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vin

  • Esaïe 6. Notre Père (8)

    Esaïe 6

    23.8.2020

    Notre Père (8)

    Esaïe 6 : 1-9

    1 Corinthiens 1 : 1-3

    Jean 17 : 24-26

    télécharger le texte : P-2020-08-23.pdf

     

    Chers frères et soeurs en Christ,

    Dans notre suite de prédications sur le Notre Père (pour lire toute la série sur le Notre Père, cliquer dans la colonne de droite la catégorie "Notre Père"), nous arrivons aujourd'hui à la phrase : « Que ton nom soit sanctifié ». Je trouve que c'est la phrase la plus difficile à comprendre du Notre Père. Pourquoi le nom de Dieu ? Que veut dire sanctifier, quand il s'agit déjà de Dieu ? Qui doit le faire ? L'être humain peut-il rendre Dieu plus saint qu'il ne l'est déjà ? Quelle qualité l'être humain pourrait-il rajouter à Dieu ?

    Commençons par revenir à l'histoire, l'histoire d'Israël qui peut se lire en remontant le Notre Père. En commençant par la fin, le Notre Père exprime la délivrance de l'esclavage en Egypte. Puis le peuple est soutenu lors des tentations dans le désert, il est pardonné, il est nourri.

    Ensuite Dieu donne sa Loi, le Décalogue, pour exprimer sa volonté. Enfin, vient la période de la royauté où le règne des hommes est en concurrence avec le règne de Dieu. Finalement Salomon construit le Temple à Jérusalem pour manifester la présence de Dieu. Au cœur du Temple se trouve une pièce, appelée le Saint des Saints, réservée à la présence divine.

    Esaïe reçoit la vision de cette sainteté. Il voit Dieu sur son trône. Des séraphins clament la sainteté de Dieu en disant : « Saint, saint, saint est le Seigneur de l'univers, la terre entière est remplie de sa gloire. » (Es 6:3).

    Aussitôt Esaïe est renvoyé à sa petitesse et à ce qu'il perçoit comme son impureté, son indignité. La sainteté de Dieu est opposée à la bassesse humaine. C'est le grand écart, l'éloignement complet, la divergence absolue. Tout pourrait se terminer dans l'anéantissement du prophète Esaïe et de toute l'humanité.

    Mais la révélation de cette vision, c'est que cette grandeur de Dieu, cette gloire, cette sainteté est bienveillante, tournée vers le bien de l'humanité. Dieu prend l'initiative d'effacer la distance, d'anéantir, non pas l'être humain, mais l'impureté, c’est-à-dire ce qui nous sépare de Dieu.

    Dieu est toujours dans l'initiative envers l'être humain. Cela fait partie de sa sainteté, de son être profond. La sainteté de Dieu n'est pas destructrice, mais constructrice.

    C'était déjà Dieu lui-même qui avait pris l'initiative de révéler son nom à Moïse dans le buisson ardent (Ex 3). Ce nom que le Notre Père appelle à être sanctifié. Pourquoi sanctifier le nom de Dieu et pas Dieu lui-même ?

    Le nom est en même temps ce qui dévoile et ce qui voile. Le nom permet d'appeler quelqu'un et d'entrer en dialogue avec lui. Mais le nom n'est pas la personne elle-même, c'est comme un substitut, un remplaçant.

    Dans cette phrase : « Que ton nom soit sanctifié » en parlant du nom et pas de Dieu, nous affirmons que Dieu lui-même est inaccessible, hors de notre portée et que nous ne pouvons rien ajouter à Dieu. C'est une façon de refuser la possibilité d'enfermer Dieu dans une théologie particulière, dans une Eglise, dans nos désirs. Dieu nous échappera toujours.

    Par contre, s'il s'agit du nom, nous, comme êtres humains, nous pouvons lui faire une place. Une place dans nos vies et dans nos cœurs, une place dans la vie publique, une place dans le monde.

    Notre rôle, ce que nous pouvons demander dans la prière du Notre Père, c'est que le nom de Dieu soit respecté, c'est qu'une place soit faite à Dieu dans notre monde. Notamment pour que rien ne vienne occuper cette place, aucune idole.

    Or aujourd'hui, nous connaissons et voyons les veaux d'or qui sont adorés publiquement. La place de Dieu est occupée par des humains ou des idéologies.

    Comme chrétiens, nous demandons que Dieu soit remis à la première place, que son nom soit placé au-dessus de tout autre nom (Phil. 2:9). Au-dessus, cela laisse penser à une supériorité ou une suprématie. Mais il ne faut pas oublier que Jésus est venu achever la révélation du nom de Dieu.

    Dans la prière sacerdotale (Jean 17), Jésus termine sa prière en disant : « J'ai fait connaître ton nom et je le leur ferai encore connaître. » (v.26). Or l'oeuvre du Christ qui nous révèle Dieu a pour sommet le service et le don de soi. Il n'y a pas de pouvoir dans la suprématie du nom de Dieu.

    Encore une remarque sur le choix des mots. La phrase parle de sanctifier, pas de rendre sacré. Rendre sacré, faire du sacré se dit « sacrifier » fier étant une forme de faire.

    Le Notre Père nous rappelle qu'avec Dieu il n'est pas question de rendre sacré, de sacrifier, mais de rendre saint.

    Rendre saint, c'est élever l'ordinaire vers le divin. Et c'est ce que nous faisons et sommes appelés à faire. Nous prenons de l'eau du robinet et nous en faisons l'eau du baptême, Dieu la sanctifie.

    Nous prenons du pain et du vin ordinaires et ils deviennent corps et sang du Christ. Nous avons des vies ordinaires et toutes simples et nous les confions à Dieu pour qu'il les sanctifie.

    C'est en laissant nos vies être sanctifiées par le contact avec le Christ que nous faisons une place au nom de Dieu dans le monde. Nous sanctifions le nom de Dieu lorsque nous remplissons notre mission, lorsque nous accomplissons notre vocation d'être humain, lorsque nous acceptons d'être nous-mêmes dans la transparence devant Dieu.

    Nous n'ajoutons rien à Dieu, c'est lui qui ajoute de la sainteté dans nos vies, si nous le voulons bien.

    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2020

     

  • Jean 15. « Je suis la vigne » dit Jésus

    Jean 15
    22.6.2014

    « Je suis la vigne » dit Jésus

    Esaïe 5 : 1-2+7      Jean 15 : 1-9

    Télécharger le texte : P-2014-06-22.pdf


    Chères paroissiennes, chers paroissiens, chers membres de l’Abbaye,
    J’ai entendu dire qu’il n’y avait pas de fête d’Abbaye sans apéritif, sans son petit verre de vin. C’est pourquoi j’ai choisi de vous parler de la place de la vigne dans la Bible.
    La vigne est une plante qui pousse bien sur les coteaux ensoleillés et arides d’Israël. Elle fait partie du patrimoine et évoque le bon temps, la fête, l’abondance, la joie de vivre. Avec le figuier, la vigne évoque la sécurité. Si on a quelques plans de vignes et quelques figuiers autour de sa maison, tout va bien, on peut être heureux.
    C’est pourquoi plusieurs récits bibliques donnent à Dieu la figure du vigneron et à Israël le rôle de la vigne. Dieu est le vigneron qui plante une vigne en Israël, qui s’en occupe, la soigne, la protège et en attend les fruits.
    Les prophètes se sont emparés de cette image pour rappeler au peuple — et plus souvent aux dirigeants, aux riches et aux puissants — que Dieu attendait de sa vigne des fruits de justice et de droiture ! Ainsi, la vigne improductive est-elle devenue l’image du jugement de Dieu sur un monde injuste, un monde de profit et d’exploitation (Es 5:1-7).
    Le vin et la vigne ont aussi une place dans le Nouveau Testament. On se souvient des Noces de Cana (Jn 2:1-11) où Jésus transforme de l’eau en vin pour que la fête ne soit pas gâchée. La parabole des ouvriers de la 11e heure (Mat 20:1-15 ) que le vigneron paie la même chose que ceux qui ont commencé le travail à l’aube. La parabole des méchants vignerons (Mat 21:33-40) qui refusent de donner au propriétaire de la vigne ce qu’ils lui doivent et molestent ses envoyés, puis tuent le fils du vigneron.
    L’Evangéliste Jean, de son côté, nous rapporte les parole de Jésus qui s’identifie à la vigne : « Je suis le cep de vigne et mon Père est le vigneron » (Jn15:1) et « Je suis le cep et vous êtes les sarments » (Jn 15:5). L’Evangéliste Jean développe cette image, ces images, du vigneron, du cep, des sarments et des fruits à produire pour nous parler de notre relation à Dieu.
    Rappelons quelques principes élémentaires de viticulture : Le cep de vigne reste en place d’année en année et le vigneron doit s’en occuper pour avoir du raisin. A la fin de la saison, le vigneron ôte tous les sarments pour un départ à neuf au printemps. Au printemps, plusieurs sarments émergent et se développement en vue de porter des grappes. Le vigneron va émonder sa vigne, il élague, il effeuille, il retranche des fleurs, tout cela pour augmenter la qualité du raisin et la qualité du vin qui en sortira. Le but est d’augmenter la quantité de sucre dans la grappe de raisin, ce qui améliore le vin, comme vous le savez.
    Jésus utilise cette pratique de la culture de la vigne comme une image de sa relation à Dieu et de sa relation avec nous. Dieu est le vigneron qui plante la vigne. Jésus est le cep de vigne qui porte les sarments. Nous sommes les sarments qui sommes destinés à porter du fruit.
    C’est une image de la vie, de notre existence. Si nous voulons produire un bon vin, c’est-à-dire une existence qui embaume, qui réjouisse notre cœur et celui de tous ceux qui nous côtoient, comme sarment nous devons être reliés au cep. C’est-à-dire que nous avons besoin de sève, de vie, d’énergie et nous avons besoin d’être relié à la source de la vie, à la source d’une énergie positive.
    Jésus se présente comme une source de vie, une source d’énergie relationnelle, c’est pourquoi le leitmotiv de ce récit est : « Demeurez en moi »(Jn 15:4,5,6,7,9,10). Cela signifie : demeurez en lien, restez en relation avec la source de la vie, avec la source des relations, avec la  source de l’amour.
    A aucun moment, le texte ne donne l’ordre de porter du fruit. Le fruit découle du lien, de l’attachement du sarment au cep. C’est ce lien à la source de la vie et de l’amour qui va, de lui-même, nous permettre de produire du fruit, c’est-à-dire des attitudes, des comportements qui seront authentiques, bons pour soi et pour les autres.
    On résume cela en disant « aimer ». C’est plus qu’avoir simplement des sentiments les uns pour les autres. C’est une façon d’aborder la vie, de vivre pleinement, d’être heureux. Ce bonheur n’est pas possible si l’on est coupé de ses racines, si l’on est coupé de soi-même, de son corps. Ce bonheur n’est pas possible si l’on est coupé de ses émotions ou du contact avec les autres. 
    Ce bonheur, nous dit Jésus, n’est possible que si nous acceptons d’être reliés (a) à nous-même, à ce qui se passe en nous, dans nos émotions, dans notre corps ; d’être reliés (b) aux autres, à nos proches d’abord, mais aussi à d’autres plus lointains ; enfin d’être reliés (c) à l’univers, à Dieu, à l’infini ou à l’absolu.
    Ce que Jésus dit lorsqu’il dit « Je suis le cep et vous êtes les sarments, demeurez en moi » c’est que nous ne vivons une vie complète, en plénitude que si nous sommes reliés. Il y a trois dimensions auxquelles nous avons besoin d’être reliés, à nous-même, aux autres et à l’absolu qu’il nomme Dieu son Père.
    Nous avons besoin de ces trois relations pour être heureux dans tous les domaines de l’existence. Nous avons besoin de nous connaître nous-même. Nous avons besoin d’être reliés au cep pour recevoir la sève. Nous avons besoin du vigneron pour porter du fruit et avoir une vie riche comme du bon vin.
    Amen
    © Jean-Marie Thévoz, 2014