrise de notre liberté.

    Jean 10

    28.2.2010

    Cette parabole parle de notre combat pour garder la maîtrise de notre liberté.

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    Jérémie 31 : 31-34 Jean 10 : 1-6

    Chères paroissiennes, chers paroissiens, chère famille,

    Nous avons entendu une parabole de Jésus qui parle de moutons et d'enclos. C'est plutôt loin de notre vie de citadin d'aujourd'hui ! Y a-t-il quand même quelque chose à comprendre là-dedans, surtout quand le narrateur ajoute — après le récit de Jésus — que les auditeurs de Jésus, à l'époque, n'ont rien compris non plus. Cette phrase est là pour nous alerter, nous inviter à chercher un sens caché.

    La parabole est l'image de quelque chose d'autre qu'une histoire de moutons. Et c'est vrai que Jésus ne nous donne pas un cours d'élevage, mais veut nous parler de Dieu, de nous-mêmes et de la relation entre Dieu et nous. Il faut donc transposer les images dans notre monde intérieur, dans notre réalité psychique.

    Commençons à penser : "Je suis l'enclos, je suis le gardien, je suis le troupeau…" Si je suis l'enclos, qu'est-ce que je comprends ? L'enclos est une frontière entre l'intérieur et l'extérieur, avec un contenu. Nous connaissons notre frontière physique : c'est notre peau. Une frontière psychique, psychologique est plus difficile à définir. Qu'est-ce qui contrôle ce qui entre et ce qui sort de notre tête, de notre cerveau, de notre âme ?

    C'est là qu'intervient le gardien. C'est lui qui ouvre la porte ou qui la ferme, qui laisse entrer ou sortir. Le gardien est notre libre-arbitre. Je choisis ce que je veux lire ou pas. Je choisis ce que je veux écouter ou pas. Je choisis ce que je veux regarder ou pas. Oui… en principe, je choisis ce que je veux, mais dans la réalité, c'est plus complexe.

    On s'aperçoit vite qu'il y a des choses qu'on aurait mieux fait de ne pas lire, de ne pas écouter de ne pas regarder. Il y a des choses qu'on nous refile, qu'on nous impose, qui nous agressent et qu'on n'a pas pu éviter. Il y a des choses qu'il n'a pas été possible de ne pas voir, de ne pas entendre, de ne pas subir.

    Souvent, trop souvent, le gardien est contourné, court-circuité, voire maîtrisé et ligoté. Voilà ce dont parle cette parabole, de notre combat pour garder la maîtrise de notre liberté. Nous sommes assiégés par des voleurs, par des brigands. Ce sont plus souvent des messages que des personnes.

    Ce sont des messages qui nous perturbent, qui nous agressent ou nous paralysent. "Tu devrais… Tu ne devrais pas… Il faut… Fais cela… Ne fais pas cela… Yaka… Taka… etc." Des voix intérieures qui répètent des messages enregistrés dès l'enfance qui coupent nos élans : "Tu n'y arriveras pas… Tu n'es bon/bonne à rien… Ça ne peut pas marcher… Tu finiras comme Untel… Débrouille-toi tout seul… On finit toujours par payer les moments de bonheur…"

    Ça fait déjà pas mal de messages; mais il y a encore une sorte de message plus retord — et je crois que Jésus dit cette parabole pour abattre, neutraliser le message suivant : "Dieu voit tout ce que tu fais, jusqu'au plus profond de toi, et il te punira…"

    Là, Jésus dit NON ! Le berger entre par la porte après que le gardien la lui a ouverte (Jn 10:2-3). Dieu n'entre pas par effraction. Dieu ne place pas une caméra de surveillance dans votre intimité. Dieu n'entre que là où on choisit de le laisser entrer. Dieu n'est pas dans la surveillance, dans l'espionnage, dans l'accusation. Il est le berger qui prend soin du troupeau et qui veut que les humains aient la vie et la vie en abondance (Jn 10:10).

    Le berger s'occupe du troupeau, au contraire des voleurs qui veulent s'en emparer et le disperser. Alors, qu'est-ce que ce troupeau de moutons et de chèvres dans notre monde intérieur ?

    Un troupeau, pour un propriétaire, c'est une richesse, c'est quelque chose de vivant, quelque chose qui nourrit, qui fait vivre. Le troupeau représente notre force de vie, notre élan, ce qui nous fait nous lever le matin et accomplir notre journée. Certains psychologues l'appellent notre "enfant intérieur" ou notre "enfant créateur", l'enfant en nous, un dynamisme, un ressort, l'énergie qui nous donne envie de dévorer la vie à pleines dents.

    La parabole nous dit que ce troupeau est dans l'enclos. Il nous est donné, il est là en nous, en chacun d'entre nous. Mais pour être créateur dans le monde, ce troupeau doit sortir dans le monde. On ne va pas tout garder à l'intérieur. Cette force créatrice, cet élan doit s'exprimer à l'extérieur.

    L'un des rôles du berger est de favoriser cette expression : "il mène le troupeau dehors" (Jn 10:3). Il y a de nouveau opposition entre le voleur et le berger. Le voleur vole notre énergie (repensez à ces phrases que j'ai citées et à celles que vous entendez dans vos têtes et qui vous paralysent en énumérant tous les obstacles). Le voleur nous épuise, nous disperse, nous pompe, nous met à plat.

    Le berger, lui, rassemble, réunit et conduit le troupeau, il le canalise pour qu'il puisse atteindre son but : avoir la vie en abondance, vivre le surplus de la vie. Tout cela en accord avec le gardien que nous sommes.

    Voilà la nouvelle alliance qu'annonçait le prophète Jérémie. Non pas une alliance comme un mariage arrangé, de convenance, mais une alliance comme un mariage d'amour où les partenaires se choisissent librement, pour partager leur amour et vivre avec tout le potentiel créateur qui les habitent. Voilà la vie possible avec Dieu pour berger.

    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2010

  • Marc 6. S'alléger pour marcher à la suite du Christ.

    Marc 6

    21.2.2010

    S'alléger pour marcher à la suite du Christ.

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    Luc 18:18-29, Mc 6 : 6-13

     

    Dans le film "Up in the air" on a pu voir George Clooney faire une conférence à des chefs d'entreprise, une conférence sur l'encombrement dans nos vies. Voici une partie de sa conférence :

    « Maintenant, on arrive au cœur du sujet, alors restez avec moi : Comment est votre vie ? Imaginez un instant que vous trimbalez avec vous un sac à dos. J'aimerais que vous le remplissiez de tout ce que vous avez dans vos vies. Commençons par les petites choses, ce que vous avez sur vos étagères, dans vos tiroirs, dans vos vide-poches. Ça y est ? Maintenant continuons avec des choses plus volumineuses : votre garde-robe, les appareils ménagers, ordinateurs et télévision.

    Le sac à dos commence à bien peser, non ? Allons encore plus loin : votre canapé, votre voiture, votre appartement ou votre villa. Oui, j'aimerais que vous bourriez tout cela dans votre sac à dos. Alors, regardez-le, soupesez-le… [...]

    Comment arrivez-vous à avancer dans la vie avec ça ? Plus lentement nous avançons, plus vite nous mourons. Ne vous détrompez pas : vivre… c'est avancer ! »

    La conférence (en anglais)

    Ça m'a fait réfléchir. De quoi sommes-nous encombrés ? Qu'est-ce qui nous empêche d'avancer dans la vie ? Je crois que c'est une bonne réflexion pour commencer ce temps de Carême qui nous mènera à Pâques. De quoi nos vies sont-elles encombrées ?

    Il y a les choses, les objets, le matériel. Comment pouvons-nous avancer avec tout ce que nous avons ? Combien sommes-nous à craindre d'avoir à déménager tellement nous possédons de choses ?

    Lorsque Jésus envoie ses disciples en mission, il leur recommande de ne pas s'encombrer de choses inutiles — en fait même de choses qui nous sembleraient indispensables ! Nous qui avons de la peine à tout mettre dans une seule valise lorsque nous partons pour 3 à 4 jours. « Ne prenez rien avec vous pour le voyage, sauf un bâton ; ne prenez pas de pain, ni de sac, ni d'argent dans votre poche. 9Mettez des sandales, mais n'emportez pas deux chemises. » (Mc 6:8-9)

    Et si nous essayions de nous alléger un peu pendant ce temps du Carême ? Pas par pénitence, pas parce qu'il faut donner, pas parce que d'autres sont pauvres, simplement pour nous sentir plus légers, plus libres. Alléger le sac à dos, alléger notre hotte, la maison que nous portons sur le dos, simplement pour avancer, pour se sentir mieux.

    Oh là là, je sens que cela réveille des peurs au-dedans de nous, en tout cas chez moi c'est le cas. Il y a au dedans de nous une peur de manquer, de ne pas avoir assez, maintenant ou plus tard. Peur de manquer, peur de ne pas recevoir si l'on vient à manquer. Ne sommes-nous pas victimes d'un effet miroir ? Je donne si peu à ceux qui manquent que le miroir me dit que je recevrai peu si je viens à manquer, alors j'accumule pour ne pas manquer et continue à moins donner… C'est le cercle vicieux de notre société du chacun pour soi.

    Jésus invite ses disciples à partir légers et à faire confiance dans la générosité de ceux qui vont les accueillir. Faire confiance… on retombe toujours là-dessus. Faire confiance et partager. Faire confiance et accepter qu'on nous donne…

    Vous avez remarqué qu'il est bien plus difficile de recevoir que de donner ! Donner, ça nous met en position de force, de dominant. Recevoir, ça nous met en position de faiblesse d'humilité, parfois même d'humiliation : "j'ai dû demander et j'ai eu honte…"

    Jésus dit à ses disciples d'accepter l'hospitalité qui leur est offerte. Ce n'est pas une honte, cela ressemble plutôt à un cadeau que les disciples font à leurs hôtes. C'est paradoxal. C'est offrir l'occasion de donner, c'est enrichir celui qui vous reçoit. C'est ce qu'on peut comprendre de la phrase sur ceux qui refusent l'hospitalité : « Si les habitants d'une localité refusent de vous accueillir ou de vous écouter, partez de là et secouez la poussière de vos pieds : ce sera un avertissement pour eux. » (Mc 6:11)

    Ils ont manqué l'occasion de faire une bonne action, manqué l'occasion de s'enrichir en donnant.

    Dans la durée d'une existence, nous recevons pendant notre enfance et nous risquons de devenir dépendant pendant notre vieillesse. Ne ressentons pas cela comme honteux. C'est l'occasion pour les autres de donner, d'aider, de faire du bien et ainsi de découvrir — en eux et pour eux-mêmes — la joie du don.

    Comment est notre vie ? Comment, de quoi est rempli notre sac à dos ? Qu'avons-nous à lâcher, à déposer au bord du chemin pour nous sentir plus légers, pour avancer plus facilement ? Qu'avons-nous dans notre sac à dos qui nous entrave, qui nous retient d'aller vers les autres ? Qu'avons-nous dans nos vies qui nous empêche d'avancer ?

    Lorsque Jésus invite ses disciples à partir léger, ce n'est pas une épreuve, ce n'est pas une punition. Lorsque Jésus invite l'homme riche à tout vendre, ce n'est pas pour le brimer, pour le priver, pour l'asservir. Au contraire — de la part de Jésus — c'est une invitation à la vie, à la liberté, au mouvement.

    Le temps du Carême n'est pas un chemin de tristesse, de renoncement, de flagellation, c'est un temps de renouvellement, de rénovation où l'on peut chercher à se débarrasser de ce qui nous ternit, de ce qui nous encombre, de ce qui nous retient sur le chemin de la vie, de la lumière et de la joie, chemin que Jésus ouvre devant nous.

    Allant de l'avant, sans argent ni bagages, les disciples ont rencontré des gens et ont pu leur apporter réconfort, libération et guérison. Regardons bien notre sac à dos et voyons comment l'alléger pour marcher dans les pas du Christ jusqu'à Pâques.

    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2010