Jean 16
14.12.97
Demandez et vous recevrez et ainsi votre joie sera complète
Luc 2 : 8-11 Psaume 16 : 7-11 Jean 16 : 16-24
Chères paroissiennes, chers paroissiens,
Joyeux Noël !
C'est peut-être encore un peu tôt pour vous dire Joyeux Noël !, pourtant, c'est déjà le temps des cartes de voeux et ces mots se retrouvent sur les vitrines des magasins depuis quelques jours déjà. Noël est associé à la joie et c'est de la joie que j'aimerais vous parler maintenant.
La joie est annoncée aux bergers à propos de la naissance de Jésus : "une grande joie pour tout le peuple" ( Lc 2:10). La joie, Jésus l'annonce aussi à ses disciples dans le texte de l'évangile de Jean que nous venons d'entendre : "mais je vous reverrai et votre coeur se réjouira, et personne ne pourra vous enlever votre joie !".
Parler de la joie à Noël, c'est normal, mais je me suis quand même senti mal à l'aise au moment où j'ai voulu écrire des cartes de voeux à des personnes qui ont perdu un être cher récemment. Peut-on dire Joyeux Noël ! à quelqu'un en deuil ? Peut-on dire Joyeux Noël ! à quelqu'un qui vient d'apprendre qu'il a un cancer ? Peut-on dire Joyeux Noël ! à quelqu'un qui vient de recevoir sa lettre de licenciement ? Cela ne manque-t-il pas de tact, de coeur ? Plus généralement, en regardant la marche du monde, de Louxor à Kyoto, la joie n'est-elle pas un sentiment déplacé ? La réalité ne nous invite pas à la joie, mais plutôt à la tristesse ou à la révolte.
Devons-nous dès lors vivre sans joie ? Non. La joie a sa place dans cette réalité-là. Jésus dit : "je vous reverrai et votre coeur se réjouira, et personne ne pourra vous enlever votre joie !". Lorsque Jésus dit "je vous reverrai", il parle des jours qui suivent la résurrection, dans le monde tel qu'il est, il ne parle pas de l'au-delà. La joie promise, c'est une joie pour nous ici et maintenant, une joie imprenable, donc une joie qui n'est pas étouffée, éteinte par le monde et ses circonstances tragiques. Cette joie n'efface pas la souffrance vécue non plus.
Jésus utilise là une illustration : la femme qui accouche dans la douleur. La joie vient après le travail, la femme peut être joyeuse parce qu'un nouvel être est né.
Cette image doit nous rendre attentif à ce que Dieu ne fait pas un équilibre entre le mal et le bien. Soit qu'à tout mal devrait correspondre un bien qui le répare. Soit qu'à tout bien devrait correspondre un mal qui le compense. (souvent des gens ont peur d'être heureux, parce qu'ils pensent que cela devra se payer plus tard).
Dieu ne cherche pas à équilibrer le mal par du bien ou le bien par du mal. L'opposé du mal, c'est l'être. Dieu EST, il est celui qui dit JE SUIS et en cela il est opposé au mal qui conduit au néant. Dieu nous invite donc à être, être nous-mêmes, et à puiser notre être à la source de son être.
C'est pourquoi il nous est dit : "Demander et vous recevrez, et ainsi votre joie sera complète".
La joie est le sentiment qui naît de la sensation d'être entier, intégral. Ce qui est le contraire de déchiré, divisé, dissocié. La joie ne se commande pas, mais elle jaillit et devient communicative lorsque nous sentons que notre être est entier.
Comment retrouve-t-on une partie égarée de soi-même ? C'est un travail de tisserand, il s'agit de tisser de nouveaux liens avec soi-même, avec son corps. Renouer avec les sensations éprouvées au fil des heures. Etre attentif à ce qui nous fait nous sentir bien, ou nous sentir mal et trier pour ne garder que le bon.
Commencer par se sentir respirer, sentir le souffle entrer et sortir, sentir le souffle nous habiter. Sentir comment le souffle devient esprit, comment cet esprit nous habite et nous ranime. Se centrer sur le souffle de Dieu qui nous habite. Ce souffle qui est l'être et la présence de Dieu. Demander à Dieu d'habiter notre être.
Jésus nous dit : "jusqu'à maintenant vous n'avez rien demandé en mon nom. Demandez et vous recevrez, et ainsi votre joie sera complète." (Jean 16:24)
Amen.
© 2006, Jean-Marie Thévoz