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  • Je t'ai vu quand tu étais sous le figuier

    Jean 1

    25.6.2017

    Je t'ai vu quand tu étais sous le figuier

    Genèse 3 : 1-8       Jean 1 : 43-50

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    Chers frères et soeurs en Christ,

    "Je t'ai vu quand tu étais sous le figuier !" dit Jésus à Nathanaël. Voilà la phrase qui bouleverse Nathanaël. Voilà la phrase qui change sa vie, qui le fait découvrir Jésus, qui lui fait reconnaître l'être divin en Jésus. "Je t'ai vu quand tu étais sous le figuier !" Qu'y a-t-il là de bouleversant, d'extraordinaire pour que cela décide Nathanaël à tout abandonner pour suivre Jésus ? Pourquoi cette parole est-elle décisive ?

    Une interprétation rabbinique nous dit que "être sous le figuier" c'est étudier la Torah, l'Ecriture. Il n'y a pas de doute que Nathanaël devait connaître les Ecritures. Son ami Philippe — pour lui présenter Jésus — lui dit avoir "trouvé celui dont Moïse a parlé dans le livre de la Loi et dont les prophètes ont aussi parlé" (Jn 1:45). Et quand Philippe lui dit que Jésus vient de Nazareth, il s'étonne — sceptique — "peut-il venir quelque chose de bon de Nazareth ?" (Jn 1:46) puisque Nazareth n'est jamais mentionnée dans l'Ancien Testament.

    Certainement, Nathanaël a étudié la Bible, "il a été sous le figuier," mais cela ne suffit pas pour lui faire reconnaître Jésus comme le Messie. Heureusement, Philippe l'invite à venir voir par lui-même : "Viens et vois !" Et c'est en venant, en rencontrant Jésus qu'il va entendre cette parole qui l'interpelle : "Je t'ai vu sous le figuier !"

    Dans l'Ancien Testament, le figuier (souvent avec la vigne) est évoqué comme signe de sécurité, d'un pays en paix (1 R 4:25; 2 R 8:31; Mi 4:4). La menace, c'est d'être privé de son figuier et de sa vigne, par la destruction ou la nécessité de fuir sa maison ou son pays (Jér 5:17; Os 1:12; Jl 1:7). Il semble que chaque habitant pouvait avoir un figuier et quelques plants de vigne dans son jardin. C'est là qu'on exerce l'hospitalité envers ses voisins et ses amis (Za 3:10). Viens boire un verre chez moi, sous la tonnelle, dit-on chez nous. Viens boire un verre sous mon figuier devait-on dire en Israël.

    Le figuier évoque donc le jardin de sa maison, le chez soi, l'aspect de la vie privée, son jardin secret. Lorsque Jésus dit à Nathanaël qu'il l'a "vu sous le figuier" il semble que Nathanaël comprend que Jésus l'a vu alors qu'il pensait ne pas être vu. Jésus a vu en lui quelque chose de personnel, quelque chose que Nathanaël porte en lui, sans le révéler à personne, mais que Jésus a découvert et lui révèle en retour. C'est à mettre en parallèle avec le récit de la Samaritaine lorsqu'elle dit de Jésus : "Il m'a dit tout ce que j'ai fait" (Jean 4:39). Jésus voit ce qu'il y a dans le cœur de Nathanaël.

    Cela paraît extrêmement menaçant, non ? N'avons-nous pas tous quelque chose à cacher au fond de nous-mêmes ? Mais il ne faut pas oublier que Jésus a abordé Nathanaël en lui disant ces mots : "Voici un véritable Israélite, il n'y a rien de faux en lui !" (Jn 1:47) Ouf pour Nathanaël, il semble qu'il n'y avait rien de noir en lui, mais en nous ? Nous qui nous connaissons de l'intérieur, n'avons-nous pas à trembler d'être percé à jour par Jésus ? C'est là qu'il faut revenir au premier emploi du figuier dans la Bible.

    Adam et Eve, découvrant leur vulnérabilité fondamentale après avoir goûté du fruit défendu dans le jardin d'Eden, s'habillent avec des feuilles de figuier. "Je t'ai vu sous le figuier !" pourrait aussi vouloir dire : "Je vois en toi se refléter Adam dans son égarement, le vieil homme peureux, honteux et gêné." C'est comme si Nathanaël entendait Jésus lui dire : "Je reprends avec toi l'histoire de l'humanité exactement là où elle avait déraillé."

    Jésus ne vient pas accabler Nathanaël, Jésus ne vient pas nous accabler avec son regard sur nos vies, non, comme Jean Baptiste l'a proclamé : "Jésus est l'agneau de Dieu qui ôte le péché du monde" (Jn 1:29).Si Jésus nous voit "sous le figuier" c'est-à-dire dans notre condition de vulnérabilité, de fragilité humaine, avec nos zones d'ombre et nos fautes, c'est pour nous sortir de là. Il vient à nous avec sa compréhension fondamentale de notre parcours de vie : y mettre sa lumière pour panser nos plaies, pour soigner ce qui nous fait mal, pour nous sortir de notre misère.

    Lorsque Nathanaël entend Jésus lui dire : "Je t'ai vu sous le figuier !" Nathanaël se sent compris. Il se sent compris et accepté jusqu'au fond de lui-même. Il se sent relevé. Il doit se dire : "je me sens remplis de fautes, mais il n'en tient pas compte, il ne tient compte que de mes efforts à être droit, il ôte mon péché, il me soulage de mes poids.

    Il me connaît jusqu'au fond de moi-même — même ce que je ne voudrais avouer à personne — mais il ne me le fait pas peser, il m'en délivre, alors je peux marcher avec lui, le suivre partout où il m'entraînera." Nathanaël peut mettre sa confiance en Jésus. Jésus l'a accepté tel qu'il est, il reçoit sa foi et il promet à Nathanaël de confirmer, d'affermir sa foi : il va découvrir de plus grandes choses encore. Jésus inaugure la nouvelle création, fondée sur le pardon (le pardon originel, comme le dit Lytta Basset) et l'amour infini de Dieu. Une création qui commence au cœur de chacun d'entre nous quand nous acceptons que Jésus nous voit sous notre figuier.

    Amen

     

    © Jean-Marie Thévoz, 2017

  • Un programme de transformations

    Jean 2

    18.6.2017

    Un programme de transformations

    1 Corinthiens 3 : 5-11     Jean 2 : 13-22

    Message pour les enfants

    Pour le message de ce matin, j’ai choisi l’épisode de la vie de Jésus où il chasse les marchands du Temple. Dans le Temple, il y avait des animaux à vendre pour les sacrifices. Cela n’a pas plu à Jésus. Il a pris des cordes ce qui se trouvaient là. Il en a fait un fouet et a chassé les bœufs, les moutons et les chèvres et demandé aux vendeurs de colombes de partir. Jésus voulait faire cesser les sacrifices d’animaux. Savez-vous à quoi sert un sacrifice ? Vous est-il arrivé de faire un vœu ; j’entends un vœu sérieux après une bêtise ou un malheur ? Quand j’étais petit, lors d’une balade en forêt, j’avais posé ma veste pour construire une cabane. Et en repartant j’avais oublié de reprendre ma veste. Quand je m’en suis aperçu, j’avais peur de devoir dire à ma mère que j’avais perdu ma veste. Alors j’ai fait un vœu : si je retrouve ma veste alors je donnerais ma voiture préférée à mon frère.

    L’idée c’est d’accepter de perdre quelque chose qui nous est précieux pour éviter un plus grand malheur. Mais si on applique cela à Dieu, c’est qu’on pense que Dieu va nous envoyer des malheurs si on ne lui sacrifie pas quelque chose (et au Temple, c’était des animaux de son troupeau). Cela suppose un Dieu méchant et un homme rusé qui peut tromper Dieu en lui disant : « je te donne un animal, ne me prend pas la vie.» Mais Dieu n’est pas comme cela, et Jésus le sait. Dieu n’a pas besoin de sacrifices, il n’a pas besoin de violence pour nous aimer. Dieu n’aime pas la violence, Dieu n’aime pas la mort, même pas la mort des animaux, Dieu aime la vie. Et depuis Jésus, il n’y a plus de sacrifices d’animaux. On a compris que Dieu n’aimait pas ça. Dieu aime la vie !

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  • Le miracle éblouit, il risque donc d’aveugler.

    Jean 2

    11.6.2017

    Le miracle éblouit, il risque donc d’aveugler.

     

    1 Rois 17 : 5-16    Jean 2 : 1-11

     

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    Chers frères et sœur en Christ,

    Avec les noces de Cana, l’Évangile selon Jean présente le premier miracle de Jésus. Jean n’a pas choisi ce récit au hasard pour le placer là. Le miracle de l’eau changée en vin annonce le programme de l’action de Jésus, annonce le sens de sa mission dans le monde. Jean l’explicite par le verset explicatif — un commentaire pour le lecteur— à la fin du récit : « Tel fut à Cana de Galilée, le premier signe de Jésus. Il manifesta sa gloire et ses disciples crurent en lui. » (Jn 2:11)

    Trois choses sont dites : Jésus commence son œuvre par un signe (Jean n’utilise en fait pas le terme habituel de « miracle » utilisés par les autres évangiles). L’accent n’est pas sur la réalité transformée ou les lois naturelles transgressées, mais sur la signification du geste, sur le sens de l’action de Jésus.

    Donc premièrement un signe, deuxièmement le signe révèle la gloire de Jésus, troisièmement cela a pour but de susciter la foi des disciples. Le signe qui révèle la gloire de Jésus comporte trois aspects. D’abord il a lieu lors d’une noce, d’une fête de mariage. Pour tout lecteur de l’Ancien Testament, le mariage est une image symbolique de l’alliance d’amour que Dieu propose à son peuple. Le prophète Osée est celui qui a poussé le plus loin cette image. Dieu souhaite re-séduire la fiancée qui l’a quitté.

    Ensuite Jésus transforme de l’eau en vin — c’est à dire quelque chose d’absolument ordinaire — en boisson de fête, qui sème la joie, l’ivresse, qui fait oublier les soucis. Le vin a aussi une dimension messianique. C’est la boisson que Dieu offre pour le banquet du retour d’Exil ou de la fin des temps (Esaïe 25:6).

    Enfin, les quantités suggérées par les vasques de pierre et la qualité du vin — meilleur que le premier vin servi— montre que l’abondance, la prodigalité, la plénitude vient abolir le manque, la pénurie, la disette. Cela s’était déjà passé pour Élie et la veuve (1 Rois 17:16), c’est maintenant le programme de Jésus pour la multitude.

    Jésus manifeste donc sa gloire par ce signe éclatant ! Mais quelle gloire est manifestée ? Le risque du miracle, c’est d’attirer par le côté spectaculaire ou de rebuter par le côté incroyable. Nombre de nos contemporains rejettent les évangiles à cause des miracles incompréhensibles qui s’y trouvent racontés. Le miracle éblouit, il risque donc d’aveugler.

    L’évangéliste Jean est conscient de ce risque, il le mentionne après la multiplication des pains : « Vous me cherchez parce que vous avez eu beaucoup de pain, non pas parce que vous avez saisi le sens de mes signes. » (Jn 6:26) Le miracle, tout seul, est donc ambigu. Il peut fourvoyer, il peut conduire à une fausse image de Jésus.

    Il y a le miracle et il y a le signe. L’évangéliste Jean veut nous aider à mettre le miracle au second plan pour mettre le signe en évidence, au premier plan. Il le fait en construisant le récit comme sur deux plans. Il y a d’un côté la scène — comme celle d’un théâtre — ou se déroule le récit, où parlent et se déplacent les personnages. Ce sont les planches du théâtre. Et il y a les lecteurs de l’Évangile — comme les spectateurs dans les fauteuils du théâtre — auquel évangéliste parle : il situe la scène « Trois jours plus tard… à Cana ». Et à qui il dit « Voici le premier signe de Jésus pour révéler sa gloire, et ses disciples crurent en lui. ».

    Maintenant que nous avons séparé ces deux plans, nous pouvons voir que les acteurs sur les planches, ne voient pas le miracle ! Le majordome interroge le marié sur la provenance du vin et lui dit son incompréhension que n’ait pas été respectée la règle habituelle de servir le meilleur vin en premier. Le miracle n’est donc pas pour la noce ! C’est un signe pour les lecteurs–spectateurs, pour nous ! La matérialité du miracle n’a aucune importance — ce vin ne sera jamais servi à nous les disciples. Mais nous sommes invités par l’évangéliste Jean a passer du matériel au spirituel. À comprendre que la gloire de Jésus n’est pas dans les exploits matériels, mais dans le mystère de son lien avec Dieu.

    Le miracle de Cana n’est pas dans le vin nouveau, mais dans le signe que Dieu est capable de tout transformer. Le vin nouveau de Cana a été bu. Il nous reste le signe, le programme de Jésus : il est venu pour transformer nos vies ordinaires — ordinaires comme l’eau du puits ou du robinet — en un vin de fête. Il est venu pour transformer nos manques et nos pénuries en moments d’abondance et de plénitude.

    Pour comprendre cela, nous devons changer de plan, de niveau. Le miracle de Jésus sur le plan matériel est le signe d’une autre réalité : relationnelle et spirituelle.

    Oui, au niveau matériel le manque et la pénurie existent. Ce n’est pas drôle, c’est dur, cela fait souffrir. Mais ce n’est pas une raison d’appliquer cette économie au monde relationnel et spirituel. L’amour et les relations n’obéissent pas aux mêmes règles que l’économie de l’argent. L’amour partagé se multiplie. L’amour donné renaît et croît d’autant plus.

    Le programme de Jésus signifié dans ce signe de Cana, c’est que la vie, relationnelle et spirituelle, nous est offerte en abondance. C’est ce que l’Évangile selon Jean appelle la « vie éternelle », c’est-à-dire la vie en plénitude, la vie en abondance (Jn 10:10).

    Cet amour en abondance — illimité et inconditionnel — Jésus va l’accomplir dans sa Passion, sur la croix, où sa gloire sera définitivement révélée. Une gloire paradoxale évidemment, puisque ce n’est pas le Messie glorieux et militairement vainqueur. Mais un Messie qui passe incognito dans le monde, à l’image du vin de Cana dont personne ne connaît la provenance (à part les serviteurs qui représentent les disciples, les lecteurs de l’Évangile). C’est ainsi que seuls ceux qui servent Jésus et entendent la voix de l’évangéliste arrivent à décoder le signe derrière le vin nouveau, la victoire derrière la croix, la gloire derrière le don de sa vie.

    C’est ainsi que Jean développe et fait croître la foi des disciples, notre foi, en révélant un Jésus que ses contemporains directs n’arrivaient pas à voir sur le moment. Aujourd’hui, nous sommes des privilégiés de pouvoir lire et comprendre l’évangile, de pouvoir voir la vraie gloire de Jésus au-delà des apparences, de pouvoir grandir dans la foi, foi que l’amour est abondant, qu’il nous est donné sans limite et que nous pouvons le partager comme un vin de fête sans peur d’en manquer jamais.

    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2017