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eau

  • Esaïe 6. Notre Père (8)

    Esaïe 6

    23.8.2020

    Notre Père (8)

    Esaïe 6 : 1-9

    1 Corinthiens 1 : 1-3

    Jean 17 : 24-26

    télécharger le texte : P-2020-08-23.pdf

     

    Chers frères et soeurs en Christ,

    Dans notre suite de prédications sur le Notre Père (pour lire toute la série sur le Notre Père, cliquer dans la colonne de droite la catégorie "Notre Père"), nous arrivons aujourd'hui à la phrase : « Que ton nom soit sanctifié ». Je trouve que c'est la phrase la plus difficile à comprendre du Notre Père. Pourquoi le nom de Dieu ? Que veut dire sanctifier, quand il s'agit déjà de Dieu ? Qui doit le faire ? L'être humain peut-il rendre Dieu plus saint qu'il ne l'est déjà ? Quelle qualité l'être humain pourrait-il rajouter à Dieu ?

    Commençons par revenir à l'histoire, l'histoire d'Israël qui peut se lire en remontant le Notre Père. En commençant par la fin, le Notre Père exprime la délivrance de l'esclavage en Egypte. Puis le peuple est soutenu lors des tentations dans le désert, il est pardonné, il est nourri.

    Ensuite Dieu donne sa Loi, le Décalogue, pour exprimer sa volonté. Enfin, vient la période de la royauté où le règne des hommes est en concurrence avec le règne de Dieu. Finalement Salomon construit le Temple à Jérusalem pour manifester la présence de Dieu. Au cœur du Temple se trouve une pièce, appelée le Saint des Saints, réservée à la présence divine.

    Esaïe reçoit la vision de cette sainteté. Il voit Dieu sur son trône. Des séraphins clament la sainteté de Dieu en disant : « Saint, saint, saint est le Seigneur de l'univers, la terre entière est remplie de sa gloire. » (Es 6:3).

    Aussitôt Esaïe est renvoyé à sa petitesse et à ce qu'il perçoit comme son impureté, son indignité. La sainteté de Dieu est opposée à la bassesse humaine. C'est le grand écart, l'éloignement complet, la divergence absolue. Tout pourrait se terminer dans l'anéantissement du prophète Esaïe et de toute l'humanité.

    Mais la révélation de cette vision, c'est que cette grandeur de Dieu, cette gloire, cette sainteté est bienveillante, tournée vers le bien de l'humanité. Dieu prend l'initiative d'effacer la distance, d'anéantir, non pas l'être humain, mais l'impureté, c’est-à-dire ce qui nous sépare de Dieu.

    Dieu est toujours dans l'initiative envers l'être humain. Cela fait partie de sa sainteté, de son être profond. La sainteté de Dieu n'est pas destructrice, mais constructrice.

    C'était déjà Dieu lui-même qui avait pris l'initiative de révéler son nom à Moïse dans le buisson ardent (Ex 3). Ce nom que le Notre Père appelle à être sanctifié. Pourquoi sanctifier le nom de Dieu et pas Dieu lui-même ?

    Le nom est en même temps ce qui dévoile et ce qui voile. Le nom permet d'appeler quelqu'un et d'entrer en dialogue avec lui. Mais le nom n'est pas la personne elle-même, c'est comme un substitut, un remplaçant.

    Dans cette phrase : « Que ton nom soit sanctifié » en parlant du nom et pas de Dieu, nous affirmons que Dieu lui-même est inaccessible, hors de notre portée et que nous ne pouvons rien ajouter à Dieu. C'est une façon de refuser la possibilité d'enfermer Dieu dans une théologie particulière, dans une Eglise, dans nos désirs. Dieu nous échappera toujours.

    Par contre, s'il s'agit du nom, nous, comme êtres humains, nous pouvons lui faire une place. Une place dans nos vies et dans nos cœurs, une place dans la vie publique, une place dans le monde.

    Notre rôle, ce que nous pouvons demander dans la prière du Notre Père, c'est que le nom de Dieu soit respecté, c'est qu'une place soit faite à Dieu dans notre monde. Notamment pour que rien ne vienne occuper cette place, aucune idole.

    Or aujourd'hui, nous connaissons et voyons les veaux d'or qui sont adorés publiquement. La place de Dieu est occupée par des humains ou des idéologies.

    Comme chrétiens, nous demandons que Dieu soit remis à la première place, que son nom soit placé au-dessus de tout autre nom (Phil. 2:9). Au-dessus, cela laisse penser à une supériorité ou une suprématie. Mais il ne faut pas oublier que Jésus est venu achever la révélation du nom de Dieu.

    Dans la prière sacerdotale (Jean 17), Jésus termine sa prière en disant : « J'ai fait connaître ton nom et je le leur ferai encore connaître. » (v.26). Or l'oeuvre du Christ qui nous révèle Dieu a pour sommet le service et le don de soi. Il n'y a pas de pouvoir dans la suprématie du nom de Dieu.

    Encore une remarque sur le choix des mots. La phrase parle de sanctifier, pas de rendre sacré. Rendre sacré, faire du sacré se dit « sacrifier » fier étant une forme de faire.

    Le Notre Père nous rappelle qu'avec Dieu il n'est pas question de rendre sacré, de sacrifier, mais de rendre saint.

    Rendre saint, c'est élever l'ordinaire vers le divin. Et c'est ce que nous faisons et sommes appelés à faire. Nous prenons de l'eau du robinet et nous en faisons l'eau du baptême, Dieu la sanctifie.

    Nous prenons du pain et du vin ordinaires et ils deviennent corps et sang du Christ. Nous avons des vies ordinaires et toutes simples et nous les confions à Dieu pour qu'il les sanctifie.

    C'est en laissant nos vies être sanctifiées par le contact avec le Christ que nous faisons une place au nom de Dieu dans le monde. Nous sanctifions le nom de Dieu lorsque nous remplissons notre mission, lorsque nous accomplissons notre vocation d'être humain, lorsque nous acceptons d'être nous-mêmes dans la transparence devant Dieu.

    Nous n'ajoutons rien à Dieu, c'est lui qui ajoute de la sainteté dans nos vies, si nous le voulons bien.

    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2020

     

  • Jésus accepte toutes les facettes de son humanité

    30.10.2016

    Jean 4

    Jésus accepte toutes les facettes de son humanité 

    Mat 3 : 13-17       Jean 4 : 1-10

    télécharger le texte : P-2016-10-30.pdf

    Chères frères et sœurs en Christ,

    Vous avez entendu le récit du baptême de Jésus —selon l'évangéliste Matthieu — et le début de la rencontre de Jésus avec la femme samaritaine — dans l'évangile de Jean. Ces deux récits sont bien différents, puisqu'ils racontent des événements et des rencontres dissemblables, mais deux choses les réunissent : ils ont l'eau en commun et chaque écrit tourne autour d'une demande de Jésus.

    - Jésus demande à Jean Baptiste de le baptiser et

    - Jésus demande à la femme samaritaine de lui donner à boire.

    Cela paraît évident que, dans la vie, on demande certains services, certaines choses. Cela va de soi ! Pourtant, ici, cela ne va pas de soi, puisque les deux fois, Jésus rencontre une résistance.

    Jean Baptiste s'oppose. Il ne veut pas baptiser Jésus, il trouverait plus normal d'être baptisé par Jésus ! Jean Baptiste voudrait donc inverser les rôles. En disant cela, Jean Baptiste reconnaît, confesse en Jésus un être supérieur à lui, plus proche de Dieu, un être auquel il n'a rien à donner, mais tout à recevoir. Pourtant, Jésus demande ce baptême à Jean Baptiste, même si "théoriquement" Jésus n'a pas à être purifié, pardonné. (Mais les évangiles ne nous présentent pas un Jésus "théorique"). Mais Jésus — bien que Fils de Dieu, comme la voix dans le ciel le proclame lors de son baptême — ne veut pas être élevé au-dessus de sa condition d'être humain, en tout cas pas avant sa mort sur la croix.

    C'est ce que nous retrouvons sous la plume de l'évangéliste Jean dans la rencontre avec la Samaritaine : un Jésus tout humain.

    - Il est en voyage, en marche de la Judée vers la Galilée.

    - Il est midi, il a envoyé ses disciples acheter des provisions au village.

    - Il est fatigué, comme un homme qui a marché toute la matinée sous un soleil de plus en plus chaud. Il s'est assis sur la margelle du puits de Jacob.

    - Il a soif. (Notez que c’est aussi la parole de Jésus sur la croix que l’évangéliste Jean relève dans son Evangile, donnant ainsi à cette rencontre et à cette demande une importance particulière.)

    Jésus a soif, comme tout homme qui a marché longtemps sous le soleil. Jésus est montré comme ayant des besoins humains, il vit une vie d'homme avec tout ce que cela représente de finitude, de soif et de faim à calmer, de fatigue à compenser, de repos à trouver. Et lorsque Jésus a soif, il demande à boire, et il le demande à la personne qui se trouve là, en l'occurrence une femme, une étrangère de surcroît.

    En lui adressant la parole, Jésus brise deux tabous : celui d'un homme qui s'adresse à une femme et celui d'un juif qui s'adresse à un samaritain. Mais Jésus n'a rien à faire de ces tabous, ce qui est important, c'est qu'il manifeste qu'il n'est pas autosuffisant, qu'il ne vit pas de manière autarcique. Jésus manifeste que — comme tout être humain — il a besoin des autres. Pas seulement de ses amis, de ses disciples, qu'il a envoyé chercher à manger. Non, Jésus a besoin de chacun, même des inconnus et il n'a pas peur de le faire savoir. Il demande comme un enfant demande, en toute innocence, en toute confiance.

    Il demande comme nous ne savons souvent pas demander. Je ne sais pas si vous réalisez comme on a peur de demander dans ce Canton, tellement on a peur de déranger, tellement on a appris qu'il fallait y arriver tout seul, par ses propres moyens.

    Il y a souvent de la honte à demander de l'aide.

    - Combien de personnes ici à Lausanne ou dans le Canton se passent d'aide sociale ou de prestations complémentaires d'AVS, parce qu'il faut les demander !

    - Combien sommes-nous à éviter de déranger notre voisine pour lui demander un œuf ou du sucre et à préférer prendre sa voiture pour aller à la station-service pour en acheter le soir ou le dimanche ?

    Cela me rappelle une rencontre que j’ai faite à l’EMS, une ancienne infirmière, qui me disait combien elle trouvait gênant, voir humiliant de devoir demander de l’aider pour se lever, pour sa toilette, pour s’habiller. Elle qui avait consacré sa vie à faire cela pour les autres, qui avait dû trouver valorisant d’exercer ce métier d’aide et de soutien, elle ne supportait pas de se trouver de l’autre côté !

    Demander, c’est difficile, c'est dévoiler un manque, une vulnérabilité, une imprévoyance, voire une faiblesse. C'est avouer : "je ne suis pas autosuffisant", "je ne suis pas parfait, parce que je n'ai pas prévu d'avoir assez de sucre ou d'œuf." “Je ne suis plus autonome.” Ah ! comme c'est plus facile de proposer de l'aide que d'en demander !

    Eh bien, voilà que Jésus se présente avec ses demandes, avec ses limites d'être humain, pour nous dire : "Il n'y a pas de honte à être humain, à être imparfait, à être vulnérable, à dépendre d'autrui." Dans la demande même, Jésus nous fait cadeau de son humanité, de son acceptation paisible de toutes les limites humaines. Non, nous n'avons pas à être des surhommes, ou des super-women, à être partout à la fois, à faire trois choses à la fois, à être parfait(e)s. Accepter d'avoir besoin des autres, c'est aussi un cadeau que nous leur faisons.

    Regardez ces petits enfants qui attendent tout de leurs parents, ne sont-ils pas des cadeaux dans leur façon ingénue de demander ? Ne nous apprennent-ils pas la vraie vie ? Jésus a dit une fois "Le Royaume des cieux appartient à ceux qui leur ressemblent" (Mt 19:14) Le Royaume de Dieu n'est pas pour ceux qui pensent avoir accompli la perfection dans leur vie, mais pour ceux qui ont soif, pour ceux qui se savent fatigués, limités et s'offrent aux autres avec leurs demandes et leurs possibilités.

    Jésus a demandé le baptême à Jean Baptiste parce qu'il savait qu'une vie d'être humain a besoin du soutien, de l'aide de Dieu et des autres. Il savait que chaque être humain a besoin de la grâce et de l'amour de Dieu pour avancer et qu'il en avait besoin lui aussi. C'est ce qui nous est offert chaque jour par la présence de Dieu dans votre vie. Il suffit de le demander !

    Amen  

    © Jean-Marie Thévoz 2016

  • Vivre la vie en 3D

    Jean 3

    9.10.2016

    Vivre la vie en 3D

    Genèse 12 : 1-5         Jean 3 : 1-12

    Télécharger le texte : P-2016-10-09.pdf

    Chers frères et sœurs en Christ,

    On relisant le récit de la rencontre de Jésus avec Nicodème, j’ai réalisé que Jésus demandait à Nicodème, la même chose que Dieu demandait à Abraham. Vous vous souvenez du début de l’histoire d’Abraham, avec cette demande de Dieu de tout laisser et de partir, vers un autre pays, vers un autre horizon, vers une autre patrie. Ce voyage nous est présenté comme un itinéraire géographique, mais nous percevons que Dieu ne demande pas seulement un déménagement, mais une démarche de foi.

    Le déplacement n’est pas seulement une affaire de kilomètres à parcourir, mais un déplacement dans sa tête : accepter d’être dérangé dans ses habitudes, dans ses routines ; accepter d’envisager un ailleurs — encore inconnu, encore mystérieux, sur la foi d’une promesse. Il y a bien un ailleurs promis, un avenir ouvert, une nouvelle vie au bout du chemin, dans le chemin même. Comme lecteur de ce récit, nous sommes invités à nous associer à Abraham, donc à faire avec lui ce voyage, qui devient pour nous un voyage spirituel.

    Abraham est bien un père spirituel, le père d’une multitude de nations, comme le dit son nom. Abraham était en tout cas le père spirituel duquel les pharisiens disaient descendre et se rattacher. Sachant cela, le dialogue entre Nicodème et Jésus prend une tournure encore plus ironique. Ce maître pharisien ne comprend rien au discours de Jésus sur la nouvelle naissance, alors que Jésus ne demande rien d’autre à Nicodème que ce que Dieu a demandé à Abraham : « Commence une nouvelle vie !» Va, pars, quitte ton ancienne vie et commences-en une nouvelle. C’est ce que signifie l’injonction : « tu dois naître de nouveau. »

    Mais Nicodème est comme nos rationalistes d’aujourd’hui, il ne voit la vie qu’en deux dimensions : il y a ce qui est devant et derrière soi, il y a ce qui est à droite et à gauche. Mais il ne voit pas ce qu’il y a en-dessus et en-dessous. C’est la vie en 2D. Alors que la vie nous est donnée en 3D. Il y a tout ce qui est au-dessus de nous.

    L’évangéliste Jean joue sur le double sens, en grec, du mot qui veut dire en même temps « de nouveau » et « d’en haut ». Jean joue sur ce double sens pour montrer aux lecteurs comment Nicodème manque une dimension de la vie. Il reste à ras terre, dans le concret, le visible, le tangible. Jésus parle de nouvelle naissance et Nicodème se représente un accouchement et voit l’impossibilité concrète de recommencer. Mais Jésus est à un autre niveau. Jésus voit la vie en 3D. La vie n’est pas plate, elle a du relief, il y a quelque chose au-dessus de nous.

    Ce que Jésus cherche à faire dans ses dialogues, c’est d’ouvrir ses interlocuteurs à cette troisième dimension, à la réalité divine qui surplombe notre réalité visible, qui lui donne du relief, de la vie, de la vraie vie.

    On voit cela dans ce dialogue avec Nicodème entre le premier degré de l’accouchement et le deuxième degré de la nouvelle naissance. On voit cela dans le dialogue avec la Samaritaine avec l’eau. La Samaritaine pense à l’eau du puits, lorsque Jésus parle de l’eau jaillissante, l’eau qui donne la vie.

    L’évangéliste Jean utilise plusieurs moyens littéraires pour ouvrir le lecteur à cette dimension nouvelle. Il utilise — comme ici — le malentendu sur un terme qui peut avoir un sens concret et un sens symbolique (la naissance, l’eau). Il utilise aussi l’ironie ou les phrases à double sens : c’est le cas lorsque Caïphe — pour convaincre qu’il faut mettre à mort Jésus — dit : « Il vaut mieux qu’un seul homme meurt plutôt que tout le peuple » ce qui est épouvantablement cynique, mais en même temps la description de l’œuvre salvatrice de Dieu. Il utilise enfin la symbolique, des réalités concrètes, pour renvoyer à la réalité divine dans les phrases où Jésus affirme « je suis» la lumière du monde, le pain de vie, la porte des brebis, la vigne etc.

    Le Dieu de la Bible — et Jésus en tête — veut nous entraîner à sortir du monde en 2D pour entrer dans le monde en 3D de la vie spirituelle. Ce passage n’est pas naturel. Nous ne naissons pas dans la 3D, nous y parvenons pas une prise de conscience. Quelqu’un a dit : « Tout être humain a deux vies, la seconde commence quand on réalise qu’on en a qu’une. »

    La vie spirituelle commence lorsque nous réalisons que le monde, ou la vie, nous échappe. Que nous ne sommes pas maître de tout. Que l’essentiel nous échappe. Alors nous nous mettons à chercher le sens de la vie, de notre existence et de la destinée du monde. Alors nous nous mettons en route pour chercher la terre promise, cette troisième dimension qui donne sens, qui explique comment fonctionne le monde.

    Être croyant, c’est croire que cette troisième dimension existe, qu’il y a quelque chose au-dessus de nous, qu’il y a une dimension spirituelle. Cela beaucoup de nos contemporains le croient.

    Être Chrétien, c’est croire que cette troisième dimension — nous disons habituellement « le ciel» dans le langage biblique — est habitée par le Dieu de Jésus-Christ. C’est-à-dire un Dieu bienveillant, qui nous aime inconditionnellement.

    Être chrétien, c’est voir Dieu à l’œuvre dans nos vies. Être chrétien, c’est mettre la 3D dans nos vies. C’est voir plus loin que le visible et le tangible. C’est voir dans l’eau du baptême plus que de l’eau. C’est voir dans le pain de la cène plus que du pain, c’est voir dans le vin de la cène plus que du vin. Être chrétien, c’est croire qu’une autre réalité, celle du royaume ou de la terre promise, habite nos réalités visibles et tangibles.

    Nous pouvons appliquer cela à notre lecture de la Bible. Ne pas rester bloqués dans une lecture historique est géographique des textes pour trouver le sens symbolique et spirituel des récits. Quel est le pays promis pour moi ? De quelle Égypte Dieu veut-il m’aider à sortir ?

    Nous pouvons appliquer cette 3D à nos rencontres. Qu’est-ce que Dieu me dit dans les paroles que prononce cette personne ? Et si c’était Dieu qui m’avait fait croiser les pas de cet individu ? Qu’est-ce qu’il m’apporte ? Que puis-je lui apporter ? Abraham n’a-t-il pas accueilli Dieu lui-même dans les trois messagers qui sont venus à la porte de sa tente ? Cette vision des rencontres ne va-t-elle pas modifier la qualité même de nos dialogues, de nos échanges ?

    Nous pouvons appliquer cette vision 3D aux événements qui nous arrivent. Si je crois en un Dieu bienveillant, ce qui m’arrive aura une autre couleur que si je pense que la vie est dirigée par des forces obscures. Nous pouvons nous demander si les événements que nous traversons n’ont pas une face cachée et apporter quelque chose d’insoupçonné. Comme dans un roman, tant qu’on n’a pas tourné la dernière page, il peut survenir une surprise qui renverse la perspective et permet de tout reconsidérer sous un jour nouveau.

    Le récit de Jean — qui nous présente Nicodème comme incapable de comprendre — nous place, comme lecteur, avec l’envie de lui souffler les bonnes réponses ! Avec l’envie de lui dire : pars, va, quitte tes vieilles idées et commence une nouvelle vie ! Ferons-nous pour nous-mêmes ce que nous avons envie de recommander à Nicodème ?

    Amen

    © Jean-Marie Thévoz 2016

  • Exode 17. Dans notre désert, nous avons soif d'une eau qui nous restaure.


    Exode 17
    25.11.2012

    Dans notre désert, nous avons soif d'une eau qui nous restaure.
    Exode 17 : 1-7      Jean 4 : 7-15
    Téléchargez la prédication ici : P-2102-11-25.pdf

    Chères paroissiennes, chers paroissiens, chers familles,
    Je vous ai fait entendre ce récit de l'Ancien Testament où le peuple hébreu a soif dans le désert et réclame de l'eau à Moïse. C'est un épisode de l'histoire des hébreux qui se situe pendant l'Exode. Vous vous en souvenez, le peuple hébreu vivait en Egypte. Il était devenu une menace pour le Pharaon et soumis à la corvée. Entendant les plaintes et les cris de douleur de son peuple, Dieu avait mandaté Moïse pour faire sortir le peuple des hébreux d'Egypte.
    Dans notre récit, le peuple est loin d'Egypte, il est dans le désert de l'Horeb (ou Sinaï), libre mais assoiffé. La vie dans le désert est difficile et certains regrettent la vie en Egypte, ils font des reproches à Moïse.
    Je vais faire une lecture symbolique de ce récit. Je fais le pari que ce récit — tout ancien qu'il soit — parle de nos situations celles que nous traversons aujourd'hui !
    Ce voyage du peuple hébreu dans le désert, c'est une image, une représentation de nos traversées du désert, de nos périodes difficiles, de nos temps de deuils, de nos épreuves. Nous aussi nous avons été blessés et chassés de nos territoires connus et balisés pour être jetés sur des routes inconnues, incertaines. Nous aussi nous nous retrouvons à être privés de l'eau à laquelle nous étions habitués, être privés de l'amitié d^'un être cher, de la sécurité d'un époux ou d'un père, de l'affection d'une épouse ou d'une mère.
    Dans notre désert, nous avons soif et nous crions notre soif et nous nous demandons — comme le peuple hébreu — "le Seigneur est-il parmi nous, oui ou non ?" (Ex 17:7) Nous avons soif d'un accompagnement, d'une présence. Nous disons notre soif — parfois nous crions notre soif : y a-t-il un Moïse pour nous entendre ?
    Y a-t-il un Moïse pour nous répondre ? Qui est Moïse pour nous ? Qui va frapper le rocher pour nous ? Pour faire jaillir l'eau de consolation, l'eau jaillante de vie pour continuer la route ? Où est notre rocher ? Où est l'Horeb, la montagne de Dieu ? Où est cette eau qui désaltère et restaure l'âme ?
    Dans l'Evangile de Jean, Jésus se présente à la Samaritaine comme celui qui donne cette eau qui désaltère et restaure. L'Evangile de Jean nous présente Jésus comme la source, l'eau qui donne la vraie vie, celui auprès de qui aller se ressourcer. L'évangéliste Jean le dit dans son récit de la Samaritaine, mais il y fait encore allusion dans la Passion de Jésus.
    Jean mentionne qu'après la mort de Jésus — pour vérifier que Jésus est bien mort — un soldat perce le côté de Jésus avec sa lance et Jean rapporte que "du sang et de l'eau sortent de son côté" (Jn 19:34). Jésus mourant sur la croit devient le rocher de l'Horeb d'où sort l'eau qui donne la vie.
    C'est du Christ sur la croix que coule l'eau qui donne la vie, l'eau qui ressource nos existences, l'eau qui désaltère nos vies, l'eau qui restaure notre âme.
    Le bâton de Moïse qui fait sortir de l'eau du rocher pouvait nous faire penser à une baguette magique qui n'a rien à voir avec notre réalité. Il en est autrement du Christ qui donne sa vie pour nous sur la croix, pour que nous vivions.
    Par ce geste, cet accomplissement, Jésus nous rejoint au plus profond de nos gouffres. La plaie d'où sort l'eau qui nous donne la vie nous dit que Dieu nous rejoint précisément là où nous sommes : dans nos blessures.
    Ce n'est pas un Dieu qui plastronne qui nous parle et nous offre une issue à notre souffrance. C'est un Dieu blessé qui vient à la rencontre de nos blessures pour nous proposer un chemin à faire ensemble vers la guérison, vers l'espérance, vers le relèvement, vers la résurrection.
    C'est Jésus, avec ses mains et ses pieds percés, avec son côté blessé qui se fait reconnaître par ses disciples après la résurrection (Jn 20). Ses blessures rejoignent nos blessures, son relèvement est notre relèvement, sa résurrection est notre guérison, notre retour à la vie.
    Ainsi, l'évangéliste Jean nous dit que Jésus est le rocher d'où jaillit la source d'eau qui apaise notre soif. Il est celui qui nous relie à la source de l'amour; il est celui qui nous relie à la vie, la vraie vie; il est celui qui nous relie à l'espérance pour nous restaurer, à sa Table lors de la Cène, pour reconstruire en nous la sécurité et la paix intérieure.
    Laissons-nous approcher par ce Dieu-là, qui connaît nos blessures, qui a traversé la douleur et la nuit. Il nous entraîne vers le jour, vers la lumière, vers la vraie vie. Laissons-nous approcher par ce Dieu-là.
    Amen
     © Jean-Marie Thévoz, 2012

  • Jean 3. Jésus est venu dans le monde pour révéler la deuxième dimension de la vie.

    Jean 3
    2.9.2012
    Jésus est venu dans le monde pour révéler la deuxième dimension de la vie.
    Marc 1 : 9-11     Jean 3 : 1-9

    Téléchargez la prédication ici : P-2012-09-02.pdf

    Chères paroissiennes, chers paroissiens, chère famille,
    Nous découvrons aujourd'hui le personnage de Nicodème, dans sa rencontre avec Jésus. Le récit nous dit qu'il appartient au parti des Pharisiens, qu'il est un des chefs des juifs — il fait partie du Conseil appelé le Sanhédrin — et il dit lui-même qu'il est âgé.
    Les Pharisiens sont un groupe de gens très religieux, qui cherchent à se rapprocher de Dieu au travers de leur pratique, de leur stricte obéissance de la Loi de Moïse. Ils l'ont détaillée en une longue liste de commandements. Les Pharisiens ne se contentent pas d'observer et de pratiquer ces commandements, ils surveillent aussi les autres pour que chacun observe également ces commandements.
    Jésus est souvent confronté à leurs critiques. Il ne manque pas non plus de dénoncer leur hypocrisie, les accusant de filtrer le moucheron, mais d'avaler le chameau (Mt 23:24).
    Cette nuit-là, Nicodème vient secrètement rencontrer Jésus. Nicodème perçoit quelque chose d'exceptionnel chez Jésus, il croit reconnaître une origine divine aux paroles et aux actes de Jésus. Avant même que Nicodème ne pose une question à Jésus, Jésus lui dit ce qui lui manque : "Personne ne peut voir le Royaume de Dieu s'il ne naît pas de nouveau, ou s'il ne naît pas d'en haut" (Jn 3:3) (le mot grec signifie en même temps de nouveau et d'en haut). Jésus perçoit que Nicodème est en recherche, en quête du Royaume de Dieu, dans une quête spirituelle.
    Suit une sorte de dialogue de sourd où Nicodème oppose l'impossibilité pour un adulte ou une personne âgée de naître de nouveau de sa mère. Nicodème reste dans le terre-à-terre. Il reste dans les possibilités matérielles : personne ne peut retourner dans le ventre de sa mère pour naître une deuxième fois. C'est que Nicodème n'a pas vu la deuxième signification de ce "renaître." En fait, de manière générale, Nicodème ne voit pas la deuxième dimension de l'existence. Et Jésus est justement venu dans le monde pour révéler cette deuxième dimension de la vie, celle qui vient d'en haut.
    Nous naissons tous une fois dans ce monde, et nous avons besoin de ce corps pour y vivre, et nous avons besoin de nourrir ce corps, d'en prendre soin, de le faire grandir… pas de problème. Mais la vie ne se limite pas à cette dimension. Nous ne nous nourrissons pas seulement de lait maternel ou de pain. Nous avons besoin du regard de nos parents, nous avons besoin de recevoir de l'amour, nous avons besoin de relations.
    La vie humaine ne se réduit pas à la vie matérielle. Nous avons besoin d'être nommés. Nous avons tous besoin d'être appelés, nous avons tous besoin d'être adoptés.
    C'est ce que nous voyons dans le baptême de Jésus. Il y a la part matérielle avec l'eau du baptême pour le corps, mais ensuite il y a cet esprit qui vient d'en haut — visualisé par la colombe — et il y a cette parole d'amour et d'adoption : "Tu es mon fils bien-aimé en qui je mets toute mon affection." (Mc 1:11).
    C'est cette parole qui nous fait vivre, bien plus que ce que nous mangeons. Ce sont ces paroles d'amour et ces gestes d'affection qui affermissent notre confiance dans la vie, dans la valeur de notre existence. Peu importe l'ADN partagé ou non, c'est l'amour que nous recevons qui nous constitue comme être humain, aimé, engendré d'en haut.
    Nous sommes faits de cette double dimension, le charnel et le spirituel. Nous sommes boiteux si nous oublions une de ces dimensions. Et c'est ce que fait Nicodème. Comme Pharisien, il était tellement dans le contrôle de l'obéissance pratique aux commandements qu'il en oubliait la raison, le but ou la provenance : en haut.
    C'est pourquoi Jésus lui rappelle tout de suite l'essentiel : "Il faut naître à la vie d'en haut" et Jésus ajoute que cet "en haut" relève de l'eau et de l'esprit, l'esprit qui est comme le vent. Ce que Jésus veut dire, c'est que la vie d'en haut, cette deuxième dimension de l'existence ne peut pas se laisser enfermer dans un catalogue de prescriptions. Cette deuxième dimension de l'existence et de l'ordre de la liberté, de la danse, de la joie. Cette deuxième dimension, c'est ce qui donne du relief à l'existence, ce qui donne de la vie à la vie.
    Dans chaque moment de la vie, on peut saisir ces deux dimensions. Quand je fais la vaisselle, je peux penser à la corvée que cela représente, mais je peux aussi penser que je rends service à mon conjoint, à ma famille et plus encore, je peux anticiper le plaisir d'une belle table avec ses invités.  Quand je travaille, je peux penser au salaire qui tombera à la fin du mois et à la sueur que cela me demande, mais je peux aussi me réjouir de ce que mon travail apporte aux autres, comment il leur facilite la vie, comment ce que je fais contribue au bien commun. Quand je vois un coucher de soleil, je peux penser qu'il ne s'agit que de la réfraction d'ondes lumineuses au travers des couches de l'atmosphère, ou bien je peux m'émerveiller et me réjouir du jeu des couleurs et avoir envie de partager cette joie avec ceux que j'aime.
    Jésus appelle Nicodème à lever les yeux du guidon, à voir au-delà du factuel et du matériel. Nous sommes appelés à voir le monde, à voir ceux qui nous entourent avec un autre regard. Quitter le terre-à-terre pour un regard illuminé d'une lumière qui vient d'en haut.
    Nous sommes invités à aller au-delà des explications matérielles qui ne nous nourrissent pas, pour recevoir ou inventer une réponse poétique qui enchante nos sens; une réponse qui nous entraîne dans un pas de danse sur les ailes du vent.
    Amen

    ©Jean-Marie Thévoz, 2012