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parabole

  • Un semeur insensé

    (17.9.2000)

    Marc 4

    Un semeur insensé

    Deutéronome 6 : 1-9.     Marc 4:1-9

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    Chers amis,

    De nos jours de puissants tracteurs tirant des remorques perfectionnées s'occupent à semer en lignes bien droites nos champs de blé, de maïs, de tournesols ou de soja. Arrivé au bout de son champ, l'agriculteur bloque l'épandage de la semeuse avant de faire son demi-tour et repartir. Qui a l'idée de perdre du grain sur le chemin, dans les cailloux ou dans les ronces ?

    Cette attitude ne date cependant pas d'aujourd'hui et de nos puissantes machines, ou de notre désir d'efficacité. Il faut imaginer le petit paysan du temps de Jésus. Il n'a pas acheté son blé à une multinationale. Il tient son grain de la part qu'il a mise de côté dès la dernière moisson, sur sa dernière récolte. Ce grain est le fruit de ses efforts, il ne va pas le gaspiller sur le chemin, dans les cailloux ou les ronces.

    Pire encore, si la récolte de l'année a été mauvaise, il doit — avec toute sa famille — se restreindre et surtout ne pas toucher à cette partie mise à part, de peur de compromettre toute récolte future ! Qu'il est précieux le grain à semer !

    Il n'y a qu'un insensé qui peut se comporter comme le semeur dont parle Jésus ! Un insensé ou quelqu'un qui possède des ressources inépuisables. Le semeur dont Jésus parle est un mélange des deux. Il fait le pari fou que le miracle de la germination peut se produire partout, qu'il vaut la peine de semer à tout vent, qu'on ne peut pas préjuger de ce qui va se passer.

    On ne peut pas préjuger que cette personne-là sera réceptive et celle-ci non. On ne peut pas préjuger que cet individu sera touché et que celui-là ne peut pas l'être. On ne peut pas le préjuger avant d'avoir semé.

    Et Dieu se refuse à préjuger, il est assez fou et généreux pour s'adresser à chacun, à celui dont le coeur a tant été piétiné qu'il est devenu dur comme de la terre battue; autant à celui dont la vie est si remplie de malheurs qu'il ne semble pas y avoir de place pour autre chose, qu'à celui qui se sent envahi par le chagrin ou les scrupules, par la culpabilité ou les soucis.

    Aucun n'est finalement inatteignable, impénétrable à l'amour de Dieu. Dieu s'abaisse et s'approche de chacun d'eux, de nous, pour les relever et leur offrir la possibilité du bonheur.

    Ce mouvement d'approche de Dieu vers nous est léger comme un grain qui tombe sur le sol. Ce n'est pas la foudre qui frappe, ce n'est pas un tremblement de terre qui creuse une faille, ce n'est pas un vent qui déracine les arbres (allusion à 1 Rois 19: 11-13), c'est juste un grain qui tombe par terre.

    [Je lâche quelques grains de blé du haut de la chaire pour faire entendre le bruit que cela fait]

    Vous avez entendu ? Presque rien ou même rien du tout ! Ce n'est pas pour rien que Jésus commence sa parabole en disant "Ecoutez !" (Mc 4:3) et qu'il la termine par ces mots : "Que celui qui a des oreilles pour entendre, qu'il entende, qu'il s'en serve !" (Mc 4:9)

    Dieu ne s'impose pas à l'être humain, il est discret comme un grain qui tombe par terre, mais ce grain est lourd d'une multitude de potentialités pour celui qui l'accueille et le laisse se développer.

    Lors du baptême, la graine de l'amour de Dieu est semée, un geste, quelques gouttes d'eau, une promesse de présence et d'amour et la possibilité d'une croissance merveilleuse.

    Comme l'enfant que Dieu confie à ses parents, le grain nous est confié. A partir de là, nous sommes investis d'une responsabilité envers nous-mêmes, envers nos proches, envers la terre entière. Cet amour reçu, allons-nous le laisser s'envoler, s'assécher, s'asphyxier ? Ou allons-nous le développer, lui faire porter du fruit, le transmettre, le faire rayonner afin que le monde en soit enrichi et élevé ?

    Que celui qui veut entendre, ouvre ses oreilles et son esprit.

    Amen

     

    © Jean-Marie Thévoz, 2021

     

  • Aucune loi ne peut répondre à la question : "Qui est mon prochain ?"

    27.10.2019

    Luc 10

    Aucune loi ne peut répondre à la question : "Qui est mon prochain ?"

    Deutéronome 30 : 11-14.    Luc 10 : 25-37

    télécharger le texte ici P-2019-10-27.pdf

    Chers frères et soeurs en Christ,

    La parabole du bon Samaritain !

    Voilà une parabole bien connue de tous, au point que le terme de "bon Samaritain" est passé dans le langage courant comme un équivalent de "secouriste". Pourtant, dans ce récit, la partie "secouriste" n'est de loin pas la plus importante.

    Jésus raconte cette parabole au coeur d'un dialogue, d'une conversation assez vive avec un maître de la Loi. Un maître de la Loi — en Israël au temps de Jésus — c'est une personne qui s'est spécialisée dans la connaissance des commandements de Dieu et qui doit d'un côté élaborer des lignes directrices pour les autres, pour bien obéir à Dieu et de l'autre régler des conflits ou des questions délicates en se référant aux données bibliques.

    Il y avait donc souvent des discussions entre maîtres de la Loi pour chercher les meilleures réponses aux questions difficiles. C'est probablement dans ce contexte-là que le maître de la Loi vient interroger Jésus. Cela signifie aussi que Jésus était considéré dans les milieux théologiques comme quelqu'un qui avait des réponses à apporter.

    La question fondamentale que vient poser ce maître de la Loi est celle-ci : "Que dois-je faire pour recevoir la vie éternelle ?" (Luc 10:25) Jésus, en bon pédagogue et parce qu'il sait à qui il a affaire, lui retourne la question et le maître de la Loi lui cite les deux grands commandements.

    Le maître de la Loi doit être un peu frustré puisque Jésus n'a rien apporté dans le dialogue. Alors il pose une deuxième question qui a fait — et fait encore — l'objet de beaucoup de discussions : "Qui est mon prochain ?"

    C'est vrai, nous savons tous — du plus jeune au plus vieux, tout autour de la terre — que l'humanité vivrait mieux si chacun aimait son prochain, plutôt que d'être en conflit. Mais qui doit-on aimer ? Il y a, en général, deux sortes de réponses : d'un côté ceux qui disent qu'on doit aimer tout le monde et de l'autre ceux qui limitent cet amour à un groupe donné, et cela peut aller jusqu'à la "préférence nationale" que personne ici ne peut envisager comme réponse.

    On peut présager que la bonne réponse est plutôt du côté d'"aimer tout le monde" et le maître de la Loi en est probablement conscient. Mais comment puis-je aimer tout le monde ? On ne s'en sent pas la force ! Je suis un être limité dans mes forces, dans mes moyens, dans mon énergie ! Alors, qui dois-je aimer ?

    En posant cette question à Jésus, cet homme — maître de la Loi — exprime sa solitude face à toute l'humanité qui attend d'être aimée. Il faut imaginer la scène : un homme seul face à toute l'humanité. C'est une situation impossible, qui fait peur, la peur d'être englouti, d'être aspiré dans un puits sans fonds.

    Face à cette peur, Jésus se met à raconter une histoire : "Un homme descendait de Jérusalem à Jéricho..." vous avez entendu la suite. Jésus fait passer trois hommes devant le blessé à demi-mort. Un prêtre et un lévite qui ne s'arrêtent pas. Le prêtre et le lévite sont des hommes consacrés au service du Temple de Jérusalem et qui ont des obligations "professionnelles" de ne pas se mettre dans des situations d'impureté. Ainsi la Loi les oblige à ne pas toucher de morts hors de leur famille. Le blessé est "à demi-mort", donc entre la vie et la mort. Il y a là une incertitude et donc un risque que ni le prêtre, ni le lévite ne veulent prendre. Ils ne sont ni méchants, ni sans coeur, ils se meuvent seulement dans un carcan d'obligations et de codes qui délimite leur marge de manoeuvre.

    En racontant cette parabole, c'est à ce carcan de la Loi que s'en prend Jésus. Il veut faire comprendre au maître de la Loi que la recherche d'une réponse définitive, bien cadrée, complète, à sa question "qui est mon prochain ?" est une partie du problème et non de la solution.

    Définir "qui est mon prochain ?" c'est établir un code qui — dans certaines circonstances — va m'obliger à agir comme le prêtre et le lévite, à passer à côté de celui qui n'est pas sur la liste ! Une liste de personne à aimer ne peut plus laisser la porte ouverte au hasard des besoins et des circonstances. Et cette parabole est justement celle qui donne place au hasard. "Un homme descendait..." c'est un quidam anonyme, n'importe qui, le citoyen lambda des sociologues. Les brigands frappent aussi au hasard des circonstances, de façon aléatoire, n'importe qui pourrait être leur victime... et c'est face à ce hasard des circonstances, lorsqu'il survient qu'il faut être prêt à sortir de ses habitudes, de ses obligations, prêt à se détourner de son chemin programmé.

    Le troisième personnage est un Samaritain. Jésus manie l'ironie lorsqu'il désigne un Samaritain comme l'exemple à suivre. Le Samaritain est justement celui que les juifs accusent de ne pas suivre la Loi. Mais c'est justement — aux yeux de Jésus — parce qu'il ne suit pas la Loi, comme le prêtre et le lévite, que le Samaritain se laisse détourner de sa route. Le texte dit qu'il se laisse émouvoir, il se laisse toucher par la détresse du blessé.

    Jésus fait ici l'éloge de la liberté d'esprit et de l'élan du coeur. Ni la liberté, ni l'élan du coeur ne peuvent être définis dans une Loi, sinon on tombe dans le paradoxe psychologique du "soyez spontané !"

    Après avoir raconté cette parabole, Jésus demande au maître de la Loi : "Lequel des trois te semble avoir été le prochain de l'homme blessé ?" (Luc 10:36) En posant cette question, Jésus opère un renversement. Les trois hommes représentent l'humanité qui se trouve face au blessé seul. En posant cette question, Jésus inclut le maître de la Loi dans l'humanité qui fait face au blessé. On n'a donc plus le maître de la Loi seul face à l'humanité, mais le maître de la Loi dans l'humanité, face au blessé seul.

    La question importante — aux yeux de Jésus — n'est plus "qui est mon prochain ?", mais "qui va se mobiliser (parmi tous les humains) pour cet homme qui a besoin de secours!" C'est beaucoup moins effrayant !

    De plus, en posant la question "Lequel des trois ..." — implicitement — Jésus demande au maître de la Loi : "qui voudrais-tu être dans cette histoire ?"

    Et cela nous ramène à la première question du maître de la Loi : "Que dois-je faire pour recevoir la vie éternelle, la vraie vie, celle qui comble nos aspirations les plus profondes ?" Jésus répond en terme d'être : "Qui voudrais-tu être dans la vie ?" Et le maître de la Loi de répondre : "Celui qui a été bon pour le blessé." (Luc 10:37) Et Jésus l'encourage en lui disant "Va et fais de même."

    Ce que je comprends comme "Vis de cette liberté" — qu'aucune loi extérieure ne peut te donner. Vis ton humanité et laisse-toi interpeller par les situations que le hasard te présente, laisse-toi émouvoir, laisse-toi toucher, laisse parler ton coeur, c'est là que naît l'amour du prochain !

    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2019

     

  • Partager en deux l’abîme par une main tendue !

    Actes 3

    23.9.2018

    Partager en deux l’abîme par une main tendue !

    Actes 3 : 1-10       Luc 14 : 15-21

    télécharger le texte : P-2018-09-23.pdf

    Chers frères et sœurs en Christ,

    Dans le livre des Actes, Luc a pour ambition d’écrire l’histoire du début de l’Eglise. Mais ce n’est pas l’histoire humaine qu’il veut écrire. Il veut mettre en scène l’action de Dieu au milieu des disciples, des apôtres et des croyants. C’est pourquoi Luc a dépeint la descente de l’Esprit saint sur les disciples à la Pentecôte, puis la force que donne l’Esprit saint aux apôtres.

    Tout le défi pour Luc est de savoir comment montrer — rendre visible à tous — dans un récit, l’action invisible de Dieu. On ne peut voir le vent, mais on voit ce qu’il soulève ou fait bouger. Eh bien Luc va montrer ce qui bouge, ce qui change sous l’action de l’Esprit saint.

    La première action qui suit la Pentecôte est cette rencontre de Pierre et Jean avec cet infirme qui mendie à une porte du Temple de Jérusalem. Le mendiant est handicapé depuis sa naissance. Il faut le porter jusqu’à l’entrée du Temple pour qu’il puisse mendier et gagner sa subsistance. Il reste à la porte, parce que l’intérieur du Temple est interdit à ceux qui ont des infirmités, des défauts physiques. Ce mendiant est donc caractérisé par l’immobilité, la passivité, la dépendance et l’exclusion.

    Pierre et Jean sont interpelés lorsqu’ils passent devant lui. Ils le regardent d’abord — ce que nous ne faisons souvent pas avec les mendiants de nos rues, préférant la plupart du temps éviter de croiser leurs regards.

    Ensuite Pierre lui parle… En gros il lui explique qu’il ne va pas lui donner d’argent ! Mais en faisant cela, Pierre quitte le registre économique pour entraîner le mendiant dans le registre du Royaume de Dieu — où tout est différent, tout est à l’excès, comme l’expriment les paraboles. Et Pierre prononce les mêmes paroles que Jésus face au paralytique (Luc 5:23) « Lève toi et marche ! »

    Finalement Pierre lui tend la main, il crée un contact physique, et le relève : ce verbe fait clairement allusion à la résurrection.

    La façon dont la scène se passe montre clairement la continuité entre l’œuvre de Jésus et l’œuvre des apôtres. Jésus est monté au ciel, mais son œuvre continue sur terre par la force du saint Esprit et les gestes des apôtres.

    Mais le récit n’est pas terminé. Le relèvement du mendiant n’est qu’une étape dans le travail de l’Esprit saint. Le passage de l’immobilité à la mobilité — le mendiant bondit en louant Dieu — n’est pas la seule transformation induite. Il était passif, il devient actif. Il était dépendant de ses porteurs et de ses bienfaiteurs, il devient indépendant, il va pouvoir retrouver une vie normale. Il était exclu du Temple, maintenant il rentre dans le Temple pour louer Dieu. Il a enfin accès à Dieu. Il découvre le surplus de valeur du spirituel sur le matériel, l’amour à la place de l’aumône.

    Cette guérison faite au nom de Jésus atteste de la destruction de toutes les barrières que les humains pouvaient inventer et placer entre Dieu et l’humain. Jésus l’avait déjà dit dans sa parabole du banquet. Le royaume de Dieu ne nécessite pas de ticket d’entrée. Bien plus même, ceux qui croyaient avoir un droit d’entrée (ayant reçu une invitation) ne s’y retrouvent pas, et ceux qui pensaient en être exclu — les pauvres, les infirmes, les aveugles et les boiteux (Luc 14:21)— sont repêchés et spécialement accueillis.

    L’Eglise que nous dépeint Luc avec cette « première admission » doit être à l’image du Royaume de Dieu que Jésus profilait dans ses paraboles. Une Eglise inclusive, une Eglise composée de tous les estropiés de la terre, de tous les blessés de la vie, de tous les meurtris de l’existence.

    Luc multiplie dans son Évangile et dans les Actes les récits avec des personnages généralement exclus du peuple d’Israël ou du culte : les bergers dans le récit de Noël (Luc 2), le centenier de Capharnaüm (Luc 7), les enfants écartés par les disciples (Luc 18), Zachée le collecteur d’impôts (Luc 19), et dans les Actes l’eunuque éthiopien (Actes 8), Corneille l’officier romain (Actes 10-11), et ici le mendiant à la porte du Temple.

    L’Eglise ne peut pas avoir de porte, de portillon de contrôle à l’entrée. L’Eglise est ouverte à tous, à la manière de Jésus-Christ qui rend son Père accessible à tous, sans condition.

    Par ce récit, Luc montre que l’Eglise c’est l’inverse du Temple : tous ceux à qui le Temple interdisait d’accès (laissait à l’extérieur) ceux-là même sont les invités privilégiés de la nouvelle communauté de l’Eglise.

    Cette guérison qui ouvre la porte du Temple va encore plus loin dans son message. Ce récit nous dit que la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ s’inscrit dans la pâte humaine, dans le corps. Ce récit montre comment l’action de Dieu s’incarne, se corporéise dans notre réalité. Pas tellement dans l’idée d’un exploit médical — ce serait juste de la magie — mais dans le fait que l’Esprit de Jésus passe par Pierre, se faufile dans la main de Pierre, se transmet dans cette poignée de main et transforme la vie de cet homme en le faisant revivre.

    La main de Pierre guérit le mal de vivre de cet homme parce qu’il est un humain qui prend la main d’un autre. Un auteur que j’aime dit ceci : dans l’épreuve la plus noire « la question n’est pas de trouver une réponse à la nuit (...) mais à passer la nuit en compagnie de l’autre, à partager en deux l’abîme dans une fraternité. »*

    Partager en deux l’abîme par une main tendue ! Voilà ce que Jésus a enseigné à ses disciples, ce que ces disciples devenus apôtres mettent en pratique. Et c’est ainsi que se constitue une communauté appelée l’Eglise.

    Cette communauté n’est pas idéale, elle n’est pas faite de corps « photoshopés ». Elle est à l’image de son chef, de Jésus le Crucifié qui se montre à ses disciples : Ressuscité, mais portant les stigmates, les cicatrices de son exécution.

    À notre tour nous pouvons venir, entrer dans la communauté avec les blessures de nos vies, les cicatrices de notre passé. Le banquet s’est ouvert à ceux qui ne pensaient pas être dignes d’y être invités, à tous ceux qui ont été relevés par une poignée de main humaine. Quelle que soit notre infirmité cachée, ensemble nous pouvons être l’Eglise appelée par Dieu, sauvée par Jésus-Christ, et dynamisée par le saint Esprit.

    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2018

    * John D. Caputo, La faiblesse de Dieu, Genève, Labor et Fides, 2016. p.343.

  • Un détour pour parler du pardon

    Matthieu 18 11.3.2018

    Un détour pour parler du pardon

    Matthieu 18 : 21-34

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    Chers frères et sœurs en Christ,

    Depuis plusieurs mois nous racontons des paraboles aux enfants. Comme vous l’avez vu, nous nous sommes penchés sur cette parabole du « serviteur qui ne veut pas pardonner », c’est son nouveau nom. Autrefois on parlait du « serviteur impitoyable », ce qui était peut-être plus exact — il n’a pas pitié de son compagnon — mais peut-être moins politiquement correct.

    Le titre « le serviteur qui ne veut pas pardonner » est moins juste également parce qu’il gomme un décalage entre l’intervention de Pierre sur le pardon et le contenu de la parabole de Jésus. Pierre pose une question sur le pardon envers celui qui a péché contre lui. Dans sa parabole, Jésus ne mentionne jamais le péché, il ne parle que de dette et de remise de dette. Le serviteur est impitoyable en ce qui ne remet pas la dette de son compagnon, comme on la lui a remise. Il n’est pas question d’un serviteur qui ne pardonne pas.

    Pour parler de pardon — suite à la question de Pierre — Jésus raconte une parabole qui ne parle pas de pardon non plus. Jésus a besoin de faire un détour pour pouvoir recadrer la question du pardon à son prochain.

    Restons donc d’abord uniquement sur cette parabole. Comme souvent Jésus commence son récit en disant : « le Royaume des cieux est semblable à…». Les paraboles servent à expliquer ce qui ne peut pas se laisser expliquer, définir, cerner dans notre logique. Comme Dieu ne se laisse pas enfermer dans des définitions, alors Jésus l’évoque dans ces histoires que nous appelons des paraboles. De même le Royaume des cieux n’est pas une terre localisable, c’est plutôt le monde des relations et surtout des relations nouvelles que Dieu instaure et habite.

    Un des éléments fréquents dans les paraboles, c’est la démesure. Pensez à la petite graine de moutarde censée se développer en un arbre qui abrite les nids des oiseaux. Ou le levain qui fait lever toute la pâte.

    Ici, la démesure est entre les deux dettes. D’un côté 1'500 années de salaire, de l’autre 100 jours de salaire. Imaginez que vous deviez rembourser pour demain 1’500 fois votre salaire annuel, c’est l’énormité de la dette du premier serviteur. Et le serviteur de promettre qu’il remboursera tout, il a juste besoin d’un délai. Il en appelle à la patience de son maître ! Et voilà que le maître (à partir de là le texte dit « le Seigneur ») remet toute cette dette. Il libère totalement son serviteur de cette dette monstrueuse.

    Il y a dans beaucoup de paraboles ce type de retournement, comme dans la parabole des ouvriers de la onzième heure où le maître de la vigne paie la même chose aux derniers arrivés alors qu’on attend des comptes proportionnels au temps travaillé. On attend des comportements logiques, rationnels, habituels alors que les paraboles surprennent. La logique de Dieu est toute différente de la nôtre.

    C’est là que Jésus veut emmener Pierre. La logique du Royaume des cieux n’est pas semblable à notre logique économique, rationnelle. La logique de Dieu est tout autre, elle jette toute calculette aux orties.

    Jésus raconte cette parabole à Pierre (quand celui-ci s’interroge sur le pardon) pour le faire sortir de ses calculs. Dans cette parabole, Jésus nous dit que nous avons une dette impossible à rembourser à l’égard de la vie, que ce soit Dieu, nos parents, la société etc.

    Cette parabole nous invite à prendre conscience de tout ce que nous avons reçu — gratuitement. Nous avons reçu la vie, une famille, une éducation. Nous faisons partie d’un réseau qui fait que nous n’avons que quelques pas à faire pour acheter notre nourriture et nos effets. Nous dépendons du travail de tous les autres humains sur cette terre — et par moment pendant une tranche de notre vie, nous contribuons également.

    Jésus nous appelle à voir tout ce que nous avons reçu, à voir cela d’un côté comme une dette (impossible à rembourser) et de l’autre comme une dette effacée !

    Il n’y a rien de culpabilisant chez Jésus à propos de cette dette. Elle est là, mais elle est effacée. Mais il faut avoir conscience de ces deux faces pour réaliser que nous sommes appelés à la réciprocité. C’est ce que manque le serviteur impitoyable ! Comme il ne réalise pas ce qui lui arrive — l’effacement de sa dette — il ne peut pas accorder la réciproque à son compagnon. C’est parce que notre dette est effacée, que nous pouvons à notre tour effacer les dettes de nos prochains et sortir de relations calculées, comptées, comptabilisées.

    C’est là qu’on revient au pardon. Les mots « remettre» et « dette» sont les mêmes mots qui sont utilisés dans le Notre Père que Jésus enseigne à ces disciples dans le Sermon sur la Montagne (Mt 6:12) et qui sont traduits dans le Notre Père liturgique par : «Pardonne-nous nos offenses, comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés » littéralement : «remets-nous nos dettes, comme nous les remettons aussi à nos débiteurs. »

    Comme nous avons été libérés de notre énorme dette de vie, nous pouvons à notre tour remettre les dettes de temps, d’énergie, de soins à ceux qui nous entourent. De même, comme Dieu nous a effacé nos fautes, nos péchés — sans compter — nous pouvons pardonner sans compter à ceux qui nous ont offensés.

    Jésus souligne par cette parabole — pour Pierre et pour nous— que nous ne saurions faire ce pas du pardon et de la remise de ce que nous pensons que les autres nous doivent, que si nous mesurons tous ce que nous avons reçu gratuitement. C’est parce que nous sommes riches de tout cela, que nous ne nous appauvrissons en rien de donner ou pardonner à notre tour. Riche de ce cadeau immense nous pouvons offrir la réciprocité à nos compagnons de vie.

    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2018

  • Un rien peut tout embellir ou tout gâcher

    Matthieu 13

    14.5.2017

    Un rien peut tout embellir ou tout gâcher

    1 Corinthiens 5 : 1-2 + 6-8      Matthieu 16 : 5-12      Matthieu 13 : 31-35

    Télécharger le texte : P-2017-05-14.pdf

    Chers frères et sœur en Christ,

    Vous le savez aussi bien que moi, Jésus aimait parler en paraboles. Mais pourquoi utilisait-il des paraboles avant toutes choses ? Là-dessus les avis sont partagés. On a dit aussi bien que Jésus parlait en parabole pour mieux se faire comprendre, en partant de petites histoires qui font appel à l'expérience pratique de ses auditeurs. L'expérience de celui qui cultive ou de celui qui fait du pain. Mais on a aussi dit que Jésus parlait en parabole pour ne pas être compris par tous et que Jésus réservait son enseignement à ses disciples auxquels il expliquait ses paraboles, comme celle du semeur sur quatre terrains ou l'ivraie et le bon grain.

    Pour ma part, je ne crois pas que parler en parabole était un jeu pour Jésus ou même un choix, c'était plutôt une nécessité. Pour dire ce qui est impossible à décrire, à définir, il est nécessaire de faire des détours, il est nécessaire d'utiliser des images, des illustrations. Il est impossible de parler directement de Dieu et de son action, de les décrire comme un objet, parce que Dieu n'est justement pas un objet et que son action est mystérieuse.

    Pourtant Jésus est justement là pour nous en parler. Alors il utilise des images pour enseigner. Par exemple "le Royaume des cieux ressemble au levain qu'une femme enfouit dans de la farine et qui fait lever toute la pâte." (Mt 13:33)

      Voilà, en une petite phrase, Jésus nous dit quelque chose sur la présence mystérieuse de Dieu dans le monde, ou en nous... oui, au fait ! est-ce en nous ? dans le monde ? dans l'Eglise ? En parlant de farine, Jésus laisse libre notre imagination.

      C'est l'avantage des paraboles, elles laissent ouvertes les portes de notre imagination, c'est un langage ouvert qui accueille diverses explications, diverses interprétations, un langage qui rend même les interprétations nécessaires. Personne ne peut dire : "Je sais !", "Je connais la vérité de cette parabole !" Il n'y a pas une interprétation unique et seule juste de cette petite parabole : "le Royaume des cieux ressemble au levain qu'une femme enfouit dans de la farine et qui fait lever toute la pâte." Voyez plutôt.

    On peut l'interpréter en concordance avec la parabole de la graine de moutarde qui devient un arbre où s'abritent les oiseaux (Mt 13 : 31-32). C'est-à-dire qu'une puissance insoupçonnée habite le levain comme la graine. Que cette puissance est là, cachée et présente en même temps, même si elle n'est pas encore réalisée. Dans ce sens, le Royaume des cieux, ce sont d'énormes potentialités qui vont se développer. C'est là l'interprétation la plus classique. Mais il y en a d'autres, dont la suivante.

    Le levain était considéré, dans la société juive, comme un élément corrupteur, impur. Le levain est un ferment et le processus de la fermentation peut gâter un aliment. Par exemple, lorsque votre confiture fermente parce qu'elle aurait dû être conservée au frigidaire, vous n'êtes pas contents, il faut la jeter, elle n'est plus bonne à rien.

    Le levain, le ferment est souvent vu comme négatif et nous en avons l'exemple lorsque Jésus parle du levain des pharisiens avec ses disciples ou lorsque l'apôtre Paul décrit l'immoralité comme un levain qui risque de corrompre toute la communauté.

    Pendant la fête de la Pâque, aussi appelée la fête des pains sans levain, il était important — et cela le reste pour les juifs aujourd'hui — de faire disparaître toute trace de levain dans la maison, parce qu'à partir d'un trace infime tout le processus de fermentation peut reprendre.

    Ainsi, cette parabole peut aussi être lu comme un avertissement : "un rien de levain et toute la pâte est corrompue, inutilisable". Cette interprétation viendrait ainsi faire le pendant à l'optimisme absolu de la parabole du grain de moutarde. Le levain corrupteur vient nous dire que tout n'est pas joué d'avance, automatiquement. Certes le Royaume des cieux est une puissance dynamique formidable, mais ne sous-estimons pas la puissance du mal. A partir d'éléments qui semblent négligeables, auxquels nous ne voulons même pas faire attention, le mal peut soudain se déployer d'une façon que nous n'aurions pas soupçonnée. Cette parabole nous enseigne donc la vigilance quant à chacun de nos actes. Aussi petits et insignifiants paraissent-ils... leurs conséquences — en positif comme en négatif — sont incommensurables.

    Peut-être devrions-nous nous méfier un peu plus du levain des pharisiens modernes, comme Jésus le recommandait à ses disciples. Nous méfier un peu plus — mais comment le faire sans paraître moralisateur ? — du levain contenu dans nos programmes TV; dans nos façons de désigner un peu vite des coupables (la violence des jeunes, comme si les adultes ne développaient pas aussi de la violence, même si elle se voit moins que des tags); du levain contenu dans nos discours économiques qui vantent tant le succès, la force et la compétitivité; dans nos relations quotidiennes qui deviennent vite tendues, agressives, méprisantes; du levain répandu dans les discours politiques qui désignent des boucs émissaires, qui appellent au rejet et à l’exclusion.

    Jésus nous laisse donc libre d’interpréter sa parabole dans un sens positif ou dans un sens négatif. La levure peut être vue comme l’expression de nos actions — bonnes ou mauvaises, avec les résultats qui en découlent. Mais c’est une lecture en extériorité.

    Aujourd’hui, je me rends compte que ce qui fait plus souvent problème, ce qui nous met en difficulté — plus que nos comportements à l’extérieur — ce sont nos actions et réactions intérieures. Ce sont nos voix intérieures, notre théâtre intérieur, qui nous met en difficulté. Ces voix qui viennent mettre en doute notre valeur, qui viennent saper notre moral, qui vienne insinuer que nous sommes coupable ou que nous n’allons laisser aucune trace valable de notre passage sur cette terre.

    Quand une de ces voix se fait entendre dans notre tête (et souvent nous arrivons même à identifier qui parle !) nous partons dans la rumination, dans la répétition et ces messages se mettent à tourner en boucle dans nos têtes, minant notre moral, envahissant notre mental. Un petit peu de ce levain et toute notre journée est gâchée.

    Je crois que le Christ vient prononcer d’autres paroles. Le Christ murmure à nos oreilles un message de paix et de pardon sur nos vies. Le Christ souffle à nos oreilles des paroles de vie eet d’espérance. Le levain de Jésus fait lever un nouveau jour dans nos vies. Lui, peut faire lever un nouveau règne dans nos existences, une voix qui vient couvrir nos ruminations et nos récriminations. Une voix dont le chant vient remettre de la lumière et de la paix dans nos vies.

    Entendrons-nous cette voix du Christ ? Est-ce que nous lui laisserons de la place ? Est-ce que nous laisserons sa voix dominer le concert qui nous habite et souvent nous envahit ? Une pincée de levain fait lever toute la pâte. Faisons en sorte que ce soit le levain du Christ.

    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2017

    L'idée du levain corrupteur vient de : A. Maillot, Les paraboles de Jésus aujourd'hui, Genève, Labor et Fides, 1973, pp.32-33.

  • Lire sa vie comme une parabole

    Marc 4
    19.6.2016
    Lire sa vie comme une parabole

    Marc 4 : 1-12       Marc 4 : 26-34
    Télécharger le texte : P-2016-06-19.pdf


    Chers membres de l’Honorable Abbaye des Laboureurs, chères paroissiennes, chers paroissiens,
    Jésus parlait en paraboles ! Les Evangiles insistent pour dire que l’essentiel de l’enseignement de Jésus passait par ces petits récits imagés que sont les paraboles. Les Évangiles en racontent une trentaine. Vous venez d’en entendre trois, lesquels pourriez-vous citer encore ? Celle du bon grain et de l’ivraie; celle du bon samaritain ou du fils prodigue ; celle de la brebis perdue ou de la drachme perdue ? Il en manque encore plus de 20. Ce sera le moment — en rentrant chez vous — de rouvrir un Évangile pour les redécouvrir.
    Jésus parlait en paraboles. Parler en parabole, c’est plus que nous raconter des petites histoires édifiantes, c’est même le contraire, justement le contraire de faire la morale ou de nous conduire à appliquer une maxime. Parler en parabole, c’est choisir de parier sur l’intelligence de celui qui écoute. Il y a quelque chose à comprendre, un sens à chercher, ce n’est pas du tout cuit, ce n’est pas une adaptation destiné aux enfants.
    Un moine demandait à son abbé : pourquoi ne nous expliques-tu pas les paraboles qui sont lues à l’office? L’abbé répondit : si je te donne un fruit, aimerais-tu que je le mâchouille avant de te le donner ?
    Jésus ne nous prémâche pas le mystère du Royaume de Dieu, le mystère de qui est Dieu et comment il s’approche de nous. Jésus parle en parabole pour nous laisser faire le travail de recherche du sens et même des sens possibles. C’est très important. C’est à nous de chercher à comprendre ce que dit cette parabole pour nous maintenant. En quoi nous parle-t-elle ? Pourquoi résonne-t-elle en nous ? En quoi nous interroge-t-elle, nous interpelle-t-elle ? Cela fait appel à notre intelligence, à notre imagination, à notre histoire de vie. Le travail à faire, c’est de relier l’histoire et notre vie.
    La parabole est le propre du langage spirituel. De son côté, la morale prescrit des comportements, appelle à l’obéissance et à la reproduction de gestes identiques. Au contraire la parabole invite à l’imagination et au renouvellement. Un petit élément ajouté à une parabole et celle-ci bascule vers un nouveau sens. La parabole n’est pas figée, c’est le contraire d’une affirmation dogmatique qui explique, démontre et fige la réalité.
    Jésus a toujours refusé le dogmatisme sur Dieu. Il s’est toujours opposé aux pharisiens qui avaient enfermé Dieu et la relation à Dieu dans un code de conduite et une série de commandements exigeant l’obéissance et conduisant à la déshumanisation (par exemple quand la Loi sur le sabbat interdisait de guérir ce jour-là).
    Les paraboles invitent à relire toujours à nouveau, non seulement les récits, mais tout événement, à commencer par notre vie. La parabole, c’est comme la « porte des étoiles » dans Stargate. C’est un instrument qui permet de passer d’un monde à un autre, d’une réalité à une autre. La parabole est la porte qui fait passer de notre vie matérielle à la vie spirituelle. Parce que notre vie est aussi parabole ! C’est-à-dire que nous avons à regarder notre vie pour en faire un récit et trouver du sens, des sens, le sens de notre vie.
    Tant que nous restons dans le descriptif de notre vie — j’ai fait ça, puis ça, puis ça — notre vie reste plate. Dès que nous pouvons dire : j’ai fait ça et cela m’a conduit à choisir cela, et je vois après-coup que cela m’a permis de… alors notre vie prend du relief, nous avons passé de l’autre coté de la porte des étoiles et notre vie prend sens. Et un nouvel élément — ajouté par après — peut modifier le sens de ce que nous avons vécu. Ainsi nous avons toujours la possibilité de donner du sens à notre vie, quoi qu’il se soit passé antérieurement.
    Voilà une petite histoire qui explique comment un nouvel élément peut transformer une histoire déjà écrite. Imaginez que vous vous trouvez dans la rue. Vous voyez un jeune homme sortir en courant de l’immeuble d’en face, essayer tous les vélos qui se trouvent là jusqu’à ce qu’il en trouve un qui ne soit pas cadenassé. Que pensez-vous ? Probablement : il est en train de voler un vélo. Vous avez des raisons de penser cela et de l’arrêter. Disons que vous l’arrêtez et qu’il vous dise : « le sécutel de ma grand-mère a sonné, elle est tombée chez elle, je dois m’y rendre, j’emprunte un vélo pour y être plus vite et l’aider.» Le geste du jeune homme ne change-t-il pas votre jugement premier ?
    Avant que le jeune homme ne parle, vous pensiez comprendre la situation, vous pensiez savoir de quoi il retournait. Après l’explication du jeune homme, on comprend autre chose et on réalise qu’il en allait autrement. Jésus avait compris que tous les êtres humains ont une pré-compréhension de Dieu. Nous croyons savoir, nous croyons comprendre, bien que nous n’ayons pas le dernier mot de l’histoire.
    Jésus raconte des paraboles pour nous inviter à remettre en question nos illusions d’en savoir assez sur Dieu. Jésus raconte une trentaine de paraboles où Dieu est successivement un semeur, un père, un riche propriétaire, un ami, une femme pauvre, un berger, un époux en retard, un patron en voyage ou même un boursier malhonnête. Autant de figures multiples et incompatibles pour nous empêcher d’enfermer Dieu dans une image et — pire — d’imposer cette image aux autres.
    Jésus parlait en parabole pour nous inviter à regarder tout ce que nous voyons comme des paraboles. Toute situation, tout récit, tout existence — à commencer par l’existence et la Passion de Jésus — comme des paraboles, c’est-à-dire comme des récits ouverts, qui ne sont pas figés, dont le sens n’est pas clos.
    Il peut toujours arriver un épisode qui remet tout en cause. Si nous aimons tant les séries TV, c’est bien parce que les épisodes qui viennent peuvent toujours tout remettre en cause et bouleverser notre vision du bon et du méchant. Notre monde se portera mieux lorsque nous cesserons de croire que nous savons tout et que nous avons définitivement raison, mieux que les autres.
    Jésus parlait en paraboles pour nous ouvrir les yeux sur la multitude de sens que peut avoir une même réalité. La vérité est parfois ailleurs, et une réalité peut avoir plusieurs sens. A nous de ne pas enfermer notre vie dans un seul sens, avant d’avoir le mot de la fin.
    Amen
    © Jean-Marie Thévoz, 2016