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Accepter d'avoir besoin de Dieu

(3.2.2002)

Jean 13

Accepter d'avoir besoin de Dieu

Jérémie 9 : 22-23.        1 Corinthiens 1 : 26-31.       Jean 13 : 1-15

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Décidément, Jésus fait tout à l'envers !

C'est en tout cas ce que pense Pierre. Pierre, c'est le disciple le plus bouillonnant des Douze, l'équipe d'amis, de compagnons qu'a réuni Jésus autour de lui. C'est Pierre qui est toujours le premier à répondre aux questions de Jésus, le premier à s'enthousiasmer, à foncer tête baissée, parfois avant de réfléchir aux conséquences.

Aussi Jésus doit-il souvent le reprendre, le calmer et lui expliquer les choses. Pour les plus lents — comme moi — cela me donne une chance de plus d'entendre une explication, et de comprendre mieux la pensée de Jésus.

Ainsi, ce soir-là — c'est un soir avant la grande fête de la Pâque — Jésus est avec tous ses disciples. Ils ont voyagé, marché dans la poussière, sur des chemins de terre, et sont arrivés à Jérusalem. Lorsqu'on est accueilli dans une maison, après un voyage, il est de tradition — en ce temps-là — qu'un serviteur vous lave les pieds. Cela fait du bien, surtout si l'on vient de faire dix kilomètres en sandales.

Mais voilà que ce soir-là, c'est Jésus qui décide de remplacer le serviteur ! Lui qui est le chef du groupe ! Lui, Jésus — dont tous les disciples pensent qu'il va devenir le roi d'Israël pendant cette fête de la Pâque — lui, prend la place du plus humble serviteur !

Alors là, Pierre ne peut pas laisser passer cela. Pierre ne peut pas accepter d'être servi par son maître. Pierre ne peut pas accepter que Jésus renverse les rôles. Il proteste. Mais Jésus lui répond :

"Tu ne sais pas maintenant ce que je fais, mais tu comprendras plus tard" (Jn 13:7).

C'est une façon de dire "Fais-moi confiance !", "Accepte de recevoir maintenant, tu comprendras plus tard." C'est difficile pour une adulte ! Pourtant — comme parents — c'est ce que nous disons souvent à nos enfants : "Fais-moi confiance, c'est comme ça, tu comprendras plus tard." C'est souvent comme cela lorsqu'il faut dire NON, "tu es trop petit, tu feras cela plus tard". Cela arrive aussi lorsque nous proposons une activité : "Fais-le, commence, découvre, tu comprendras plus tard comme cela vaut la peine." C'est souvent comme cela lorsque les parents veulent que leur enfant commence un instrument de musique. C'est aussi comme cela pour commencer le culte de l'enfance ou le catéchisme. "Fais-moi confiance, cela en vaut la peine."

Lorsque Jésus lave les pieds de ses disciples, il les déstabilise, il les bouscule ! On a tellement l'habitude d'un certain ordre, d'une certaine hiérarchie. Mais surtout, ne nous a-t-on pas appris à plus donner, qu'à recevoir ? Or voilà que c'est Jésus qui donne quelque chose à ses disciples. Jésus les met dans la position de recevoir, dans la position de ceux qui reçoivent.

Ne trouvez-vous pas que c'est souvent difficile d'être celui qui reçoit, qui reçoit un service, une aide. Et cela devient encore plus difficile lorsque c'est souvent, lorsqu'on devient dépendant d'autres personnes.

Dans notre société, on valorise l'indépendance, l'autonomie, on valorise celui qui se débrouille tout seul, celui qui est sage, fort ou riche comme le dit le prophète Jérémie ou l'apôtre Paul. Et voilà que Jésus nous dit : "Acceptez d'avoir besoin de moi, acceptez d'avoir besoin de Dieu !" Vous pouvez vous sentir autonome en ce qui concerne la vie pratique, vous pouvez vous débrouiller seuls pour votre nourriture et votre logement, mais si vous voulez être heureux : tissez des liens avec moi et les autres êtres humains.

Acceptez de recevoir quelque chose de chacun, parce que l'amour ne pousse pas tout seul, en restant tout seul dans son coin. Acceptez que vous avez besoin d'amour pour vivre et ne le repoussez pas sous prétexte que vous êtes assez fort ou riche pour vivre sans.

En lavant les pieds de ses disciples, Jésus nous apprend une nouvelle sagesse qui ressemble à une folie pour le monde : le bonheur ne dépend ni de nos efforts, ni du pouvoir que nous avons, ni du prestige que les autres peuvent nous envier. Le bonheur se reçoit comme un cadeau : lorsque je m'accepte tel que je suis, vulnérable, sans prestige, avec mes côtés sombres. Lorsque j'accepte de voir que la vie, que j'essaie de mener de mes propres forces, ne m'apporte pas la plénitude que je recherche, je peux m'ouvrir à accepter de recevoir de Dieu ce qui me manque.

Accepter que Jésus intervienne dans ma vie — ce que Pierre finit par comprendre — c'est l'acte de foi qui accueille l'eau du baptême. Accepter que Jésus vienne nourrir, alimenter ma vie de sa propre vie : c'est l'acte de foi qui accueille le pain et le vin du dernier repas que Jésus partage avec ses disciples et que l'Eglise rappelle en partageant la sainte cène.

Pierre ne voulait d'abord rien recevoir de pareil, peut-être parce qu'il se pensait assez fort pour tenir tout seul. Une fois qu'il a compris que Jésus ne voulait pas le piéger, mais lui apporter le bonheur, il a accepté, laissant tout orgueil de côté.

Saurons-nous, nous aussi, faire ce pas et accepter de tout recevoir de Jésus ?

Amen

© Jean-Marie Thévoz, 2023

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