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Genèse 18. Abraham, moins audacieux que Dieu

Genèse 18
8.10.2000
Abraham, moins audacieux que Dieu
Gn 18 : 20-32 1 Tim 2 : 1-6 Mat. 5 : 43-46

Chers Amis,
Vous savez que les trois grandes religions monothéistes du monde se réclament d'être des descendants spirituels d'Abraham. Ces trois religions sont le judaïsme (0,2 % de la population mondiale*), le christianisme (33,1 %) et l'islam (19,8 %). Ces trois religions ensemble groupent donc 53 % des habitants de la terre. Plus de la moitié des habitants de cette planète se reconnaissent dans la figure d'Abraham, le père de la foi, l'héritier de la promesse de Dieu d'avoir une descendance aussi nombreuse que les étoiles du ciel ou les grains de sable des plages.
Qu'a-t-il donc de si extraordinaire, cet homme, qui vivait il y a près de 4'000 ans ? Ce qu'il a de particulier, c'est d'abord que Dieu l'a choisi pour lui parler, pour se faire connaître. Ensuite, c'est parce qu'Abraham n'a pas hésité à interpeller Dieu, à lui demander de se dévoiler, de se montrer sous son vrai jour ! Abraham n'hésite pas à demander à Dieu qui il est. Est-il un Dieu qui est vraiment Dieu ou simplement un miroir des hommes avec tous leurs défauts et toutes leurs faiblesses ?
C'est pourquoi, Abraham — ayant entendu le jugement porté contre la ville de Sodome — va questionner Dieu sur ses intentions :
"Seigneur, vas-tu vraiment faire périr ensemble l'innocent et le coupable ?" (Gn 18:23)
On sait que les humains ne sont pas très doués pour distinguer les innocents des coupables — même aujourd'hui, il suffit de se rappeler combien d'innocents ont péri sur la chaise électrique ou dans des camps d'extermination au XXe siècle. On sait aussi que la nature — à travers les catastrophes, les maladies ou les accidents — ne fait pas de tri. Ne dit-on pas "ce sont les meilleurs qui partent en premier" ?
Alors, demande Abraham, Dieu n'est-il qu'une projection des idées de l'être humain sur le ciel ? Dieu n'est-il qu'un autre nom pour la nature impitoyable ? Abraham veut savoir ! Abraham va lutter, marchander avec Dieu pour tester son sens de la justice. Combien faut-il de "justes" pour sauver tout le monde ?
Remarquez ici qu'il ne s'agit pas de savoir si l'on peut sauver les justes en laissant périr les coupables. L'enjeu est de sauver tout le monde, — les bons comme les méchants — grâce à la présence de quelques personnes différentes, des personnes qui vont faire la différence !
On sent Abraham — en même temps — fort dans sa revendication et tremblant devant son audace ! Jusqu'où peut-on demander quelque chose à Dieu sans aller trop loin ?
La négociation s'arrête à 10 justes. Mais le texte ne nous dit pas pourquoi on s'arrête à dix. Dieu n'a pas dit "Ça suffit" ou "Je ne descendrai pas plus bas". Simplement Abraham s'arrête de demander ! Est-ce la limite de Dieu ou est-ce la limite d'Abraham ? Abraham n'a-t-il pas, pour une fois, manqué de foi ?
Ce que nous connaissons maintenant de Dieu au travers de la personne et de la vie de Jésus nous conduit à penser que la limite a été posée par Abraham et non par Dieu.
Le Nouveau Testament nous apprend que le but de Dieu — incroyable pour les humains ! — c'est de descendre jusqu'à UN. Un seul juste et tous les humains sont sauvés. L'attitude d'un seul compte et peut tout bouleverser. L'attitude de chacun compte et fait la différence.
Le Nouveau Testament nous confirme deux choses. Premièrement, Jésus-Christ a incarné cette figure du juste, mais elle a été rejetée par tous. Deuxièmement, Dieu ne fait pas de différences entre les gens. Comme le dit Jésus :

"Dieu votre Père fait lever son soleil aussi bien sur les méchants que sur les bons, il fait pleuvoir sur ceux qui agissent bien comme sur ceux qui agissent mal" (Mat 5:45)
Cette phrase suit immédiatement la recommandation de Jésus "d'aimer ses ennemis" (Mat. 5:44) "afin que vous deveniez les fils de votre Père" (Mat. 5:45). Dieu ne juge pas, Dieu ne fait pas de tri, il nous demande de l'imiter pour devenir comme lui. Par ces recommandations, Jésus nous demande de sortir de nos comportements communs, dirigés par nos intérêts ou une étroite réciprocité. N'importe qui apprécie celui qui l'aime, cela n'a rien d'extraordinaire. Mais Dieu ne se comporte pas comme cela, et il nous invite à autre chose.
Il nous invite à cesser d'être simplement un miroir de l'attitude de l'autre, il nous invite à innover, à surprendre, à construire une attitude intérieure et à la maintenir face aux autres. Cela provoque inévitablement des changements puisque la plupart des gens réagissent en miroir.
Face à Abraham, Dieu montre qu'il ne veut pas partager le monde entre innocents et coupables, entre bons et méchants. Si nous adoptons aussi cette attitude intérieure, nous allons devenir celui qui compte, celui qui fait la différence et le monde changera autour de nous.
Amen

* Chiffres tirés du "Calendrier interreligieux 2000/2001", Editions ENBIRO, CP 64, 1000 Lausanne 9.

© 2006, Jean-Marie Thévoz

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