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Genèse 11. De Babel à Pentecôte

Genèse 11    27.5.2007
De Babel à Pentecôte
Gn 11 : 1-7    Ac 2 : 1-11   


Chères paroissiennes, chers paroissiens,
J'ai choisi de mettre face à face les deux récits bibliques de la Tour de Babel et de Pentecôte. Ces deux récits ont des correspondances — ressemblances et différences — qui permettent de mieux comprendre l'action de Dieu qui nous est relatée dans ces deux temps de l'histoire du salut.
Le récit de la Tour de Babel vient clore la période mythologique des commencements de la Bible. Après Adam et Eve, Caïn et Abel, Noé et le Déluge, vient la Tour de Babel. Ensuite les personnages historiques entrent en scène avec Abraham, Isaac, Jacob, les patriarches.
Les récits mythologiques des chapitres 1 à 11 de la Genèse essaient d'expliquer la réalité présente que chacun peut percevoir autour de lui. Le récit de Babel est un type d'explication de l'existence des nombreux peuples à la surface de la terre, des différentes langues et cultures. Pourquoi cette diversité, alors que quelques paragraphes plus haut, on nous disait que l'humanité n'avait qu'un seul ancêtre, Adam et Eve, puis Noé et sa famille ?
Eh bien, le texte répond : Dieu l'a voulu ! C'est Dieu lui-même qui a dispersé les peuples sur toute la terre et c'est lui qui a brouillé les langues humaines pour que les humains ne puissent pas former un seul peuple. Bizarre décision !
A partir de là, les interprétations commencent… Les uns disent : Dieu était jaloux de cette unité et de cette force, il a puni les humains orgueilleux en les dispersant. Les autres disent : cette action de Dieu est une bénédiction pour les humains. Dieu, en brouillant les langages, évite la formation d'un unique empire totalitaire où tous les humains seraient asservis à un pouvoir centralisé.
Alors, bénédiction ou malédiction pour les humains de se retrouver différents, divers, multiples ? Je trouve cette question très importante et intéressante. Est-ce un bien ou un mal pour les humains que cette décision divine ? En bon vaudois, on répondra : "Ça dépend!" Oui, ça dépend d'une décision de principe : comment considère-t-on Dieu ? Comme un Dieu jaloux, méfiant, qui cherche à coincer l'être humain, ou bien comme un Dieu qui a le souci du bonheur de l'être humain et cherche son bien ?
Toute décision qui nous touche, tout événement qui nous arrive, nous pouvons le prendre comme une bénédiction ou une malédiction, selon la façon dont on considère Dieu. En fin de compte, notre vie tournera vers le malheur ou le bonheur en fonction de ce regard que nous portons nous-mêmes sur ce qui arrive. Ainsi, j'incline plutôt à voir dans la dispersion des peuples et des langages une bénédiction pour l'humanité.
Dans ce récit de la construction d'une tour qui monte jusqu'au ciel, il y a la mise en garde contre plusieurs impasses sociales et personnelles. La tentation de devenir des dieux à la place de Dieu, c'est-à-dire croire que l'on peut tout savoir, tout prévoir et ainsi faire le bien de nos semblables, comme s'il n'existait qu'une seule sorte de bonheur pour tout le monde. Ou la tentation de dominer, d'écraser en se créant un monopole. Ou la tentation de vouloir monter vers Dieu et l'atteindre, le rejoindre par nos propres efforts.
Par sa décision, Dieu montre que ce que nous croyons être des chemins vers le bien, le bonheur, ne sont que des impasses qui ne mènent pas là où nous le pensons, elles ne mènent nulle part.

C'est là qu'intervient le récit de la Pentecôte. Ce récit prend acte de la réalité des différences, de la diversité des langages, de la dispersion. La Pentecôte n'annonce pas d'unification, n'annonce pas une nouvelle langue unique et universelle. La bonne nouvelle de l'évangile n'est pas annoncée dans une seule langue que les auditeurs apprennent ou reçoivent par miracle. Non, l'évangile est prêché dans toutes les langues des destinataires. Ainsi, aujourd'hui, la Bible est traduite en 2'400 langues, pour toucher les gens là où ils sont, dans leurs mots, dans leurs cultures. Pas besoins d'apprendre une langue unique pour lire le livre sacré. Chacun peut recevoir la Parole de Dieu dans sa langue.
Alors que la Tour de Babel voulait s'élever jusqu'au ciel pour se rapprocher de Dieu, à la Pentecôte, c'est Dieu, sous la forme des langues de feu, qui descend sur chacun, comme il était descendu sur le Sinaï pour remettre la Loi à Moïse.
Babel exprimait un mouvement ascendant, une quête pour monter vers Dieu. La Pentecôte exprime un mouvement descendant, que Dieu instaure, prolonge — parce qu'il y en a de multiples expressions dans l'Ancien Testament — et rend définitif. Le don de l'Esprit de Dieu est l'accomplissement de la venue de Jésus comme Dieu devenu homme sur la terre. Cet Esprit, cette Présence de Dieu est donnée à tous, ici, sur la terre, dans tous les lieux, aussi dispersés qu'ils soient aux quatre coins du monde.
L'amour de Dieu est descendu sur la terre. Lorsque nous avons besoin d'être aimés, nous n'avons plus besoin de mettre en œuvre des stratagèmes et des stratégies pour monter le chercher jusqu'au ciel, il est là autour de nous. Dieu nous donne à chacun un nom, il nous appelle par notre nom, nous n'avons plus besoin de nous fabriquer un nom sur la terre, nous n'avons pas besoin de devenir célèbres, il connaît notre nom.
Nous n'avons pas besoin de monter jusqu'au ciel, Jésus y est monté pour nous auprès de Dieu et maintenant sa présence nous accompagne ici sur terre. Nous pouvons déployer nos activités — non pas pour prouver quoi que ce soit — mais juste pour faire ce que nous devons faire, chacun à notre place. Faire ce que nous avons à faire, non pour attirer le regard de Dieu, les louanges de nos collègues, etc. Mais faire ce que nous avons à faire simplement par reconnaissance, parce que nous avons reçu une place, parce que nous avons reçu des compétences, parce que nous sommes quelqu'un et que nous avons tous la capacité d'aimer.
Etre nous-mêmes et aimer autour de soi, retransmettre ce que nous avons reçu, voilà comment nous pouvons passer de Babel à Pentecôte.
Amen

© Jean-Marie Thévoz, 2007

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