(1.4.2001)
Lévitique 26
Culte des familles, d'Abraham à Jésus avec Dieu
Lévitique 26 : 9-12
télécharger le texte : P-2001-04-01.pdf
En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.
(1.4.2001)
Lévitique 26
Culte des familles, d'Abraham à Jésus avec Dieu
Lévitique 26 : 9-12
télécharger le texte : P-2001-04-01.pdf
8.3.2020
1 Rois 3
Saynète : Le roi Salomon
1 Rois 3 : 4-28 1 Corinthiens 3 : 16-17
télécharger les textes : Saynète 2020-03-08.pdf P-2020-03-08.pdf
Saynète des enfants :
1. Salomon enfant joue avec son épée sur la musique « je voudrais déjà être roi »
Narratrice : Nous allons vous raconter l’histoire de Salomon, fils du roi David.
Salomon enfant: Je suis Salomon, le fils du roi ; plus tard je serai le roi du monde.
2. David est sur son trône. A ses côtés les gardes, Salomon jeune et Nathan le prophète.
Narratrice : Plusieurs années ont passé. Salomon a bien grandi et va devenir roi à son tour. Venez avec nous assister à son couronnement. Le prophète Nathan va verser de l’huile sacrée sur le nouveau roi.
David : Mon fils bien-aimé, tu as acquis de l’expérience et de la sagesse ; il est temps maintenant d'être désigné officiellement comme le prochain roi. Le prophète Nathan va te bénir.
Salomon s’approche de Nathan pour oindre le jeune roi Salomon.
La foule : Vive le roi Salomon ! Vive le roi Salomon ! Vive le roi Salomon !
La foule acclame le nouveau roi avec de la musique.
3. David est couché sur un lit et Salomon debout à ses côtés.
Narratrice : Le temps passe, David est très vieux et il va bientôt quitter ce monde. Il parle avec Salomon et lui transmet ses dernières volontés…
David : Mon fils, moi je m’en vais où va tout ce qui est terrestre. Sois fort et sois un homme ! Observe l’ordre de Dieu en marchant dans ses voies et en gardant ses commandements écrits dans la Loi de Moïse.
Salomon : Mais… je ne suis pas encore assez grand, je n’ai pas assez d’expérience, je ne vais pas savoir faire. J’ai besoin de toi et de tes conseils.
David : Je te fais confiance, tu vas gagner en expérience. Mais surtout confies-toi en Dieu; demande-lui toujours ce dont tu as besoin. Il te guidera. Fais-lui confiance.
Narratrice : David meurt et il est enterré avec ses pères, ses ancêtres. Salomon prend sa succession.
4. Salomon est couché dans son lit. Il dort.
Narratrice : Salomon est devenu roi. Il s’est marié. Il s’occupe maintenant des affaires du pays comme il peut. Un soir qu’il dort, il fait un rêve.
Dieu : Salomon, Salomon, écoute : Demande-moi ce que tu veux ; je te le donnerai.
Salomon : ô Dieu, tu as été bon avec mon père David car il était un roi juste et bon. Moi je suis un roi débutant, je suis tout jeune et je ne sais pas gouverner. Donne-moi donc un esprit ouvert et un cœur attentif à mon peuple.
Dieu : Tu ne me demandes pas la richesse, tu ne me demandes pas de vivre longtemps, tu ne me demandes pas la mort de tes ennemis, mais tu me demandes l’intelligence et la sagesse pour bien gouverner. Alors, je vais te donner ce que tu demandes et je te donnerai en plus la richesse, une longue vie et la paix dans ton royaume.
5. Salomon est assis sur son trône. Il a un garde de chaque côté.
Narratrice : David avait construit le palais royal du temps de son vivant mais à cause des guerres il n’a pas pu construire le temple de Dieu à Jérusalem. Maintenant qu’il n’y a plus de guerre, Salomon va pouvoir accomplir cette mission.
Salomon : Qu'on fasse venir mes architectes ! Je vais faire construire le temple de Jérusalem.
Les architectes arrivent avec leurs aides qui portent le plan. Ils déroulent un très grand plan.
Architecte 1 : Voici notre projet majesté. Comme vous nous l'avez demandé - Majesté - nous avons prévu un Temple magnifique. Le Temple sera constitué de trois espaces. D'abord une grande cour tout public. Elle pourra accueillir le peuple et les visiteurs de tous les pays. Tout le monde y aura accès.
Architecte 2 : Ensuite, il y aura le bâtiment du Temple lui-même. Il sera allongé, de 30 mètres de long sur 10 mètres de large et de 15 mètres de hauteur. En pierre à l'extérieur et tout tapissé de bois précieux à l'intérieur. Le Temple sera réservé au peuple d'Israël, à ceux qui vénèrent notre Seigneur Dieu. C'est là qu'aura lieu le culte.
Architecte 1 : Enfin le troisième espace sera une pièce entièrement fermée, plus petite, qui contiendra l'arche de l'alliance avec les tables de la Loi. Elle sera toute tapissée d'or fin. Cet endroit est réservé à Dieu seul. Personne ne peut y entrer, sauf le grand-prêtre une seule fois par année pour obtenir le Grand Pardon pour tout le peuple.
Architecte 2 : Nous vous proposons - Majesté - de voir avec le roi du Liban pour obtenir le bois de cèdre et les objets en bronze pour le culte. Les plans sont prêts. Nous attendons les ordres pour commencer à bâtir ce Temple magnifique qui honorera grandement le Dieu d'Israël.
Salomon adulte: Vous avez bien travaillé, je suis content d'accomplir la promesse de mon père David et de faire construire un Temple à Jérusalem. Que les travaux commencent !
6. Salomon, les gardes et les experts.
Salomon : Ce sera vraiment un beau temple, un temple magnifique, un temple digne de mon règne...
Deux femmes arrivent en se disputant et en tirant un bébé chacune vers soi.
Femme 1 : C’est mon enfant !!
Femme 2 : Lâche-le ; il est à moi.
Femme 1 : Menteuse ! Je vais me plaindre au roi.
Salomon : Silence !! Que se passe-t-il ?
Femme 1 : Nous allons tout vous expliquer. Nous habitons dans la même maison sans personne d’autre avec nous.
Femme 2 : Nous avons accouché à quelques jours près. Pendant la nuit nous avions chacune notre bébé à côté de nous. Son bébé est mort. Pendant que je dormais, elle a échangé nos bébés.
Femme 1 : Non, ce n'est pas vrai, tu mens !!
Femme 2 : Quand je me suis réveillée, j’ai vu que ce n’était pas mon bébé.
Femme 1 : C’est le contraire. C’est mon enfant qui est vivant.
Femme 2 : Non, c’est le mien qui est vivant.
Salomon : STOP !! Je vais juger votre affaire mais je vais d’abord consulter mes experts. Quelle solution est-ce que vous proposez ?
Expert 1 : Il faut attendre que l’enfant soit assez grand pour voir à quelle mère il ressemble.
Expert 2 : Je propose d’aller voir dans la maison s’il y a des traces qui nous permettent de voir dans quel lit l’enfant est mort.
Expert 3 : Je propose que les deux mères gardent l’enfant à tour de rôle.
Salomon : Hum hum, hum…. Ça va prendre beaucoup de temps tout ça. Gardes ! amenez-moi mon épée !
Salomon : Je vais couper l’enfant en deux, chacune en aura une moitié.
Femme 2 : NON !!!!! Laissez-le vivre ! Donnez-lui l’enfant vivant.
Femme 1 : Il ne sera ni à moi, ni à toi, coupez-le en deux !
Salomon : Donnez l’enfant vivant à cette femme. C’est celle qui voulait que l’enfant vive qui est la vraie mère.
Applaudissements de la foule - tous les enfants et les catéchumènes - Chant d’allégresse.
© Paroisse St-Jean (EERV) - Lausanne, 2020
(Le droit de publication commerciale est réservé, le droit de jouer la saynète est libre, merci de citer la source.)
Message :
Chers frères et soeurs en Christ,
Salomon est le roi qui a construit le premier Temple de Jérusalem, nous dit la Bible. Ce Temple est divisé — comme le sera plus tard le Temple reconstruit par Hérode, celui qu'a fréquenté Jésus — en trois espaces.
Ces trois espaces sont imbriqués les uns dans les autres, comme des boîtes ou des poupées russes. Le plus grand espace est une grande cour, à ciel ouvert, qui accueille tout le monde. C'est l'espace public, pour les croyants comme pour les visiteurs. A l'intérieur de cette cour se trouve le bâtiment du Temple. Seuls les prêtres entrent dans ce bâtiment, dans cet espace. C'est un espace réservé. A l'intérieur de ce bâtiment se trouve une chambre plus petite, qui est le lieu saint, même le saint des saints, un espace où étaient placées l'arche de l'alliance et les tables de la Loi. C'est le lieu sacré de la présence divine. Personne n'a le droit d'y entrer, sauf un prêtre, qui y entre une fois par année pour le Grand Pardon. Voilà pour l'architecture et l'organisation du Temple de Salomon.
Mais voilà que l'apôtre Paul nous dit que nous sommes — nous-mêmes — le Temple de Dieu et que l'Esprit saint habite en nous. Paul nous invite à faire une analogie entre le Temple et nous, nos personnes, nos corps. C'est ce que les enfants ont représenté sur les deux panneaux que vous pouvez voir derrière moi. Le coeur y représente l'espace sacré.
Notre coprs est notre interface avec le monde, avec notre environnement. C'est par notre corps, nos sens, que nous entrons en relation avec les autres. Notre relation au monde se joue aussi en trois espaces : un espace public, un espace personnel et un espace privé, sacré. Notre espace public commence à peu près à une distance de coude autour de nous. Nous ne sommes pas génés quand un inconnu se place à cette distance. Par contre cela nous dérange s'il se colle à nous ou s'il vient s'asseoir sur nos genoux. Il serait clairement entré dans notre espace personnel. Notre espace personnel est comme une bulle proche de notre corps. C'est un espace réservé, personne n'a le droit d'y entrer sans notre accord, notre consentement.
Et puis nous avons un espace tout à fait privé, intime, celui de nos pensées secrètes. C'est là que se trouve notre être profond, ce qui fait que nous sommes uniques. Personne ne peut y entrer sauf nous-mêmes. Nous y habitons — et mystérieusement, c'est aussi là que Dieu habite en nous. C'est un espace que Dieu protège en nous — c'est pourquoi l'apôtre Paul dit que si quelqu'un voulait détruire cet espace en nous, Dieu s'en prendrait à lui pour nous défendre. Nous sommes le Temple de Dieu, Dieu habite en nous parce qu'il trouve que nous avons de la valeur. Dieu trouve que c'est le plus beau lieu où habiter. Nous valons tous infiniment, nous sommes précieux aux yeux de Dieu.
Amen
© Jean-Marie Thévoz, 2020
15.12.2019
Luc 2
Remonter le temps avec les récits bibliques
Luc 2 : 1-20
télécharger le texte : P-2019-12-15.pdf
Les enfants jouent une saynète. Ils montent dans une machine à voyager dans le temps. En passant par Robin des bois et les dinosaures après quelques difficultés de réglages, les enfants rencontrent successivement Abraham et Sarah, Moïse et David. Abraham reconnaît en Jésus l'enfant promis.
Moïse reconnaît en Jésus le libérateur de l'humanité. David reconnaît en Jésus le Messie qui doit venir. Ils les emmènent ensuite jusqu'à la crèche où ils peuvent tous adorer Jésus.
Crèche vivante :
Les enfants nous ont fait voyager dans le temps. La Bible est un livre qui nous fait voyager dans le temps. Elle nous rend contemporains de personnages du passé ; des personnages du passé nous rendent visite dans notre présent et y donnent du sens. Nous visitons la crèche, comme si nous y étions. Jésus vient habier nos vies de sa présence.
Nous avons rencontré trois personnages, trois grandes figures de l'Ancien Testament : Abraham, Moïse et David. Ces trois personnages sont venus — grâce à notre machine à voyager dans le temps — jusqu'à la crèche. Une façon de dire qu'ils ont rejoint Jésus ou que Jésus reçoit et reprend leur héritage.
Abraham est l'homme de la confiance, de la foi. Il a été partout où Dieu lui disait d'aller. Cette confiance on la retrouve dans la relatin de Jésus avec Dieu, qu'il appelle son Père ou même « papa. » Un confiance totale, fondamentale, ils ne font qu'un.
Maïse est le législateur, celui qui a donné un code de conduite au peuple d'Israël, qui a montré qu'il n'y a pas de culte sans un comportement droit, sans une justice dans tous ses gestes. Dans le Sermon sur la montagne (Mt 5—7), Jésus se pose en nouveau législateur, avec comme loi fondamentale l'amour, l'amour de Dieu et l'amour du prochain.
David, comme roi choisi par Dieu, annonce de nouvelles formes de pouvoir, d'autorité. Il annonce le Messie à venir, celui qui règnera sur les cœurs par sa bonté. Jésus, le Messie, le Christ, n'impose rien. Il lance un appel à aimer, un appel à servir.
Dans l'humilité de sa naissance, Jésus reposant dans une simple crèche (une mangeoire pour les animaux), le ton est donné. Jésus se fait serviteur. Une invitation à suivre ce roi humble nous est lancée. Invitation à suivre Jésus comme Abraham, comme Moïse, comme David ont suivi Dieu.
Joyeux Noël à tous.
Amen
@ Jean-Marie Thévoz, 2019
2 Samuel 13
26.7.2015
Femmes de la Bible (IV) : Tamar, fille de David
2 Samuel 13 : 1-22 Luc 12 : 2-7
Télécharger le texte : P-2015-07-26.pdf
Chères paroissiennes, chers paroissiens,
Il y a dans la Bible des histoires terribles ! C’est le cas de ce récit du viol de Tamar. Comment une telle histoire peut-elle faire partie de l’Histoire sainte, du livre qui contient la Parole de Dieu, de l’Ecriture qui doit nous rapprocher de Dieu ? Eh bien justement, la Bible témoigne de la rencontre entre Dieu et le monde, du choc que représente l’irruption de Dieu dans le monde réel. Ainsi la Bible est-elle en même temps le reflet du monde et de la vie réelle et le jugement de Dieu sur ce monde ! D’où la présence de textes violents, de situation perturbantes. C’est le reflet du monde réel. C’est pourquoi la Bible n’est pas moins violente que nos journaux !
Aujourd’hui nous accompagnons Tamar dans son parcours. Le récit la concernant nous montre comment se prépare le piège qui va se refermer sur elle, le crime dont elle a été victime et les conséquences qui en découlent. Nous allons voir d’abord quelques éléments de la réalité sociale et humaine, ensuite les perturbations que produit ce viol, enfin le jugement de Dieu sur ces violences.
A. D’abord quelques éléments de la réalité sociale et humaine qu’on trouve dans toutes les sociétés et à toutes les époques (évitons de penser : aujourd’hui nous sommes plus civilisé). C’est la domination des hommes sur les femmes. La violence qui est toujours sous-jacente dans les rapports humains, y compris dans la sexualité. Et le fait, statistiquement reconnu, que la majorité des violences sont le fait de personnes connues ou proches de la victime et pas de psychopathes tombant au hasard sur une personne dans la rue. Tous ces éléments sont présents dans notre récit et sont toujours actuels.
B. Ensuite j’aimerais m’attarder sur les perturbations induites par le viol (v. 15-22). On observe un retournement des sentiments d’Amnon. Il se croyait fou amoureux, il se découvre juste la marionnette de ses désirs. Il se dégoûte lui-même, mais n’ose pas regarder ce sentiment en face, aussi projette-t-il ce dégoût sur Tamar et la prend-il en haine. Il fait de sa victime la coupable de ce qui s’est passé. C’est une deuxième négation de la victime. Cela conduit au rejet de Tamar et à son expulsion de l’appartement d’Amnon (même terme que dans Genèse 3 pour l’expulsion du jardin d’Eden). Cela conduit à la désolation pour Tamar. Le viol est une négation de sa personne, de sa parole (elle essaye d’éviter la violence par le dialogue), la négation de son être intérieur. La victime n’est plus sûre de rien, le sol se dérobe sous ses pas. L’état de choc conduit à un état de deuil, la perte de ses repères, la perte de ses soutiens, la perte de son estime de soi. Cet isolement est renforcé par les prises de positions et les « conseils » de ses proches : «Garde le silence», « N’en fait pas une histoire». Il y a une minimisation des faits, de la douleur, de la blessure intérieure. Cela conduit à la paralysie, à l’inaction, au sentiment d’impuissance : personne ne veut entendre le cri de Tamar. La solidarité se crée autour des coupables, des complices, au lieu de se former autour de Tamar. Cela conduira à une augmentation de la violence, puisqu’Absalom va tuer Amnon, mais sans que Tamar soit réhabilitée et puisse vivre une vie à peu près normale. Voilà les conséquences du viol que nous présente le texte biblique.
C. Que peut-on y lire du jugement de Dieu ? Il faut lire entre les lignes et tenir compte de la Bible en entier, y compris le Nouveau Testament, pour voir le jugement de Dieu. Le récit ne fait pas intervenir les foudres divines, c’est plus plus subtil et plus encourageant pour nous ainsi. Ce qui est révélateur du jugement de Dieu, c’est la position du narrateur. Le narrateur se pose comme une sorte de chroniqueur judiciaire. Il ne passe rien sous silence. Il montre la planification du crime, sa préméditation, la construction minutieuse du piège, le rôle des complices, puis l’exécution pas-à-pas de ce qui a été planifié. Rien n’est passé sous silence, tout est dévoilé. Cette chronique est déjà — en soi — une dénonciation du crime, elle pointe les coupables et innocente totalement Tamar. Elle n’y est pour rien, elle est juste victime, elle est victime juste. Aucun reproche ne peut être imputé à Tamar, alors qu’on sait combien de fois les procès pour viols tournent à l’accusation de la victime.
Le crime est dénoncé comme un crime dans le récit. Cela nous rappelle le procès de Jésus, sa Passion, où les narrateurs font ce même travail de déconstruction minutieuse du mensonge habituel qui fait de la victime le coupable, responsable de ce qui lui arrive. Non, ici, le texte dit bien où est le mal, où est le bien. Nous avons ici un récit précurseur du récit de la Passion, une chronique judiciaire qui montre le juste qui n’est pas reconnu comme tel par les personnes autour de lui, mais que le lecteur peut reconnaître comme innocent. Ce qui aurait dû être caché dans la vie de David et de ses fils — parce que cela ternit l’image de la royauté — cela-même est révélé dans le récit biblique. Le juste n’est pas toujours reconnu comme juste et innocent de son vivant, mais Dieu le voit et ne l’oublie pas : «Tous ce qui est caché sera découvert, tout ce qui est secret sera connu» dit Jésus (Luc 12 :2).
Les actes et les gestes de Jésus apportent une lumière sur les relations sociales. Lorsque Jésus mange chez Simon le Pharisien et que celui-ci juge « de mauvaise réputation» la femme qui baigne les pieds de Jésus de parfum et les essuie avec ses cheveux (Luc 7:16-50), Jésus réhabilite cette femme. Lorsque les pharisiens amènent à Jésus la femme adultère (Jean 8:1-11) (qui comparait seule accusée, comme si elle avait pu commettre l’adultère sans homme !) Jésus renvoie tout le monde au compte de ses propres péchés. Chaque fois, le jugement de Dieu se manifeste par la réhabilitation, la restitution de la dignité à la personne blessée. Le monde écrase la victime, Dieu relève la victime.
Quelles que soient les atteintes, les blessures, aux yeux de Dieu la victime est sans tache, sans traces de collaboration avec le bourreau, sans reproche à se faire, sans honte à éprouver. Le Christ en croix est la figure de toutes les victimes maltraitées, violentées, abusées. Et on peut élargir le cercle des personnes abusées pour y joindre les enfants placés, les enfants soldats, la traite des femmes, les victimes d’inceste et d’abus, les conjoints battus etc. sans parler des victimes des violences étatitques et institutionnelles et celles des violences guerrières ou économiques.
Toutes ces personnes sont assimilées au destin du Christ dans le cœur de Dieu. Dieu souffre de les voir souffrir injustement dans les mains des hommes et il leur réserve la même réhabilitation, la même résurrection, la même vie nouvelle qu’à Jésus.
De même que la vie du Christ est gardée intacte dans la main de Dieu, de même le noyau intime de toute personne abusée est gardé intact dans le cœur de Dieu.
Comme Jésus blessé sur la croix meurt et ressuscite, chaque personne blessée ressuscite avec lui, avec les marques de ses blessures, mais vivante à nouveau.
Amen
© Jean-Marie Thévoz, 2015
1 Samuel 25
5.7.2015
Femmes de la Bible (II) : Abigaïl
1 Samuel 25 : 2-42
Télécharger ici le texte : P-2015-07-05.pdf
Chères paroissiennes, chers paroissiens,
Aujourd’hui nous découvrons la personne d’Abigaïl dans un épisode qui pourrait quasiment sortir du recueil des mille et une nuits, une sorte d’histoire racontée dans un style oriental où se mêlent richesse et pouvoir, vie et mort, beauté et orgueil. Alors on peut se demander pourquoi cette histoire est restée dans la Bible, à part le fait qu’elle appartient à la saga de David ? Comment s’inscrit-elle dans l’histoire de David et dans l’histoire biblique ?
Quelques mots sur le contexte de cette histoire. En gros, le premier livre de Samuel nous relate l’établissement de la royauté avec Saül comme premier roi. Un roi insatisfaisant, un roi qui n’est pas fait sur le modèle de la royauté que Dieu veut établir sur Israël. Aussi ce livre mêle-t-il la royauté de Saül à l’histoire de l’ascension de David vers le trône d’Israël. Le deuxième livre de Samuel est consacré au règne de David. Les deux livres des Rois traitent ensuite de sa succession et de ses successeurs.
Mais là nous sommes encore dans le premier livre de Samuel. Il est donc question de l’ascension de David à la royauté et, en quelque sorte, de sa formation en tant que roi.
On voit d’abord David au service du roi Saül, on ne le voit vaincre Goliath, s’allier à Jonathan contre Saül, être en guerre contre Saül et — dans le chapitre 24 — celui qui précède le nôtre, on voit David épargner la vie de Saül, pourtant à sa merci dans la grotte d’En-Guédi. Épisode qui se répète dans le chapitre 26, où, là non plus, David ne porte pas atteinte à la vie de Saül, car la vie de celui qui a été oint comme roi par le prophète de Dieu est sacrée !
Notre chapitre 25, avec l’histoire de David face à Nabal et Abigaïl, comporte une unité de thème avec ses deux chapitres qui l’encadrent : celui de la vengeance. Lorsque Nabal refuse de payer les services de protection de David que la bande armée a assurée autour de ses troupeaux, David est furieux, il ne pense qu’à tuer celui qui lui fait affront. Le récit n’est pas clair : David vient-il chercher le payement d’un contrat loyal, ou bien vient-il racketter Nabal pour une « protection » de type sicilienne, mais peu importe. Peu importe que la colère de David soit justifiée ou orgueilleuse. Il y a un désir de vengeance, de faire couler le sang. Et David en a le pouvoir, comme chef d’une petite armée.
C’est là qu’intervient Abigaïl. Elle parle longtemps à David pour le convaincre de renoncer à son geste funeste. Les prédicateurs parlent beaucoup de la nourriture et des gâteaux qu’elle apporte, mais c’est son discours qui est remarquable ! C’est d’ailleurs le discours de femme le plus long rapporté dans la Bible.
Que dit-elle à David pour le convaincre ? Quels arguments utilise-t-elle ? D’abord ceux qu’elle n’utilise pas. L’appel à la pitié ; la compensation ou la réparation (tu as ce que tu voulais, j’ai apporté la nourriture que tu voulais de Nabal) ; l’appel à sa beauté — qui est remarquable comme le souligne le texte.
Non, dans son discours, elle commence par en faire une affaire personnelle, interpersonnelle entre elle et David. Elle prend sur elle toute la faute. Cela nous paraît injuste — et faux en plus ! Cela ressemble à un discours misérabiliste, culpabilisé : « tout est de ma faute, n’en veut pas aux autres ». Elle aurait pu négocier un échange : « c’est ma faute, prends-moi et laisse la vie sauve aux autres ». Mais ce n’est pas ce qu’elle fait. En affirmant que la faute lui revient, elle se pose en interlocutrice unique et responsable, en position de négocier et d’arriver à un accord. En fait elle évacue Nabal, son mari, de la négociation. Abigaïl règle d’ailleurs son compte à son mari dans une phrase pleine de jeux de mots puisque Nabal veut dire vaurien ou fou ou imbécile. Abigaïl prend les rênes de la négociation, mais elle se place en position inférieure à David, non pas parce qu’elle est une femme, mais parce qu’elle sait être en face de celui qui a été oint par Dieu et qui sera le prochain roi d’Israël. Un homme on aurait fait autant (sauf son fou de mari).
Ensuite, Abigaïl met en question la volonté de vengeance et la violence de David : « Mais maintenant, par le Seigneur vivant et par ta propre vie, le Seigneur lui-même te retient d'en venir au meurtre et de te faire justice toi-même. » (1S 25:26) Et là, on voit la parenté avec les chapitres 24 et 26. Vis-à-vis du roi Saül, David a su se retenir d’exercer sa vengeance. Ne devrait-il pas agir de même envers la maison de Nabal ? Oui, mais là, David n’a pas affaire avec un oint du seigneur ! Quelle raison aurait David d’épargner Nabal et sa maison ?
C’est là le génie d’Abigaïl, et selon moi, la raison pour laquelle ce récit a sa pleine place dans la Bible et devient pour nous un enseignement. Abigaïl rappelle à David les promesses que Dieu lui a faites : « Lorsque le Seigneur accomplira tous les bienfaits qu'il t'a promis et fera de toi le chef d'Israël… » (v.30). Abigaïl rappelle à David sa raison d’être, les raisons pour lesquelles il a rassemblé une armée. Elle lui rappelle que l’accomplissement est à bout touchant et qu’il pourrait tout risquer, maintenant, en commettant un faux pas. Abigaïl fait donc appel aux fondamentaux de la vie de David, à sa raison d’être, à sa vocation, à sa mission, pour avoir un critère de décision pour savoir ce qu’il est juste de faire ou injuste de faire dans ces circonstances. Abigaïl pose un principe éthique fondamental, une méthode de décision dans les situations difficiles : ce que je dois faire dans cette situation, doit être en cohérence avec ma vocation, avec le but de ma vie, avec la personne que je suis et que je veux être. Toutes les petites décisions doivent être orientées vers l’ essentiel, en cohérence avec les valeurs supérieures que je poursuis.
Abigaïl en appelle donc à la vocation, à la mission de David. Elle ne lui dit pas ce qu’il doit faire ! Elle lui demande : soit cohérent avec qui tu es et qui tu vas devenir, ne fait pas quelque chose que tu regretteras, quelque chose qui sera une tache dans ton parcours.
Abigaïl donne ici une leçon de politique extrêmement sensée, qui s’applique à David, mais dont tous les hommes politiques devraient s’inspirer. Pas seulement dans la période où ils visent le pouvoir, mais également dans l’exercice du pouvoir.
C’est une des questions qui tourmente les rédacteurs de la Bible : savoir comment limiter le pouvoir, le pouvoir de ceux qui sont au sommet, au sommet du pouvoir ! « Capitaine après Dieu ! » Qui pourra limiter leurs pouvoirs ? Les deux livres de Samuel et les deux livres des Rois essaient des pistes sur cette question de la limitation du pouvoir. Et la réponse est toujours la même : c’est la loi divine, le respect de Dieu, ce savoir soumis à une loi supérieure qui peut seule limiter le pouvoir de ceux qui ont le pouvoir de la force. Ainsi se sont mit en place, au fil du temps, des mécanismes de régulation. Au XXe siècle ce sont les droits de l’homme et les tribunaux internationaux, comme tentatives de limiter le pouvoir des superpuissants.
Ici nous sommes dans le dialogue entre Abigaïl et David et on voit que le discours d’Abigaïl, l’appel à la mission et à la vocation de David, l’appel aux promesses divines fait réfléchir David. Et en effet, il va subordonner sa fureur à sa vocation. Il va renoncer à entacher son parcours avec le sang de Nabal et de sa maisonnée. C’est tout seul que Nabal va aller vers son sort, une crise cardiaque ou un AVC l’emporte.
Ensuite David va profiter du veuvage d’Abigaïl pour l’épouser de manière à avoir auprès de lui une femme d’un tel niveau d’intelligence et de si bons conseils. Les compétences psychologiques et relationnelles d’Abigaïl sont, en quelque sorte, récompensées dans le récit par le fait qu’elle est débarrassée d’un mari sans valeur, pour devenir l’épouse du roi. Le conte oriental finit bien, non sans nous avoir laissé une maxime de valeur : «Oriente tous les choix de ton existence de manière à ce qu’ils te fassent avancer vers tes plus hautes valeurs. »
Amen
© Jean-Marie Thévoz, 2015
Esaïe 9
22.12.2013
Conte : Adam réveille-toi !
Esaïe 9 : 1-2+5-6 Esaïe 7 : 10-14 Esaïe 60 : 1-5
Télécharger le texte ici : P-2013-12-22.pdf
Dans le pays de l’ombre, il fait tout noir ! Dans la shéol, c’est comme dans une caverne lorsque la dernière torche s’est éteinte. Tout est noir, tout est immobile. Pourtant il y a du monde dans ce séjour souterrain puisqu’il rassemble tous ceux qui ont quitté la surface de la terre. Mais tout le monde est immobile, parce que — dans le noir — si on bouge on se cogne et on se fait mal. Alors tout le monde dort, d’un sommeil qui ne respire pas, d’un sommeil qui ne bouge pas, d’un sommeil qui pèse des milliers de tonnes. Pourtant, là-bas, au bord de la frontière, une femme se met à bouger... elle lève la tête... elle se redresse... et bouscule le compagnon qui partage sa couche :
- Adam ! Réveille-toi ! Réveille-toi !
- Oh ! Laisse-moi tranquille ! Voilà des siècles que je dors ! Je ne vais quand même pas me réveiller maintenant !
- Si ! Adam ! Réveille-toi !
- Oh ! Eve ! Tu ne vas pas me refaire le coup de la pomme ! Laisse-moi tranquille !
- Adam ! Je t’en prie ! Regarde là-bas, la lumière ! Tu ne vois pas ? C’est comme au matin du sixième jour, quand je t’ai découvert dans le jardin, il y avait cette lumière-là au fond de tes yeux...
- Tu as raison... la lumière de Dieu est en train de revenir... elle illumine ton visage...
Dans le pays de l’ombre, il y a une mer, une mer très sombre, une mer qui a l’air de vouloir engloutir tous ceux qui l’approchent. Au bord de l’eau, un homme est figé, avec sa femme et ses trois fils. Comment est-il possible de dormir au bord de ces eaux qui secouent en furie leurs tentacules de mort ?... Et soudain, les eaux s’apaisent, peu à peu... Le bruit du silence réveille la dormeuse... elle secoue son compagnon :
- Noé ! Ecoute !
- Tu es folle, ma femme ! Il n’y a aucun bruit ! Par contre, je vois...
- Que vois-tu ? Tu es fou, Noé ! Tu sais bien que dans cette obscurité, il n’y a rien à voir !
- Si, regarde, là-bas ! Du rouge... rouge comme le couple de colibris entré dans l’arche au dernier moment...
- Oh ! Je vois de l’orangé... orange comme la petite grenouille à trois doigts qui sautait partout... et du jaune comme les plumes des canaris...
- Regarde, le vert... vert comme les feuilles du rameau d’olivier rapporté par la colombe... et aussi le bleu... un bleu profond comme celui des ailes de la libellule...
- Et du violet... violet comme l’étrange papillon posé sur le rebord de la fenêtre de l’arche...
- La lumière de Dieu est en train de revenir... Regarde ce bel arc-en-ciel... l’alliance se renouvelle.
MUSIQUE
Dans le pays de l’ombre, il y a un ciel, un ciel très noir, un ciel déprimé et déprimant. Pourtant, tout à coup, on entend un rire, un rire de femme, un rire clair jaillissant comme une source :
- rire de femme
- Sarah ! Tais-toi ! Qu’as-tu à rire pareillement ? Notre fils est grand depuis longtemps... Tu n’es tout de même pas enceinte une nouvelle fois ?
- Non, Abraham ! Non ! Mais lève les yeux au ciel ! Une étoile est revenue !
- Une étoile ? C’est impossible, pas ici.
- Si, une étoile comme toutes celles que Dieu t’avait fait voir pour t’indiquer que tu serais le père d’un grand peuple.
- Oui ! Le père de tous les croyants... Oui, je suis le père de tous les croyants... Mais cette étoile elle est toute seule ! Mais c’est vrai qu’elle est bien plus brillante que toutes celles que j’ai vues autrefois. Tu crois que Dieu veut nous annoncer une bonne nouvelle ?
- Serait-ce encore une naissance ?
- Tu es folle, Sarah ! Rien ne naît au pays de l’ombre !
- Attention, Abraham, si tu doutes, tu vas perdre ton titre de « père des croyants » !
On ne peut pas sortir du pays de l’ombre. C’est un endroit complètement clos, fermé par les portes de la mort. Jacob, lui, a trouvé un moyen : il s’évade par le haut ! Il dort, avec une échelle à côté de lui. Quand il était vivant, il avait dormi ainsi à Béthel et il avait eu un songe... le songe de sa vie : pensez donc, il avait vu Dieu !
Une échelle était dressée sur la terre et le sommet de cette échelle atteignait le ciel... Des anges montaient et descendaient... et Dieu lui avait parlé ! Il n’est pas interdit de refaire le même rêve plusieurs fois. Alors, Jacob ne se lasse pas. Il rêve qu’il monte en gravissant les échelons de son échelle. Il monte vers le ciel, il monte dans ce royaume de lumière...
Mais ce soir, c’est différent. Il n’a pas l’impression de dormir et pourtant il voit des anges, comme à Béthel ! Il voit des anges qui descendent vers la terre, ils se préparent à chanter pour des bergers.
- C’est sûr, dit-il en se redressant, si je vois des anges descendre vers la terre, c’est que Dieu va parler une nouvelle fois ! Et il entend les anges chanter : « Gloire à Dieu et Paix sur la terre. »
MUSIQUE
Dans le pays de l’ombre, il fait froid et il est impossible de faire du feu. Çippora, glacée comme la mort, dort à côté de Moïse... Soudain, elle se réveille... surprise par une chaleur douce qui vient lui lécher les pieds...
- Moïse ! Regarde ! Des bergers qui gardent leurs troupeaux ! Ils ont allumé un feu pour se réchauffer ! Regarde ! Ils ont même un petit mouton noir... comme toi quand tu faisais paître le bétail de mon père dans le pays de Madiân... Moïse, il y a si longtemps que nous n’avons pas vu un bon feu !
- Oh, Çippora ! Ce feu a quelque chose d’extraordinaire ! Sa chaleur est si enveloppante !... Tu sais, il me rappelle un autre feu, celui que j’avais vu sur la montagne de l’Horeb, tu sais le feu dans le buisson... Serait-ce « Je suis » qui revient ? Dieu... le Dieu de nos pères... le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob...
- Moïse ! Ce feu a été allumé par des bergers... pas par Dieu !
- Oui, ma douce ! Mais tu sais que Dieu a un petit faible pour les bergers : Il a aimé l’offrande d’Abel, il a parlé en songe à notre père Jacob, il a donné une mission importante à son fils Joseph... et à moi ! Si tu as été réveillée, ma belle, de ce sommeil glacé, c’est que Dieu va venir !
Dans le pays de l’ombre, personne ne chante. Il n’y a pas d’oiseaux, pas de cascades, pas de brise légère pour charmer les oreilles. Il n’y a pas de musique. Pourtant, dans un coin, il y a une cithare. Un homme a posé sa main dessus et dort ainsi, profondément. Cet homme n’est pas n’importe qui : il a gardé sur la tête une couronne... qui ne lui sert pas plus que la cithare à laquelle il s’accroche. Cet homme a d’abord été le petit David musicien qui s’occupait des moutons de son père. Puis il est devenu roi d’Israël... un grand roi.
David, tout à coup, sort de son sommeil et se met à chanter :
« La ténèbre n’est pas ténèbre devant toi, la nuit comme le jour est lumière. » (Ps 139:12)
Puis David se met à danser en tournoyant comme le jour où il s’est installé à Jérusalem :
- « Mon âme, bénis l'Éternel! Que tout ce qui est en moi bénisse son saint nom! Mon âme, bénis l'Éternel, Et n'oublie aucun de ses bienfaits ! » (Ps 103:1-2).
MUSIQUE
Dans le pays de l’ombre, personne ne parle. Les mots ont été tués. Il est interdit de s’exprimer. Il n’y a aucune place pour la parole venant du cœur. Quand Esaïe est arrivé dans ce pays-là, il a eu beaucoup de mal à se taire. Même couché là, au milieu des autres, il parle encore. Car Esaïe est un prophète, c’est-à-dire celui qui parle devant, au nom de Dieu. Alors, Esaïe parle en dormant... c’est à peine si on l’entend... de toutes façons, entend-on les prophètes, même quand ils sont réveillés ? Soudain, Esaïe se dresse et crie :
- « Pour l'amour de Sion je ne me tairai point, Pour l'amour de Jérusalem je ne prendrai point de repos. Jusqu'à ce que son salut paraisse, comme l'aurore, Et sa délivrance, comme un flambeau qui s'allume. » (Es 62:1)
Jérémie, qui dort non loin de là le fait taire :
- Chut ! Esaïe ! Tu sais bien que Jérusalem passe ses nuits à pleurer, que les larmes couvrent ses joues. Personne ne la console, tous ses amis l’ont trahie.
- Non, Jérémie, je ne me tairai pas ! Le Seigneur vient : « Le Seigneur lui-même vous donnera un signe, Voici, la jeune fille deviendra enceinte, elle enfantera un fils, Et elle lui donnera le nom d'Emmanuel. » (Es 7:14)
Je vous le dit, à tous, à chaque habitant du pays de l’ombre : « Lève-toi, sois éclairé, car ta lumière arrive, Et la gloire de l'Éternel se lève sur toi. » (Es 60:1)
Tandis que le prophète parlait « on entendit le bruit d’un grand remue-ménage » (Ez 37:7) et les habitant du pays de l’ombre « reprirent vie. Ils se dressèrent sur leurs pieds et ils formaient une foule nombreuse » (Ez 37:10) comme le dirait Ezéchiel.
Et on vit Sarah et Abraham suivre une étoile, on vit Jacob écouter des anges, on vit Çippora et Moïse habillés en bergers s’avancer vers une pauvre étable avec leurs moutons.
Et on vit Adam, Noé et David, habillés de riches vêtements et couronnés d’or apporter des cadeaux à un enfant couché dans une crèche.
Et on entendait au loin Esaïe dire :
- Viens Jérémie ! Je te l’ordonne ! Viens ! Tu ne vas quand même pas laisser passer la Lumière du monde sans te bouger !
- La Lumière du monde ?
- Oui ! Regarde ce bébé, là-bas, entre son père et sa mère ! Il est la Lumière du monde !
- Ce bébé ? Je ne comprends pas !
- Tu comprendras plus tard ! Viens ! Allons adorer l’enfant qui vient de naître !
- - - - -
d’après Marie-Françoise Chauveau, original sur : http://ursulines.union.romaine.catholique.fr/Adam-Reveille-toi
© Jean-Marie Thévoz, 2013
1 Samuel 24
3.10.2010
David sort d'une situation sans issue.
Télécharger la prédication : P-2010-10-03.pdf
1 S 24 : 1-8, 1 S 24 : 9-12+17-20, Jn 13 : 34-35
Chères paroissiennes, chers paroissiens,
Petit plongeon dans l'Ancien Testament ce matin avec cet épisode de la lutte entre Saül et David. Je rappelle brièvement le contexte pour comprendre cette situation, puis nous verrons qu'au delà de l'Histoire, ce récit nous dit des choses importantes pour nous et notre époque.
Le récit nous reporte au début de la royauté en Israël. Le peuple a demandé d'être gouverné par un roi — comme les autres nations. Le prophète Samuel a consulté Dieu et Saül a été désigné comme premier roi d'Israël. Mais Saül prend des chemins de traverse et se détourne de Dieu, de sorte que Dieu lui retire son appui et choisit le jeune David comme futur successeur. David est d'abord au service de Saül, mais ce dernier le voit grandir en force et en autorité, il prend peur et cherche à le tuer. David s'enfuit et Saül le pourchasse pour le tuer.
C'est dans ces circonstances que la rencontre que nous avons entendue se produit. Saül est parti avec la détermination de tuer David. Dans cette grotte, Saül était désarmé, à la merci de David et de ses compagnons. Pourtant, David renonce à profiter de son avantage, il laisse la vie sauve à Saül, mais s'arrange pour lui faire connaître son geste et discuter avec lui.
C'est cette rencontre, et ce qui se passe dans le cœur, la tête et les mains de David, qui m'intéresse et qui me semble nous donner une leçon de vie. Il se passe quelque chose à trois niveaux : au niveau personnel, interpersonnel et universel. Nous allons voir un à un chacun de ces niveaux.
Premier niveau, le niveau personnel. C'est ce qui se passe chez David, dans son corps, dans son cœur et dans sa tête. Vous l'imaginez : il est caché dans une grotte avec ses compagnons de lutte. C'est un homme pourchassé par Saül et son armée de 3'000 hommes. Et voilà que son bourreau se présente devant lui, en ombre chinoise sur l'ouverture de la caverne. Saül dépose son manteau, s'accroupit, certainement dos à l'obscurité de la caverne pour regarder la lumière de l'entrée, pour surveiller que personne ne vient de l'extérieur.
David est là, dans son dos, l'épée à la main. Il n'a qu'un geste à faire pour mettre fin à toute cette poursuite, à toute cette persécution. David a tous ses compagnons derrière lui — et il sait ce qu'ils pensent : "Vas-y, tue ton ennemi. S'il est là c'est que Dieu lui-même l'a mis à ta portée pour t'en débarrasser…"
Et le texte nous dit : "Le cœur de David se mit à battre très fort." Vous imaginez l'émotion. Vous imaginez l'envie ! Un geste et finis les soucis, finis les ennuis. Un geste et David est roi d'Israël, il sera aux commandes, pas juste l'éventuel futur roi.
Eh bien, David vit cette émotion, mais ne se laisse pas dominer par elle. Il l'accepte, mais il refuse de se laisser diriger par elle.
Dieu lui a promis la royauté. David fait confiance en Dieu pour la lui donner, pas pour la prendre. David choisit le contrôle de lui-même et renonce à la voie de la facilité. En grand chef, il maîtrise aussi ses troupes. Il coupe juste un pan du manteau de Saül comme preuve de son renoncement à tuer.
Quand Saül est sorti de la caverne, David sort après lui et lui explique ce qui vient de se passer. Si David avait tué Saül, il n'y aurait pas ce dialogue. Le renoncement de David permet le passage au deuxième niveau : le niveau interpersonnel.
A ce niveau interpersonnel, Saül et David étaient bloqués dans un schéma relationnel qu'on appelle "bourreau-victime" ou "persécuteur-victime." Dans la vision de Saül, il est lui-même victime. Puisque David va lui prendre la couronne, David est le bourreau. Pour échapper à ce rôle de victime, Saül pourchasse David, il inverse donc les rôles, mais ne sort pas du schéma "persécuteur-victime."
Par son geste dans la caverne, David fait éclater le schéma, il ouvre une porte de sortie. C'est comme s'il disait à Saül : "Regarde, j'ai renoncé être ton bourreau, sors de ton rôle de victime et nous pourrons vivre côte à côte en bons termes. Je ne te veux pas de mal, tu peux arrêter sans risque de me pourchasser.
Qu'est-ce qui permet à David de trouver cette troisième voie ? C'est le troisième niveau : le niveau universel ou divin. Dans le texte, c'est le respect dû au roi choisi par Dieu qui anime David. Plus largement, c'est la confiance qu'a David dans l'idée que sa vie est entre les mains de Dieu et que c'est Dieu qui va faire advenir ce qui lui est promis.
Avec cette confiance fondamentale, pas besoin de tout faire — et faire n'importe quoi — pour faire avancer ses pions. Tous les gestes, tous les mouvements doivent être en accord avec le but, avec la volonté divine.
Visiblement, David a pour principe de ne pas rendre le mal pour le mal. Dans ce sens, David est bien une figure messianique. Il anticipe, dans ce principe, ce que Jésus a porté à son comble : toujours opposer l'amour au mal. Rendre le bien pour le mal qu'on vous fait.
Dans le texte, cela est mis en évidence dans le dialogue entre David et ses compagnons d'armes. Ceux-ci disent à David : "Voici le moment annoncé par le Seigneur : il te livrera ton ennemi." Les compagnons d'armes de David lisent la situation comme "Dieu te donne l'opportunité de tuer ton ennemi." Mais David a une certaine idée de Dieu qui n'est pas un Dieu qui tue, mais un Dieu qui donne la vie.
David est messianique parce qu'il voit Dieu comme Jésus nous le décrira 1'000 ans plus tard, comme un Dieu d'amour. David a déjà ce filtre pour interpréter les situations : "Aimez-vous les uns les autres, il faut que vous vous aimiez les uns les autres comme je vous ai aimé." (Jn 13:34)
Il n'y a rien de plus dangereux dans notre monde actuel que les gens qui savent ce que Dieu veut, au plan géopolitique, et qui disent que Dieu veut la mort de tel ou tel.
David nous enseigne que les circonstances ne nous disent rien — ni en blanc, ni en noir —sur ce que nous devons faire. Nous devons nous équiper d'un filtre qui nous permette de comprendre ce que Dieu veut de nous. Et dans le christianisme, ce filtre et celui du commandement nouveau, celui de l'amour.
Toute situation, tout verset biblique, toute action doit être passée à ce filtre. Toute autre interprétation que celle du respect et de l'amour doit être retenue par ce filtre, pour ne laisser passer que des gestes, des actions qui augmentent la paix dans le monde. A la manière du geste de David qui nous sort du cercle et du schéma de la violence.
Amen
© Jean-Marie Thévoz, 2010