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  • Luc 2. Noël, c'est Dieu auprès de nous : Emmanuel !

    25.12.2009

    Noël, c'est Dieu auprès de nous : Emmanuel !

    Luc 2 : 1-20

    Chères paroissiennes, Chers paroissiens,

    Qu'est-ce que Noël nous dit de la présence de Dieu dans le monde ?

    Nous avons toutes les raisons d'être découragés, démotivés, lorsqu'on voit le monde autour de nous. Tout ne va-t-il pas de plus en plus mal ? Ne nous demandons-nous pas, avec l'ensemble de nos contemporains : mais où est Dieu, que fait-il, nous a-t-il abandonnés ?

    Je crois que nous rêvons encore à un Dieu Père Noël, qui nous donne les cadeaux que nous avons commandé, qui soit partout au même moment à réaliser nos rêves. Nous rêvons encore d'un Dieu tout-puissant qui nous remplace dans nos tâches et nos devoirs. Pourtant, à Noël, Dieu se présente justement autrement. Il n'est plus le Dieu de l'Histoire et des pouvoirs. Il est un Dieu humble et sans pouvoir, juste présent dans notre monde à nous, juste présent avec nous, à nos côtés, dans l'impuissance du bouleversement des situations. Il se glisse dans les interstices de l'Histoire, pour nous rejoindre dans l'intimité de nos relations. Alors j'ai cherché dans mon environnement, dans ce que je vis, où Dieu se refuse et où il se révèle comme Emmanuel, Dieu avec nous.

    J'ai parcouru les rues de Lausanne et de Bussigny, j'y ai vu des décorations brillantes et des lumières étincelantes pour faire ambiance de Noël, mais je n'ai pas vu Dieu.

    J'ai lu les journaux avec impatience relater la rencontre des grands à Copenhague, j'ai attendu des décisions pour sauver notre planète, mais je n'y ai pas vu Dieu.

    J'ai regardé le film du dimanche soir, je me suis distrait, mais je n'ai pas vu Dieu.

    J'ai vu une grand-maman prendre dans ses bras son petit-fils, pour le soulager de son chagrin, Emmanuel !

    Je vois des bergers s'agenouiller devant un bébé couché dans une crèche et s'émerveiller, Emmanuel !

    J'ai visité des cathédrales, des abbayes magnifiques, même des mosquées à l'architecture impressionnante, mais je n'ai pas vu Dieu.

    J'ai lu que l'empereur Auguste avait donné l'ordre de recenser tous les habitants de l'empire romain, mais je n'y ai pas vu Dieu.

    J'ai vu des hommes et des femmes se réunir dans un salon et prier les uns pour les autres, Emmanuel !

    J'ai vu une mère relever son enfant et souffler sur son genou avec tendresse, Emmanuel !

    Je vois une communauté d'hommes et de femmes se rassembler dimanche après dimanche dans son lieu de culte, malgré les sarcasmes sur les Eglises vides, Emmanuel !

    J'ai vu tomber le mur de Berlin (dans mon fauteuil) puis commémorer les 20 ans de cette chute et je me suis demandé…, mais je n'y ai pas vu Dieu.

    Je vois les chefs d'Etats se rassembler, G7, G20, pour faire des promesses d'améliorer le monde, sans rien perdre de leurs profits, mais je doute d'y voir Dieu.

    J'ai vu un homme pleurer du fond de sa détresse et déposer une fleur sur la tombe de son épouse, Emmanuel !

    Je vois des jeunes s'exercer ensemble à la foi, au chant et à la prière, Emmanuel !

    J'ai lu qu'un lépreux guéri était retourné dire merci pour sa guérison, Emmanuel !

    Des mages sont allés au Palais d'Hérode pour y chercher le roi des juifs qui devait naître, mais ils n'y ont pas trouvé Dieu.

    Je connais quelques personnes qui vont voir des résidents en EMS, bien après avoir perdu le proche qui s'y trouvait, juste pour y apporter un peu de chaleur, Emmanuel !

    J'ai vu des mages apporter des présents dans une étable, sur la foi de quelques lignes de l'Ecriture sainte, Emmanuel !

    Je vois des femmes faire des cakes et des gâteaux pour le marché missionnaire, un apéritif ou la fête paroissiale, Emmanuel !

    Je vois des hommes et des femmes se rassembler pour partager le pain et le vin et créer une communauté, par delà leurs différences, Emmanuel !

    Je vois que l'esprit de Noël vit encore. Que Dieu nous ouvre les yeux pour le voir chaque jour à nos côtés. Joyeux Noël, Dieu avec nous, Emmanuel !

    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2010

  • Luc 12. Allumer le feu de l'amour pour remplacer le monde ancien par un monde nouveau.

    Luc 12

    31.5.2009
    Allumer le feu de l'amour pour remplacer le monde ancien par un monde nouveau.
    Gn 2 : 4b-8    Ac 2 : 1-4    Lc 12 : 49-50

    Chères paroissiennes, chers paroissiens, chères familles,
    La Pentecôte marque dans le parcours des Evangiles un aboutissement. Après le départ de Jésus — à l'Ascension — les disciples reçoivent l'Esprit de Dieu pour être, en eux, la présence de Jésus pour les guider dans leur nouvelle vie.
    Mais la Pentecôte n'est pas seulement — même si c'est déjà beaucoup — un événement pour les disciples, pour les croyants, pour les chrétiens. Je crois que la Pentecôte est l'aboutissement, l'achèvement, l'accomplissement de l'œuvre créatrice de Dieu. La Pentecôte est l'achèvement de la création voulue par Dieu, pas seulement pour les croyants, mais pour tous les humains, pour toute l'humanité. La création n'est pas un projet pour les seuls croyants, mais l'aventure dans laquelle est embarquée toute l'humanité et toute la terre.
    L'être humain ne naît pas achevé, accompli. L'être humain vient à la vie, tout petit, dépendant, vulnérable, mais en même temps avec un infini de possibilités. L'être humain est un être en développement, en devenir, et le temps de notre existence nous est donné pour accomplir notre développement, notre vocation.
    La Bible en parle en images à décrypter, elle nous signale des étapes, des passages, des perspectives. Dans un des récits de création, on entend que Dieu fait l'être humain — Adam — à partir de la terre en façonnant de la poussière, puis en lui insufflant l'haleine de vie (Gn 2:7).
    (1) Premier élément : la terre, ce qui fait que nous sommes des terriens, des êtres liés à notre planète. Nous avons un corps, nous sommes un corps et notre société insiste beaucoup pour que nous nous occupions de cette partie de nous-mêmes ! Il faut se nourrir et bien. Il faut l'entretenir (sport), il faut l'embellir (il y a quantité de produit qu'on veut nous vendre pour cela), il faut le soigner, le satisfaire, etc… Mais nous ne sommes pas que de la chair.
    (2) Nous sommes animés par cette haleine de vie que Dieu nous a insufflé. On pourrait dire que ce sont nos émotions qui nous font nous sentir vivants : la joie et la tristesse, la peur ou la colère, l'envie ou la satisfaction. Cela nous anime, cela nous meut, parfois cela nous déborde et nous nous laissons emporter,
    (3) Mais la vie ne s'arrête pas là non plus. Dieu nous appelle à ne pas en rester là, au corps et aux émotions; il nous appelle à tisser des relations, à développer des liens, à faire circuler l'affection et l'amour. Nous découvrons là une nouvelle dimension, marquée autant par le beau et le bien que par l'échec et le mal. Autant on se sent bien lorsqu'on est aimé, autant la souffrance nous assaille lorsqu'une parole nous blesse et met en cause l'affection éprouvée.
    La Bible en parle en termes d'eau. L'eau de la source ou du puits qui donne la vie, rafraîchit ou purifie. L'eau du baptême qui efface toute vie ancienne pour permettre un recommencement dans nos relations. L'eau de la Mer Rouge traversée pour sortir de l'esclavage et inaugurer une nouvelle liberté. L'eau du Jourdain, franchie pour quitter le désert et entrer dans la terre promise.
    Nous avons, dans nos vies, à franchir des étapes, à quitter des états pour de nouveaux horizons, nous avons à dépasser des sentiments négatifs pour entrer dans de nouvelles relations. Une vie nouvelle pour des relations nouvelles. Dieu nous offre la possibilité, à tout moment, de puiser à la source de la vie pour devenir ressources pour d'autres. Dans ces passages, nous recevons un nouveau souffle.
    (4) Mais la Bible nous parle encore d'une étape supplémentaire : le feu. Vous avez entendu cette phrase énigmatique de Jésus : "Je suis venu apporter le feu sur la terre et combien je voudrais qu'il soit déjà allumé !" (Luc 12:49).
    Phrase énigmatique, parce qu'on associe le feu avec la destruction, avec la colère de Dieu, avec le jugement ou la vengeance, il n'y a qu'à penser à Sodome et Gomorrhe. Or nous avons de Jésus l'image de quelqu'un apportant la paix, le calme, la sérénité et un amour que nous confondons trop souvent avec la simple gentillesse.
    Dans la Bible, le feu est souvent associé à la violence ou au jugement, c'est vrai, mais pas seulement. Il est aussi le lieu de la révélation de la présence divine. Pensez au buisson ardent que découvre Moïse dans le désert (Ex 3:2). En regardant un feu on voit les étincelles et la fumée s'élever dans les airs. Le feu est ce qui élève l'âme vers Dieu, ce qui éclaire, illumine notre esprit. Il donne de l'ardeur, il embrase et là l'image débouche sur un amour dévorant, sur un amour communicatif, contagieux, qui transforme tout ce qu'il touche.
    En donnant sa vie pour nous sur la croix, Jésus a allumé le feu de l'amour, du don de soi. Le feu, les flammes que reçoivent les disciples à la Pentecôte sont un second baptême, une révélation de cet amour contagieux que nous communique le Christ.
    Comme dernière étape, Dieu nous appelle à une élévation nouvelle dans nos relations. Il ne s'agit pas seulement d'avoir de bonnes relations avec les autres, d'être en bonne entente et de pouvoir co-habiter tous ensemble sur cette même planète. Il s'agit de construire un monde plus pacifique, plus accueillant pour tous.
    Comme le feu, c'est un jugement sur la violence de ce monde, sur tous ses disfonctionnements et tous les égoïsmes rassemblés. C'est un feu qui plaide pour la destruction du mal, mais par le don de soi, pas par la destruction de l'autre. Jésus allume un feu sur la terre, mais un feu d'amour, une passion dirigée vers la vie, vers le soutien et le développement, vers la justice et la paix. Une passion qui combat toujours dans le plus grand respect de l'autre.
    Le Christ sur la croix nous a montré la voie : à nous d'allumer le feu de l'amour pour remplacer le monde ancien par un monde nouveau.
    Avec l'air et la terre, nous sommes des habitants de cette terre. Avec l'eau, nous puisons à la vie de Dieu et nous devenons des ressources de vie pour ceux qui nous entourent. Avec le feu de l'amour, nous accomplissons dans notre existence la finalité de la création voulue par Dieu.
    Dieu souhaite que nous soyons des feux qui éclairent, qui réchauffent, qui transmettent la chaleur de l'amour, de son amour infini autour de nous. Voilà ce que nous recevons à la Pentecôte, voilà ce à quoi nous sommes appelés, voilà notre vocation.
    Amen
    © Jean-Marie Thévoz, 2009

  • Luc 4. Directives pour une Eglise dynamique

    Luc 4

    25.5.2008
    Une prédication de Martin Luther King
    Luc 4 : 16-21    Mt 11 : 28-30

    Directives pour une Eglise dynamique.
    Prédication prononcée par Martin Luther King en l'église baptise d'Ebenezer à Atlanta, le 5 juin 1966.

    J'aimerais ce matin vous soumettre l'hypothèse que nous, disciples de Jésus-Christ et responsables de la vie de son Eglise, avons aussi quelques directives de base à suivre. Quelque part, derrière le mince voile d'éternité, Dieu présente ses directives. Et à travers ses prophètes et plus encore par son fils Jésus-Christ, il déclare : « Il y a des choses que mon Eglise doit accomplir. Il y a des directives que mon Eglise doit suivre. » Et si nous, dans l'Eglise ne voulons pas que les crédits de grâces du trésor divin soient coupés, nous devons suivre ces directives. Elles nous sont clairement données dans les mots prononcés par notre Seigneur et Maître, un jour lors de sa venue au Temple, alors qu'il cite Esaïe : « L'Esprit du Seigneur est sur moi, parce qu'il ma conféré l'onction pour annoncer la bonne nouvelle aux pauvres, il m'a envoyé guérir ceux qui ont le cœur brisé, proclamer aux captifs la libération et aux aveugles le retour à la vue, renvoyer les opprimés en liberté, proclamer une année d'accueil par le Seigneur. » (Lc 4:6-22) Ce sont les directives.

    L'Eglise, voyez-vous, n'est pas un club social (…). L'Eglise n'est pas un centre de divertissement (…)
    En dernière analyse, l'Eglise a un but. L'Eglise se bat avec ce qui compte le plus pour l'homme. Et par conséquent elle doit suivre certaines directives. (…)

    Commençons par réfléchir au fait que si l'Eglise veut suivre ces directives, elle doit guérir ceux qui ont le cœur brisé. Il n'y a probablement pas de situation plus tourmentée que d'avoir le cœur brisé. Voyez-vous le fait d'avoir le cœur brisé ne traduit pas une condition physique, mais une condition d'épuisement spirituel. Et qui d'entre vous n'a jamais éprouvé cela ? Je dirais même qu'une telle condition est le fruit de la désillusion. Et je ne crois pas que beaucoup de mes auditeurs ce matin n'aient jamais éprouvé cela.

    (…)MLK donne 3 exemples :  Un jeune qui ne peut faire les études qu'il espérait faire, un couple qui voit se briser le rêve de leur mariage et une famille qui lutte pour élever ses enfants mais les voit emprunter une mauvaise voie. Il reprend…

    Et c'est ainsi que grandit la tragédie ultime de la vie, ce quelque chose qui brise le cœur. Qui ce matin n'en a jamais fait l'expérience ? Lorsque le cercueil passe dans l'allée centrale. Cette expérience que l'on appelle la mort, l'irréductible dénominateur commun entre tous les hommes. Et personne ne peut perdre un bien-aimé, une mère, un père, une sœur, un frère, un enfant, sans en avoir le cœur brisé. Avoir le cœur brisé est une réalité de la vie.
    Et dimanche après dimanche, semaine après semaine, des gens se rendent à l'église de Dieu avec le cœur brisé. Ils ont besoin de paroles d'espérance. Et l'Eglise a une réponse — si elle n'en a pas, ce n'est pas une Eglise. L'Eglise doit dire en substance qu'avoir le cœur brisé est un fait de la vie. Qu'il ne s'agit pas de fuir lorsque vous en faites l'expérience. Ni de réprimer. Ni de traiter avec cynisme. Ne devenez pas méchants lorsque cela vous arrive. L'Eglise doit proclamer aux hommes et aux femmes que le vendredi saint est un fait de la vie, que l'échec fait partie de la vie. Certains ne dépendent que de leurs succès, que de ce qu'ils accomplissent. Aussi, lorsque surviennent les difficultés et les fardeaux de la vie, il ne peuvent les assumer.
    Mais l'Eglise doit dire à ces hommes que le vendredi saint fait autant partie de la vie que Pâques, l'échec autant que la réussite, la désillusion autant que l'accomplissement. Et l'Eglise doit dire aux gens de prendre en charge leur fardeau, leur peine, les inciter à y être attentifs, à ne pas les fuir. Dites-vous, c'est ma peine et je dois la porter. Examinez-la sérieusement et interrogez-vous : “Comment puis-je transformer ce handicap en avantage ?"
    C'est le pouvoir que Dieu vous donne. Il ne dit pas que vous n'aurez pas de tension, que nous n'éprouverez pas de désillusion, que vous échapperez aux ennuis et aux difficultés. Mais ce que dit la religion, c'est ceci : Si vous avez foi en Dieu, Dieu a le pouvoir de vous donner un équilibre intérieur au travers même de votre peine. Aussi ne laissez pas votre cœur se troubler. « Si vous croyez en Dieu, croyez aussi en moi » (Jn 14:1) Une autre voix résonne : « Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et chargés. » (Mt 11:28) Comme pour dire : Venez à moi, vous tous qui êtes écrasés. Venez à moi, vous tous qui êtes frustrés. Venez à moi, vous tous dont les esprits sont assombris par les nuages de l'anxiété. Venez à moi, vous qui n'en pouvez plus. Venez à moi, vous tous qui avez le cœur brisé. « Venez à moi, vous tous qui êtes chargés de lourds fardeaux, et je vous donnerai le repos. » (Mt 11:28) Et le repos que donne Dieu est un repos qui dépasse toute compréhension. Le monde ne comprend pas ce genre de repos, car c'est un repos qui vous rend capables de tenir au milieu de la tempête et de vous maintenir dans un calme intérieur. Si l'Eglise suit ses directives, elle guérit ceux qui ont le cœur brisé. 

    Deuxièmement, quand l'Eglise suit ses directives, elle proclame la libération des captifs. C'est le rôle de l'Eglise : libérer les gens. Cela signifie simplement libérer ceux qui sont esclaves. Cependant, notez-le, certaines Eglises ne lisent jamais cette partie. Certaines Eglises ne s'estiment pas concernées par la libération de quiconque. (…) Ensuite vous avez un autre groupe, assis, qui aimerait bien faire quelque chose à propos de l'injustice raciale, mais qui craint les représailles sociales, politiques ou économiques, d'où son silence. (…)
    L'Eglise est appelée à libérer ceux qui sont captifs, libérer ceux qui sont victimes de l'esclavage de la ségrégation et de la discrimination, ceux qui sont pris dans l'esclavage de la peur et du préjugé.

    Et l'Eglise [3e], si elle agit en conformité avec ses directives, doit prêcher l'année de la faveur du Seigneur. Vous savez, l'année de la faveur du Seigneur, c'est une année de faveur aux yeux de Dieu parce qu'elle remplit les exigences de son Royaume. Quelques-uns en lisant ce passage estiment qu'il évoque une période au-delà de l'histoire, mais je vous le dis ce matin, l'année de la faveur du Seigneur peut se réaliser cette année. Et l'Eglise doit le prêcher.
    L'année de la faveur du Seigneur, c'est n'importe quelle année où l'homme décide de bien agir.
    L'année de la faveur du Seigneur, c'est n'importe quelle année où l'homme cessera de lyncher et de tricher. (…)
    L'année de la faveur du Seigneur, c'est cette année où les hommes apprendront à vivre fraternellement ensemble.
    L'année de la faveur du Seigneur, c'est cette année où les hommes hisseront leur théologie à la hauteur de leur technologie. (…)
    L'année de la faveur du Seigneur, c'est cette année où les hommes hisseront leur moralité à la hauteur de leur mentalité.
    L'année de la faveur du Seigneur, c'est cette année où les dirigeant du monde s'assiéront à la table de négociation et comprendront que [comme le disait Kennedy] à moins que le genre humain ne mette un terme à la guerre, c'est la guerre qui mettra un terme au genre humain.
    L'année de la faveur du Seigneur, c'est cette année où les hommes martèleront leurs épées pour en faire des socs de charrue, et leurs lances des serpes.; où les nations ne se lèveront plus les unes contre les autres et n'apprendront plus à faire la guerre. (Es 2:4) (…)
    L'année de la faveur du Seigneur, c'est cette année où les hommes feront pour les autres ce qu'ils voudraient qu'ils leur fissent à eux-mêmes.
    L'année de la faveur du Seigneur, c'est cette année où les hommes aimeront leurs ennemis, béniront ceux qui les maudissent et prieront pour ceux qui les calomnient.
    L'année de la faveur du Seigneur, c'est cette année où les hommes découvriront que Dieu les a tous créés d'un seul sang pour peupler la surface de la terre (Ac 17:26).

    Ce sont les directives, et si seulement nous les suivons, nous serons prêts pour le Royaume de Dieu, accomplissant ce que l'Eglise de Dieu est appelée à faire. Nous ne serons pas un club social. Nous ne serons pas un petit centre de divertissement. Mais nous serons concernés par quelque chose de sérieux, apporter le Royaume de Dieu sur terre.
    Il me semble entendre le Dieu de l'univers s'adresser à l'Eglise en souriant : « Tu es une grande Eglise, car j'ai eu faim et tu m'as donné à manger. Tu es une grande Eglise, car j'étais nu et tu m'as vêtu. Tu es une grande Eglise, car j'étais malade et tu m'as visité. Tu es une grande Eglise, car j'étais en prison et tu m'as apporté consolation en venant à moi. » (Mt 25:35-36) Et c'est cette Eglise-là qui va sauver le monde.
    « L'Esprit du Seigneur est sur moi, parce qu'il m'a conféré l'onction pour guérir ceux qui ont le cœur brisé, pour proclamer aux captifs la libération et pour prêcher l'année de la faveur du Seigneur. » (Es 61:1-2)

    © Extraits tirés du livre : Martin Luther King, Minuit, quelqu'un frappe à la porte, Les grands sermons de Martin Luther King, Paris, Bayard, 2000, pp. 119-127 (traduction de l'américain par Serge Molla).

  • Luc 24. Nous avons plus de chance, nous aujourd'hui, que les disciples au matin de Pâques.

    Luc 24

    23.3.2008
    Nous avons plus de chance, nous aujourd'hui, que les disciples au matin de Pâques.
    Luc 18 : 31-34    Luc 24 : 1-12


    Chers amis,
    Ce matin, nous fêtons la résurrection du Christ ! Ce matin, nous nous rappelons le premier dimanche de Pâques, la première aube pascale où les femmes ont découvert le tombeau vide et ont été porter la nouvelle de la résurrection aux autres disciples !
    Nous avons raison de nous réjouir, nous avons raison de laisser éclater notre joie et notre foi en la résurrection, car nous pouvons le faire, aujourd'hui, bien mieux que les disciples au premier matin de Pâques. Oui, je crois que nous avons plus de chance, nous aujourd'hui, que les disciples au matin de Pâques. Il nous est plus facile de croire au Christ ressuscité aujourd'hui, au XXIe siècle, que le surlendemain de la mort de Jésus.
    Je sais que la plupart des gens regrettent le passé et qu'ils pensent qu'il aurait été plus facile d'être croyant, de croire à la résurrection en assistant aux apparitions de Jésus avec ses disciples. Et bien, je crois que c'est une erreur.
    D'abord, lisons les textes, tels qu'ils sont écrits, et non pas tels que nous les imaginons. Les femmes arrivent au tombeau pour embaumer un corps qu'elles ne trouvent pas. Leur réaction ? "Elles ne savent que penser"(v.4). Perplexité. Ensuite "elles sont saisies de frayeur" (v.5) lorsque deux messagers leur apparaissent. Ces femmes vont raconter aux autres disciples ce qu'elles ont vu et entendu et les disciples trouvent leurs propos "absurdes" (v.11). Les disciples ne croient pas les femmes. Pierre part vérifier ce que disent les femmes. Il voit les bandes de lin dans le tombeau et retourne "très étonné" (v.12) chez lui.
    Où est la foi ? Perplexité, peur, incrédulité, étonnement. Voilà les divers états d'esprit des proches de Jésus le jour de Pâques ! De foi ? Aucune ! Les disciples sont déstabilisés, pleins de questions. Que se passe-t-il ? Que s'est-il passé ?
    Une piste leur a été donnée : "Rappelez-vous ce qu'il vous a dit en Galilée." (v.6) La foi va naître de la mémoire, du rappel des paroles et des gestes de Jésus. Ce que Jésus a fait et dit se réalise ! Ce que Jésus a annoncé à propos de Dieu et de lui-même arrive, se passe. Une transformation s'effectue, une lumière s'allume qui donne sens à ce qui a été vécu avec Jésus, à ce qu'il a dit, à ce qu'il a fait.
    Jésus n'apparaît même pas dans le récit du tombeau vide raconté par Luc ! Ce n'est qu'après un travail de mémoire et les gestes du partage du pain que les disciples d'Emmaüs reconnaissent que Jésus a fait chemin avec eux auparavant.
    La foi ne naît pas de la vision de la résurrection (elle ne nous est jamais montrée ou décrite), la foi naît de la vision des effets de la résurrection dans la vie de tous les jours.
    C'est là notre grand avantage par rapport aux disciples. Les disciples n'ont que quelques heures, quelques jours derrière eux, pour voir les effets de la résurrection autour d'eux. Nous avons vingt siècles d'histoire du monde.
    La résurrection elle-même reste un mystère indéchiffrable, mais ses traces dans notre histoire sont lisibles. Elle laisse une trace chaque fois que ce qui devait être une fin, un terminus, ouvre à un nouveau début; chaque fois que ce qui devait être un anéantissement ouvre à un réveil, à un surgissement, à une renaissance. Chacun en a des exemples dans sa propre vie.
    La résurrection du Christ est la façon qu'a eue Dieu de mettre son sceau, sa signature sur les paroles et les gestes de Jésus. Et notre monde — malgré toute l'obscurité qu'il comporte encore — porte les marques nombreuses de la dynamique de vie des paroles et des gestes de Jésus. C'est la puissance de la résurrection dans notre monde !
    Sans la résurrection,  le message de Jésus serait tombé dans l'oubli.
    Sans la résurrection, nous ne vivrions pas sous le signe de l'égale valeur de tous les êtres humains, comme enfants d'un même Père, nous serions une société de castes avec ses hommes libres et ses esclaves ou ses parias.
    Sans la résurrection, nous ne vivrions pas la liberté individuelle, y compris celle de quitter le Père comme le fils prodigue.
    Sans la résurrection, nous n'aurions pas d'émancipation des femmes ou de protection des enfants.
    Sans la résurrection, nous n'aurions pas de combat pour la justice sociale et d'attention aux plus pauvres, aux plus démunis ou aux opprimés.
    Sans la résurrection, nous n'aurions pas de séparation entre le pouvoir religieux et le pouvoir politique, amalgame qui a conduit Jésus sur la croix.
    Sans la résurrection, nous n'aurions pas cette attention constante au prochain qui a fait naître les hôpitaux, la Croix-Rouge et les organisations humanitaires.
    Nous ne savons toujours pas comment Jésus est ressuscité, nous ne savons pas l'expliquer et le décrire, mais nous pouvons lire dans le monde les signes, les effets, les conséquences de la résurrection.  C'est pourquoi je pense que nous avons plus de chance que les disciples au matin de Pâques. Joyeuses Pâques à tous !
    Amen
    © Jean-Marie Thévoz, 2008

  • Luc 13. Jésus fait de l'attention au prochain la vraie façon de consacrer le temps qui est réservé à Dieu.

    Luc 13

    27.1.2008
    Jésus fait de l'attention au prochain la vraie façon de consacrer le temps qui est réservé à Dieu.
    Exode 20 : 1-11        Luc 13 : 10-17

    Chères paroissiennes, chers paroissiens,
    Jésus n'a pas craint de choquer ! Jésus n'a pas craint de diviser !
    L'Evangéliste Luc nous rapporte quatre guérisons réalisées par Jésus le jour du sabbat dans des synagogues. Cela nous montre d'une part que Jésus avait l'habitude de se rendre de synagogue en synagogue pour dispenser son enseignement, et d'autre part qu'il était attentif aux situations qui se présentaient à lui.
    Jésus ne cherchait pas la polémique ou l'affrontement pour faire passer ses idées, mais il ne renonçait pas à intervenir en fonction des réactions de son entourage. C'est là qu'on voit la totale liberté que vivait Jésus : liberté d'intervenir chaque fois que le besoin se fait sentir, liberté d'intervenir quelles que soient les réactions ou les conséquences qui peuvent survenir.
    Jésus ne se laisse dicter sa conduite par personne, il ne vise que la transmission de l'amour que Dieu a pour tous les êtres humains. C'est avec cette ouverture aux autres et avec cette liberté que Jésus se retrouve dans une synagogue, un jour de sabbat, face à une femme handicapée depuis 18 ans.
    Le sabbat — jour chômé, jour de repos et de culte — est l'objet du 4e commandement du Décalogue :
    "N'oublie jamais de me consacrer le jour du sabbat. Tu as six jours pour travailler et faire tout ton ouvrage. Le septième jour, c'est le sabbat qui m'est réservé, à moi, le Seigneur ton Dieu; tu ne feras aucun travail ce jour-là, ni toi, ni tes enfants, ni tes serviteurs ou servantes, ni ton bétail, ni l'étranger qui réside chez toi. Car en six jours j'ai créé le ciel, la terre, la mer et tout ce qu'ils contiennent, puis je me suis reposé le septième jour. C'est pourquoi moi, le Seigneur, j'ai béni le jour du sabbat et je veux qu'il me soit consacré." (Ex 20:8-11).
    Comment honorer ce commandement, comment y obéir ? La question se posait au temps de Jésus, comme elle se pose encore aujourd'hui pour nos dimanches. Mais restons au temps de Jésus. Le commandement est très affirmatif, mais pas très descriptif. Il faut consacrer, réserver ce jour-là. N'y faire aucun travail, même ne faire faire aucun travail par ses serviteurs et ses servantes, pas même par ses animaux domestiques ! Mais qu'est-ce qui relève du travail ?
    Il y a toute une jurisprudence, une casuistique qui tente de définir ce qui est du travail et ce qui n'en est pas. Jésus semble connaître cette casuistique puisqu'il reproche à ses auditeurs — qui le blâment pour cette guérison — de mener leurs bêtes à l'abreuvoir pendant le jour du sabbat. Laisser une bête assoiffée parce que c'est le jour consacré à Dieu devait être considéré comme inhumain. Et c'est justement là-dessus que Jésus va baser son argumentation pour redéfinir la volonté de Dieu contenue dans ce 4e commandement.
    Remarquez que la discussion vient après la guérison. Le récit raconte d'abord la guérison par Jésus, et il le fait d'une façon qui renvoie à Dieu et au Dieu créateur : Jésus, voyant la femme, prononce une parole affirmative : "Tu es délivrée de ta maladie." (Lc13:12). C'est la parole du Dieu créateur ou recréateur. Une parole forte et efficace, qui rappelle Genèse 1. Ensuite vient le geste, la réalisation de la guérison et la louange de la femme guérie. Jésus se pose donc en maître de la vie, ensuite, il va expliquer et enseigner pour que son geste puisse être compris et interprété correctement, c'est-à-dire comme une nouvelle façon de comprendre la Loi, la volonté de Dieu.
    Le chef de la synagogue est indigné par le geste de Jésus parce que pour lui c'est une transgression de la Loi de Dieu. Pour le chef de la synagogue, l'ordre des choses c'est : 6 jours de la semaine pour s'occuper des êtres humains et 1 jour — le sabbat — pour s'occuper de Dieu. "Revenez donc vous faire soigner pendant un jour ouvrable" et tout sera propre en ordre.
    Jésus vient déranger ce bon ordre classificateur. Il le fait violemment par la guérison, il le fait en douceur dans l'explication. En se servant de leur propre casuistique, Jésus leur fait voir qu'eux-mêmes n'arrivent pas à s'en tenir vraiment à cet ordre entre jours ouvrables et sabbat. Ils font déjà des aménagements. Lorsqu'ils trouvent quelque chose d'inhumain, ils se sont donnés la permission de faire une exception, notamment pour détacher les bêtes et les mener ou les laisser aller à l'abreuvoir.
    Jésus entre dans cette brèche pour montrer que ce qu'ils font pour leurs bêtes, ils peuvent le faire pour un être humain ! Cette femme, liée par Satan, peut être déliée le jour du sabbat. Là, Jésus va plus loin que l'exception tolérable, il en fait un devoir. Cela est visible dans le fait que ces guérisons le jour du sabbat se multiplient dans les évangiles. S'occuper de son prochain qui souffre n'est pas une exception tolérable, c'est un devoir devant Dieu. C'est même la bonne façon d'honorer Dieu. Là où les hommes voudraient séparer le service envers le prochain du service envers Dieu, Jésus les lie.
    Jésus fait de l'attention au prochain — de son relèvement — une façon, même la vraie façon, d'honorer Dieu, de lui consacrer le temps qui lui est réservé.
    Cet épisode se passe à la synagogue. Mais l'action de Jésus a une portée symbolique qui peut retentir jusque dans le Temple de Jérusalem. Le Temple était divisé en cours successives jusqu'au centre du Temple, le Saint des Saints. Les non-juifs ne pouvaient entrer que dans la première cour. Les femmes ne pouvaient entrer que dans la deuxième cour. Les hommes juifs dans la troisième où se trouvait l'autel des sacrifices. Finalement seuls les prêtres pouvaient entrer dans le lieu saint et seul le grand prêtre, une seule fois par année, dans le Saint des Saints.
    En guérissant le jour du sabbat, Jésus renverse ces barrières, Dieu lui-même s'approche de cette femme en la guérissant. Elle est — bien qu'infirme, bien que femme — en contact avec le Saint des Saints quand Jésus la touche. Toutes les barrières qui limitent l'accès à Dieu tombent par l'action de Jésus. Il en a fallu du temps pour que ces barrières détruites par Jésus le soient aussi dans nos sociétés. Peu à peu dans l'histoire, et sous la poussée des chrétiens et souvent aussi de personnes hors des Eglises — mais qui avaient saisi cette intention de Jésus — ont été abolis :
    •    l'esclavage,
    •    la ségrégation, l'apartheid, le racisme légitimé.
    Et dans nos Eglises :
    •    la discrimination envers les étrangers (tous ont le droit de vote à l'assemblée paroissiale et peuvent être élus dans les divers Conseils d'Eglise ou au Synode)
    •    la discrimination envers les femmes (elles ont accès au ministère et à tous les postes à responsabilité)
    •    et finalement — mais là l'Eglise n'est pas en avance — la reconnaissance des personnes quelle que soit leur orientation sexuelle, comme membre de notre Eglise et leur accès à des responsabilités dans l'Eglise.
    La guérison de cette femme à la synagogue par Jésus a créé une division parmi ceux qui étaient présents ce jour-là, comme nous le rapporte le récit. Jésus n'a pas craint de choquer ou de diviser pour affirmer — au prix de sa vie — que Dieu aime tout être humain et ne se laisse pas enfermer par les classifications humaines. L'amour de notre prochain — quel qu'il soit — est l'inscription dans la réalité de notre amour pour Dieu.
    Amen
    © Jean-Marie Thévoz, 2008

  • Luc 2. Veillée de Noël

    24.12.2007

    Il est recommandé de lire les textes bibliques indiqués

    Genèse 28 : 10-15

    Un homme en chemin s'est couché où la terre s'est montrée accueillante.
    Malgré la pierre sous son oreille, il rêve.
    Rêve d'un homme, rêve de l'humanité :
    que le ciel s'ouvre et que le divin descende,
    qu'il descende, lui le Très-Haut,
    pour voir ce qui se passe ici très bas.
    Oui, se rend-il compte de ce que nous vivons ici-bas ?
    Voit-il ? Sait-il ? Comprend-il ?

    Un homme rêve et voit une échelle où les messagers du divin descendent et remontent,
    descendent et remontent.
    Ces messages descendent, porteurs d'une bonne nouvelle :
    "A travers toi et tous tes descendants,
    je bénirai toutes les nations de la terre." (Gn 28:14)

    Et ces messagers remontent, avec les prières,
    les demandes et les louanges des humains.
    Dieu va-t-il entendre la demande la plus pressante
    de l'être humain, de l'humanité :
    "Vient Seigneur Très-Haut, viens nous visiter !"

    Luc 2 : 1-20

    Un homme et une femme en chemin
    se sont arrêtés là où une porte s'est ouverte.
    Malgré la paille sous son oreille, un nouveau-né dort.
    Il est le rêve d'un homme depuis plus de 1'000 ans.
    Il est le rêve de l'humanité depuis toujours :
    que le divin descende,
    que le Très-Haut descende jusqu'au sol de cette terre
    pour voir ce qui s'y passe.

    Ce soir, le Très-Haut repose sur la paille d'une crèche,
    dans le froid de la nuit,
    et dans la chaleur d'un amour maternel et paternel.
    Ah? c'est donc ainsi que cela se passe chez les humains !

    Maintenant, il voit, il sait, il comprend,
    non pas du haut de l'échelle, mais tout en bas, au ras du sol.
    Dieu a pris chair, il prend corps, notre corps et notre chair,
    pour vivre notre vie, notre existence, nos joies et nos douleurs.

    C'est lui-même qui est descendu l'échelle, cette fois-ci.
    C'est lui-même qui apporte à toutes les nations sa bénédiction,
    C'est lui-même qui reçoit — en ouvrant ses yeux et ses oreilles —
    les plaintes, les demandes et les louanges des humains.
    C'est lui-même qui descend nourrir l'humanité de son amour,
    apporter sa lumière.
    C'est lui-même qui vient rendre visite à son peuple.
    Alléluia.

  • Luc 11. Jésus nous apprend à relier entre eux les points lumineux dispersés de notre existence

    7.10.2007
    Jésus nous apprend à relier entre eux les points lumineux dispersés de notre existence
    Jean 9 :1-7    Luc 11 : 33-35

    Les lectures bibliques parlaient de lumière, je vais donc allumer deux bougies (Je les pose par terre, derrière la table de communion, elles sont invisibles). Les voyez-vous ? Sont-elles bien placées ? (Je les reprend et les place sur un bougeoir en hauteur).
    Le propre de la lumière, c’est d’être visible, d’apporter la clarté. Le propre de la lumière, c’est de rendre visible, d’illuminer ce qu’il y a alentour. Sinon, elle ne sert à rien !
    La lumière, à bien y réfléchir, est utile seulement par rapport à nous. A quoi sert d’allumer la lumière dans une pièce où ne sommes pas ? Elle brûle en vain. C’est nous qui avons besoin de lumière, pour nous déplacer, pour lire, pour vivre. C’est pourquoi nous préférons la lumière à l’obscurité, que nous donnons une valeur positive à la lumière et négative aux ténèbres.
    Dans les trois petites phrases de Jésus dans l’Evangile de Luc, la lumière occupe trois places différentes. D’abord, c’est une lumière qui doit être placée en haut, sur le porte-lampe, pour nous éclairer. Elle est face à nous, en dehors de nous.
    Puis Jésus parle de l’œil qui est comme la partie de notre corps qui y laisse entrer la lumière. Aujourd’hui, on pourrait dire que l’œil est comme l’objectif de l’appareil photo. S’il est propre et bien réglé, il laisse entrer une image nette et belle. S’il est endommagé ou opaque : pas d’image, ou une image transformée, déformée. Les porteur de lunettes connaissent cela : quand on ne les a pas sur le nez et qu’on les cherche, on risque de se cogner aux meubles ou de trébucher dans l’escalier parce que notre image n’est pas nette ! Nous ne sommes pas en lien avec la réalité, mais avec une image déformée de la réalité.
    Enfin dans la troisième phrase, Jésus dit « remets-toi en question, est-ce que ta lumière n’est pas obscurité ? » Quelle image du monde as-tu en toi ? A quelle réalité correspond-elle ? Est-elle un vrai reflet ou une image déformée, une illusion, une tromperie, un faux-semblant ? C’est une grave remise en question ! Est-ce que votre lumière est lumière ou obscurité ? Est-ce que ce que vous croyez être la réalité est une image vraie de la réalité, ou une image trompeuse de la réalité ?
    C’est une vraie question, parce que nous n’avons pas un accès direct à la réalité. La réalité passe toujours par une image reconstruite de la réalité. On peut discuter cela à propos de choses matérielles. Mais on ne peut pas le remettre en doute en ce qui concerne les réalités immatérielles que sont les relations.
    Un exemple : quand je demande : « M’aime-t-il ? M’aime-t-elle ? Me veut-il du bien ou du mal ? Puis-je lui faire confiance ou dois-je me méfier ? » La réponse dépendra de déchiffrage des divers signes. Il m’a offert du chocolat, ou des fleurs. Elle n’est pas venue au rendez-vous…
    Nous passons notre temps à chercher à déchiffrer le comportement des autres et nous y ajoutons nos croyances propres : exemple d'observation : il est nerveux.
    - Croyance 1 « j’ai dû faire quelque chose de faux, alors il doit être fâché ». Décision en conséquence : je fais mieux de m’éloigner, il pourrait déverser sa colère.
    - Ou croyance 2 : « sa journée de travail a dû être pénible » et « il aime ma présence ». Décision en conséquence : je vais m’approcher de lui et essayer de le réconforter. La relation va être différente selon la croyance choisie !
    La Bible, par des récits imagés et symboliques essaie de nous ouvrir les yeux sur certaines croyances, ou nous propose de nouvelles croyances. Ainsi, dans le récit de la guérison de l’aveugle-né, Jésus essaie de casser la croyance selon laquelle le malheur est le résultat du péché, donc d’une punition divine. Jésus dit non. Le malheur est un malheur, point. Il n’est en rien relié à une faute quelconque. Et Jésus ajoute le geste à la parole, en rendant la vue à cet homme, signifiant par là que Dieu cherche au contraire à nous sortit du malheur, pas à nous y plonger.
    Nous avons beaucoup d’autres croyances fausses (ce que Jésus appelle de la lumière qui est obscurité). Par exemple : les autres sont responsables de nos malheurs, il faut donc nous en débarrasser. Par exemple : acquérir des objets nous rendra heureux. Par exemple : quand il / elle aura changé, alors je pourrai être heureux. Ces types de croyances sont des points d’obscurité en nous, que Jésus met en lumière. C’est en cela que « Jésus est la lumière du monde ». Il nous offre une autre lecture du monde. Il nous aide à déchiffrer le monde d’une manière nouvelle.
    Il nous apprend à lire le monde, à y déchiffrer des signes. Il ne suffit pas de voir avec les yeux pour déchiffrer une image. Un apprentissage est nécessaire. Deux exemples :
    a) lorsqu’un médecin fait une échographie d’un bébé dans le ventre de sa mère, il voit le bébé bien avant nous, parce qu’il l'a appris. Pour nous, c’est un écran de TV avec de la neige. Ce n’est que lorsqu’il nous montre où est la tête, le cœur, les membres, qu’on se met à voir, à comprendre l’image. 
    b) Lorsqu’on regarde un ciel étoilé, on voit une foule de points lumineux dispersés, sans ordre. Mais une fois que quelqu’un vous a dit « ici, c’est la Grande Ourse, ou Orion, et vous fait relier les points entre eux, vous ne verrez plus un semi d’étoiles, mais des formes significatives, même si ces points ne sont reliés que dans votre tête.
    Jésus nous apprend à relier entre eux les points lumineux dispersés de notre existence. Pour que notre vie prenne un sens, un dessin qui devienne lisible peu à peu. Mais cela demande un apprentissage. Cela demande d’entendre ou de lire les textes bibliques, de manière à ce que jaillissent des liens, dans notre tête ou dans cette de nos enfants : ah, c’est dans ma vie comme dans ce récit …
    Voilà un point de repère, un phare qui me permet de m’orienter, de suivre la côte ou d’éviter  un écueil. Ces phares, ces lumières, dans la géographie biblique et dans nos vies sont (brièvement) :
    1) l’amour est la substance de la vie ;
    2) la confiance est la base de toute relation ;
    3) juger ne mène à rien, essayez la compréhension ;
    4) le malheur n’est jamais une punition divine, car Dieu est bon ;
    5) ce que vous voyez de ténèbre en vous, Dieu peut le guérir et le transformer en lumière.
    Je pourrais continuer ainsi, mais j’en garde pour de prochains dimanches. Mettez-vous à cet apprentissage, enseignez cela à vos enfants et vous aurez tous les repères nécessaires naviguer en sécurité dans la vie.
    Amen.

  • Luc 10. "Si j'étais blessé, ne voudrais-je pas que quelqu'un se penche sur moi pour me secourir ?"

    Luc 10

    24.11.2002
    "Si j'étais blessé, ne voudrais-je pas que quelqu'un se penche sur moi pour me secourir ?"
    Es 30 : 18-21        Luc 10 : 25-37

    Chers amis,
    Un homme, un spécialiste de la Torah, la loi juive, vient vers Jésus avec la grande question, celle qui habite tous ceux qui cherchent Dieu : "Que dois-je faire pour recevoir la vie éternelle ?" (Lc 10:25), ce qui peut signifier deux choses : "Comment être pleinement heureux ?" et "Comment être en pleine communion avec Dieu ?", deux choses qui n'en font qu'une pour les sages.
    Le maître de la loi connaît même la réponse à sa propre question : les deux grands commandements ! La réponse n'est pas nouvelle, le maître de la loi est frustré. Il pose donc une nouvelle question : "Qui est mon prochain ?"
    C'est là que se tend le piège dans lequel doit tomber Jésus. Il semble que le maître de la loi veuille faire dire à Jésus qu'il est impossible d'accomplir la loi, donc de recevoir la vie éternelle. Aimer tous les humains est une tâche hors de notre portée, c'est un fardeau trop lourd, une exigence écrasante, personne ne peut y arriver ! Donc, j'ai le droit d'abandonner, de ne pas essayer.
    Un fardeau trop lourd, une tâche écrasante, un chemin trop raide pour remonter la pente, c'est aussi ce que l'on ressent lorsqu'on est frappé de plein fouet par le deuil, un accident, une maladie. Dans ces situations, on entend tellement de "Tu devrais... sortir, voir du monde, te distraire" de "Tu ne devrais pas... t'isoler, te morfondre, continuer de pleurer" et on reprend soi-même : "je devrais...", "je ne devrais pas...", "il faut que...", "je ne peux pas continuer..." Un fardeau trop lourd d'obligations, de pressions de l'entourage.
    Jésus va-t-il entrer dans cette ronde épuisante ? Jésus raconte simplement une histoire. Il ne désigne pas de prochains, il ne fait pas de catégories, il ne pose pas d'exigences. Jésus raconte l'histoire d'un homme à qui il arrive un malheur.
    Sur le chemin de sa vie, il est arrêté, il est dépouillé, dépossédé, frappé, jeté à terre. Jésus nous emmène au coeur de la vraie vie — qui est aussi faite de malheurs et d'épreuves — dans une situation concrète où il est question de vie et de mort, de secours ou d'abandon, d'indifférence ou de compassion.
    Le blessé est le personnage central de l'histoire de Jésus, nous ne pouvons manquer de nous sentir concernés. - Lorsque le prêtre passe et change de trottoir, c'est avec les tripes du blessé que nous ressentons son manque de compassion. - Lorsque passe le lévite, c'est avec la colère du blessé que nous nous demandons "c'est la religion qui lui apprend à détourner les yeux ?"
    En racontant une histoire, Jésus retourne la perspective du maître de la loi. La question n'est plus "qui dois-je aimer ?" mais : "Si j'étais blessé, ne voudrais-je pas que quelqu'un se penche sur moi pour me secourir ?". De plus, peu importe qu'il soit de mon pays ou étranger, de ma religion ou de celle de mes ennemis !
    Ce que Jésus dit au maître de la loi c'est : "Lorsque tu réalises que tu es blessé, meurtri, vulnérable et que quelqu'un se penche vers toi pour te secourir, alors il sera évident pour toi de reconnaître ton prochain, même dans le Samaritain que tu hais d'habitude !
    Reconnaître ses blessures, sa souffrance, son besoin d'aide (parfois en laissant sa fierté de côté, en abandonnant son "Je peux toujours me débrouiller tout seul"), c'est le début de l'ouverture de son coeur à la vie.
    Après un malheur, un accident, une maladie, un deuil, souffrir et reconnaître que l'on souffre, que l'on est triste, que l'on est en colère, parce que c'est injuste, reconnaître que l'on a besoin d'être recueilli, pansé, accompagné, soulagé... c'est le premier pas vers le retour à la vie.
    Sur le chemin de sa vie, il a y souvent des personnes qui passent sans voir nos blessures, nos souffrances, nos tristesses, mais, il y a toujours quelqu'un aussi qui a souffert et qui reconnaît la même douleur, quelqu'un qui a compassion et qui apporte l'huile et le vin du soulagement.
    Le Samaritain qui s'arrête auprès du blessé est la figure de celui qui connaît la souffrance d'être exclu, mal-aimé, blessé. Ici le Samaritain est celui qui préfigure le Christ en croix, celui qui éprouve toutes nos souffrances, jusqu'à la mort.
    Aujourd'hui, le Christ passe sur le chemin de nos vies et s'arrête auprès de chaque blessé pour prendre soin de lui et le relever. C'est lui qui nous remet debout après que nous ayons été abattus. C'est lui qui nous redonne vie, vie intérieure, goût à la vie. Ce qui nous est impossible, c'est le Christ qui l'effectue en nous, c'est lui qui nous donne la vie, la vraie vie, la plénitude.
    "Que dois-je faire pour recevoir la vie éternelle?" Comment être pleinement heureux ? Comment être en pleine communion avec Dieu ? Jésus nous dit :
    Reconnais ton malheur et ta souffrance et vois : je m'approche de toi et je prends soin de toi. Accueille-moi et nous ferons route ensemble.
    Amen
    © Jean-Marie Thévoz, 2007

  • Luc 14. Nous n'avons pas à gagner notre place dans la vie, elle nous est donnée.

    Luc 14    23.9.2007
    Nous n'avons pas à gagner notre place dans la vie, elle nous est donnée.
    Jn 13:33-35    Luc 14:15-22

    Chers catéchumènes, chers parents, chers paroissiens,
    Je suis heureux de vous voir rassemblés dans cette église. Vous avez répondu à notre invitation de commencer le catéchisme par ce culte et de la prolonger par un repas. Nous sommes en train de vivre la parabole que Jésus a racontée et que nous venons d'entendre.
    En juin, j'ai envoyé 104 invitations à participer au catéchisme et aujourd'hui, vous êtes 26 à être là pour le commencer. Sur quatre envois, j'ai reçu trois refus et une acceptation, comme dans la parabole. Mais je ne vais pas m'attarder sur les excuses de ceux qui ne voulaient pas venir. Nous sommes-là pour nous réjouir avec vous qui avez répondu positivement à cette invitation !
    Cette parabole de Jésus nous parle de la vie et de la réalité, de la vie réelle, de celle que nous vivons. Mais en nous parlant de la vie, Jésus veut aussi nous parler de Dieu et de la place qu'il occupe dans la vie et dans notre vie.
    Jésus compare le Royaume de Dieu à une invitation à un festin. D'abord, c'est quoi le Royaume de Dieu ? Le Royaume de Dieu, c'est une façon de parler de l'univers tel que Dieu le souhaite. C'est le monde dans lequel Dieu voudrait que l'on puisse vivre. Ce n'est pas un monde virtuel comme Second Life, ce n'est pas non plus le paradis qui ne se trouverait qu'après la mort. C'est un monde à l'intérieur de notre monde présent, un espace où on essaie de vivre avec d'autres règles et codes que dans le monde que nous voyons. 
    Comment fonctionne le monde autour de nous ? Souvent comme la jungle, c'est la loi du plus fort. Un monde dur, où il faut se faire sa place, se bagarrer, se vendre, lutter pour qu'on ne nous marche pas sur les pieds ou qu'on nous respecte. Un monde où l'on doit faire ses preuves, faire de bons résultats, de bonnes notes, réussir, être plus forts ou meilleurs que les autres. Un monde où il faut faire gagner son équipe. Qu'est-ce qu'il est exigeant !
    Qu'est-ce que c'est difficile d'être à la hauteur de ce qu'on attend de nous ! On peut même avoir l'impression qu'on ne nous pardonnera pas nos erreurs, nos faiblesses, nos défaillances. Il faut gagner ou passer pour un looser.
    En même temps, ce monde nous montre plein de trucs pour réussir et être heureux. Il faut porter telle marque de vêtements pour plaire aux copains, il faut avoir le dernier natel ou X-box pour se faire remarquer par les autres et ne pas passer pour un nul. Il faut se faire belle, essayer le maquillage avant les autres copines, porter le T-shirt le plus petit possible, écouter la bonne musique pour être acceptée par les autres. Et encore, ce n'est pas gagné d'avance parce que la mode change d'un jour à l'autre…
    Cette vie-là, ça ressemble à un jeu de Super-Mario : il faut attraper tous les bonus possibles et surmonter tous les obstacles pour réussir, sinon on perd sa vie.
    L'idée principale de ce monde, c'est que vous partez sans rien dans la vie et qu'il faut tout gagner au fur et à mesure.
    L'idée principale dans le monde de Dieu, au contraire, c'est que Dieu nous a entièrement équipé au départ et que ce que vous avez, vous ne pouvez ni le perdre, ni vous le faire voler.

    C'est difficile à croire puisqu'on naît tout nu, tout fragile et complètement dépendant de ses parents. Mais le bébé : il vit et il a déjà la force de la vie en lui. Les parents sont là pour l'aider à développer ce qui est déjà en lui : la confiance dans la vie. Chacun naît avec toute l'estime de soi dont il a besoin pendant toute sa vie.
    Bien sûr, il arrive — presque toujours — que cette estime de soi, elle se couvre de poussière au cours du temps. Elle est là, mais on doit la déterrer, la dépoussiérer, la retrouver au fond de soi-même.
    Cette estime de soi, elle est dans l'invitation que Dieu nous a donnée. Dieu nous invite à nous servir de cette confiance qu'il nous fait, de cette estime de soi qu'il nous a donnée pour profiter du festin de la vie.
    Mais beaucoup ne s'en servent pas. Ils trouvent d'autres choses à faire. Ils oublient que la vie est un festin à croquer et ils s'emploient à faire toutes sortes de choses pour gagner ce qu'ils ont déjà en eux-mêmes, sans le savoir.
    Nous avons tous reçu l'invitation : Vis ta vie. Mais beaucoup n'en font rien. Ils restent passifs devant la vie, ils font ce qu'on leur demande de faire, sans chercher quel sens a la vie. Mais quelques-uns deviennent actifs et cherchent à répondre à cette invitation, à prendre leur vie en main, à chercher le sens de la vie et le sens qu'ils peuvent donner à leur propre vie.
    En nous donnant cette invitation, cette vie, Dieu nous dit : "Tu n'as pas besoin de gagner cette vie, tu n'as pas besoin de prouver — à toi ou aux autres — que tu la mérites : je te la donne, tu l'as, elle est à toi." "Tu es déjà aimé" et tu n'a rien à faire de plus pour exister, pour te faire valoir. Voilà l'idée fondamentale du monde de Dieu.
    Après cela, comme on n'a plus à se préoccuper de se faire accepter, on a de l'énergie pour se tourner vers les autres, pour les aimer. C'est pourquoi Jésus nous a dit "aimez-vous les uns les autres, comme je vous ai aimés." Cela devient possible, parce que nous n'avons pas besoin de gagner l'amour des autres, il nous est déjà donné.
    C'est à la découverte de cet amour, de cette liberté que vous allez vous engager dans le catéchisme. Peut-être que quelques parents suivront ce chemin en parallèle. Jésus ne disait-il pas à la fin de sa parabole, après avoir été chercher de nouveaux participants à son festin : "il y a encore de la place…"
    Amen
    @ Jean-Marie Thévoz, 2007

  • Luc 3. Sommes-nous des disciples de Jean-Baptiste ou de Jésus ?

    28.1.2007

    Luc 3.
    Sommes-nous des disciples de Jean-Baptiste ou de Jésus ?
    Luc 3 : 1-3 Luc 5 : 27-32 Luc 5 : 33-35

    Chères paroissiennes, chers paroissiens,
    Ce matin, je vous invite à vous pencher avec moi sur le personnage de Jean-Baptiste, celui que les Evangiles dépeignent comme le Précurseur de Jésus. Tous les Evangiles mentionnent Jean-Baptiste, sa prédication, le fait qu'il baptise Jésus et qu'il est tué par Hérode. Mais tous les Evangiles prennent bien soin de souligner que Jean-Baptiste n'est qu'un messager, qu'il n'est pas le Messie, même s'il est un prophète, et que c'est Jésus le personnage important. Cela reflète bien la pensée des chrétiens, de notre époque comme celle des chrétiens de la première Eglise.
    Mais cela ne reflète probablement pas leur importance respective de leur vivant. Il est fort probable que, dans ces années 30 de notre ère, Jean-Baptiste ait été beaucoup plus important, beaucoup plus connu que Jésus. Plusieurs indices plaident dans ce sens.
    D'abord, c'est Jean-Baptiste qui baptise Jésus, ce qui donne à Jean-Baptiste une ascendance certaine sur Jésus. Ensuite, cette insistance des Evangiles à assurer que Jésus est plus important que Jean-Baptiste et que Jésus baptise davantage de disciples que Jean (Jn 4:1) et que Jean-Baptiste affirme n'être pas le Messie, tout cela nous laisse imaginer qu'il fallait convaincre des gens qui étaient persuadés du contraire à cause de ce qu'ils avaient vu ou entendu. Enfin, le grand historien de l'histoire juive, Flavius Josèphe, mentionne Jean-Baptiste appelant les juifs à se détourner du péché et à se faire baptiser ainsi que son exécution par Hérode, alors qu'il n'écrit pas un mot sur Jésus !
    Ainsi donc, on peut en déduire que, pour les contemporains de Jésus et de Jean-Baptiste, ce dernier était plus important et plus connu que Jésus de Nazareth. Pourtant, aujourd'hui, c'est le contraire. Les disciples de Jean ont disparu et les chrétiens sont nombreux sur toute la terre. Qu'est-ce que cela signifie pour nous aujourd'hui ?
    Je crois que cela veut dire d'abord que le succès immédiat n'est pas synonyme de vérité absolue ou de pérennité. Cela signifie aussi que le message de Jésus a une portée plus profonde, plus fondamentale pour l'être humain que le message de Jean-Baptiste, même s'il a pu — en son temps — drainer les foules et attirer l'attention d'un historien. Alors, voyons quels sont les messages de chacun et en quoi la différence est significative.
    Quel est le message de Jean-Baptiste ? « Changez de comportement, faites-vous baptiser et Dieu pardonnera vos fautes » (Luc 3:3). Jean-Baptiste appelle à un changement de vie, à un changement de comportement pour adopter une vie qui plaise à Dieu. Le baptême est le signe de cette volonté de changement.
    On reconnaît là un appel à la conversion comme premier pas dans sa vie avec Dieu, une conversion comme condition d'une réconciliation avec Dieu. Voici la prédication de Jean-Baptiste, elle paraît très évangélique, très proche de la prédication de Jésus.
    En quoi la prédication de Jésus diffère-t-elle de celle de Jean-Baptiste ? Il est important de connaître cette différence, parce que c'est ce qui a fait que les disciples de Jean-Baptiste ont disparu et que ceux de Jésus-Christ se sont répandus sur toute la terre. En plus, il est essentiel pour soi, pour vivre comme un chrétien et pas — à son insu — comme un disciple égaré de Jean-Baptiste au XXIe siècle.
    La prédication de Jean-Baptiste avait trois temps : 1. changer, 2. être baptisé, 3. être pardonné. Jésus renverse fondamentalement ce schéma. En tout premier, il pardonne (voir la guérison du paralytique quelques lignes plus haut : Luc 5:17-26), ensuite, il relève ou il appelle (voir Lévi à sa table de péage : Luc 5:27-32), enfin, en réponse à ce geste premier de Dieu, le disciple répond, se lève, marche, suit Jésus.

    Pour expliquer cela avec deux images, on peut dire que Jean-Baptiste dit ceci : "Marchez 30 km et au bout vous aurez un repas pour prix de vos efforts." Mais Jésus dit : "Venez, mangez, recevez ce dont vous avez besoin, ensuite vous aurez la force de marcher ces 30 km." Pour Jésus, il n'y a pas de conditions pour obtenir l'amour de Dieu. Cet amour existe, il est là en abondance sur la table, chacun est accepté à ce banquet sans conditions.
    C'est bien ce que les pharisiens ont observé en comparant les disciples de Jean-Baptiste avec ceux de Jésus : « Les disciples de Jean, de même que les nôtres, jeûnent souvent et font des prières; mais tes disciples, eux, mangent et boivent. » (Luc 5:33) Oui, ce n'est pas drôle de peiner chaque jour pour acquérir la bienveillance de Dieu, si d'autres, à côté, font la fête en obtenant cette même bienveillance, sans effort. La colère des pharisiens, c'est la colère du fils aîné de la parabole du fils prodigue (Luc 15).
    Le chrétien est celui qui fait confiance à Dieu qu'Il lui donne en abondance, avant la route. Et cela devient un plaisir que de faire la route, d'avancer dans la vie en sachant que tout ce dont nous avons besoin nous est donné à chaque instant.
    Bien sûr, cela ne signifie pas que la route soit toujours facile. Elle peut être tortueuse, pleine d'épreuves et d'embûches, mais nous n'y sommes pas seuls et chaque matin, avant de nous y engager, nous pouvons demander à Dieu ce dont nous avons besoin pour la journée. Alors n'oublions pas d'avancer comme des disciples de Jésus, aimés, pardonnés et nourris, avant même que nous nous levions chaque matin.
    Amen

    © 2007, Jean-Marie Thévoz

  • Luc 2. Au cœur des nuits de notre monde, vient une lumière.

    Luc 2
    25.12.2006
    Au cœur des nuits de notre monde, vient une lumière.
    Es 9 : 1-6 Luc 2 : 1-20

    Chères paroissiennes, chers paroissiens, chers Amis,
    En entrée de ce culte, nous avons chanté un cantique (PCT 263) qui commence par cette phrase : "Après la longue et sombre nuit, le ciel a rayonné…" Noël est une fête joyeuse, une occasion de se réjouir pour tout ce que Dieu a fait pour nous, pour nous avoir donné son fils Jésus. C'est une fête joyeuse, justement en contraste avec la nuit qui recouvre le monde, avec le mal, l'injustice, l'adversité, le deuil que chacun rencontre dans la vie.
    Cette lumière de Noël est une bonne nouvelle, justement parce qu'elle vient briller dans l'obscurité. Esaïe parlait de la situation politique de son époque : une Jérusalem assiégée par les Assyriens, avec l'aspiration qu'un chef politique de la lignée de David vienne les délivrer, militairement.
    Luc, dans sa présentation de la naissance de Jésus indique aussi le contexte politique. Il cite César Auguste, l'empereur de Rome et Quirinius, gouverneur de Syrie, donc un pays d'Israël occupé par les romains. Il présente Joseph soumis aux contraintes de cet occupant qui veut recenser les habitants pour fixer l'impôt, le tribut à payer à César. Voilà la nuit, l'adversité dans laquelle vit le peuple d'Israël au temps de Jésus. Une adversité qui se marque aussi dans le fait que Jésus naît dans une étable et qu'il est déposé dans une crèche.
    Lorsqu'il nous est dit que les bergers passaient la nuit dans les champs, l'Evangéliste joue sur le double sens de la nuit. Il y a la réalité de devoir veiller sur les troupeaux, mais il y a aussi le sens symbolique d'un peuple qui vit dans l'obscurité, loin de Dieu. C'est à ces bergers que Dieu vient révéler — en premier, en primeur — son action.
    "Un ange du Seigneur leur apparut et la gloire du Seigneur brilla autour d'eux." Cette gloire du Seigneur qui brille rappelle la nuée qui guidait le peuple hébreu dans le désert, nuée sombre le jour et brillante la nuit, dans laquelle Dieu se voile pour protéger son peuple, parce qu'on ne peut pas voir Dieu. C'est pourquoi les bergers ont peur, d'abord, et que l'ange doit les rassurer. Les bergers reçoivent le message de l'ange et se mettent en mouvement, en route vers Bethléem. Ce déplacement, ce voyage est un des points communs dans les récits de Noël de Luc et de Matthieu qui raconte le voyage des mages. A part cela, et la lumière, ils n'ont rien en commun.
    Oui, l'action de Dieu met les humains en route. Déjà Marie et Joseph avaient dû se mettre en route de Nazareth vers Bethléem, puis les mages en suivant l'étoile, pour un long voyage, maintenant les bergers, parce qu'ils sont animés de curiosité et de confiance dans le message de l'ange. Chacun se met en route donc.
    Dieu vient, il prend chair en Jésus, il s'approche des humains, c'est le chemin que Dieu fait dans notre direction. Ensuite, c'est à nous de nous mettre en marche et de le rejoindre à Bethléem. Dieu ne nous traite pas comme des incapables ou des assistés, il attend que nous fassions une partie du chemin. C'est sa façon de ne pas nous contraindre, c'est sa façon de nous laisser notre liberté, notre capacité d'initiative. Il glisse son invitation dans notre cœur, à nous d'y répondre.
    Les bergers ont cru et se sont mis en route pour découvrir ce qui leur était promis. "Il faut que nous voyions ce qui est arrivé." Quelle est cette lumière dans la nuit ? Qu'est-ce que Dieu apporte pour notre salut et pour le salut du monde ?
    "Ils trouvèrent Marie, Joseph et le bébé couché dans la crèche." C'est toujours émouvant de voir un nouveau-né, dans un berceau à la maternité, dans une poussette. Chacun se penche et s'émerveille : "comme il est petit ! Je ne me souvenais pas qu'un nouveau-né était si petit, ils grandissent tellement vite !" Un nouveau-né, c'est une espérance, c'est une promesse de vie, de nouveauté.
    Chaque naissance apporte un espoir, une promesse, un accomplissement. Voilà un être nouveau qui va assumer son destin, qui va apporter sa touche de nouveauté, de beauté dans le monde. Il va être quelqu'un de spécial et unique pour le monde.
    Mais que doivent penser les bergers en voyant ce nouveau-né ? N'est-ce pas un nouveau-né comme tous les autres ? Qu'a-t-il de spécial pour mériter le déplacement des anges du ciel ?
    Oui, on peut repartir de la crèche avec des sentiments contrastés selon ce qu'on attendait de cette visite. On peut repartir de la crèche avec de la déception, comme beaucoup de nos contemporains. Etre déçu de tout ce qu'on n'y a pas vu, pas trouvé. Déçu de ne pas y trouver le Dieu dont on rêve, celui qui devrait résoudre tous nos problèmes, arrêter tous nos conflits, combler tous nos besoins.
    Ou bien l'on peut repartir avec la joie de ce qu'on y a vu, de ce qu'on y a trouvé : un Dieu qui préserve notre liberté, un Dieu qui nous invite à agir et nous en donne la force. On peut repartir avec des yeux neufs qui voient au-delà du tangible la promesse des situations et la promesse des êtres.
    Il y a dans chaque être que nous côtoyons la même humanité que celle que Jésus est venue habiter. Il y a dans chaque être la même promesse que celle qui habite le nouveau-né dans sa crèche.
    A nous de voir cette humanité avec des yeux neufs, à nous de lui faire un espace pour qu'elle passe de l'état de promesse à celui de réalité, à nous de participer à cette germination.
    Au cœur des nuits de notre monde, vient une lumière, une chaleur, une tendresse qui peut tout transfigurer. Joyeux Noël.
    Amen
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    © 2007, Jean-Marie Thévoz

  • Luc 15. "La drachme perdue" Dieu à la recherche des êtres humains

    Luc 15
    18.1.98
    "La drachme perdue" Dieu à la recherche des êtres humains
    Ps 36 : 6-12 Eph. 1 : 3-10 Luc 15 : 1-10

    Chers frères et soeurs en Christ,
    Aujourd'hui, je vais vous parler du plan secret de Dieu qui est évoqué dans la lettre aux Ephésiens. Ce plan, Jésus l'a révélé dans diverses paraboles. Pour aujourd'hui, j'ai choisi la parabole dite de la "drachme perdue". Cette parabole est précédée de la parabole de la "brebis perdue" et suivie de la parabole du "Fils prodigue". Ce sont trois mauvais titres qui insistent sur ce qui a le moins d'importance.
    Ces trois paraboles pointent dans la même direction, quelque chose de perdu est retrouvé, un mouton, une pièce de monnaie, deux fils. A travers ces paraboles, nous trouvons un message qui nous ouvre une porte sur le vrai visage de Dieu, sur la relation que Dieu a avec nous et sur nous-mêmes, notre cheminement spirituel.
    A. Le vrai visage de Dieu. Placée entre les deux autres paraboles, le récit de la femme qui cherche sa pièce de monnaie nous rappelle que Dieu n'est pas exclusivement masculin, même s'il est d'abord comparé à un berger, puis à un père de famille.
    Notre parabole de la recherche de la pièce perdue est l'équivalent, au féminin, de la recherche du mouton égaré. Jésus raconte une histoire où c'est une femme qui tient le rôle de Dieu. Elle cherche une pièce, dans la maison. Lorsqu'elle l'a trouvée, elle appelle ses amies et ses voisines. Dieu n'est pas seulement le Bon Berger, il est aussi la Bonne Ménagère, un Dieu maternel, capable de souffler sur les écorchures de nos genoux, capable d'enlacer tendrement ses enfants et de leurs donner de gros poutous dans le cou.
    B. La parabole nous révèle Dieu en action et au travers de cette action le lien qui se tisse entre Dieu et nous. Le berger (plutôt riche) ne veut pas perdre un mouton, devenir moins riche. La femme, (plutôt pauvre) ne veut pas perdre une pièce, devenir plus pauvre. Dieu ne consent pas à perdre qui que ce soit. Dieu souffre d'un manque chaque fois qu'un humain s'éloigne et se perd. C'est lui qui engage immédiatement des recherches pour retrouver sa plénitude, son intégrité, et il n'aura pas de relâche avant d'avoir retrouvé ce qui est perdu.
    Ne nous faisons pas d'illusions sur ce que signifie l'humain qui se perd et qui est retrouvé, du point de vue de Dieu. Une pièce de monnaie pense-t-elle ? Peut-elle se perdre elle-même, ou revenir d'elle-même dans le porte-monnaie ? Peut-elle se repentir ? La drachme illustre la totale passivité de l'être humain lorsqu'il est question de son salut ! C'est Dieu qui engage les recherches. C'est Dieu qui se bouge, qui de démène. C'est le regard de Dieu, cette recherche, qui nous donne de la valeur. C'est à ses yeux que nous avons un prix infini, non par le prix de nos efforts.
    Dieu nous cherche et nous retrouve. Mais que se passe-t-il après, une fois que nous sommes revenus dans le troupeau, dans le porte-monnaie, dans la maison du Père ?
    C. Notre cheminement spirituel. Certainement, nous avons à éviter de laisser notre coeur se dessécher (comme celui des pharisiens) et nous mettre à juger ceux du dehors. Nous avons un cheminement spirituel à faire, et je crois que les trois paraboles à la suite nous révèlent des étapes pour notre vie intérieure sur ce chemin.
    Il nous arrive à tous, à un moment ou à un autre de notre vie de vivre une crise où nous éprouvons soudainement un vide, un manque. La première quête est souvent de partir à la recherche de ce qui nous manque. Une recherche au travers de voyages, de dépaysements, de lectures, bref des recherches à l'extérieur de nous-mêmes. Nous faisons la même chose que le berger qui part dans le désert chercher ce qu'il a perdu. Cela peut nous satisfaire un temps, mais souvent le manque resurgit.
    La quête alors peut se faire intérieure, ce que nous cherchons est peut-être à l'intérieur de nous-mêmes, dans notre être. Comme la femme nous allumons une lampe pour éclairer notre caractère, notre personnalité. Nous prenons le balai pour chercher partout et ne pas laisser un coin de notre existence inexploré. Et nous cherchons avec soin pour trier ce que nous ne voulons pas garder et ce qui a de la valeur et que nous préservons.
    Les coups de balai nous conduiront à l'aboutissement de notre quête lorsqu'ils auront créé la place nécessaire à celui qui nous cherche assidûment; lorsque nous aurons compris que c'est le Père qui vient au devant de nous, que c'est lui qui alimente la source qui est au plus profond de nous.
    La quête intérieure, c'est découvrir le portrait de Dieu que nous avons esquissé plus haut, du Dieu qui cherche ses enfants sans relâche.
    C'est pourquoi, il faut renommer toutes ces parabole et parler du berger, de la femme et du père qui cherchent jusqu'à ce qu'ils trouvent, parce que Dieu ne supporte pas d'être séparé d'un seul d'entre nous.

    Amen.

    © 2007, Jean-Marie Thévoz