Jean 2
13.1.2002
A Cana, Jésus opère trois changements fondamentaux
Esaïe 62 : 1-5 2 Pierre 1 : 2-8 Jean 2 : 1-11
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Chers amis,
Après Noël où nous avons fêté la naissance de Jésus, après l'épiphanie où nous nous sommes rappelés les rois mages, nous faisons un grand saut dans le temps pour retrouver Jésus au début de son ministère.
Jésus a 30 ou 33 ans et — il ne le sait pas encore — il a trois ans à vivre devant lui, pendant lesquels il va réaliser l'entier de sa mission. Une mission d'enseignement, une mission de guérison, une mission de révélation du visage de Dieu.
En seulement trois ans, Jésus va révolutionner le regard de l'humanité sur Dieu et changer toute l'histoire humaine puisque nous sommes ici, 2000 ans plus tard, à continuer à chercher à comprendre, à saisir toute la richesse qu'il y a en lui et à vivre des paroles qu'il a prononcées et des gestes qu'il a faits.
Aujourd'hui, nous nous penchons sur le premier signe de Jésus que l'évangéliste Jean nous a transmis, celui des Noces de Cana. Ce miracle est un peu embarrassant pour nous, car il ressemble vraiment à un acte de magicien ! Jean veut-il nous présenter Jésus comme un magicien, comme quelqu'un qui est capable des tours de passe-passe les plus réussis ? Croire parce que le tour a réussi, c'est plus être crédule qu'avoir la foi !
Je pense qu'il faut laisser tomber l'idée que l'accent est mis sur le côté miraculeux pour voir l'aspect signe, significatif. D'ailleurs Jean ne parle pas du premier miracle de Jésus, mais de son premier signe, de son premier geste significatif. Ce geste a pour but de mener ses disciples à croire, à avoir la foi, en effet, le récit de Jean se termine par ces mots :
"Voilà le premier signe de Jésus. Il manifesta sa gloire et ses disciples crurent en lui." (Jn 2:11)
Pourquoi les disciples se mettent-ils à croire en Jésus ? D'abord "croire en Jésus" signifie reconnaître la gloire de Dieu qui se manifeste en Jésus, voir au travers des actes, des paroles, du visage de Jésus, les actes, les paroles et le visage de Dieu lui-même.
En quoi les disciples — nous-mêmes — pouvons-nous reconnaître la présence de Dieu dans ce premier signe de Jésus ? Dans ce signe, Jésus fait trois choses, il opère trois changements fondamentaux :
1) Il transforme de l'eau en vin (c'est le plus évident)
2) l transforme les bassins de purification en tonneaux — il faudra voir ce que cela signifie !
3) Il renverse l'ordre des choses en faisant servir le bon vin après le moins bon.
Reprenons ces trois changements.
1) Jésus change de l'eau en vin. Faire cela comme premier signe, c'est annoncer la couleur de tout son ministère : ce sera une mission de changement, de transformation profonde et cela indique aussi le sens, la direction des transformations en vue. Ce qui est insipide, inodore et incolore, ce qui est commun, ordinaire et sans saveur va être transformé en extra-ordinaire, en fête, en joie.
Jésus nous dit que Dieu veut transformer le banal de nos vies en y insufflant de la joie et du bonheur. Lorsque notre vie et notre propre joie viennent à manquer, Dieu vient nous ranimer, nous remettre debout, remettre de la couleur et de l'abondance dans nos vies.
2) Ensuite, Jésus transforme l'usage des bassins de pierre dans lesquels les juifs effectuaient leurs rites de purification. Qui dit purification, besoin de purification, dit qu'il y a des choses à laver, à nettoyer pour se sentir propre devant Dieu.
L'usage des bassins de purification illustre une attitude face à Dieu : le fait de se sentir sale devant lui et surtout l'idée que par nos propres efforts nous allons pouvoir nous rendre présentables devant Dieu. Que nous allons pouvoir plaire à Dieu, que nous allons pouvoir être à la hauteur de ce que nous pensons qu'il attend de nous !
Mais qui — en étant honnête avec soi-même — peut penser arriver à se montrer parfait face à Dieu ? Qui peut penser être sans tache, sans faute, sans ombre devant Lui ? C'est un effort sans fin et sans aucune garantie de succès. C'est un travail désespérant et ... désespéré.
En transformant ces bassins en tonneaux où l'on vient puiser le vin, Jésus supprime toute idée de purification par nos propres moyens. L'attitude juste devant Dieu, c'est d'accepter que nous ne pouvons rien faire par nous-mêmes, seulement venir puiser la vie à sa source, accepter de la recevoir comme ce vin puisé dans ces bassins.
Ces bassins deviennent des fontaines de vie, un lieu où l'on vient s'abreuver, recevoir de quoi étancher sa soif, recevoir ce qui va remplir notre vie de joie et de satisfaction.
3) Enfin, troisième changement, Jésus a renversé l'ordre humain des choses qui veut que l'on serve les bonnes choses, le bon vin, au début, parce que tout se dégrade avec le temps, à commencer par nos facultés d'apprécier la vie. Là encore, Jésus veut nous parler de notre rapport à Dieu. Jésus renverse l'ordre de la religion.
L'ordre humain veut que nous nous efforcions de plaire à Dieu, d'essayer de monter jusqu'à lui. L'ordre de Dieu, le père de Jésus-Christ et notre Père, c'est que c'est lui qui vint à nous, c'est lui qui prend l'initiative. Et son initiative, c'est de nous réhabiliter, de nous purifier lui-même, de nous rendre juste pour que nous puissions répondre par des comportements justes à l'égard de notre prochain.
C'est Dieu lui-même qui prend l'initiative de ne pas compter nos fautes, de ne pas tenir compte de ce que nous lui devons. C'est lui qui prend l'initiative de venir chez nous, pourvu que nous lui ouvrions la porte, parce qu'il ne veut pas entrer par effraction.
A nous d'inviter Jésus à entrer dans nos vies — comme les mariés de Cana l'ont invité — pour qu'il vienne transformer l'eau de nos existences en vin de joie et de fête.
Amen
© Jean-Marie Thévoz, 2013