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o) Actes - Page 3

  • Actes 8. Même imparfaite, l'Eglise reçoit le don du Saint-Esprit.

    Actes 8.

    8.8.2010

    Même imparfaite, l'Eglise reçoit le don du Saint-Esprit.

    Actes 8 : 4-25

    Télécharger la prédication : P-2010-8-8.pdf

    Chères paroissiennes, chers paroissiens,

    Nous poursuivons notre parcours en suivant l'apôtre Pierre dans le livre des Actes des Apôtres. Dans ce chapitre 8, nous voyons Pierre venir en Samarie pour confirmer le travail de Philippe. Pour comprendre ce voyage de Pierre, il faut revenir un peu en arrière.

    Les Douze apôtres ont reçu, comme première mission, d'annoncer le Christ à Jérusalem. Comme nous l'avons vu dimanche passé, ils ont rapidement été mis en difficulté par les autorités : ils se sont vu interdire de parole au Temple et à Jérusalem. Malgré cela, ils prêchent et la situation s'envenime jusqu'à la lapidation d'Etienne (Ac 7). Une persécution sévère s'en suit qui force les croyants à fuir Jérusalem. Ils se dispersent dans les campagnes avoisinantes, en Judée et en Samarie.

    Et là, ils ne purent s'empêcher de parler de leur foi… C'est là qu'on retrouve Philippe en Samarie. L'évangélisation de la Samarie n'a pas été une décision stratégique des Douze. C'est une conséquence imprévue des persécutions. L'auteur des Actes — Luc — nous montre ainsi que l'avance de l'Evangile dépend davantage de Dieu que des décisions des Apôtres. Il montre comment ce qui apparaît au premier regard comme un malheur et un échec peuvent devenir une opportunité et une chance.

    Ainsi, Philippe arrive en Samarie et annonce la bonne nouvelle, par la parole et par des signes, qui sont semblables à ceux réalisés par Jésus pendant son ministère. Mais Philippe n'arrive pas sur un terrain en friche, il est déjà occupé par Simon le magicien, qui est aussi capable de faire des miracles. Les foules sont fascinées par les miracles de Simon. Elles voient en lui quelqu'un qui détient une puissance divine, une grande puissance.

    Voilà deux homme qui font des miracles — face à face. Le Christianisme se voit confronté au sacré et au religieux. Qu'est-ce qui va faire la différence ? Qu'est-ce qui différencie les miracles de Philippe de ceux de Simon ? Le texte nous dit que Simon s'annonce lui-même, comme grand, alors que Philippe annonce le Royaume de Dieu et le Christ.

    Il se passe alors que les gens de Samarie s'attachent au message de Philippe, ils croient et se font baptiser. Et Simon suit le mouvement. Il croit et se fait baptiser. Et le texte nous dit que Simon s'attache à Philippe et qu'il est à son tour fasciné par Philippe. Par ces mots, le texte ne dénigre pas la foi de Simon, mais révèle la fissure de sa personnalité. A quoi est-il vraiment attaché ? Au Christ et à sa Parole ou à Philippe et à ses prodiges ?

    Les deux personnalités sont en concurrence, leurs portraits sont presque dessinés en miroir. Qui est du bon côté ? L'arrivée de Pierre et Jean — émissaires de Jérusalem — va clarifier les choses.

    Pierre est détenteur de l'autorité de Douze et il intervient — en quelque sorte — pour valider après coup le travail d'évangélisation que les circonstances ont mises en route. Cependant, il ne faut pas survaloriser cette autorité de Pierre, ce n'est pas un pouvoir en propre, qui lui appartient. Il n'est que le vecteur, le médiateur, l'intermédiaire d'une force qui vient directement de Dieu. C'est ce qui ressort de sa confrontation avec Simon le magicien.

    Lorsque Pierre et Jean arrivent en Samarie, ils voient les nouveaux croyants, les nouveaux baptisés. C'est alors qu'ils prient pour qu'ils reçoivent le Saint-Esprit. Ensuite seulement, Pierre et Jean leur imposent les mains et ils reçoivent l'Esprit saint. Ce temps de prière est important. C'est le temps de la reconnaissance que l'Esprit saint n'appartient qu'à Dieu et que Dieu seul décide quand, où, à qui et par qui il le donne. Les apôtres ne sont que des vecteurs, des médiateurs, des intermédiaires.

    C'est ce que Simon le magicien n'a pas compris. Cette fissure en lui — le désir de posséder le pouvoir — se rouvre en lui. D'où sa demande à Pierre et le refus outré de celui-ci. Pierre rappelle alors à Simon et par là à toute l'Eglise, que l'Esprit saint est un don, il se reçoit et ne se possède pas.

    C'est la liberté de Dieu de le répandre là où il veut. Ici le Saint-Esprit est donné après le baptême, mais dans l'épisode de Corneille (Actes 10) il est donné avant le baptême.

    Ce récit est un rappel de l'entière liberté de Dieu, mais cette liberté de Dieu est entièrement tournée vers son Eglise et vers les croyants. C'est lui qui transforme les malheurs et les échecs pour en faire des occasions de témoignage et de conversion. C'est lui qui porte son Eglise et transforme le cœur des gens.

    Mais le récit nous met également en garde contre l'illusion d'une Eglise pure, idyllique, sans faille. L'Eglise est composée d'hommes et de femmes avec chacun leurs fissures et leurs ombres. Mais c'est cette Eglise tout de même qui reçoit l'Esprit saint.

    Dans un livre des Actes qui dépeint la naissance de l'Eglise d'une manière souvent idéale — des milliers de convertis, un groupe qui partage tous ses biens, une communauté de vie — Luc ne manque pas de relever que l'Eglise, toute bénie qu'elle soit, reste composée d'êtres humains faillibles et pécheurs. C'est cette Eglise défaillante que Dieu relève et que Jésus sauve.

    L'Eglise n'a donc pas pour tâche de viser la pureté, mais elle a une tâche de vigilance pour rester un vecteur, un médiateur, un intermédiaire pour transmettre la grâce de Dieu et ne pas prétendre à la possession de cette grâce.

    La différence significative entre les apôtres et Simon se trouve dans le fait que ce dernier se prêchait lui-même, alors que les apôtres annoncent l'Autre, le Tout-Autre, qui s'est fait connaître dans le Christ et qu'ils se mettent à son service.

    Bien sûr, il reste toujours difficile — aujourd'hui encore — de se mettre au service du Christ, de choisir l'obéissance à l'Evangile. C'est là pourtant que se trouvent le salut et la joie!

    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2010

  • Actes 4. Obéir à Dieu plutôt qu'aux hommes.

    Actes 4.

    1er août 2010

    Obéir à Dieu plutôt qu'aux hommes.

    Actes 4 : 1-12,  Actes 4 : 13-21.

    Télécharger la prédication : P-2010-8-1.pdf

    Chères paroissiennes, chers paroissiens,

    Nous avons choisi — comme thème de prédications de l'été — de vous parler de l'apôtre Pierre. Ma collègue vous a fait découvrir ce personnage dans les Evangiles et je vais continuer avec le livre des Actes des Apôtres. Le livre des Actes des Apôtres pourrait presque s'appeler les Actes de Pierre et Paul. Ils en sont les principaux héros. Pierre dans les chapitres 1 à 15 et Paul dans les chapitres 13 à 26, avec l'inclusion de sa conversion au chapitre 9. Pierre et Paul se rencontrent lors du Concile de Jérusalem, dont je vous parlerai le 22 août.

    Ainsi, peu à peu, Paul supplante Pierre dans la construction du christianisme et du Nouveau Testament. Mais Pierre reste le premier des disciples, dans le temps, dans son parcours avec Jésus et dans la fondation de l'Eglise de Jérusalem.

    C'est lui qui prêche directement après la Pentecôte. Il enseigne dans le Temple — avec Jean. Et il guérit l'infirme qui siège devant la Belle-Porte (Ac 3). C'est cet épisode de guérison qui est à la base du premier conflit avec les autorités du Temple et qui nous est exposé dans ce chapitre 4.

    Luc fait ici preuve de son talent littéraire, dans sa façon de raconter l'épisode et de nous faire comprendre beaucoup de choses sur Pierre comme "entre les lignes." Luc utilise le timing de l'épisode qui nous intéresse. Rappelons l'horaire de ce conflit : Pierre prêche au Temple pendant la journée. Les autorités réagissent et arrêtent Pierre et Jean dans la soirée. Les apôtres passent la nuit en prison. Ils comparaissent le lendemain matin devant le Conseil. Cela ne vous rappelle-t-il rien ?

    Par cet horaire, Luc fait un parallèle entre la Passion de Jésus et ce premier conflit. On y voit une sorte de remake du procès de Jésus. C'est ainsi que s'accomplissent les annonces de persécutions que Jésus a faites à ses disciples. Luc souligne ainsi la communauté de destin entre les disciples et Jésus. Voyons cela dans le détail.

    Jésus avait annoncé à ses disciples : "Quand on vous conduira pour être jugés dans les synagogues, ou devant les dirigeants ou les autorités, ne vous inquiétez pas de la manière dont vous vous défendrez ou de ce que vous aurez à dire, car le Saint-Esprit vous enseignera à ce moment-là ce que vous devez exprimer." (Luc 12:11-12, voir aussi Luc 21:15).

    Et voici que Pierre — dont on se souvient la peur, voire la lâcheté, devant la servante pendant le procès de Jésus — Pierre est maintenant plein d'assurance. Il s'exprime, au grand étonnement de l'assemblée, avec clarté et avec des arguments qui font mouche, alors que les grands-prêtres pensent avoir à faire à des gens simples et sans instruction.

    Luc dit clairement d'où vient cette audace et cette assurance : "Pierre était rempli du Saint-Esprit" (v. 8). Ainsi, les promesses de Jésus s'accomplissent. Le Pierre du reniement d'avant la croix et la résurrection a été transformé et cette transformation vient de l'Esprit-Saint, l'Esprit de Jésus qui habite maintenant les disciples.

    Un autre "trait de caractère" de l'apôtre mis en évidence par Luc est l'honnêteté. Les autorités du Temple demandent à Pierre et aux disciples de ne plus parler de Jésus au Temple. Là, Pierre joue l'honnêteté, il joue cartes sur table : ce ne sera pas possible, "nous ne pouvons par renoncer à parler de ce que nous avons vu et entendu" (v. 20). Ce n'est pas de la contestation, ce n'est pas de la provocation, c'est juste un positionnement, une affirmation, un fait. Ce positionnement est ancré dans la certitude "qu'il faut obéir à Dieu plutôt qu'aux hommes" (v. 19).

    Affirmation si évidente, mais affirmation si problématique.

    Affirmation évidente pour le sanhédrin, mais problématique pour le sanhédrin vis-à-vis des prédicateurs de Jésus. Affirmation évidente aujourd'hui face aux violations des droits humains, mais affirmation problématique pour nous aujourd'hui lorsque ce sont les musulmans qui la prononcent pour obtenir des dérogations à nos lois.

    Affirmation problématique un 1er août où nous mettons justement en avant notre pays et nos lois. Qu'est-ce qui justifie cette phrase dans la bouche de Pierre. Qu'est-ce qui la rend acceptable dans la pratique — puisqu'il est difficile de la contester dans l'absolu ?

    Comment concilier : Dieu est au-dessus de nos lois, fussent-elles démocratiques, et : Tout le monde doit se soumettre aux lois et aux principes de la démocratie ? Je pense qu'on peut trouver quelques pistes dans le comportement de Pierre.

    Premièrement, Pierre demande juste une liberté, un droit à la liberté d'expression. Il faut distinguer le "droit-liberté" du "droit-créance". Le "droit-créance" demande une action, une prestation de la part du pouvoir. Le droit au travail, le droit au logement sont des "droits-créances". Les "droits-liberté" demandent une abstention de la part du pouvoir : s'abstenir d'empêcher ou de réprimer. La liberté d'expression que demande Pierre ne demande pas de prestation, juste de ne pas être empêché de parler.

    Deuxièmement, cette liberté d'expression n'est pas contraignante pour les autres, elle n'oblige pas à rester pour écouter. Chacun reste libre d'adhérer ou pas au message de Pierre.

    Troisièmement, les apôtres sont prêts à assumer les conséquences et les inconvénients de leurs discours ou de leur opposition à l'autorité. Ils sont prêts au martyre. C'est une résistance non-violente et non-agressive.

    Quatrièmement, Pierre ne définit pas un contenu précis à ce que Dieu demande. Il ne revendique pas cette obéissance sur des cas particuliers, un comportement, un rite ou une coutume; et il ne cherche pas à imposer cette volonté à d'autres. Il demande un espace de liberté dans l'espace public.

    Ce conflit entre autorités religieuses et Pierre persiste encore aujourd'hui entre les autorités civiles et les demandes religieuses, entre la pensée dominante et les courants minoritaires. Le partage n'est pas facile à faire, nous le voyons souvent dans nos journaux.

    Rappelons-nous que la pratique du Christianisme (dans son essence), à la suite de Jésus, a toujours été de chercher des voies d'ouverture et de non-violence où le chrétien renonce à son droit plutôt que de devenir intolérant.

    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2010

  • Actes 10. Le message de Jésus n'est pas réservé à une terre, à un peuple.

    4.4.2010

    Le message de Jésus n'est pas réservé à une terre, à un peuple.

    Télécharger en pdf : P-2010-4-4.pdf

    Luc 24:1-10, Actes 10: 34-45

    Chères paroissiennes, chers paroissiens,

    Pâques, la fête de la résurrection ! C'est la fête que nous commémorons tous les dimanches : premier jour de la semaine où les femmes sont allées au tombeau après le sabbat, jour de repos qui clôt la semaine.

    La résurrection — pierre angulaire de la foi chrétienne— est pourtant si mystérieuse, tellement inexplicable. Résurrection, pierre d'achoppement pour nombre de nos contemporains et — osons le dire — très souvent pour nous aussi. Comment dire l'impossible, l'inédit, l'indicible ? Comment croire sans comprendre, sans explication ?

    Nous vivons dans une société rationnelle et scientifique. Tout doit trouver sa description et son explication. Et c'est bien. Mais la résurrection échappe à cela. Déjà, les évangiles se dérobent ou, à choix, préservent le mystère.

    Les textes, dans les quatre évangiles, passent du dépôt du corps de Jésus au tombeau le vendredi soir, à la découverte du tombeau vide le dimanche matin par les femmes. Entre deux : rien. Pas une ligne, pas un mot. Un blanc, un vide, un silence.

    Le mystère de Pâques ne se trouve donc pas là. Ne répétons pas le geste de la femme de Lot de regarder en arrière (Gn 19:26). Il n'y a rien en arrière, tout est en avant, devant soi et là il y a beaucoup de choses. C'est bien ce que disent les anges : "Pourquoi cherchez-vous parmi les morts celui qui est vivant ?" (Lc 24:5).

    Tout est en avant, devant soi. Et les femmes le comprennent : elles quittent le tombeau pour aller porter la nouvelle aux disciples. Les femmes sont les premiers témoins de la bonne nouvelle. Aujourd'hui, cela sonne comme normal. Mais c'est inouï, incroyable, c'est comme si on nous annonçait qu'il y avait sept femmes au Conseil fédéral !

    Le premier miracle de Pâques, c'est que Dieu choisit ce qui ne comptait pour rien dans la société (excusez-moi Mesdames) pour annoncer la nouvelle la plus important de toute l'histoire de l'univers ! D'ailleurs les disciples ne croient pas les femmes. Dieu fait confiance à ces femmes, mais pas les disciples. C'est toute l'histoire de Dieu avec le genre humain. Le manque de foi dans l'action de Dieu pour nous ! Nous sommes incrédules, nous ne croyons pas à la force transformatrice de Dieu, à sa puissance de renouveau, de résurrection !

    Cela arrive à nouveau dans les Actes, dans le récit que nous venons d'entendre. L'Eglise était alors composée des disciples et des juifs qui reconnaissaient Jésus comme le Messie. Pierre s'occupe de cette communauté. Ils ont l'air bien ensemble — entre eux. Ça marche… Mais Dieu a plus d'ambition, le message de Jésus n'est pas réservé à une terre, à un peuple. D'autres barrières doivent tomber et Dieu manifeste son Saint Esprit à Pierre pour qu'il s'ouvre aux autres peuples de la terre, les grecs, les romains, tous les non-juifs.

    La puissance de la résurrection, c'est que le message de Dieu n'est pas là pour garantir notre façon de penser, mais pour élargir nos pensées à la dimension de celles de Dieu. Et Dieu pense large, Dieu voit grand.

    Sous la poussée de l'Esprit Saint, sous la pression de Dieu, Pierre découvre que Dieu ne fait pas de différence entre les humains. Dieu n'est pas partial. Dieu n'est pas communautariste. Dieu est universel et entretient le même rapport d'amour avec tous les humains, sur toute la terre.

    La puissance de la résurrection ne se voit pas en se retournant pour savoir ce qui s'est passé entre samedi et dimanche, mais en regardant ce qui a été transformé dans les jours qui suivent :

    - des femmes sont chargées — en premier — de témoigner de la puissance de Dieu,

    - des disciples sont amenés à laisser tomber leurs œillères et à élargir leur vision de l'amour de Dieu,

    - des hommes et des femmes se mettent au service de Dieu pour annoncer et vivre cette égalité de tous en partageant des repas et des célébrations ensemble.

    Nous ne savons pas ce qui s'est passé dans la nuit de Pâques, mais nous voyons que cela a changé la face du monde. Nous voyons aussi que tout n'est pas accompli, il y a encore trop de barrières qui ne sont pas tombées. Il y a encore besoin de témoins de la puissance de Dieu dans le monde. Comme ces femmes, comme Pierre, comme tous ces croyants qui nous ont précédés, nous avons un trésor, des valeurs à partager.

    Nous avons surtout l'assurance que la puissance de Dieu nous précède sur ce chemin. Il a ouvert le tombeau, il ouvre le chemin, il ouvre les cœurs. Acceptons que Dieu fait tomber toutes les barrières au matin de Pâques et qu'un chemin de fraternité avec tous s'ouvre devant nous.

    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2010

  • Actes 1. Ascension. Jésus passe le relais, nous sommes ses témoins.

    Actes 1    21.5.2009
    Ascension. Jésus passe le relais, nous sommes ses témoins.
    Luc 24 : 41b-53    Ac 1 : 1-4

    Chères paroissiennes, chers paroissiens, chers JP,
    Nous avons entendu le récit de l'Ascension tel que nous le raconte l'Evangéliste Luc, à la fin de son Evangile et au début du livre des Actes. Luc a fait de l'Ascension l'élément charnière entre ses deux livres, le récit de la vie de Jésus et le récit de la vie de l'Eglise commençante.
    Luc est un écrivain doué qui sait mettre en scène les personnages et les événements pour faire ressortir le sens et les perspectives théologiques. Dans le récit de l'Ascension, Luc reprend une affirmation de foi des apôtres et témoins du Christ : "le Christ a été élevé au-dessus de tout (Ph 2:9), il a été glorifié (Jn 12:23) et il est maintenant assis à la droite de Dieu (Luc 22:69)" et il la met en récit visuel, devant les yeux des disciples.
    Il nous montre en quelque sorte Jésus rejoindre le monde de Dieu, représenté par le ciel et la nuée. Il nous rend visible, compréhensible, une vérité théologique. Mais plus important que de voir cela, c'est de comprendre le sens de cet événement. En plaçant l'Ascension à la charnière de l'Evangile et des Actes, Luc nous transmet plusieurs messages.
    Dans l'Evangile, l'épisode entourant l'Ascension est raconté comme une scène d'adieu. Jésus se sépare de ses disciples, il les enseigne une dernière fois, il leur ouvre l'intelligence pour qu'ils comprennent les Ecritures; il leur promet l'Esprit saint; il les bénit et s'en va. Jésus est actif et les disciples sont passifs, ils reçoivent l'enseignement, la promesse et la bénédiction. Et si l'on devait mettre en film la dernière image des disciples louant Dieu dans le Temple, on pourrait en faire une vue aérienne, comme si Jésus regardait ses disciples depuis le ciel.
    Dans le livre des Actes, Luc change la perspective (je vous avais dit que Luc était un écrivain doué). Luc commence par faire un petit résumé qui reprend — avec d'autres mots — les événements qui terminent l'Evangile, rappelant le temps (40 jours) entre la Résurrection et l'Ascension.
    Luc expose que le temps de Jésus était celui du baptême d'eau et que vient le temps du baptême de l'Esprit qui viendra "dans peu de jours" (à la Pentecôte) (Ac 1:5). Ensuite, les disciples questionnent Jésus sur l'établissement du Royaume d'Israël, qu'ils confondent encore avec le Royaume de Dieu dont parle Jésus. Alors Jésus les investit de leur mission : être témoin à Jérusalem, en Judée, en Samarie et jusqu'aux extrémités de la terre (Ac 1:8). Après cela, Jésus est élevé et caché aux yeux des disciples. En cinéma, ce serait une vue du sol vers le ciel.
    Dans cette scène on a vu des disciples actifs à questionner Jésus et investis d'une mission et un départ vu du point de vue de ceux qui restent.
    Voilà, Jésus est parti ! Qu'en penser et que faire ?
    Ce départ, cette ascension est bien différente du départ que les disciples ont déjà vécus lors de la mort de Jésus sur la croix. Ce départ n'est pas un abandon, une séparation douloureuse. Ce départ est préparé, les disciples ont reçu des instructions. Ce départ est préparé, les disciples ont reçu une mission. Ce départ est préparé, les disciples ont reçu une promesse.
    Les disciples vont recevoir l'Esprit saint, qui est la nouvelle forme de présence de Jésus, de Dieu en nous. Les disciples ont reçu une mission : ce sont eux, c'est nous qui sommes à présent les relais de la présence de Jésus. Nous sommes les témoins du message de Jésus. L'absence de Jésus "comme avant" est remplacée par une nouvelle forme de présence, par l'Esprit saint et par la communauté.
    « En s'effaçant du monde, le Ressuscité ouvre un espace dans lequel la communauté des croyants concrétisera la présence cachée du Christ »* Jésus passe le relais. Nous sommes ses témoins. Et ce message est destiné à la terre entière ! Comme un caillou qu'on jette dans l'eau fait des vagues concentriques qui s'étendent à toute la surface de l'eau, le message de Jésus est destiné à la terre entière et nous en sommes les messagers aujourd'hui.
    Les disciples ont apporté le message de Jésus dans tout l'empire romain, à travers le réseau de synagogues qui s'étendait dans tout l'empire. Le message a traversé les siècles, deux millénaires, jusqu'à nous. Une chaîne ininterrompue de témoins va des premiers disciples jusqu'à nous.
    Nous avons la responsabilité d'être à notre tour les témoins de Jésus auprès des humains de notre temps. Quelques jeunes de notre paroisse vivent ce culte avec nous avant de partir pour Taizé, y passer quatre jours.
    Vous les JP (jeunes paroissiens), vous avez reçu notre témoignage, vous avez reçu le Christ en vous et vous recevez aussi — comme cette communauté paroissiale toute entière — cette mission de témoigner du Christ et de sa vie.
    Les disciples se réunissaient pour prier dans une maison de Jérusalem, pour se ressourcer et prendre des forces pour se préparer à évangéliser la terre. Ils étaient onze disciples avec quelques autres personnes, des hommes et des femmes, comme vous êtes onze JP ce matin, avec quelques hommes et femmes de notre paroisse pour prier et louer Dieu.
    Nous allons aller nous ressourcer à Taizé pour que la Parole et l'Esprit de Jésus nous habitent et que nous puissions témoigner de cette vie en nous. Nous avons besoin de la prière et du soutien de toute la communauté de l'Eglise pour que l'Evangile — la bonne nouvelle — de Jésus continue d'être annoncée et vécue dans notre paroisse, dans notre pays et dans le monde.
    Le départ de Jésus à l'Ascension n'est pas un abandon, n'est pas un affaiblissement, il est le transfert de la responsabilité de la mission à tous les croyants. Assumons avec joie cette responsabilité, Jésus nous en promet la force par son Esprit.  
    Amen
    * Daniel Marguerat, Les Actes des Apôtres (1—12), Commentaires du Nouveau Testament, Labor et Fides, Genève, 2007, p. 51
    © Jean-Marie Thévoz, 2009

  • Actes 28. L'apôtre Paul (IV) La surprenante fin du livre des Actes

    Actes 28

    27.7.2003

    L'apôtre Paul (IV) La surprenante fin du livre des Actes

    Ac 26:19-32    Luc 21:12-19    Ac 28:30-31


    Chers amis,
    Nous arrivons au dernier épisode de la vie de Paul que j'avais entrepris de vous faire découvrir ou approfondir. C'est dans le livre des Actes des Apôtres, rédigé par Luc, l'évangéliste, que nous trouvons le plus d'éléments biographiques sur la vie de l'apôtre. On peut même dire que l'apôtre Paul devient le personnage principal, central des actes, dès le chapitre 13 jusqu'à la fin du livre au chapitre 28. Plus on avance dans ce livre, plus les récits et les discours sont détaillés. Luc est même le témoin direct de certains événements puisqu'il nous les raconte en "nous."
    Mais revenons à la vie de Paul. Nous retrouvons Paul à 52 ans, il est en train de revenir pour la troisième fois à Jérusalem. Il est porteur de la collecte des Eglises de Grèce et d'Asie mineure pour la communauté de Jérusalem et de Judée, un geste de solidarité entre les Eglises.
    Il semble que l'Eglise de Jérusalem vive en assez bonne harmonie avec les autorités juives. L'Eglise chrétienne est un mouvement sectaire assez marginal pour être tolérée jusque dans le Temple, puisque cette jeune Eglise continue d'obéir à la Loi de Moïse.
    Lorsque Paul, à Jérusalem, se rend au Temple, par contre, cela crée du grabuge. Il est perçu comme un adversaire, presque comme un païen. Cela provoque tant de désordre — Paul est accusé d'avoir fait entrer un grec dans l'enceinte réservée aux juifs — que la garnison romaine doit intervenir en force. Les romains arrachent Paul aux émeutiers qui étaient près de le lyncher.
    Le commandant de la garnison, Claude Lysias, pense régler le problème en faisant fouetter Paul. Cela devrait d'un côté calmer la vindicte populaire et de l'autre calmer le fauteur de trouble, pense-t-il. Mais Paul fait savoir au commandant qu'il est citoyen romain et donc qu'il a droit à un véritable procès !
    La machine judiciaire se met en marche... mais lentement. Paul sera transféré de Jérusalem à Césarée de Philippe — sous forte escorte, car le commandant est averti qu'un groupe veut profiter du transfert pour assassiner Paul.
    A Césarée, il y aura plusieurs confrontations entre Paul et ses accusateurs sous la direction de Félix le gouverneur de Palestine, puis de Porcius Festus son successeur. Pour éviter d'être renvoyé à Jérusalem pour son procès, Paul utilise ce que j'ai appelé son "joker" dimanche passé, à savoir une prérogative des citoyens romains dans les affaires qui peuvent conduire à la peine de mort : l'appel à l'empereur, c'est-à-dire le droit d'être jugé à Rome.
    Deux ans de procédures s'écoulent entre l'arrestation à Jérusalem et le départ pour Rome ! (Deux ans de captivité où Paul va écrire certaines de ses lettres). Le voyage de Césarée à Rome va prendre quelques 6 mois à cause des conditions météo : une tempête, un naufrage, puis un hivernage à Malte qui retardent l'avancée des prisonniers et de leurs gardiens. Finalement, Paul est à Rome, "assigné à résidence" dirait-on aujourd'hui, il doit rester à Rome sous la surveillance d'un gardien. Et le livre des Actes se termine sur ces mots :

    "Paul demeura deux années entières dans le logement qu'il avait loué. Il y recevait tous ceux qui venaient le voir. Il prêchait le Royaume de Dieu et enseignait ce qui concerne le Seigneur Jésus-Christ avec pleine assurance et librement." (Ac 28:30-31)
    Cette fin me surprend beaucoup ! Car ce n'est pas un fin. Comment se fait-il que Luc ne raconte pas la mort de Paul ? Voilà qui achèverait logiquement et presque triomphalement la biographie de Paul. L'apôtre mourant martyr de la foi sous le glaive romain ! Car il existe des écrits ultérieurs qui nous racontent — dans les Actes de Paul — la rencontre entre l'empereur Néron et Paul et son exécution, la tête tranchée.
    Ce n'est pas un question de chronologie, car Luc finira de rédiger le livre des Actes et son évangile dix ou quinze ans au moins après la mort de Paul. Luc ne pouvait pas ne rien savoir de la mort de Paul après avoir fait avec lui le voyage de Césarée à Rome !
    Je vais émettre une hypothèse personnelle : Luc n'est pas intéressé par la mort de Paul, même s'il en a fait le héros de son livre : les Actes des Apôtres. Voici quelques arguments qui plaident en faveur de cette hypothèse :
    1) Luc s'est donné pour but de présenter une histoire du développement de l'Eglise, une histoire de l'évangélisation du monde. L'arrivée de Paul à Rome manifeste que l'Evangile est arrivé jusqu'au centre du monde (de l'époque), la tâche est accomplie. La mort de Paul n'ajouterait rien.
    2) Luc souhaite présenter une histoire du salut ouverte sur l'avenir, et une histoire qui dépasse les histoires individuelles des témoins. Même si Paul "monopolise" 60% du texte des Actes, ce qui prime n'est pas son histoire personnelle, mais la progression de la bonne nouvelle. Finir sur la mort de Paul serait finir sur un obstacle, un coup de frein.
    Je risque encore une idée plus audacieuse : les histoires qui circulent sur la mort de Paul sont fausses aux yeux de Luc. Il suffit de lire le martyr de Paul dans les Actes de Paul pour y voir tout le merveilleux surajouté, notamment son entretien avec Néron.
    En fait ce qui importe à Luc dans tout le récit des Actes, c'est de montrer que Paul témoigne en toutes circonstances, devant les petits comme devant les grands (Ac 26:22) réalisant et mettant en pratique les paroles de Jésus que Luc rapporte dans son évangile:

    "... on vous arrêtera, on vous persécutera, on vous livrera pour être jugés dans les synagogues et l'on vous mettra en prison; on vous fera comparaître devant des rois et des dirigeants à cause de moi. Ce sera pour vous l'occasion d'apporter votre témoignage à mon sujet." (Lc 21:12-13)
    Dans les Actes, Luc met en scène Paul témoignant ou comparaissant devant quatre groupes ayant autorité et devant sept hauts personnages. S'il avait été vrai que Paul avait comparu devant Néron, Luc n'aurait pas manqué de l'ajouter à sa liste !
    Ce qui importe à Luc dans sa présentation de Paul, c'est de montrer à quel point il est un témoin et que tous les événements qui surgissent dans sa vie sont des occasions de témoignage. Dans la vie de Paul — et par extension pour Luc, dans la vie de toute personne qui répond à l'appel de Jésus-Christ — toutes les circonstances de la vie sont transformées par la foi. Suivre Jésus, vivre "en Christ" comme le dit l'apôtre Paul, conduit à une transformation de la vie courante, de la vie banale, en une aventure, une aventure relationnelle qui débouche sur la vie et non sur la mort.
    Bien sûr, Paul est mort, comme tous les hommes de son temps, mais Luc affirme aussi, entre les lignes, que Paul est vivant : (i) ressuscité auprès du Christ, "le premier-né d'entre les morts" selon une formule paulinienne, mais (ii) il est aussi vivant au travers de sa prédication qui continue à travers ses lettres (celles qui pour nous sont rassemblées dans le Nouveau Testament).
    C'est pourquoi Luc a raison de terminer son livre des Actes par ces mots — qui prennent une dimension intemporelle :

    "Paul demeura deux années entières dans le logement qu'il avait loué. Il y recevait tous ceux qui venaient le voir. Il prêchait le Royaume de Dieu et enseignait ce qui concerne le Seigneur Jésus-Christ avec pleine assurance et librement." (Ac 28:30-31)
    Luc nous passe le message : Rien ne peut vraiment faire obstacle à la diffusion de la bonne nouvelle !
    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2007

  • Actes 15. L'apôtre Paul (II) Le Concile de Jérusalem

    Actes 15

    6.7.2003

    L'apôtre Paul (II) Le Concile de Jérusalem

    Ac 15 : 1-12    Ac 15 : 22-31

    Chères paroissiennes, chers paroissiens, chers Amis,
    Dimanche dernier, j'ai commencé à vous parler de la vie de l'apôtre Paul. Né à Tarse, il a reçu une formation de pharisien à Jérusalem. Son zèle pour la Loi l'a conduit à persécuter la jeune Eglise chrétienne. Son amour de la loi l'a conduit à la haine des hommes et à la violence.
    Sur le chemin de Damas, il a une mystérieuse et foudroyante révélation, une voix du ciel lui demande : "Pourquoi me persécutes-tu ?" Cette question le projette dans un abîme de réflexion :
    comment se fait-il qu'il persécute celui à qui il avait décider de vouer sa vie ?
    Paul va se retirer pendant trois ans pour faire le point sur sa vie, pour recadrer sa relation avec Dieu. Trois ans pour intégrer dans sa pensée de pharisien l'irruption de cette nouvelle — a priori incroyable pour lui — le Messie est venu, c'était ce Jésus de Nazareth.
    Au bout de ces trois ans, Paul fait un premier voyage à Jérusalem pour rencontrer Pierre, le chef de l'Eglise et Jacques le frère de Jésus. Paul est accepté et sa mission définie, il ira à Antioche et en Asie Mineure pour annoncer l'Evangile.
    Pour évangéliser, Paul a sa méthode. Il commence par se rendre à la synagogue, le jour du sabbat, et profite du temps de parole qu'on donne aux visiteurs pour annoncer Jésus-Christ comme le Messie, un Messie mort sur la croix à Jérusalem et ressuscité par Dieu le troisième jour.
    D'après le livre des Actes, le résultat est presque toujours le même, la communauté est divisée, certains suivent Paul, d'autres s'opposent à lui, en général plus nombreux, car Paul est chassé de la synagogue. Il part alors avec ceux qu'il a réussi à convaincre et — à partir de leurs maisons — il annonce la bonne nouvelle aux non-juifs, aux grecs, aux romains, aux populations locales. Ainsi naissent de nouvelles communautés.
    Comme on le voit, ces communautés naissent sur un fond de crise et de conflits. Elles sont de composition hétéroclite et le mélange est parfois explosif. Les juifs devenus chrétiens voudraient que les non-juifs soient soumis à la Loi et notamment à la circoncision. Les non-juifs résistent et ne voient pas pourquoi en plus d'être chrétiens, ils devraient devenir juifs.
    Paul a une ligne claire là au milieu. Il a une expérience personnelle qui lui a montré que la Loi juive, son application stricte, ne conduit pas à aimer Dieu correctement. La Loi est utile pour la vie de tous les jours, mais la Loi est incapable de conduire à Dieu. En aucun cas on ne peut plaire à Dieu, se montrer à la hauteur de ses exigences au travers de l'obéissance à la Loi de Moïse. Le salut ne vient que de la grâce de Dieu, de la bonté de Dieu, non par nos mérites ou notre obéissance.
    Donc, Paul renonce à demander — plus même il combat  ceux qui veulent exiger des "païens" — la circoncision, symbole de la soumission à la Loi de Moïse.
    Mais il vient un temps où cette question ne peut plus être résolue au cas par cas, avec des différences d'applications d'une Eglise locale à l'autre. Un dispute à ce sujet se développe à Antioche et il est décidé de convoquer une réunion sur cette question à Jérusalem. C'est le deuxième voyage de Paul à Jérusalem pour ce qui sera plus tard appelé le 1er Concile de Jérusalem.
    Le récit de ce "Concile" dans Actes 15 est très important. Il nous montre que — environ 10 ans après la mort et la résurrection de Jésus — l'Eglise est toujours en formation. Il y existe différents mouvements, différentes tendances, comme des partis.

    On nous montre Jacques, le frère de Jésus qui reste très attaché aux traditions juives, il tient à la conversion au judaïsme pour devenir chrétien. On nous présente Pierre. Lui a d'abord eu une position semblable à celle de Jacques. Mais le livre des Actes nous montre qu'à travers une vision (Ac 10) il a été amené à annoncer l'Evangile et à convertir des non-juifs. Il est donc plus ouvert, car il a vu des païens recevoir le baptême d'eau et d'Esprit. Enfin, il y a Paul qui milite pour une entrée sans condition dans la communauté chrétienne.
    Ce Concile de Jérusalem va déboucher sur un compromis intéressant : les nouveaux venus devront respecter trois règles (ce qui est moins que les 613 commandements que les Pharisiens trouvent dans la loi mosaïque). 
    1) Renoncer à l'idolâtrie (renoncer aux sacrifices dans les temples grecs ou romains).
    2) Ne pas consommer de sang ou de viande contenant le sang de l'animal (pour les juifs, le sang contenait le principe de vie).
    3) Se garder de l'immoralité sexuelle.
    L'important n'est peut-être pas dans le contenu de ces trois règles, mais dans ce qui a été omis dans ces prescriptions !
    Implicitement, arriver à ces trois règles signifie que le chrétien est libéré de la Loi, que la Loi est remplacée par une autre obéissance, qui n'a pas besoin de définir précisément — dans un code, une liste — les attitudes ou les actes autorisés ou interdits. L'obéissance à la Loi est remplacée par une exigence unique !

    La Loi est remplacée par le commandement nouveau donné par Jésus : "Aimez-vous les uns les autres." (Jean 13:34)
    Paul dira : "Tout est permis, mais tout n'est pas utile, ou tout n'est pas constructif." (1 Co 10:23-24)
    Jean dira : "Dieu est amour." (1 Jn 4:16)
    Saint Augustin dira : "Aime et fais ce que tu veux."
    A ce Concile de Jérusalem est confirmé que le christianisme est une religion qui libère des fardeaux extérieurs, des devoirs qui pèsent, qui asservissent et qui peuvent n'être que des façades ! Le christianisme est une foi qui libère des gestes extérieurs, mais qui peut être plus exigeante par là-même, puisqu'elle réclame un engagement intérieur, une intériorisation du commandement d'amour. Et aucun aspect de la vie n'échappe à cette exigence !
    Il n'y a plus de règles extérieures, il n'y a plus de prescriptions pratiques ! Pour vérifier, posez-vous la question : "qu'est-ce que mon christianisme m'oblige à faire qui me distingue des autres ?" Je ne trouve rien, mais en même temps, aimer son prochain est une tâche permanente.
    De cette conférence à Jérusalem date probablement le schisme entre juifs et chrétiens et cette division restera toujours une préoccupation, une souffrance de l'apôtre Paul : "Quelles relations doivent avoir juifs et chrétiens dans le plan de Dieu ?" se demande l'apôtre Paul. Et c'est ce que nous examinerons dans 15 jours, lors de ma prochaine prédication.
    (à suivre...)

    © Jean-Marie Thévoz 2007

  • Actes 19. Du baptême de Jean à celui de Jésus

    Actes 19

    10.6.2007
    Du baptême de Jean à celui de Jésus
    Ac 19 : 1-10    Ga 3 : 26-29


    Chères paroissiennes, chers paroissiens,
    Après le récit de la Pentecôte qui ouvre le livre des Actes et l'épisode de Paul et Silas libérés de prison dans la ville de Philippes, voici un nouvel épisode des pérégrinations de l'apôtre Paul.
    Le livre des Actes des Apôtres nous présente les débuts de l'Eglise. Dans une première partie, Actes est centré sur l'apôtre Pierre et l'annonce de Jésus-Christ sur les terres d'Israël d'abord, puis en Syrie. Dans la 2e partie, Paul devient le personnage principal que l'on suit dans ses voyages en Asie mineure (la Turquie actuelle) en Grèce, puis jusqu'à Rome.
    Ce livre nous montre donc le travail au jour le jour des apôtres, les difficultés rencontrées, les succès et les avancées de leur prédication. Paul procède toujours de la même manière : il se rend à la synagogue locale pour y prendre la parole (il est de coutume de permettre aux visiteurs de lire l'Ecriture puis de la commenter). Alors, Paul explique que le Messie annoncé par les Ecritures est arrivé en Israël, il y a à peine 10 ou 15 ans et qu'il s'agit de Jésus de Nazareth, crucifié à Jérusalem.
    Certains, dans la synagogue, reconnaissent Jésus comme le Messie, le Christ ("Christ" est la traduction grecque de l'hébreu "Messie"), d'autres pas. Cela crée des tensions et finalement ceux qui croient en Jésus sont expulsés de la synagogue. A ce moment-là, Paul crée une nouvelle communauté, une Eglise, avec ceux qui croient en Jésus. Mais l'espoir de Paul, c'est que tous les juifs reconnaissent Jésus.
    Dans le récit que vous avez entendu, on retrouve bien ce schéma. Paul reste trois mois à la synagogue, mais doit finalement partir. Dès ce moment, il enseigne dans les locaux d'une école, chez Tyrannus, pendant deux ans, le temps que cette communauté gagne son autonomie.
    Ce qui est particulier à Ephèse, c'est qu'à son arrivée, Paul rencontre des gens qui ont déjà reçu une annonce du Messie. Paul n'est donc pas le seul à parcourir ces pays pour y annoncer la venue du Messie.
    Ce qui est étrange ici, c'est que Paul rencontre des disciples de Jean-Baptiste : ils ont reçu le baptême de Jean, mais pas celui de Jésus. Jean-Baptiste appelait les gens à changer de comportement, à renoncer à vivre loin de Dieu pour se tourner vers Dieu et marquer ce tournant, cette conversion, par un baptême.
    Jésus, lui, demandait à ses disciples de baptiser les nouveaux croyants pour qu'ils puissent recevoir la présence de Dieu et manifester leur foi. Cette présence de Dieu donnée au croyant, c'est l'Esprit saint. C'est ce que reçoivent ces personnes qui ne connaissaient que le baptême de Jean auparavant, lorsque Paul leur impose les mains en les baptisant.
    Nous sommes à une année de l'Eurofoot en Suisse : Avez-vous l'esprit foot ? Faites-vous partie des supporters qui allez dans les stades pour soutenir la Nati en chantant, en criant, en hurlant des slogans ? De mon côté, je suis plutôt footballeur non-pratiquant, je n'ai pas reçu l'esprit foot ! Mais j'aurais plutôt l'esprit Alinghi. Il y a 4 ans, je me levais à 3h du matin pour suivre les courses diffusées depuis la Nouvelle-Zélande.
    Bon, pourquoi est-ce que je vous parle de ça maintenant déjà ? Ah oui, c'est pour démystifier un peu le résultat de ce baptême de Paul au nom de Jésus, dont le récit nous dit qu'il déclenchât chez ces disciples un parler en langues et des déclarations, des messages venus de Dieu. Ce que ces textes expriment par le parler en langues, c'est simplement l'enthousiasme et la joie débordante de ces personnes après leur baptême.
    Pourquoi sont-elles si contentes ? Parce qu'elles ont découvert la différence entre le baptême de Jean et celui de Jésus. Le baptême de Jean marquait la volonté de s'efforcer de suivre tous les commandements divins. C'était un engagement difficile qui demandait beaucoup d'énergie pour être à la hauteur et se maintenir dans la ligne. 
    Le baptême au nom de Jésus, c'est la prise de conscience que quelque chose s'est déjà passé et que l'on peut simplement recevoir comme un cadeau. Que s'est-il passé ? Dieu, à travers Jésus, est venu dire à tous les êtres humains : "vous êtes aimés", "vous êtes acceptés tels que vous êtes, inconditionnellement." C'est fait, Jésus l'a déjà accompli dans sa vie et dans sa Passion. C'est un cadeau que Dieu nous fait, nous n'avons plus à partir à la conquête du Graal, à chercher à être aimés pour ce que nous faisons. C'est déjà donné, chacun peut le recevoir. 
    La foi, c'est croire, accepter que Dieu l'a fait, qu'il a déjà ouvert la porte du chemin qui mène à lui. Pas d'efforts à faire pour trouver la clé de cette porte. Cette porte est ouverte à tous, malgré les barrières, les exigences que décrit la société. Dans la société d'alors, il existait des barrières infranchissables entre grecs et juifs, entre hommes et femmes, entre personnes libres et esclaves.
    Paul nous dit : toutes ces barrières n'existent pas devant Dieu et ne doivent pas exister dans l'Eglise. Tous nous sommes acceptés par Dieu. Quelle libération lorsqu'on réalise cela ! Toute l'énergie, tous les efforts qu'on pouvait mettre pour affirmer sa valeur, envers soi-même ou face aux autres, on peut laisser tomber. Il n'y a rien à prouver à personne.
    Est-on — aujourd'hui — persuadé que ce cadeau est pour nous ? Dieu attend seulement de nous une attitude réceptive (comme un enfant qui tend ses mains). Il nous faut juste accepter de faire de la place, se désencombrer, accepter de faire silence pour entendre cet amour, accepter d'être prêt à recevoir ce cadeau. Après, laissons Dieu agir et nous donner son Esprit, sa Présence.
    Amen
    © Jean-Marie Thévoz, 2007

  • Actes 3. Le royaume de Dieu est vraiment présent aujourd'hui

    Actes 3

    14,15.06.1997
    Le royaume de Dieu est vraiment présent aujourd'hui
    Es 35:1-7    Ac 3:1-10    Lc 7:16-23


    Chères paroissiennes, chers paroissiens,

    Ce que j'ai à vous dire ce matin s'inscrit à la suite de Pentecôte, dans le temps de l'Église. La question qui se posait à Luc était : comment vivre avec le Christ, mais après le départ de Jésus. Cela s'inscrit aussi dans le concret d'un dimanche consacré aux réfugiés, à ces prochains en exil chez nous.
    J'ai choisi le récit d'un miracle, celui de l'infirme de la Belle-Porte. Je sais que le miracle fait problème à l'ère scientifique. Aussi je vais d'abord essayer d'en extraire le sens, comme s'il s'agissait d'une métaphore, d'une image. Ensuite, nous verrons pourquoi il était spécialement utile, voire nécessaire de raconter cela sous la forme d'un miracle. Finalement, on verra qu'il y a bien un miracle réel pour Luc et pour nous aujourd'hui.
    1. Luc choisit de raconter un miracle juste après la Pentecôte. Luc est l'évangéliste qui a construit un calendrier précis de Pâques à Pentecôte. Après Pâques, Jésus est resté 40 jours avec ses disciples, à l'Ascension, il a quitté ses disciples et à Pentecôte, l'Esprit est descendu sur les apôtres. La Pentecôte était pour les juifs la fête du don de la Loi au Sinaï, Luc en fait une fête chrétienne du don de l'Esprit. Dans le chapitre 3 du livre des Actes, Luc veut montrer comment se passe la transition : que se passe-t-il lorsque Jésus n'est plus là ?
    Luc choisit l'action, le lieu, les personnages et les mots de son récit. Tout y est significatif, comme dans la vie. Je retiens un premier thème, celui du boiteux. Les boiteux sont très présents dans la Bible. Après sa lutte avec l'ange, Jacob lui-même se relève boiteux et reçoit son nouveau nom : Israël. L'ancêtre d'Israël, du peuple élu est un boiteux. Dans le texte d'Esaïe que nous avons entendu, l'arrivée du Messie est accompagnée de signes :
    "Alors, le boiteux bondira comme un cerf". Lorsque Jean-Baptiste veut savoir qui est Jésus, ce dernier donne comme message "les aveugles voient, les boiteux marchent droit..." Jésus rappelle la prophétie d'Esaïe. Chez Luc toujours, dans l'évangile, dans la parabole des invités qui refusent, des boiteux et des mendiants remplacent les invités prévus et qui se sont excusés.
    Un théologien (Loisy) a dit : "Jésus annonçait le Royaume de Dieu et c'est l'Église qui est venue !", et c'était pour lui une déception. Luc nous dit tout autre chose : Le Messie est toujours présent dans les actes des chrétiens ! Et Luc va insister dans les Actes. Après Pierre, c'est Philippe, puis Paul qui feront marcher et bondir les boiteux. C'est le signe : Jésus est parmi nous, il continue d'agir et de guérir. Faire marcher, avancer ceux qui sont bloqués, arrêtés dans leur existence, c'est vraiment l'affaire de l'Église.
    2. Il ne s'agit pas de n'importe quelle guérison ! L'homme est relevé, remis en marche. Touchées par Jésus, nos vies trouvent un nouvel élan, au-delà de nos paralysies, de nos peurs, de nos blocages.
    Le deuxième thème que j'aimerais souligner, c'est le bondissement du boiteux. Non seulement Luc dit qu'il marche, mais il dit que le boiteux bondit. Chez Luc, bondir ou tressaillir, c'est la réaction provoquée par le contact avec le Messie, le Christ. Jean-Baptiste a tressailli, bondi, dans le sein d'Élisabeth lorsqu'elle a rencontré Marie enceinte. Dans le récit de la Samaritaine, l'évangéliste Jean, parle de l'eau bondissante.
    La phrase qui nous dit que le boiteux bondit est construite d'une façon particulière, sur un axe de symétrie. Le boiteux bondit, marche, entre dans le temps, marche, bondit et loue Dieu. L'élément central de cette phrase est l'entrée dans le temple, entourée comme les colonnes d'un portique par Bondir et Marcher. Au centre, il y a l'entrée dans le Temple qui conduit à la louange.
    C'est ici que se loge le miracle : pouvoir entrer dans le Temple et louer Dieu. Jésus est la Porte du Temple, de l'Église (de la bergerie chez Jean).
    Au contact de Jésus, l'homme souffrant est relevé, l'homme souffrant a accès à Dieu, il entre en contact avec la vie, la vraie vie. L'Église est le rassemblement de tous ceux qui sont tombés et que Dieu relève. Il est à noter que Pierre, qui réalise ce miracle, est le premier des disciples, qu'il est tombé en trahissant trois fois son maître avant le chant du coq et que Jésus l'a relevé.
    3. Bonne nouvelle pour nous : un vrai miracle s'est passé et se passe encore aujourd'hui. Le boiteux a été relevé. Voyons comment cela s'est passé.
    Cet homme attendait à la porte, il désirait des aumônes, il mendiait. Son besoin immédiat, c'est de quoi se nourrir ce jour-là. On en voit aussi chez nous à présent. On est abordé dans la rue : "Vous n'auriez pas 2.-". Il est bon et généreux de contribuer à couvrir ces besoins (et l'offrande de ce jour en faveur des réfugiés va y contribuer).
    Mais une fois l'homme nourri, vêtu, abrité, il y a encore un besoin fondamental à couvrir : être reconnu, être aimé, se sentir digne, recevoir de quoi avoir de l'estime de soi.
    Pierre et Jean n'ont ni or, ni argent, mais ils n'ont pas fermé leur coeur, lorsque le boiteux leur demandait d'ouvrir leur porte-monnaie. Pierre et Jean n'ont ni or, ni argent, mais ils ont autre chose, l'amour qu'ils ont reçu.
    Ils remplaceront donc l'avoir par l'être, l'économie de marché par l'économie du Royaume, la pénurie par l'abondance d'une source inépuisable. Ce qui fait vivre, c'est l'amour échangé, la dignité lue dans le regard, la main tendue, le soutien reçu.
    Certes, il faut de l'argent pour couvrir les besoins, mais cela ne suffit pas, ce n'est pas l'essentiel. S'il manque la dignité, la reconnaissance de l'autre comme égal, l'argent peut devenir une insulte, une façon de se débarrasser d'autrui.
    Samedi dans le journal (Gazette de Lausanne 14.6.97) dans un article sur les requérants d'asiles qui doivent repartir intitulé "L'usure des exilés en sursis", des requérants laissaient paraître leur déception : "Nous sommes venus chercher un peu d'humanité en Suisse. Nous ne l'avons pas vraiment trouvée". Triste constat.
    L'Église a tout reçu du Christ qui s'est fait don pour l'humanité. L'Église à cette tâche de rendre la dignité à ceux qui croient l'avoir perdue, à ceux que l'économie humilie, que la politique refoule, que la société marginalise.
    "Ce que j'ai, je te le donne" dit Pierre. On ne peut donner que ce qu'on a reçu, d'où l'importance de veiller à recevoir, plus précisément à être relié à une source qui nous alimente.
    Dieu est amour. Dieu est source d'eau vive. Dieu nous donne le pain et le vin, et comme nous aimons le chanter le soir en famille avec nos enfants : "L'Éternel est mon berger, Rien ne saurait me manquer."
    Voilà un vrai miracle. Cette surabondance ne peut être exprimée que par le récit d'un miracle. C'est la seul façon de raconter la chose la plus extraordinaire qu'on puisse imaginer.
    Nous avons reçu, nous recevons, nous recevrons continuellement assez pour donner autour de nous parce que nous sommes reliés à l'amour infini de Dieu en Jésus-Christ.
    Amen.


    ©2007 Jean-Marie Thévoz

  • Actes 2. Le culte

    Actes 2

    5.6.2005
    Le culte.
    Ac 2 : 36-42    1 Co 14 : 26-33

    Chères paroissiennes, chers paroissiens,
    Il y a une semaine le Conseil paroissial a vécu une journée de retraite à St-Loup. Nous avons d'abord découvert avec une sœur l'histoire de cette communauté et sa réorientation actuelle; les sœurs ne sont plus responsables de l'hôpital, mais s'occupent d'accueil, d'accompagnement spirituel et de formation théologique.
    Ensuite, nous avons mené une réflexion sur le culte. Je vais librement tirer quelques enseignements de cette réflexion. Je ne suis pas mandaté par le Conseil paroissial pour faire un comte rendu de cette journée, mais il me semble intéressant de parler aussi du culte en paroisse — même pendant un culte. En effet, j'ai remarqué que ce qui paraît évident aux pasteurs — à propos du culte — ne l'est pas forcément pour les paroissiens.
    Je vais donc présenter quelques réflexions sur le culte en 4 points. 1) un rappel sur la raison pour laquelle nous nous réunissons; 2) quelques mots sur le déroulement du culte; 3) sur les officiants et leurs rôles; 4) sur quelques aspects pratiques.
    1) Vous avez entendu deux lectures qui montrent que les premiers chrétiens se réunissaient. Dans les Actes, on trouve une reconstitution — un peu idyllique, peut-être programmatique — de la vie de la première Eglise. Dans la lettre de Paul aux Corinthiens, c'est une tentative de remise à l'ordre d'une communauté où les cultes "partent dans tous les sens." Ce qu'il en ressort en premier lieu, c'est que les chrétiens se rassemblent pour vivre ensemble leur joie d'être aimés de Dieu et pour grandir dans la foi.
    Luc nous dit : ils écoutent l'enseignement des apôtres; ils vivent la communion fraternelle; ils prennent part à des repas de Cène; ils prient ensemble. En résumé, ils nourrissent leur intellect par l'enseignement; leur cœur par les relations mutuelles; leur corps par des repas partagés et leur vie spirituelle par la prière.
    Le culte est un lieu de ressourcement et de restauration, où l'on est restauré dans la relation à Dieu, aux autres, à nous-mêmes et où l'on peut nourrir tous les plans de notre personne. Beau programme non ? Nous nous réunissons donc pour cela, parce que Dieu veut que nous ayons la vie et la vie en abondance.
    2) Quelques mots sur le déroulement du culte. Il n'est pas toujours apparent — lorsqu'on est dans l'assemblée — que le culte est fait de quatre moments principaux, puisque ces moments sont eux-mêmes souvent fragmentés en plusieurs parties.
    Ainsi la première partie est un temps d'accueil, d'entrée dans la communion avec Dieu. Il comprend : Salutations, Invocation, Confession des péchés et paroles de grâce, enfin la Louange.
    Vient ensuite la deuxième partie qui est la partie enseignement, avec la Prière d'illumination, les Lectures bibliques, la Prédication, en général suivie d'un silence pour prolonger la méditation. On appelle aussi ce temps, le temps de la Parole, en référence à la Parole de Dieu prêchée, écoutée, méditée.
    La troisième partie est la réponse de la communauté avec la Confession de foi ou la Cène, la Prière d'intercession et le Notre Père et — dans certaines paroisses — la récolte de l'Offrande dans les bancs.
    La quatrième partie est l'envoi dans le monde avec les Annonces et la Bénédiction finale. Bien sûr, le contenu et les textes de chacune de ces parties peut varier selon les circonstances, selon la place qu'on donne à la Cène ou la présence de baptêmes. Mais ces quatre parties : Accueil, Parole, Réponse de la communauté et Envoi sont présents dans tous les cultes.
    3) Venons-en aux officiants. Dans notre Eglise, le ministre (pasteur ou diacre) tient un grande place dans le culte. Mais le culte est aussi l'affaire des paroissiens. Si le pasteur est tellement présent, ce n'est pas pour des raisons théologiques, plutôt parce que nous avons le privilège — mais jusqu'à quand ? — d'avoir assez de ministres pour présider tous les cultes. En fait, aucune partie du culte n'est réservée au pasteur. toutes les parties du culte pourraient être assumées par des laïcs.
    Le pasteur est simplement la personne, déléguée par la paroisse et l'Eglise, pour présider au bon ordre de l'ensemble. Ce sont des considérations d'organisation qui donnent au pasteur cette place, ce ne sont pas des considérations théologiques. Le pasteur n'a pas de supériorité par rapport aux laïcs, il a simplement plus de temps alloué pour ces tâches. Il est donc possible de diversifier les rôles des paroissiens dans le culte.
    4) Enfin quelques mots sur des aspects tout pratiques. Il est apparu en même temps, que certains trouvent qu'il y a trop de cantiques dans un culte et que pour d'autres le chant est essentiel pour leur foi. Certains ont des difficultés à vivre les temps de silence alors que d'autres les trouvent trop courts. Certains apprécient de n'avoir qu'à écouter les officiants alors que d'autres souhaiteraient pouvoir participer plus activement ou plus librement à la réponse de la communauté. Certains trouvent qu'on ne cesse de se lever et de s'asseoir pour chanter et pour prier. A ce propos, n'oublions pas la liberté de chacun de rester assis, même si l'assemblée se lève.
    Il y a donc une grande diversité d'attentes et de désirs à ce niveau pratique. Et comme on peut s'y attendre, le "juste milieu" risque aussi de ne satisfaire personne ! Le Conseil paroissial va continuer de réfléchir à ces questions et proposera sûrement quelques orientations à mettre en place. Je ne peux donc rien vous annoncer à ce sujet aujourd'hui.
    Pour ma part, je peux vous dire que le Conseil paroissial ou l'Assemblée paroissiale a le souci de ne pas dénaturer le culte paroissial. Nous veillerons à introduire des changements — s'il y en a — en douceur et probablement au travers d'une différenciation des cultes, comme c'est déjà le cas avec les cultes du soir.
    N'oublions pas que nous travaillons aussi en Région et qu'il est aussi possible de jouer sur des différences de tonalité entre les paroisses de la Région, comme nous l'avons fait dimanche passé en invitant les autres paroisses à participer à l'Office de Taizé organisé par les JP à Bussigny.
    Pour terminer, relevons les propos de l'apôtre Paul à la communauté de Corinthe, lorsqu'il s'agit de faire des choix pour le culte, ce qui doit nous guider ce sont ces deux principes :

    "tout cela doit aider l'Eglise à progresser dans la foi" (1 Co 14:26) et
    "Dieu ne nous a pas appelé à vivre dans le désordre, mais dans la paix." (1 Co 14:33).
    Remarquons que Paul n'oppose pas l'ordre au désordre, mais la paix au désordre. C'est la paix de la communauté qui doit nous aider à vivre le culte, à nous aimer les uns les autres et à progresser ensemble dans la foi.  
    Amen

    © 2007, Jean-Marie Thévoz

  • Actes 16. Liberté intérieure

    Actes 16

    13.5.2007

    Liberté intérieure

    Luc 9 : 22-25    Ac 16 : 16-24    Ac 16 : 25-34

    Chères paroissiennes, chers paroissiens,

    Voilà un bien étrange épisode de la vie de l'apôtre Paul, que cet emprisonnement et cette libération à la prison de Philippes. Comment lire ce texte, le comprendre, en comprendre la signification spirituelle ?On peut le lire littéralement, comme un reportage journalistique qui rapporte des faits avérés. Alors, on se dit : quelle coïncidence, ce tremblement de terre, c'est vrai que les séismes sont fréquents dans cette région. Mais est-ce que c'est Dieu qui les déclenche, avec toutes les conséquences dramatiques qui en découlent ? Je ne peux pas croire en un tel Dieu !Ou alors, Dieu fait un miracle en n'ébranlant que le bâtiment de la prison. Mais, je ne vois pas cela se reproduire dans notre temps, notre époque, alors ce Dieu s'est-il éloigné de nous ? La coïncidence ou le miracle rendent Dieu plus éloigné, plus distant, moins crédible. Alors, comment comprendre ce récit ?
    Je pense qu'on peut le lire comme une parabole, comme une métaphore, comme la projection dans la réalité physique d'une réalité spirituelle. Comme la projection dans le texte au travers de mots représentant des choses d'un état d'esprit intérieur aux personnes.
    Dans la situation qui nous est exposée — la vue de l'extérieur — d'un côté : Paul et Silas ont été jetés en prison, immobilisés par des entraves en bois. De l'autre côté : le gardien a bien refermé les portes, il est monté à l'étage et vit ainsi, libre, dans son appartement.
    Paul et Silas sont prisonniers et le gardien est un citoyen libre.  Mais le récit introduit le doute dans cette disposition logique : Paul et Silas prient et chantent des hymnes. Les autres prisonniers les écoutent. Le comportement des deux apôtres est étrange, les autres prisonniers ne s'y trompent pas ! La prison n'est pas un lieu où l'on est reconnaissant d'être. La louange y est déplacée. Or Paul et Silas chantent et louent Dieu, ils expriment leur confiance, leur joie ! Pour eux cette prison, ils peuvent la voir comme une église. Ils peuvent prendre la vie — toute la vie, y compris cet épisode — comme un sujet de louange, comme un sujet de reconnaissance.
    Ils témoignent ainsi d'une confiance inébranlable, la confiance de celui qui sait que sa vie, sa valeur, est conservée ailleurs, hors d'atteinte de ceux qui leur veulent du mal, hors d'atteinte des événements circonstanciels de la vie. Dans cette prison, ils ne se sentent pas emprisonnés, ils ne se sentent pas menacés, ils ne se sentent pas abattus.
    Dans cette prison, Paul et Silas gardent toute leur liberté intérieure. Même si leurs corps ne le peuvent pas, leur esprit peut entrer et sortir librement de cette prison. Cette liberté, le récit l'exprime par l'ouverture de toutes les portes (expliquée par ce tremblement de terre). Aucune porte physique ne peut entraver la liberté intérieure des apôtres.
    Ce tremblement de terre métaphorique nous ouvre au renversement de situation que ce récit veut exprimer. Paul et Silas sont libres bien qu'ils paraissent enfermés. Le gardien semble être libre dans son appartement, alors qu'il est habité par l'angoisse constante que ses prisonniers ne s'évadent.
    (A l'époque, le gardien répond sur sa vie de la sécurité de sa prison. Si ses prisonniers s'enfuient, c'est lui qui en paie le prix et le prix peut être sa vie !)
    Le gardien est prisonnier de ce système et de sa hiérarchie. On peut imaginer son angoisse — qui va jusqu'à le pousser au suicide — s'il sent que ses prisonniers lui échappent. Or Paul et Silas chantent… Le gardien, qui doit maîtriser la situation, voit que Paul et Silas lui échappent — même s'ils ne sortent pas. Ils sont libres, même s'il ne partent pas. En résumé : vu du dehors, Paul et Silas sont emprisonnés et le gardien est celui qui a le pouvoir et la liberté. Vu du dedans, c'est le contraire. Paul et Silas sont libres et le gardien est esclave de sa hiérarchie et il dépend de ses prisonniers.
    Le gardien vit dans l'angoisse et c'est Paul qui le rassure, comme si le gardien avait fait un cauchemar en rêvant que tous ses prisonniers s'étaient évadés. Paul lui dit : "Tout est normal, on est tous là." Et le gardien se rend compte de son angoisse et que sa vie est un enfer dont il veut être sorti. C'est pourquoi il demande à Paul : "Comment puis-je être sauvé ?" (Ac 16:30). Comment être sauvé de cette impasse où j'assure ma propre sécurité par mon travail, mais qu'en conséquence je me trouve assujetti aux circonstances et aux autres ?
    Comment devenir libre, autonome intérieurement ? Comment pouvoir prier et chanter quand tout tourne mal autour de soi, à l'extérieur ? Paul répond très simplement : "Crois au Seigneur Jésus et tu seras sauvé" (Ac 16:31).
    Etre sauvé, c'est être sorti du ballottement des circonstances en s'ancrant en Dieu. (Ce n'est pas pour rien que la foi est symbolisée par une ancre.) Croire en Jésus, ce n'est pas se mettre à croire à des choses invraisemblables, ce n'est pas se mettre à faire du bien… Croire en Jésus, c'est changer de vision du monde, surtout la vision de notre monde intérieur.
    Qu'est-ce que ça veut dire ? Voir la vie comme un cadeau de Dieu, recevoir la vie comme un enfant reçoit — avec une confiance totale — la vie et l'amour de ses parents. Un enfant reçoit la parole d'un adulte comme une vérité, il ne comprend pas encore pourquoi, mais il a confiance que l'adulte lui veut du bien, il le croit. (C'est pourquoi il est terriblement pervers lorsqu'un adulte profite de cette confiance pour manipuler un enfant à son profit.) Croire, c'est assurer sa vie en Dieu, ne la faire dépendre que de lui.
    Jésus disait à ses disciples : "Celui qui voudra gagner sa vie la perdra…" et encore "Que sert à l'homme de gagner le monde entier, s'il se perd lui-même ?" (Luc 9:24-25). L'enjeu est son propre être, comment le sauver de l'angoisse du manque, du souci et de l'inquiétude, de la peur de ne pas être aimé ?
    Le récit de Paul et Silas dans la prison de Philippes nous dit que la situation extérieure, les circonstances ne déterminent pas notre état intérieur. Notre état intérieur dépend de notre relation à Dieu, de notre confiance en lui, en Jésus.
    Croire en Jésus, c'est se laisser aller à cette confiance, marcher sur cette voie de la confiance en Dieu qui redonne vie et liberté à notre être intérieur, de sorte que nous puissions prier et louer Dieu en toutes circonstances.  
    Amen
    © Jean-Marie Thévoz, 2007

  • Actes 11. Faire avancer l'oecuménisme

    Actes 11
    16.1.2000
    Faire avancer l'oecuménisme
    1 Cor 12 : 4-11 Ac 11 : 4-11 Mt 7 : 1-5

    Chers frères et soeurs en Christ,
    Nos deux communautés veulent marquer leur volonté de rapprochement en s'unissant ce matin dans la célébration commune de Dieu. "Nous avons quand même le même Dieu !" C'est une phrase que j'entends souvent dans mes visites et mes contacts. Oui, nous avons le même Dieu, le même Seigneur Jésus-Christ, nous avons reçu le même Esprit et la même Bible. Nous avons la même volonté de servir Dieu de tout notre coeur, de toute notre âme, avec toute notre énergie, et cette volonté se traduit dans les faits !
    Les relations entre catholiques et protestants sont différentes aujourd'hui — à la fin de ce XXe siècle — de ce qu'elles étaient au début de ce siècle. On ne se jette plus des pierres, les enfants ne se battent plus entre eux pour des raisons de confession, on n'entend plus, comme ma grand-mère qui était une enfant protestante à Paris me le racontait, que les protestants ont les pieds fourchus dans leurs chaussures.
    Ce XXe siècle a été un siècle de réconciliation et d'avancées de l'oecuménisme. Il y a eu la création du Conseil Oecuménique des Eglises et l'événement du Concile Vatican II. Il y a eu bien des avancées, même s'il y a eu aussi les inévitables stagnations ou certains retours en arrière. La direction générale est indiquée pour le prochain siècle : il faut continuer à progresser, à se rapprocher.
    Un pas de plus a encore été fait il y a juste un an. Le 20 janvier 1999 le Conseil synodal de l'EERV et le Conseil de l'Eglise catholique en Pays de Vaud ont signé une Déclaration de Collaboration oecuménique qui encourage toutes les formes de collaboration entre nos deux confessions. Cette volonté de nos autorités rejoint les volontés des paroissiens. Profitons-en !
    Certes, il reste des obstacles, concrets ou dans nos têtes. Les deux principaux obstacles que je peux identifier sont dans nos têtes.
    Le premier est notre incapacité à voir la poutre qui est dans notre oeil. On voit tellement plus facilement ce qui devrait changer chez l'autre que chez soi, n'est-ce pas ?
    Le second est notre difficulté à penser ensemble unité et diversité. Nous pensons l'unité comme une fusion, où l'un doit forcément se fondre dans l'autre. Or, qui voudrait être absorbé et disparaître ?
    Lorsque la Bible nous parle de l'Eglise et du peuple de Dieu, elle utilise deux images. Elle parle soit en terme de corps avec des parties différentes, complémentaires et coordonnées dont la tête est le Christ lui-même, soit en terme de mariage, le mariage de Dieu avec le peuple d'Israël ou le mariage de Jésus avec son Eglise. Or, dans le mariage, il n'est pas question de fusion, même s'il est question d'union et d'unité ! Un mariage ne peut subsister que si l'homme reste homme et la femme reste femme. C'est parce que chacun reste lui-même et qu'il est respecté dans sa différence que le mariage a des chances de persister.
    Cela posé, cette unité ne vient pas des différences, mais du lien qui unit ces diversités, c'est-à-dire de Dieu et du Saint Esprit.
    Sur ce point le récit des Actes est très parlant. La communauté des premiers chrétiens, d'origine juive, a été confrontée à la question de l'accueil des non-juifs, des païens. Le récit nous dit que Pierre a mangé à la table de familles païennes. Il est vertement critiqué par l'Eglise de Jérusalem pour ce comportement qui transgresse la loi et la tradition juive. Pierre a commis un acte jugé impur, parce qu'il s'est mélangé avec des gens différents. L'Eglise de Jérusalem pose ainsi un jugement (conforme à ses traditions).
    Pierre doit leur expliquer en détail ce qui s'est passé : par une vision, Dieu a montré à Pierre qu'il ne devait rien considérer comme impur ; "Ne considérez pas comme impur ce que Dieu a déclaré pur." (Ac 11:9) En envoyant son Saint-Esprit sur des païens — à la grande surprise de Pierre — Dieu déclare que le jugement n'appartient pas aux hommes de fixer ce qui est pur ou impur, qu'il n'appartient pas aux hommes de délimiter des frontières à son Eglise.
    A cela Pierre ne peut qu'acquiescer : "Qui étais-je pour m'opposer à Dieu ?" (Ac 11:17) Nous avons à reconnaître, avec Pierre, que le jugement des coeurs, de la foi, de la vraie doctrine n'appartient qu'à Dieu. Notre rôle n'est pas de placer des limites et d'établir des frontières. Nous avons à reconnaître que Dieu fait les choses différemment, qu'il peut nous surprendre ! Si Dieu veut l'unité des chrétiens, qui sommes-nous pour nous y opposer ?
    Voici ce qui se passa lorsque Pierre eut fini de parler aux membres de l'Eglise de Jérusalem :
    "Après avoir entendu ces mots, ils se calmèrent et louèrent Dieu en disant :
    — C'est donc vrai, Dieu a donné aussi à ceux qui ne sont pas juifs la possibilité de changer de comportement et de recevoir la vraie vie."(Ac 11:18)
    Les chrétiens de l'Eglise de Jérusalem ont reconnu le bien fondé de l'attitude de Pierre et ils en ont fait l'attitude de toute l'Eglise depuis ce moment-là : non seulement il est permis d'entrer et de partager le repas avec tout être humain sur la terre, mais encore cela doit devenir le signe même de l'appartenance à Jésus-Christ : un accueil sans jugement et un amour sans frontières dressées entre les personnes.
    Qu'il en soit ainsi entre nous !
    Amen

    © 2007, Jean-Marie Thévoz