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pentecôte

  • Le Saint-Esprit, présence de Dieu dans notre temps.

    (29.5.1999)

    Jean 14

    Le Saint-Esprit, présence de Dieu dans notre temps.

    Jérémie 31 : 31-34.      Actes 2 : 1-13.       Jean 14 : 15-21

    télécharger le texte : P-1999-05-23.pdf

    Chères paroissiennes, chers paroissiens,

    Nous fêtons aujourd'hui Pentecôte. 50 jours après Pâques; 10 jours après l'Ascension, le départ définitif de Jésus. Comment vivre sans Jésus ? Pendant quelques années Jésus a parcouru la Palestine, a rassemblé des disciples, a enseigné, s'est fait connaître comme envoyé de Dieu. Quelques-uns ont cru, se sont attachés à lui, mais voilà qu'ils se retrouvent — entre eux — mais sans lui.

    Pentecôte est un épisode de transition. Dieu n'abandonne pas les siens. L'oeuvre de Jésus a une suite : Jésus est remplacé ! L'évangéliste Jean est très clair là-dessus. Avant sa mort, Jésus prépare ses disciples en leur annonçant :

    "Je demanderai au Père de vous donner quelqu'un d'autre pour vous venir en aide, afin qu'il soit toujours avec vous : c'est l'Esprit de vérité." (Jean 14:16-17).

    Nous ne vivons plus au temps de Jésus, nous ne l'avons pas vu sur les chemins de Palestine et pourtant nous le connaissons, nous l'avons rencontré, nous lui parlons, nous le prions. C'est l'oeuvre du Saint-Esprit.

    Une question revient régulièrement dans les entretiens que j'ai : «Mais qu'est-ce que le Saint-Esprit ?» Dans une formule courte, je dirais que c'est "la façon dont Dieu se rend présent à nous dans notre temps". Dans ce sens, le Saint-Esprit n'est pas une nouveauté qui n'apparaît qu'à la Pentecôte. L'Esprit de Dieu est déjà descendu sur Jésus "pareil à une colombe" lors de son baptême. L'Esprit de Dieu habitait déjà les prophètes ou les rois d'Israël. On peut même penser qu'il "planait sur les eaux" avant la création du monde.

    Dans l'histoire, Dieu s'est rendu présent aux humains, à son peuple de différents manières : sous la forme d'anges, notamment auprès d'Abraham); dans la nuée pendant l'Exode; dans l'arche de l'alliance; dans le Temple, etc. Jésus a annoncé que la relation à Dieu ne passerait plus par des intermédiaires, mais — comme il le disait à la Samaritaine — "les croyants adoreront le Père en esprit" (Jean 4:24).

    Pour expliquer cela, le christianisme a développé la doctrine de la Trinité : Dieu se révèle en trois personnes, c'est-à-dire de trois façons, sous trois visages : le Père, le Fils et le Saint-Esprit. Il ne s'agit pas de trois dieux, mais de trois aspects ou visages du seul, unique et même Dieu.

    1) Dieu est le Père, en tant que celui qui nourrit et donne la vie, et comme celui qui donne la loi. Ainsi a-t-il donné à Israël au désert, aussi bien la manne que le décalogue. Il est Père dans son rôle créateur et législateur, celui qui donne la matière qui fait vitre et la parole qui fait vivre, la loi étant le mode d'emploi qui permet d'entretenir et de favoriser la vie. Il est le roi et le juge et, dans un sens, cette majesté est inabordable, cette grandeur est menaçante, voire mortelle pour l'être humain. Il n'y a pas de commune mesure entre l'être humain et Dieu.

    2) Mais Dieu n'a pas voulu que cette différence totale soit un obstacle entre lui et nous, aussi s'est-il incarné, est-il devenu homme, Fils, en Jésus, donc frère des humains. Il s'est approché pour nous dire son amour. Il est entré dans le temps, à une époque, dans une vie d'humain. Il est entré dans l'espace, un pays, une ville, une tombe. Il n'était plus ni partout, ni éternel. Et nous ne vivons pas à cette époque, ni dans cet endroit.

    3) Aussi, Dieu se manifeste-t-il aussi en tant que Saint-Esprit, pareil au vent, au souffle, il est partout, en tout temps et en tout lieu. Comme esprit, il est à l'intérieur de l'être humain, de chacun d'entre nous. Il remplace le Temple, il remplace Jésus.

    C'est la forme actuelle de la présence de Dieu pour nous. Nous l'invoquons au début du culte, et lorsque nous baptisons, et lorsque nous partageons la Sainte-Cène.

    C'est la forme actuelle de la présence de Dieu en nous. "Vous le connaissez parce qu'il demeure avec vous et qu'il sera toujours en vous" dit Jean (14:17). Il n'est pas nécessaire de courir à droite et à gauche pour chercher Dieu. il est venu habiter au fond de chacun d'entre nous.

    C'est la promesse qu'avait énoncé le prophète Jérémie :

    "Le Seigneur déclare : J'inscrirai mes instructions, non plus sur des tablettes de pierre, mais dans votre conscience, dans votre coeur. Je serai votre Dieu et vous serez mon peuple" (Jér. 31:33)

    La relation à Dieu n'est plus faite d'obéissance extérieure, la relation à Dieu n'est plus une histoire de forme ou de façade, c'est une adhésion du coeur, de l'être entier, c'est une complicité, un élan, une réponse à l'amour que Dieu nous donne. Le Saint-Esprit, c'est la voix intérieure qui nous répète : "tu es aimé, détends-toi, tout va bien, tu es aimé !"

    Jean appelle le Saint-Esprit le défenseur, l'avocat, parce que son rôle est de défendre notre être contre les trop nombreuses paroles accusatrices, critiques et dévalorisantes que nous entendons.

    Le Saint-Esprit atteste à notre esprit cette vérité : Dieu est amour. C'est cela que nous fêtons à Pentecôte.

    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2022

     

  • Pentecôte, don, universalité et solidarité

    (31.5.1998)

    Actes 2

    Pentecôte, don, universalité et solidarité

    Deutéronome 16 : 9-12.        Jean 16 : 12-15.       Actes 2 : 1-13.

    Télécharger le texte : P-1998-05-31.pdf

    Chères paroissiennes, chers paroissiens,

    Aujourd'hui, nous fêtons Pentecôte, la fête du don de l'Esprit saint à l'Eglise. Aujourd'hui, les juifs fêtent également Pentecôte, ou, en hébreu, Chavouot. En Israël, depuis des temps très reculés, cette fête arrive 7 semaines (Chavouot = semaines), 50 jours (Pentecôte, en grec) après le début de la moisson. Cette fête est très ancienne et son sens a évolué au cours du temps, tout en gardant comme constante le don et la reconnaissance.

    Vous avez entendu dans l'Ancien Testament, au livre du Deutéronome, que Pentecôte est la fête de la fin des moissons. Le peuple y remercie Dieu des dons de la nature, de la culture du sol et de l'élevage des troupeaux. C'est une fête pour tous les habitants du pays, y compris les marginaux ou les déshérités. C'est une fête de reconnaissance et de joie, or la joie n'est possible que si tous y sont invités et inclus.

    Cette fête essentiellement agricole reçoit une marque "israélite" lorsqu'elle est intégrée au cycle de la Pâque. La Pâque commémore la sortie d'Egypte, la Pentecôte vient commémorer le don de la liberté et de la Loi. Cet usage devient dominant après la destruction du Temple de Jérusalem. Pentecôte devient la commémoration du don de la Loi, rappel des événements du Sinaï, de la constitution du peuple d'Israël.

    Venons-en maintenant à l'évangéliste Luc. Lorsqu'il écrit une suite à son évangile avec le livre des Actes des Apôtres, il crée un calendrier liturgique. Il est le seul évangéliste à le faire. Si vous vous souvenez de ma prédication du 3 mai dernier sur le Paraclet, pour l'évangéliste Jean, le don de l'Esprit suivait directement l'élévation — donc la résurrection — de Jésus. Luc, lui, rythme les événements. Il y a Pâques, puis 40 jours que Jésus passe avec ses disciples jusqu'à son ascension. Ensuite Luc place le don de l'Esprit lors de la fête de Pentecôte, 50 jours après Pâques, donc 10 jours après l'Ascension. C'est ce calendrier que nos Eglises suivent aujourd'hui.

    Luc institue son calendrier pour faire une relecture de l'histoire à la lumière des événements instaurés par Jésus-Christ. La venue du Christ illumine le passé, donne une nouvelle clé de lecture de l'histoire du peuple d'Israël. La Pentecôte peut être fêtée à la lumière du Christ. La Pentecôte chrétienne est une actualisation, une nouvelle vision, un nouvel accomplissement de la révélation de Dieu au mont Sinaï. Si la Pentecôte juive fête le don des Tables de la Loi, la Pentecôte chrétienne fête le don de l'Esprit, l'Esprit de Dieu, ou de Jésus qui devient le nouvel interprète de la Loi.

    Les flammes qui se posent sur la tête de chacun des disciples transforment chacune de ces têtes en un petit Mont Sinaï recouvert par la nuée de Dieu, signe de sa présence. Chaque disciple reçoit personnellement les Tables de la Loi, non pas sous forme de Tables de pierre, mais sous forme d'un nouveau langage, d'une parole. Les lettres gravées sur la pierre sont remplacées par des mots qui se disent dans le souffle, dans l'esprit. La loi écrite à l'extérieur est remplacée par une parole qui s'inscrit à l'intérieur de nous-mêmes, dans notre esprit et dans notre coeur.

    Cette intériorisation du message de Dieu ne correspond cependant pas à une privatisation de la religion. Le christianisme n'est pas une religion enfermée à l'intérieur de soi, c'est une religion de communication.

    Dans l'événement de Pentecôte il y a un double mouvement. J'ai parlé du premier mouvement qui va de Dieu vers chaque individu avec la langue de feu. Le deuxième mouvement, lui, est transversal, il va d'un individu à l'autre, il est mouvement vers les autres, ce sont les langues que se mettent à parler les disciples et que les humains de toutes les nations se mettent à comprendre !

    La Pentecôte, c'est la globalisation de la communication à un degré qui n'a rien à envier à Internet. Le message de l'Evangile est pour tous les peuples, bonne nouvelle pour tous, compréhensible par tous. L'universalisation du message de l'Evangile est le fruit de l'Esprit. L'Esprit va d'ailleurs précéder les pas des hommes et anticiper des ouvertures que les disciples n'osaient même pas esquisser. Là, je vous renvoie à l'histoire de Pierre et de Corneille dans le livre des Actes au chapitre 10.

    L'universalisation, la globalisation de l'Evangile se fait dans l'accueil et dans l'inclusion de tous, en rappel du fondement de la fête de Pentecôte que nous donne le Deutéronome :

    "Au sanctuaire du Seigneur, vous vous réjouirez avec vos enfants, vos serviteurs et vos servantes, ainsi que les lévites, les étrangers, les orphelins et les veuves qui vivent parmi vous." (Dt 16:11).

    La mondialisation de l'Evangile que décrit l'événement de la Pentecôte, c'est la perspective que tous les humains — quels que soient leurs statuts, provenances, origines, etc. — puissent former un seul peuple — comme Israël sous le Sinaï — où chacun et chacune ait sa place, car c'est le peuple que Dieu lui-même appelle et constitue. Pentecôte c'est la création d'une communauté accueillante et solidaire.

    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2021

     

  • Ainsi tu n'es plus esclave, mais fils

    pour le dimanche de Pentecôte

    Galates 4

    Ainsi tu n'es plus esclave, mais fils

    Jean 14 : 25-29.       Actes 2 : 1-17.         Galates 4 : 1-7

    télécharger le texte : P-2020-05-31.pdf

    Chers frères et soeurs en Christ,

    Nous vivons le dimanche de Pentecôte, jour où l'Eglise commémore le don de l'Esprit saint aux disciples et à l'Eglise toute entière. Jésus — nous l'avons entendu dans la lecture de l'Evangile de Jean — avait annoncé à ses disciples que l'Esprit saint serait envoyé une fois qu'il les aurait quittés.

    Luc — dans le livre des Actes — nous dépeint comment a pu se dérouler la première Pentecôte. Et Paul, finalement, explique à la jeune Eglise de Galatie pour quoi, dans quel but l'Esprit saint leur est donné : "Pour prouver que vous êtes bien ses fils, Dieu a envoyé dans nos coeurs l'Esprit de son fils, l'Esprit qui crie « Abba ! mon Père ! ». Ainsi tu n'es plus esclave, mais fils." (Gal 4 : 6-7)

    L'Esprit qui est donné au croyant par Dieu crée un lien de filiation. Ce lien de filiation indique plusieurs choses (il est peut-être bon d'avoir ici en mémoire la parabole que Jésus a racontée sur le "fils prodigue", sans oublier le fils aîné de la parabole (Luc 15:11-32)) :

    a) la première chose que nous montre le lien de filiation, c'est la proximité. Père et fils sont proches, ils se côtoient, ils travaillent ensemble. L'idée de séparation est vue comme une anomalie, un échec de la relation.

    b) la deuxième chose qui vient avec la filiation, c'est la notion d'héritage. Chez nous on dit "Tel père, tel fils" ou bien "Le fruit ne tombe jamais loin de l'arbre." Qu'il le veuille ou non, qu'il l'accepte ou se révolte, l'enfant hérite beaucoup de choses de ses parents en termes d'héritage psychologique, d'attitudes et de comportement.

    c) enfin, la filiation signifie aussi la copropriété de l'héritage (voyez le fils aîné de la parabole qui ne s'en doutait pas !). Il y a une communauté de gestion, communauté de biens. Ce qui appartient au père appartient aussi au fils. L'Esprit du Père est donné aux fils pour mener une oeuvre commune dans le monde !

    Paul définit le fils en l'opposant à l'esclave. C'est très important pour l'Eglise de Galatie qui avait la tentation de replonger dans une spiritualité fondée sur l'obéissance stricte à la Loi (avec le risque de devenir des pharisiens chrétiens) et pour nous aujourd'hui où le monde ne parle que de liberté : défendre le monde libre (contre le terrorisme); avoir plus de temps libre; lutter contre toutes les atteintes à la liberté, etc... Ça sonne bien et honni soit celui qui osera dire le contraire ! Mais de quelle liberté s'agit-il ? Celle de tous ou celle du petit groupe qui contrôle celle des autres ?

    Paul oppose l'esclavage à la filiation : "Ainsi tu n'es plus esclave, mais fils." (Gal 4:7). La liberté, c'est Dieu qui la donne et la liberté n'est pas l'abandon de tout lien — comme s'il était possible de vivre sans lien, donc sans relations — mais l'attachement à un maître qui libère par opposition à un maître qui enchaîne et asservit.

    La liberté n'est pas l'abolition de toutes les lois, cela ne peut conduire qu'au rétablissement de la loi du plus fort. La liberté, c'est d'accomplir la loi (le double commandement d'amour) non par soumission scrupuleuse et par crainte d'une punition, mais par choix, parce qu'on a compris la bonté et l'utilité du commandement. Accomplir la loi, non par soumission comme l'esclave, parce que le maître l'a dit, mais par l'Esprit de Dieu, parce qu'on a compris où cela conduit.

    Par exemple, on m'a dit de ne pas tricher ni mentir. Le ferais-je parce que j'ai peur de la transgression ou parce que je comprends que sans cette règle je ne peux pas vivre de vraies relations avec quiconque ?

    L'Esprit de Dieu nous rend libre chaque fois qu'il nous aide à comprendre la visée d'une règle et nous conduit à l'adopter comme si c'était nous-mêmes qui l'avions inventée !

    Mais cette question de liberté n'est-elle pas devenue caduque dans notre société occidentale ? N'avons-nous pas toutes les libertés qu'il nous faut, même trop de liberté — comme on l'entend parfois ? Quel est cet esclavage dont nous parle Paul ? Que veut-il dire lorsqu'il écrit : "nous étions esclaves des forces spirituelles du monde" (Gal 4:3) ? Est-ce dépassé ou est-ce encore actuel ?

    Si je pose la question, c'est que je pense que c'est encore actuel. Il y a encore aujourd'hui un combat à mener pour la liberté contre les "forces spirituelles du monde". Simplement il faut actualiser le vocabulaire. On ne peut plus parler en termes de forces célestes, d'anges et de démons. Aujourd'hui le vocabulaire parle de pressions sociales, de modes, de tendances, de trends ou encore de conditionnements ou de pulsions. Et c'est vrai que ces luttes ne doivent plus être projetées sur l'écran du ciel, hors de nous.

    La lutte se mène en nous-mêmes et dans la société pour savoir à qui nous allons faire allégeance : sera-ce aux manipulateurs de l'opinion publique; aux endormeurs de conscience; aux charmeurs de nos égos; aux vendeurs de rêve qui se remplissent les poches ? Ou sera-ce à ce Dieu qui nous veut libres, libres de toute dépendance, libres de former notre opinion, libres de remplir nos caddies selon nos besoins et non selon les désirs des publicitaires ?

    Qu'est-ce qui fait un esprit libre dans les tempêtes du monde actuel ? Si nous sommes un voilier soumis aux vents de tous ceux qui veulent nous asservir, il faut choisir une destination. D'où que vienne le vent, un voilier peut voguer vers sa destination. Il peut y parvenir par une multitude de chemins.

    Lorsque Dieu nous donne son Esprit, pour faire de nous des Fils, il nous donne cette destination, ce but, et il nous donne la liberté de choisir notre voie pour y parvenir.

    Que l'Esprit de Dieu qui vous fait enfants de Dieu vous accompagne sur votre route.

    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2020

  • Ce qui appartient au Père, appartient aux enfants.

    Galates 4

    27.5.2018

    Ce qui appartient au Père, appartient aux enfants.

    Gal. 4 : 1-7        Jean 14 : 25-29

    télécharger le texte : P-2018-05-27.pdf

     

    Chers frères et sœurs en Christ,

    Dimanche dernier nous fêtions la Pentecôte, jour où l'Eglise commémore le don de l'Esprit saint aux disciples et à l'Eglise toute entière. Jésus — nous l'avons entendu dans la lecture de l'Evangile de Jean — avait annoncé à ses disciples que l'Esprit saint serait envoyé une fois que lui les aurait quittés. C’est ce qu’ont vécu les premiers disciples, la première Eglise.

    C’est ainsi que Paul explique à la jeune Eglise de Galatie pour quoi, dans quel but l'Esprit saint leur est donné : "Pour prouver que vous êtes bien ses fils, Dieu a envoyé dans nos coeurs l'Esprit de son fils, l'Esprit qui crie « Abba ! mon Père ! ». Ainsi tu n'es plus esclave, mais fils." (Gal 4 : 6-7)

    L'Esprit qui est donné au croyant par Dieu crée un lien de filiation. Ce lien de filiation indique plusieurs choses (il est peut-être bon d'avoir ici en mémoire la parabole que Jésus a racontée sur le "fils prodigue", sans oublier le fils aîné de la parabole (Luc 15:11-32))

    a) la première chose que nous montre le lien de filiation, c'est la proximité. Père et fils sont proches, ils se côtoient, ils travaillent ensemble. L'idée de séparation est vue comme une anomalie, un échec de la relation.

    b) la deuxième chose qui vient avec la filiation, c'est la notion d'héritage. Chez nous on dit "Tel père, tel fils" ou bien "Le fruit ne tombe jamais loin de l'arbre." Qu'il le veuille ou non, qu'il l'accepte ou se révolte, l'enfant hérite beaucoup de choses de ses parents en termes d'héritage psychologique, d'attitudes et de comportement.

    c) enfin, la filiation signifie aussi la copropriété de l'héritage matériel (voyez le fils aîné de la parabole qui ne s'en doutait pas !). Il y a une communauté de gestion, communauté de biens. Ce qui appartient au père appartient aussi au fils. L'Esprit du Père est donné aux fils pour mener une oeuvre commune dans le monde !

    Paul définit le fils en l'opposant à l'esclave. C'est très important pour l'Eglise de Galatie — qui avait la tentation de replonger dans une spiritualité fondée sur l'obéissance stricte à la Loi (avec le risque de devenir des pharisiens chrétiens) — et pour nous aujourd'hui — où le monde ne parle que de liberté : défendre le monde libre (contre le terrorisme); avoir plus de temps libre; lutter contre toutes les atteintes à la liberté, etc... Ça sonne bien et honni soit celui qui osera dire le contraire ! Mais de quelle liberté s'agit-il ? Celle de tous ou celle du petit groupe qui contrôle celle des autres ?

    Paul oppose l'esclavage à la filiation : "Ainsi tu n'es plus esclave, mais fils." (Gal 4:7). La liberté, c'est Dieu qui la donne et la liberté n'est pas l'abandon de tout lien — comme s'il était possible de vivre sans lien, donc sans relations — mais l'attachement à un maître qui libère par opposition à un maître qui enchaîne et asservit. La liberté n'est pas l'abolition de toutes les lois, cela ne peut conduire qu'au rétablissement de la loi du plus fort.

    La liberté, c'est d'accomplir la loi (le double commandement d'amour) non par soumission scrupuleuse et par crainte d'une punition, mais par choix, parce qu'on a compris la bonté et l'utilité du commandement. Accomplir la loi, non par soumission comme l'esclave, parce que le maître l'a dit, mais par l'Esprit de Dieu, parce qu'on a compris où cela conduit.

    Par exemple, on m'a dit de ne pas tricher ni mentir. Le ferais-je parce que j'ai peur de la transgression ou parce que je comprends que sans cette règle je ne peux pas vivre de vraies relations avec quiconque ?

    L'Esprit de Dieu nous rend libre chaque fois qu'il nous aide à comprendre la visée d'une règle et nous conduit à l'adopter comme si c'était nous-mêmes qui l'avions inventée ! Mais cette question de liberté n'est-elle pas devenue caduque dans notre société occidentale ? N'avons-nous pas toutes les libertés qu'il nous faut, même trop de liberté — comme on l'entend parfois ?

    Quel est cet esclavage dont nous parle Paul ? Que veut-il dire lorsqu'il écrit : "nous étions esclaves des forces spirituelles du monde" (Gal 4:3) ? Est-ce dépassé ou est-ce encore actuel ?

    Si je pose la question, c'est que je pense que c'est encore actuel. Il y a encore aujourd'hui un combat à mener pour la liberté contre les "forces spirituelles du monde". Simplement il faut actualiser le vocabulaire. On ne peut plus parler en termes de forces célestes, d'anges et de démons.

    Aujourd'hui le vocabulaire parle de pressions sociales, de modes, de tendances, de trends ou encore de conditionnements ou de pulsions. Et c'est vrai que ces luttes ne doivent plus être projetées sur l'écran du ciel, hors de nous. La lutte se mène en nous-mêmes et dans la société pour savoir à qui nous allons faire allégeance : sera-ce aux manipulateurs de l'opinion publique; aux endormeurs de conscience; aux charmeurs de nos égos; aux vendeurs de rêve qui se remplissent les poches ? Ou sera-ce à ce Dieu qui nous veut libres, libres de toute dépendance, libres de former notre opinion, libres de remplir nos caddies selon nos besoins et non selon les désirs des publicitaires ?

    Qu'est-ce qui fait un esprit libre dans les tempêtes du monde actuel ? Si nous sommes un voilier soumis aux vents de tous ceux qui veulent nous asservir, il faut choisir une destination. D'où que vienne le vent, un voilier peut voguer vers sa destination. Il peut y parvenir par une multitude de chemins.

    Lorsque Dieu nous donne son Esprit, pour faire de nous des Fils, il nous donne cette destination, ce but, et il nous donne la liberté de choisir notre voie pour y parvenir.

    Que l'Esprit de Dieu qui vous fait enfants de Dieu vous accompagne sur votre route.

    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2018

  • Actes 11. Une Eglise surprise par l’Esprit Saint

    24.5.2015
    Actes 11
    Une Eglise surprise par l’Esprit Saint

    Actes 2 : 1-13      Actes 11 : 1-18

    Télécharger le texte : P-2015-05-24.pdf


    Chères paroissiennes, chers paroissiens,
    Vous avez entendu le récit traditionnel de Pentecôte. Ce récit ouvre l’histoire de la première Eglise, histoire dépeinte dans le livre des Actes des Apôtres qui fait suite à l’Évangile selon Luc.
    Luc donne un cadre temporel aux apparitions de Jésus — de Pâques jusqu’à l’Ascension — puis décrit le don du Saint-Esprit, le jour de la Pentecôte : 10 jours après l’Ascension, 50 jours après Pâques.
    Ce récit du don de l’Esprit marque la date de naissance de l’Eglise. Avant la Pentecôte, il y a un groupe de disciples, craintifs et désorganisés. Ils se réunissaient en cachette, en s’enfermant dans la chambre haute pour se rappeler — entre eux — ce qu’ils avaient vécu avec Jésus. Ils sont encore à Jérusalem, et ce dimanche de la fête juive des semaines — Chavouot en hébreu, Pentecôte en grec — ils sont encore réunis entre eux.
    Mais ce dimanche-là un événement spécial se passe. Le Saint-Esprit descend sur la maison, puis sur les disciples à la façon de la révélation bruyante et lumineuse de Dieu à Moïse au Sinaï.
    Cela ameute du monde, tous les pèlerins juifs montés à Jérusalem des quatre coins de la diaspora juive. Beaucoup de pays ou régions sont mentionnés, de l’Iran actuel jusqu’à Rome, mais il est précisé que ce sont des juifs de souche ou des convertis à la foi juive. Le don de l’Esprit-Saint concerne — à ce moment —prioritairement les juifs, les descendants d’Abraham, les dépositaires de la révélation du Dieu d’Israël.
    Pour les disciples, il était évident que Jésus était le Messie annoncé dans les Ecritures, celui qui est venu pour accomplir les promesses de Dieu à l’égard de son peuple. C’est une affaire interne. Il est important d’annoncer aux juifs que l’Ecriture est accomplie, que le Messie est venu et qu’il s’agissait de Jésus ! Mais cela ne concerne que le peuple Israël. Voilà la croyance des disciples. Or, l’Esprit souffle où il veut et Dieu ne veut pas être limité par nos étroitesses d’esprit !
    L’évangélisation par les disciples se fait, en Judée, en Samarie et en Galilée. Mais — comme le racontent le livre des Actes — les persécutions poussent les premiers chrétiens à l’exil : à Damas, à Antioche et plus loin !
    Et voilà nos disciples confrontés aux Grecs et aux Romains. Et ceux-ci reçoivent favorablement l’évangile ! Que doivent-ils faire ? L’Esprit Saint convainc Pierre qu’il peut aller chez Corneille, et Pierre constate que Corneille reçoit l’évangile et qu’il reçoit l’Esprit Saint aussi bien que les juifs. Pierre le traite donc comme les autres nouveaux chrétiens.
    C’est lorsqu’il vient raconter cette merveilleuse histoire à Jérusalem que les choses se gâtent. Il est désapprouvé, il est contesté. Il est accusé d’avoir mangé avec des païens, donc d’avoir transgresser les règles du judaïsme qui s’appliquaient encore dans la première Eglise. C’est alors que Pierre explique comment cela s’est passé, comment il a agi sous l’inspiration divine. Ainsi Pierre nous raconte ce que les spécialistes des Actes des Apôtres appellent « la Pentecôte des Gentils » c’est-à-dire la Pentecôte des païens.
    Pierre raconte : «Je commençais juste à leur parler, quand le Saint-Esprit est descendu sur eux, tout comme il était descendu sur nous au commencement. (…) Dieu leur a accordé ainsi le même don que celui qu’il nous a fait à nous quand nous avons cru au Seigneur Jésus-Christ : qui étais-je donc pour m’opposer à Dieu ! » (Ac 11:15,17)
    L’Esprit Saint souffle où il veut. Il était là pour créer l’église, et il est là pour la faire évoluer, pour la faire grandir et avancer, pour la diriger, parfois vers des lieux ou des formes qui surprennent même les disciples, les chrétiens. L’Eglise n’est pas une Association ou une Entreprise avec des statuts et une assemblée générale. L’Eglise a certes besoin de personnes qui assurent l’organisation pratique, la petite cuisine — et ce n’est pas négligeable. Mais l’Eglise dépasse notre petite organisation humaine et nos buts humains.
    Au jour de la Pentecôte, nous devons nous souvenir que c’est l’Esprit Saint qui souffle sur l’Eglise et qu’il l’a conduit. L’Eglise n’est pas née de volontés humaines, elle est née d’un don, d’un surgissement qui a dépassé tous ceux qui étaient présents — on les a d’ailleurs pris pour des fous, on les a cru ivres, ce jour là !
    L’Eglise naît d’un appel, d’un bouleversement, elle naît d’une ouverture : c’est le Christ qui apparaît dans une chambre fermée ; c’est l’Esprit qui souffle et se manifeste en langues de feu. L’Eglise est appelée à cette ouverture qui est le contraire du repli sur soi.
    Cette ouverture est intérieure, c’est un déblocage, un élargissement par rapport à nos étroitesses, une confiance en l’Esprit Saint par rapport à nos peurs, une ouverture par rapport à nos préjugés.
    Cela n’a pas dû être facile pour les disciples juifs élevés dans la peur du contact avec les non-juifs,  la peur d’être souillé, d’être contaminé, d’être rendus impurs en entrant dans leurs maisons ou en partageant leurs repas.
    Cette ouverture, cette transformation intérieure conduit à une ouverture aux autres. Le Christianisme n’est pas réservé à une ethnie ou à une catégorie de la population. Le message de Jésus est universel, il est destiné à tous les humains, parce qu’il n’y a pas diverses catégories d’humains.
    L’Esprit Saint souffle sur tous les humains, sans différences. « Ne considère pas comme impur ce que Dieu déclare pur !» entend Pierre. Dieu fait souffler son Esprit Saint sans barrières, sans discrimination sur tous les humains, sur toute la terre, voici le souffle de Pentecôte !
    Amen
    © Jean-Marie Thévoz, 2015

  • Actes 2. Il est temps de passer du Dieu extérieur au Dieu intérieur

    Actes 2
    27.5.2012
    Il est temps de passer du Dieu extérieur au Dieu intérieur
    Jérémie 31 : 31-34     Actes 2 : 1-4    2 Corinthiens 4 : 6-8

    Téléchargez la prédication ici :P-2012-05-27.pdf


    Chères paroissiennes, chers paroissiens,
    Aujourd'hui à Pentecôte, nous fêtons le don de l'Esprit saint aux disciples. C'est l'accomplissement que Jésus avait annoncé et promis. Lui-même n'étant plus là, Dieu envoie l'Esprit saint comme présence divine auprès des disciples, des croyants.
    L'Evangéliste Luc en fait une représentation, une traduction dans la visible : même des inconnus autour de la maison entendent et voient des choses, même s'ils l'interprètent mal en pensant que les disciples sont ivres. 
    Cette représentation s'inscrit dans le plan de Luc pour le livre des Actes, ce livre qui montre comment l'Esprit de Jésus anime les apôtres et dirige l'annonce de l'évangile depuis Jérusalem jusqu'à Rome.
    Cette représentation peut devenir pour nous, aujourd'hui, un obstacle, si nous nous attachons aux "signes extérieurs", à la manifestation bruyante et visible. Cela risque de nous faire oublier que le don de l'Esprit est la réalisation de la nouvelle Alliance qu'annoncent tous les prophètes : Dieu se rend présent à nous. Jérémie annonce cette nouvelle Alliance et nous pensons avec raison que le Christ l'a réalisée.
    Cependant, je pense que nous ne sommes pas allés jusqu'au bout de l'enseignement de Jésus, nous n'en avons pas tiré toutes les conséquences ! Nous avons retenu que Jésus est le Fils de Dieu, c'est-à-dire que Jésus est habité pleinement par l'Esprit de Dieu. Nous avons retenu que le visage de tout prochain est porteur de l'image de Dieu, qu'il est le reflet du visage du Christ. Mais, nous hésitons à franchir le pas suivant, qui en est la suite logique : Dieu habite en nous. Dieu est au fond de nous-même.
    Si mon prochain est visage du Christ, pourquoi ne le suis-je pas pour moi-même ? Si Dieu est venu pleinement habiter dans l'homme Jésus, pourquoi n'habiterait-il pas en moi, comme il l'a promis ?
    Bien sûr, énoncer que "Dieu habite au plus profond de chaque être humain" est un courant minoritaire dans la Bible. Mais "le Messie souffrant" aussi était un courant minoritaire jusqu'à la mort sur la croix. Et pourtant, c'est la clé d'interprétation qu'a choisi le Christianisme pour relire l'Ecriture. A partir de la croix, le Christianisme a laissé tomber toute une partie de l'Ancien Testament, tout ce qui concerne le culte au Temple et les lois sacrificielles.
    N'est-il pas temps, aujourd'hui, de prendre au sérieux ce courant qui fait passer Dieu "de l'extérieur à l'intérieur" ? N'est-il pas temps de renoncer au Dieu extérieur, le maître de l'Histoire des peuples, le Dieu horloger, le Dieu "cause première" pour considérer le Dieu dont nous parle réellement Jésus : celui qui change les cœurs, celui qui soigne et guéri les plaies de l'âme, celui qui relève.
    A quoi sert de garder ce Dieu du dehors qui ne sert que de réceptacle aux reproches de nos contemporains qui disent avec raison de Lui : "pourquoi permet-il le mal s'il est tout-puissant" ?
    La Pentecôte est la fête de l'Esprit de Dieu qui vient en nous. C'est une représentation pour marquer qu'on entre dans une nouvelle période de la révélation. C'est la nouvelle Alliance préparée par les prophètes, celle qui concerne notre cœur de chair (Ez 11:19), celle qui s'inscrit dans nos consciences, à l'intérieur de nous, au plus profond de notre être intérieur.
    Que Dieu habite en nous reste difficile à croire et l'apôtre Paul marque le paradoxe en parlant de la lumière divine que nous portons dans des vases d'argile (2 Co 4:7). Rien dans l'aspect de ces vases ne laisse apparaître qu'ils contiennent quelque chose d'aussi précieux… et pourtant.
    Pas d'orgueil pour nous de porter Dieu au fond de nous-mêmes. C'est un cadeau, souvent un cadeau difficile à découvrir. Nous sommes nous-mêmes tellement "à l'extérieur." Anthony de Mello déclare : "nous accumulons des choses parce que notre cœur est vide." En effet, tant que nous n'avons pas découvert la lumière dans le vase d'argile, la présence de Dieu au plus profond de nous-mêmes, nous sentons le vide en nous.
    A la Pentecôte, Dieu vient habiter notre cœur vide, il le remplit de sa présence. Comme dans les paraboles, la perle est déjà dans le coquillage, le trésor est déjà dans le champ quand ils sont découverts. Ils sont là, maintenant, dans l'attente d'être découverts.
    Et je finirai par cette phrase de Rûmi : "Bien que tu sois ensorcelé par ce monde, au secret de toi-même, tu es un trésor caché. Ouvre les yeux intérieurs, reviens enfin à l'origine de ta propre origine."
    Que cette Pentecôte soit pour nous l'occasion de plonger en nous-mêmes — dans nos vases d'argile — pour y découvrir la lumière de Dieu, l'Esprit de Dieu, la Présence de Dieu qui nous habite.
    Amen
    © Jean-Marie Thévoz, 2012

  • Actes 2. La Bible nous parle d'un Dieu qui chemine avec nous.

    Actes 2
    12.6.2011
    La Bible nous parle d'un Dieu qui chemine avec nous.
    Jér. 31 : 33-34    Actes 2 : 1-4 + 12-18

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    Chères paroissiennes, chers paroissiens, chère famille,
    Nous vivons aujourd'hui la Fête de la Pentecôte. Cette fête chrétienne — qui a lieu 50 jours après Pâques — est venue remplacer et donner un nouveau sens à la fête juive qui avait lieu à ce moment-là. Les premiers chrétiens, issus du judaïsme, ont voulu donner une nouvelle signification à cette fête, en lien avec Jésus.
    La fête juive célébrait le don des Tables de la Loi à Moïse au Sinaï. Rappelez-vous que Moïse avait fait sortir le peuple hébreu d'Egypte et l'avait conduit à la montagne sainte de Dieu. Là, Moïse était monté sur la montagne où Dieu était caché dans le feu et la fumée. Moïse y reçoit les 10 commandements et les communique au peuple hébreu, comme la Loi à laquelle il faut obéir.
    Dans son récit des Actes, Luc raconte comment les disciples sont rassemblés dans une chambre, en haut d'une maison et reçoivent l'Esprit de Dieu, qu'il compare à des langues de feu. Le parallèle est clair. Les disciples sont chacun comme Moïse recevant la Loi, mais ils reçoivent autre chose. Comme avec Jésus, Dieu se présente ici autrement qu'à Moïse.
    Luc, dans son récit, essaie de montrer que les choses ont changé. Certes, il y a une continuité, puisque ce sont les promesses de Dieu qui se réalisent, celles annoncées par les prophètes, la promesse de Joël que Pierre rappelle, ou la promesse de Jérémie que vous avez entendue. Dieu se présente autrement à travers Moïse ou à travers Jésus.  Les prophètes annonçaient déjà que les tables de pierre allaient être remplacées par une inscription dans le cœur. Oui, on passe du "tu dois" de Moïse au "tu peux" de Jésus. On passe du Dieu inaccessible de Moïse au Dieu proche de Jésus.
    Le Dieu de Moïse est loin sur la montagne, comme dans le fracas d'un volcan, avec le feu, la fumée et le bruit. Il nous est présenté comme un Dieu qui se met en colère et qui n'hésite pas à punir. Il me semble qu'il ressemble beaucoup au dieu de nos désirs ou du désir des autres !
    Le dieu de nos désirs, c'est celui qui doit remplir nos aspirations : "mon dieu est plus fort que le tien", un dieu qui devrait faire régner l'ordre et le bien, le dieu qui devrait éviter que du mal nous arrive ou qu'il arrive à nos enfants et à nos proches. C'est notre rêve de toute-puissance et d'invulnérabilité.
    Et puis, il y a le dieu du désir des autres, celui qui nous est "envoyé" par les autres pour nous reprendre, pour nous juger ou même pour nous punir. Combien d'enfants n'ont-ils pas entendu leurs parents leur dire : "si tu agis mal, le bon dieu viendra te punir !" Ces dieux n'ont aucune parenté avec celui que Jésus annonce.
    Le Dieu de Jésus n'a rien à voir avec la puissance, encore moins avec la toute-puissance, sinon il aurait descendu Jésus de la croix. La Bible nous parle d'un autre Dieu, celui qui chemine avec nous, à nos côtés; celui qui encourage dans les difficultés de l'existence; celui qui nous remet debout; celui qui nous dit : "Va…"
    A la femme qui était malade depuis 14 ans, il dit : "Va, ta foi t'a guérie !"
    A l'homme à qui Jésus raconte la parabole du bon samaritain, il dit : "Va, et fais de même !"
    A la femme  adultère qui devait être lapidée, il dit ; "Va, je ne te condamne pas !"
    C'est cet Esprit-là que les disciples reçoivent à la Pentecôte, celui de la compréhension, de l'empathie, du pardon. C'est un esprit qui permet d'accepter les faiblesses, les manquements, les vulnérabilités. Accepter celles des autres, mais aussi — et c'est souvent le plus difficile — accepter les siennes propres.
    S'accepter soi-même, n'est-ce pas le plus difficile ? "Consentir à ses fragilités, à ses propres limites" (Frère Roger, Taizé) voilà la plus grande difficulté de la vie ! Nous voudrions tellement que Dieu ôte nos fragilités et balaye nos limites. Mais ça, c'est le dieu de nos désirs.
    Nous voudrions tellement que la vie ne dépende que de nous, que nous puissions la façonner nous-mêmes, dans tous ses contours, dans tous ses aspects. Et voilà que nous découvrons que tant de choses nous arrivent, qui ne dépendent pas de nous.
    Sur ce chemin où nous avançons tant bien que mal — où nous décidons parfois de la direction à prendre, mais où les circonstances, souvent, nous obligent à prendre des routes que nous n'avons pas choisies — sur ces chemins et ces routes, nous recevons une parole, nous recevons l'Esprit de Dieu qui nous dit "Va !" qui nous dit "Tu peux !" car je suis avec toi. Tu peux, parce qu'il y a autour de toi des frères et des sœurs qui partagent la même fragilité.
    Jésus fait chemin avec nous, il nous accompagne, il nous donne son esprit pour vivre la vie telle qu'elle se présente, avec ses fragilités et ses beautés. Allons, ensemble, avec nos fragilités, sur nos chemins, sachant que l'Esprit de Dieu nous accompagne. Il est venu habiter nos cœurs.
    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2011

  • Jean 20. Le don du souffle et de l'apaisement.

    23.5.2010

    Le don du souffle et de l'apaisement.

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    Jér. 31 : 31-34      Jean 20 : 19-23

    Chères paroissiennes, chers paroissiens,

    Cinquante jours après Pâques, nous fêtons la Pentecôte, la fête qui nous rappelle que Dieu nous donne son Esprit après le départ de Jésus à l'Ascension. Notre calendrier a été établi à partir des récits de Luc dans son Evangile et dans les Actes des Apôtres.

    L'Evangile de Jean ne se préoccupe pas de calendrier, mais de signification. Ainsi, comme nous l'avons entendu dans la lecture ce matin, Jésus donne l'Esprit saint aux disciples le premier jour, lors de sa première rencontre avec l'ensemble de ses disciples. Ce qui est important pour Jean, c'est de montrer le lien entre la résurrection et le don de l'Esprit. C'est le Christ ressuscité qui rencontre ses disciples et qui leur donne l'Esprit saint.

    Comment se passe cette Pentecôte pour l'Evangéliste Jean ? D'abord, il y a quelques mots sur la situation des disciples. Ils se sont rassemblés dans un local fermé, fermé à clé, verrouillé. Les disciples ont peur. Ils ont peur des autorités. N'étaient-ils pas comparses — il n'y a qu'un pas vers complices — d'un condamné à mort ? On pourrait s'en prendre à eux. Nous sommes le soir du premier jour de la semaine. Les disciples sont encore sous le choc de la mort, de l'exécution de leur maître. Ils sont en deuil. Aujourd'hui, on dirait qu'ils sont en état de choc post-traumatique. Un ensemble de personne qui ne sait pas quoi penser après les nouvelles bouleversantes et contradictoires des témoins : Jésus a été mis au tombeau le vendredi soir, on ne l'a pas retrouvé ce matin. Le tombeau était vide. Est-ce vrai ? Est-ce du déni ?

    Et ensuite voilà que — dans cette situation de confusion — Jésus se tient debout au milieu d'eux. On ne nous dit pas qu'il entre, ni qu'il surgit, ni qu'il apparaît. Il est là, au milieu d'eux, au centre de leur groupe. Au cœur de nos désarrois, au cœur de nos inquiétudes, de nos deuils, de nos malheurs, Jésus est là, il se tient au milieu de nous. Il salue et montre ses mains et son côté, comme pour dire : "Vos souffrances, je les porte dans mon corps, je suis vraiment avec vous."

    Jésus salue ses disciples en leur disant : "La paix pour vous." Je n'ai pas trouvé si c'était la façon ordinaire de dire bonjour à Jérusalem en ce temps-là, comme on dit "Salam aleikoum" en arabe aujourd'hui, en hébreu ce serait "Shalom lakhem." Mais comme Jésus répète cette même phrase encore une deuxième fois plus tard, je crois qu'il faut la prendre à la lettre. Jésus souhaite vraiment nous donner la paix, sa paix, le shalom, la plénitude de l'apaisement au cœur de nos turbulences et de nos épreuves.

    En fait, Jésus donne trois choses à ses disciples dans cette rencontre. Il leur donne la paix dans la salutation. Il leur donne l'Esprit saint quand il souffle sur eux. Et il leur donne une mission — il les envoie à leur tour — avec le pouvoir sur les péchés. La paix est le but final, le souffle est l'inspiration qui leur permet d'avancer vers ce but, et le moyen d'aller vers ce but est résumé dans le pouvoir de lâcher ou retenir les péchés.

    Dès qu'on parle de péché, il faut préciser et recadrer ! Jésus ne parle jamais du péché comme d'une faute morale, mais toujours comme d'une séparation, d'un éloignement des autres ou de Dieu. On a toujours mis l'accent sur la faute commise — qui peut effectivement nous séparer des autres, briser les relations. Mais souvenons-nous qu'il y a tout l'ensemble du mal subi, des malheurs, des épreuves qui nous mettent tellement à mal que cela perturbe aussi toutes nos relations.

    Pour mieux comprendre ce que Jésus donne comme pouvoir à ses disciples, je vais remplacer le mot "péché" par le mot "tension" (même si ce mot ne recouvre pas tout le champ du péché) parce que vous savez comme on peut empoisonner la vie des autres lorsque nous sommes sous tension, trop tendus.

    Jésus nous dit que lorsque nous lâcherons nos tensions, elles seront relâchées, mais que si nous gardons (maintenons, retenons) nos tensions, elles ne disparaîtront pas comme par enchantement. Nous avons-là un pouvoir et une responsabilité — en tant que chrétiens.

    Nous inspirer du Christ — recevoir son Esprit — c'est chercher la paix en nous libérant de nos tensions, en relâchant la pression, en nous et sur les autres. C'est la mission qu'il nous donne, qu'il nous confie : défaire nos tensions pour arriver à l'apaisement et communiquer cette paix autour de nous.

    Pour donner son Esprit à ses disciples, le texte nous dit que Jésus souffle sur eux. Dans la Bible, le même mot est utilisé pour dire l'esprit (ou Esprit), le souffle, voir le vent (RUa'H en hébreu et pneuma en grec). De tout temps, les spirituels ont lié l'Esprit et la respiration; et la respiration à l'apaisement.

    Prenez un instant conscience de votre position assise sur votre banc. Ces bancs en bois ne sont pas confortables. Je suis sûr que pour rester assis, il y a quelques-uns de vos muscles qui sont tendus, peut-être inutilement tendus. En respirant profondément, vous pouvez détendre tout ce qui est inutilement tendu en vous. Cet exercice sur le corps, nous pouvons aussi le faire pour notre âme ou notre vie.

    Au cœur de nos tensions, de nos difficultés, Jésus se tient-là, debout, pour nous apporter la paix. Il souffle sur nous, il souffle en nous son Esprit de paix pour que nos tensions puissent se relâcher et nous conduire à l'apaisement. Apprenons à accueillir ce souffle et cet apaisement.

    Amen