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guérison

  • D'un homme sourd à l'Eglise balbutiante

    (17.11.2002)

    Marc 7

    D'un homme sourd à l'Eglise balbutiante

    Esaïe 35 : 1-10.            Marc 7 : 31-37

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  • Guérison à distance

    Luc 7

    23.6.2019

    Guérison à distance

    Genèse 15 : 1-6          Luc 7 1-10

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    Chers frères et soeurs en Christ,

    Vous avez entendu deux récits bibliques dont le point commun est la foi. La foi d'Abraham qui croit dans la promesse que Dieu lui fait d'avoir un jour une descendance, et la foi de cet officier romain qui demande la guérison pour un serviteur qu'il aime.

    Regardons attentivement le déroulement du récit, tel que l'Evangéliste Luc nous le raconte (c'est différent chez Matthieu), pour voir à quel moment Jésus rencontre ce capitaine romain :

    v. 3-4 les notables parlent à Jésus au nom du capitaine.

    v. 6 Jésus se met en route et l'on se dit que la rencontre va avoir lieu.

    v. 6-7 deuxième groupe de messagers.

    v. 9 Jésus ne s'adresse pas au capitaine, mais à la foule qui le suit.

    v. 10 Jésus reprend sa route.

    Et bien, le capitaine et Jésus ne se sont jamais rencontrés face à face, ils ne se sont jamais parlés directement, et pourtant, le serviteur est guéri, la foi du capitaine est admirée, le capitaine a reçu l'aide qu'il avait demandée ! L'interaction entre le capitaine et Jésus est pourtant importante, décisive, puisqu'il s'est vraiment passé quelque chose dans cet échange "à distance."

    Cet échange ressemble beaucoup à celui que nous pouvons avoir maintenant (au XXIe siècle) avec Jésus. Jésus n'est pas là, physiquement, nous ne pouvons pas le recevoir à dîner ou le voir face à face, et pourtant nous pouvons lui demander son aide et la recevoir ! Nous sommes dans la même situation que le capitaine. Le récit nous dit que le capitaine "a entendu parler de Jésus" et c'est cela qui le décide à lui faire demander de l'aide. Avez-vous entendu parler de Jésus ? Oui, puisque vous êtes ici. Des personnes vous ont parlé de Jésus, communiqué son message, ses paroles, ses actes. Cette écoute a fait naître la foi du capitaine. Il peut se dire : "Ce Jésus a le pouvoir de m'aider, d'intervenir pour mon serviteur."

    La foi du capitaine n'est pas la foi en une liste de phrases, d'énoncés sur Dieu, Jésus et le saint esprit. La foi du capitaine porte sur un fonctionnement : l'efficacité de la parole de celui qui a autorité. Le capitaine reconnaît que Jésus a autorité sur la vie !

    Un capitaine, comme tout soldat ou chef, sait comment cela fonctionne dans l'armée : il y a une hiérarchie et les ordres qui partent d'en haut sont exécutés. Un ordre, c'est efficace, lorsqu'il est dit par la bonne personne au bon destinataire.

    La foi de ce capitaine, c'est que Jésus est la bonne personne pour donner un ordre de guérison ! Il reconnaît que Jésus — comme Dieu — a autorité sur le monde. Et Jésus admire le capitaine pour cette foi et donne cette foi en exemple à la foule qui le suit.

    Les notables que le capitaine avait envoyés à Jésus avaient vanté ses mérites : "Cet homme mérite que tu lui accordes ton aide. Il aime notre peuple et c'est lui qui a fait bâtir notre synagogue." (Luc 7:5) Le capitaine lui-même considère qu'il ne mérite rien, il ne se considère même pas assez digne pour que Jésus entre chez lui. Mais Jésus n'est préoccupé ni par les prétendus mérites attribués au capitaine, ni par sa retenue ou sa modestie. Ce qui est important, c'est la confiance qui naît et s'instaure entre le capitaine et Jésus.

    C'est cette confiance qui rend tout possible. Une confiance dans l'autorité et le pouvoir de Jésus, mais qui ne tourne pas à l'obéissance servile ou soumise. Jésus répond librement à la demande d'aide du capitaine, et Jésus ne réclame pas une obéissance de sa part. L'autorité se manifeste dans la bienveillance, dans la volonté de faire du bien. Le pouvoir de Jésus — ou de Dieu — est au service du bien, de la vie, de la guérison.

     

     

     

     

    Ce récit de miracle devient parabole de la relation que Dieu veut avoir avec nous. On peut décaler tous les rôles pour faire apparaître la parabole;

    - nous prenons la place du serviteur,

    - Jésus prend la place du capitaine,

    - Dieu prend la place de Jésus et l'on voit une parabole où Jésus — tout maître qu'il soit, tout haut placé qu'il soit par rapport à l'être humain, à nous — est pris d'inquiétude, de souci pour son serviteur. Aussi intercède-t-il auprès de Dieu pour obtenir sa guérison, notre guérison.

    Jésus rompt la distance entre Dieu et nous, il est l'intermédiaire entre celui qui demande de l'aide et celui qui la donne. Il n'est pas nécessaire que nous voyons Dieu, que nous soyons en face à face avec lui pour être en relation avec lui. Nous le sommes par l'intermédiaire de Jésus. Comme il n'a pas été nécessaire que Jésus et le capitaine se rencontrent dans un face à face, pour être en communication et que le serviteur soit guéri, il n'est pas nécessaire que nous attendions des signes tangibles de l'existence et de la présence de Dieu pour lui adresser nos demandes et recevoir son aide.

    Notre premier pas, c'est de lui donner notre confiance.

    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2019

  • Jésus pratique la contamination positive.

    Marc 5

    21.1.2018

    Jésus pratique la contamination positive.

    Ex 15 : 1-21     Marc 5 : 21-43

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    Chers frères et sœurs en Christ,

    La thématique pour cette semaine de l’Unité des Chrétiens et pour cette célébration œcuménique a été préparée par un groupe d’Eglises des Caraïbes. L’accent de ces Eglises est mis sur la libération, notamment par rapport à leur passé d’esclavage. Le récit de l’Exode et du passage de la mer, qui met une fin définitive à l’esclavage, trouve là-bas un grand écho. C’est un peu moins direct pour nous ici.

    Le livret de la semaine met en avant le verset suivant : « Ta main droite, Seigneur, est éclatante de puissance. » (Ex 15:6). Cette puissance de Dieu, qui réduit à néant les armées de Pharaon dans la mer, qu’a-t-elle à voir avec le message de Jésus, avec l’Evangile ?

    Jésus n’est-il pas mort sur la croix, sans armée d’anges pour le sauver, sans puissance pour le descendre de la croix ? Jésus n’a-t-il pas accepté cette impuissance ? N’est-ce pas même la force de son ministère et de son message : ne pas entrer dans le jeu des puissances et des autorités ?

    Jésus a accepté l’impuissance publique, politique et religieuse. Jésus recadre le lieu de la puissance en la plaçant dans les relations interpersonnelles et c’est ce que nous voyons dans le double récit de guérison de l’Evangile selon Marc que nous avons entendu.

    En toutes lettres, il est dit qu’une force (dunamis en grec) sort de Jésus au moment où la femme touche son vêtement. Et la femme perçoit tout de suite qu’elle est guérie, que cette force — qu’elle cherchait auprès de Jésus — a été efficace, plus efficace que celle de tous les médecins qu’elle avait consultés pendant douze ans.

    Dans le dialogue qu’il entretient avec cette femme, au milieu de la foule qui le presse, Jésus confirme la guérison, il valide le geste de cette femme en lui disant : « Ta foi t’a sauvée ! » (Mc 5:34) Qu’est-ce que cette foi et de quoi cette femme est-elle sauvée ?

    A. La foi de cette femme est d’avoir osé transgresser tous les tabous de son époque pour s’approcher de Jésus. Il faut se remettre dans le contexte des lois de pureté du Lévitique auxquels les pharisiens demandaient de se plier. Une femme est impure pendant tout le temps de ses règles et les sept jours qui suivent. Et quiconque la touche est impur jusqu’au soir (Lév. 15:19).

    Cela signifie que cette femme était considérée comme impure 365 jours par an et que personne ne pouvait avoir un contact physique avec elle — ne serait-ce une poignée de main ou recevoir d’elle le plat qui passe à table — sans être impur à son tour.

    Cette femme-là espère en Jésus, elle croit, elle est sûre du pouvoir guérisseur de Jésus. Elle s’octroie la permission de traverser une foule compacte jusqu’à Jésus et de le toucher au risque de le rendre impur. Cette incroyable impudence, ce toupet — après coup nous disons ce courage — Jésus le valide comme étant de la foi. Oui, c’est de la confiance dans le pouvoir libérateur de Jésus.

    Mais c’est plus que cela. C’est une véritable, une authentique adhésion au mode de pensée de Jésus lui-même. N’est-ce pas Jésus qui guérit un lépreu précédemment dans l’Evangile selon Marc (Mc 1:40-42) ? Dans ce récit, le lépreux formule ainsi sa demande : « Si tu le veux, tu peux me rendre pur. » (Mc 1:40).

    C’est exactement ce que pense cette femme. Elle est persuadée que Jésus peut la rendre pure, que ce n’est pas elle qui va contaminer Jésus, mais lui qui va la rendre pure. La foi de cette femme, c’est que Jésus a le pouvoir de renverser le processus de contamination.

    Le livre du Lévitique, et les pharisiens à sa suite, pensent que l’impur pollue le pur. Jésus affirme constamment le contraire dans sa façon d’être et de guérir. Jésus approche malades, handicaps, lépreux et possédés, tout l’arrière-ban de la société, tous les exclus qu’on ne veut pas approcher de peur d’être contaminé. Et bien, Jésus va vers eux et ôte leur pseudo-impureté.

    Jésus pratique la contamination positive. Jésus n’a pas été rendu impur par cette femme, c’est une force sortie de lui qui a transformé cette femme. Jésus est venu renverser les courants, les flux. A l’image des flux sanguins de ces deux récits, flux qui se sont renversés pour qu’il ne coule plus chez la femme et qu’il se remette à couler dans les veines de la fillette.

    Jésus remet de la vie là où la vie ne circulait plus. Jésus renverse les idéologies qui étiquettent les gens, les rendant impurs, aujourd’hui on dirait infréquentables.

    B. La foi qui sauve cette femme, c’est le renversement de la croyance sur le sens de la contamination. Jésus croit à la contamination positive et il nous invite à la foi, à le croire avec lui. Avec cette croyance — que la femme a commencé avant sa rencontre physique avec Jésus — la femme est sauvée de son isolement social. En ayant ce dialogue d’aveu public, Jésus la remet au milieu de son groupe social, au milieu de son village avec sa bénédiction. Plus personne ne pourra l’exclure sans se couper lui-même de Dieu.

    Jésus n’est pas venu imposer une puissance divine à la société. Il vient changer nos mentalités et nos relations les uns avec les autres pour qu’elles ne soient plus fondées sur la peur, la peur de l’autre, mais sur la confiance.

    Confiance dans la force positive du bien, dans la force de la contamination positive, dans la contagion de l’amour. A partir de ce regard de Jésus, nous pouvons nous regarder différemment les uns les autres. Avec cette femme, avec Jésus, osons abandonner la peur et opter pour la confiance.

    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2018

  • Le miracle se dérobe pour faire place au signe

    Jean 4

    8.10.2017

    Le miracle se dérobe pour faire place au signe

    1 Rois 17 : 15-24       Jean 4 : 43-54

     

    télécharger le texte : P-2017-10-08.pdf

    Chers frères et sœurs en Christ,

    Jésus est de retour à Cana où il avait changé l’eau en vin, après un voyage qui l’avait emmené jusqu’à Jérusalem. À Jérusalem il a rencontré Nicodème. Sur le chemin du retour, il traverse la Samarie où il rencontre la Samaritaine. Et il arrive en Galilée et retourne à Cana. Là il accomplit un deuxième signe, la guérison du fils d’un fonctionnaire royal, fonctionnaire du roi Hérode.

    L’Évangéliste Jean raconte peu de miracles, il en a, en fait, sélectionné sept, qu’il appelle des signes et pas des miracles. Le deuxième signe est une guérison et ressemble à la guérison du serviteur de l’officier romain de Capharnaüm raconté dans Mt 8. Dans les deux Évangiles, c’est ce que j’appellerais « une guérison à distance ». Chez Matthieu, c’est l’officier qui prie Jésus de ne pas se déplacer, avec cette parole qu’on répète dans la liturgie de sainte Cène : « Je ne suis pas digne que tu entres chez moi, mais dis une seule parole et il sera guéri » (Mt 8:8). Et Jésus loue la foi de cet homme, foi qui surpasse celle des gens d’Israël. Ici, chez Jean, on est dans la situation contraire. C’est Jésus qui ne veut pas se déplacer.

    La préoccupation de la communauté de Jean est de savoir si Jésus peut agir maintenant, alors qu’il n’est pas présent physiquement, en personne. Jésus est retourné auprès du Père, peut-il encore avoir une influence dans notre monde ? La communauté voudrait fortement que des miracles se produisent pour attester de ce pouvoir de Jésus. Alors Jésus critique l’attirance pour l’extraordinaire et le peu de foi de ceux qui l’entourent. Aussi reçoit-il le fonctionnaire royal assez sèchement : «Si vous ne voyez signes et prodiges, vous ne croirez donc jamais ?» (Jn 4:48)

    C’est un comble ! Cet homme vient de faire 25 kilomètres de Capharnaüm à Cana pour rencontrer Jésus parce qu’il a l’espoir et la foi que Jésus peut guérir son fils ! Et il est reçu comme cela par Jésus ? Mais peut-être que cette phrase s’adresse davantage à la foule qui l’entoure et surtout aux lecteurs, à nous. La question qui nous est posée est : d’où vient notre foi ?

    Le récit de cette guérison montre, par l’exemple de cet homme, comment naît la foi et comment Jésus la suscite. La foi est autre chose que la recherche du merveilleux. C’est beau, mais ce n’est pas solide. Dans le déroulement de cette guérison tout commence par une attente, une espérance : cet homme a besoin de Jésus. Il attend qu’il sauve son fils.

    A la deuxième demande, Jésus lui répond pas une affirmation qui n’est encore qu’une promesse pour le père : il ne peut pas voir si la parole de Jésus a de l’effet : 25 kilomètres le sépare de son fils. Cette distance — pour voir — est l’espace de la foi. La foi de ce père est en jeu. Va-t-il insister pour que Jésus vienne, voie et touche son fils pour le guérir ou va-t-il croire que la parole de Jésus est efficace ? Insister ou partir avec confiance, tel est le dilemme. Et l’homme fait le choix de la confiance, confiance dans la parole de ce Jésus qu’il est venu solliciter. Ce n’est que le lendemain qu’il va rencontrer ceux qui viennent de chez lui et avoir des nouvelles. Oui, la fièvre est tombée et son fils vit. Là encore, la question se pose : est-ce la parole de Jésus ou est-ce une coïncidence ?

    Cela me rappelle l’histoire de cet homme qui raconte, au bistrot, qu’il s’était perdu dans le désert. Il a eu tellement peur de mourir qu’il s’est mis à prier que Dieu vienne le sauver. Ses copains de l’interpeller : alors Dieu est venu puisque tu es là ? Mais non, dit l’homme, Dieu n’a pas eu le temps, à peine j’avais rouvert les yeux que j’ai vu une caravane qui m’a recueilli.

    Le fonctionnaire royal doit faire un cheminement mental pour relier les événements entre eux, pour réaliser qu’il a bien fait de faire confiance dans la parole de Jésus et que la guérison de son fils est bien reliée à cette parole et cette confiance.

    Ce qui est particulier dans cette guérison, c’est que personne — à part le lecteur — n’est présent partout. Le père est loin de la maison et ne peut pas voir la guérison de son fils, il n’a que la parole de Jésus. Les serviteurs voient la fièvre tomber, mais ils ne savent pas ce qui se passe à Cana. En fait personne ne voit le miracle, la guérison. Seul le père — et le lecteur maintenant — voit le signe : la parole de Jésus est efficace, même à distance !

    On dirait que Jésus s’arrange pour que personne ne voie le miracle, mais que ceux qui ont foi en lui puissent voir le signe. C’est le même déroulement qui était déjà à l’œuvre dans le premier signe de Cana, le changement de l’eau en vin. (On peut aussi mettre en relation ces deux signes de Cana, l’un sur la nourriture et l’autre une guérison, avec les deux signes d’Elie auprès de la veuve de Sarepta, 1 Rois 17:7-24).

    Voyons les similitudes.

    1. Il y a un délai entre le moment de la transformation ou de la guérison et le moment où l’on s’en aperçoit.
    2. Ce sont d’autres personnes qui sont là au début (les serviteurs qui versent de l’eau dans les vases) et celles qui sont là à la fin (les invités et le marié). Personne n’assiste de bout en bout au processus. Donc personne ne peut se targuer d’avoir vu le miracle.
    3. Il faut une relecture du processus, après coup, pour comprendre et croire, c’est-à-dire voir la main de Dieu à l’œuvre.

    C’est dans ce processus que les deux signes de Cana sont semblables. Le miracle se dérobe pour faire place au signe. La foi est construite sur la découverte de l’origine divine de l’événement. Ce n’est pas le merveilleux qui fait la foi, c’est la reconnaissance de l’action de Dieu dans notre présent. Cette reconnaissance — nous dit l’évangéliste Jean — viens d’une relecture de l’événement, de notre vie.

    Dans ce deuxième signe, on voit ce père se poser des questions, reconstituer ce qui s’est passé à distance, pour relier la guérison de son fils à la parole de Jésus. Ce n’est qu’après coup qu’il réalise que Dieu a agit dans sa vie, la vie de son fils et la vie de toute sa famille. Cette réalisation, cette relecture après-coup va conduire toute la famille à la foi.

    C’est en se retournant sur notre vie, sur ce que nous avons traversé que nous pouvons dire : tiens, là, j’ai été guidé, là, j’ai été accompagné, là, je sens que Dieu est intervenu dans ma vie. Là, Dieu m’a fait signe ! C’est une reconstitution que souvent les autres ne peuvent pas voir, mais que notre foi en Dieu nous fait voir.

    Cela peut être très subtil, à peine perceptible. Il y a mon parcours, celui que je vois en me retournant sur mon passé, un parcours où tout s’enchaîne et s’explique, mais où je vois un petit plus, une trace, un souffle… et ma foi me fait dire : je crois que Dieu y est pour quelque chose, il était là, il a agi.

    Bien que Jésus soit auprès du Père — à distance, comme pour le fonctionnaire royal sans que cela soit visible pour les autres — Jésus a agi. Oui, là, Dieu est intervenu dans ma vie, il y a remis de la vie, de la plénitude, de la direction ou de la consolation.

    Pas besoin de miracles et de prodiges — visibles par tous autour de nous. Dieu nous fait signe. A nous de nous retourner pour lire ces signes, nous en réjouir et fortifier notre foi.

    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2017

  • Le Sermon sur la Montagne (III) Contamination positive

    Matthieu 8
    12.6.2016
    Contamination positive.
    Matthieu 5 : 21-24    Matthieu 7 : 28-29 + 8 : 1-4

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    Chères paroissiennes, chers paroissiens,
    Dans notre recherche pour mieux connaître Jésus à travers le Sermon sur la Montagne, nous avons déjà vu comment il se place en surplomb lorsqu’il parle, il se place au-dessus de la Loi pour la commenter et la modifier (P-2016-05-22). Ensuite nous avons vu la radicalité des propos de Jésus, combien il exagère, proposant des conduites impossibles à tenir pour provoquer le changement (P-2016-05-29).
    Aujourd’hui nous voulons voir comment Jésus se démarque de l’enseignement des pharisiens et des maîtres de la Loi. Jésus ne renie pas le judaïsme. Il s’inscrit dans cette tradition, il l’assume, il l’aime. Il fait référence à la Torah, à la volonté de Dieu, il se compte comme un fils d’Abraham ; il se voit dans la lignée des prophètes d’Israël. On voit même, dans la fin du récit de guérison du lépreux, qu’il l’envoie vers le prêtre et lui demande d’accomplir le sacrifice prescrit par Moïse.
    Oui, Jésus s’inscrit bien dans la ligne du judaïsme. Mais en même temps, Jésus vient pour redire la volonté de Dieu pour son peuple et c’est là qu’il y a un hiatus. Il y a une distance entre le judaïsme des pharisiens et la juste relation que Dieu veut instaurer entre les êtres humains. Cette distance, c’est Jésus qui l’a fait remarquer, ce ne sont pas les chrétiens — ultérieurement— qui l’ont définie.
    Jésus se démarque vraiment des pharisiens, il propose vraiment une relation différente à Dieu et aux êtres humains. Cette distance, cette nouveauté, c’est ce qui va créer l’insupportable et conduire à la mort de Jésus sur la croix.
    L’enseignement de Jésus se démarque sur le point de vue moral, on le voit dans le Sermon sur la Montagne, dans les reformulations : « Il vous a été dit… mais moi je vous dis…». Mais des désaccords moraux, on peut vivre avec. Ce n’est pas là-dessus que la démarcation est assez forte pour conduire à la mort de Jésus.
    La démarcation porte sur la vision globale du monde ; celle des pharisiens et celle de Jésus diffèrent complètement. Et l’ensemble des récits des Évangiles expriment cette distance, cette différence. Voyons ces différences. J’en relèverai trois.
    1.  Les pharisiens pensent qu’une bonne relation à Dieu, la relation qui peut leur assurer le salut, passe par une observance stricte de tous les détails de la Loi. Cette obéissance les différencie des païens qui n’ont aucun accès à Dieu. Cette vision des choses domine dans l’observance du sabbat, c’est là qu’on voit la différence entre les bons juifs et les autres.  Jésus remet tout cela en cause par les guérisons qu’il opère le jour du sabbat, surtout lorsqu’il demande aux pharisiens : « Est-il permis de faire du bien de jour du sabbat ?» (Mt 12:12) Question combien embarrassante.
    Jésus remet complètement en cause la vision du monde et de Dieu des pharisiens lorsqu’il pose le principe selon lequel le sabbat est fait pour l’homme, non pas l’homme pour le sabbat. Premier pas, Jésus place l’être humain au-dessus de l’obéissance.
    2. Vous avez entendu dans les lectures que Jésus demande à celui qui se rend compte — au Temple — qu’il est toujours brouillé avec son frère, de laisser là son offrande et d’aller se réconcilier avec lui.
    Deuxième pas : Jésus place les bonnes relations — la réconciliation — au-dessus du culte à rendre à Dieu. C’est incroyable ! C’est un renversement insensé pour tous les responsables religieux. Faire passer l’être humain avant Dieu! Faire passer la relation avant le rituel. C’est pourtant bien là l’avancée novatrice du Christianisme. Ce qui l’a rendu attractif et pertinent : être ensemble dans de bonnes relations, dans la joie et la bonne humeur, c’est cela rendre un culte agréable à Dieu.
    3. Le troisième bouleversement concerne la vision de la pureté des pharisiens. Ils ont l’impression de vivre dans un monde et un environnement impur contre lequel il faut constamment se protéger et toujours à nouveau se purifier. Tout est occasion de perdre sa pureté. Oublier un commandement, mais aussi marcher sur une tombe ou un ossement, être frôlé par le vêtement d’un païen ou d’une femme, manger un aliment impropre ou mal préparé, se trouver dans le même espace qu’un étranger ou croiser un lépreux. Tout est occasion d’être contaminé de l’extérieur.
    Et voilà que Jésus vient et renverse tout. Vous vous souvenez (P-2016-05-01), il dit aux pharisiens : avec vos rituels vous ne lavez que l’extérieur des plats (Luc 11:39). Ce n’est pas ce qui rentre en l’homme, mais ce qui sort de lui qui le rend impur. De la pureté défensive des pharisiens, Jésus passe à une pureté offensive ou contagieuse. Pour Jésus c’est l’attitude intérieure qui est contagieuse, c’est la pureté qui va se répandre et changer les conditions autour de soi. Ainsi Jésus peut-il se laisser toucher et aborder par quiconque, c’est toujours lui le vainqueur de l’impureté, c’est l’autre qui devient pur à son contact !
    C’est exactement ce qui se passe à la suite du récit du Sermon sur la Montagne. Le Sermon sur la Montagne se conclut par la parabole des deux maisons et le rappel que Jésus enseigne avec autorité. Et le premier acte de Jésus en descendant de la montagne, c’est sa rencontre avec le lépreux qui exprime la vérité qui vient d’être illustrée dans le Sermon sur la Montagne : «Si tu le veux, tu peux me rendre pur » proclame  le lépreux (Mt 8:2). Le lépreux fait appel à cette pureté contaminante, qui est bien plus forte que la lèpre. Voilà le retournement qui est insupportable pour les pharisiens, pour les religieux, mais qui va faire le succès du Christianisme. Toute relation est bonne et ne comporte pas de risque religieux. La relation, c’est ce que Dieu veut favoriser. La relation est possible avec tous. La relation est souhaitable avec tous ! La relation, le partage des repas, la célébration tous ensemble, voilà le souhait de Dieu pour l’humanité.
    Personne n’est impur, par nature par accident. Jésus remporte toujours la victoire du pur sur l’impur déclaré par la société. Il n’y a plus d’intouchables. Donc il n’y a plus besoin de mur de protection, il n’y a plus besoin d’exclusion, de mise à l’écart. Ce qui l’emporte, c’est le principe du rayonnement, c’est le principe de la contamination positive. C’est pourquoi le discours du Sermon sur la Montagne commence avec l’image du sel la terre et de la lumière. Deux images de contamination positive, le sel qui donne du goût et la lumière qui répand sa clarté dans l’obscurité.
    Il n’y a rien d’impur dans le monde, il n’y a que des réalités qui attendent d’être illuminées, d’être sanctifiées. Notre rôle de chrétien — à la suite de Jésus — c’est de continuer cette contamination positive que les théologiens appelle la sanctification.
    Amen
    © Jean-Marie Thévoz, 2016

  • Prends courage, lève toi, il t’appelle !

    Marc 10
    18.10.2015
    Prends courage, lève toi, il t’appelle !

    Josué 6 : 1-5        Marc 10 : 46-52

    Téléchargez le texte : P-2015-10-18.pdf


    Chères paroissiennes, chers paroissiens,
    Pour bien comprendre la portée de la guérison de l’aveugle Barthimée, il est nécessaire de comprendre quand, dans la vie de Jésus, se passe cet épisode. Nous sommes à Jéricho. Jéricho est une ville étape sur la route entre la Galilée et Jérusalem. Depuis le lac de Galilée, il est bien plus facile de suivre la vallée du Jourdain jusqu’à Jéricho, puis de monter à Jérusalem, que de traverser toutes les montagnes de Samarie.
    Jésus a donc terminé son ministère en Galilée, il a fini son enseignement, il monte à Jérusalem pour ce qu’il sait être le temps de sa Passion. Il a déjà annoncé sa Passion à ses disciples par trois fois, mais ceux-ci ne comprennent toujours pas. Ils restent aveugles face au destin de Jésus. Cette guérison est donc emblématique du besoin des disciples —  et des lecteurs — de se voir ouvrir les yeux sur la personne et le rôle de Jésus.
    Cette rencontre avec Barthimée se passe aux portes de Jéricho. Il n’est pas possible de ne pas penser à ce que l’Ancien Testament dit de Jéricho et de l’effondrement de ses murailles. C’est le lieu même où la foi — sans le recours à la violence — a fait tomber les murailles, les obstacles, les remparts. C’est le lieu que Jésus choisit pour faire tomber les obstacles à notre foi, les murailles que nous érigeons pour nous protéger, pour nous séparer des autres ou de Jésus.
    C’est là que Jésus rencontre Barthimée et que cette rencontre va transformer la vie de ce mendiant aveugle, assis au bord de la route, attendant passivement les aumônes. Jésus passe là avec ses disciples et une petite foule. Barthimée s’en rend compte, il identifie le personnage principal et il l’interpelle : «Jésus fils de David, aie pitié de moi». « Aie pitié de moi » C’est l’appel classique du mendiant. Faire appel à la charité, à la miséricorde, à la compassion, pour recevoir une aumône, de quoi vivre ce jour là. Ceux qui accompagnent Jésus ont deux réactions opposées. Les uns rabrouent Barthimée et l’enjoignent au silence. Il ne faut pas déranger le maître. Les autres soutiennent la demande de Barthimée en disant : « Prends courage, lève toi, il t’appelle. » (Mc 10:49)
    Jésus est en effet attentif. Il est attentif aux cris, aux appels, aux prières qui lui sont adressés. Mais le monde est ambivalent, plus souvent sourd et fermé. Le monde actuel est plutôt du côté de faire taire ceux qui crient à Dieu. La mode, c’est de dire que la foi c’est ringard, c’est dépassé, c’est quelque chose pour les naïfs.
    Qui allez vous écouter ? Ceux qui disent tais-toi, ou ceux qui disent « Prends courage, lève toi, il t’appelle » ?
    Ici, dans la paroisse, vous n’aurez que des encouragements, que du soutien, que de l’aide : prenez des forces là où elles vous sont offertes. Ces paroles « Prends courage, lève toi, il t’appelle. » sont un antidote au repli, à la passivité, au ressassement sans fin de la plainte, du malheur.
    Votre cri est entendu, votre appel parvient aux oreilles de Jésus, il se tourne vers vous et engage le dialogue. Jésus commence par demander ce dont nous avons besoin : « Que veux-tu que je fasse pour toi ? » (v.51) Chacun a des besoins différents ; les besoins changent au cours du temps et Jésus veut donner une réponse adaptée. Il attend la réponse de Barthimée. Il attend votre réponse personnelle : que veux-tu ? Et Barthimée demande de recouvrer la vue.
    Et Jésus est heureux de cette demande. Barthimée aurait pu juste demander une aumône, de quoi subsister un jour de plus. Non, Barthimée est confiant, il demande un changement de vie. Barthimée a passé de la prière des besoins à une prière de transformation. Il a confiance que Jésus peut transformer sa vie, et lui redonner la vue et la vie. Jésus approuve cette demande et c’est pourquoi il lui dit : « Va ta foi, ta confiance t’as sauvé » (v.52)
    Et Barthimée revoit. Cette nouvelle vue, c’est ce que Barthimée reçoit. Mais il y a aussi dans ce récit une promesses pour le lecteur. Le lecteur aussi peut recevoir une nouvelle vue, une nouvelle vision en faisant confiance à Jésus.
    Ici à Jéricho, entre l’enseignement de Jésus (sur l’amour et les nouvelles relations que chacun peut entretenir avec son prochain en suivant Jésus) et la montée à Jérusalem pour sa Passion, ici doit se passer la guérison de notre propre aveuglement. L’aveuglement de ne pas connaître la vraie nature de Dieu. L’aveuglement de croire que Dieu veut s’imposer. L’aveuglement de croire que Dieu est loin au-dessus de nous.
    Ce récit nous invite à nous laisser ouvrir les yeux sur le fait que Dieu se révèle vraiment dans la Passion de Jésus. C’est dans sa Passion, sur la croix, que Jésus est le plus proche de nous, qu’il est vraiment à nos côtés. Il n’est pas un Dieu lointain qui nous surplombe et reste indifférent à nos malheurs. Non, il est plongé dans notre monde, dans nos luttes, dans nos tristesses, dans nos souffrances, véritablement à nos côtés. À cette réalité, nos yeux sont trop souvent fermés. Nos yeux ont besoin d’être ouverts à cette proximité. Besoin d’être ouverts à cette position nouvelle de Dieu : il est à nos côtés dans nos souffrances. Nos yeux ont besoin d’être ouverts pour découvrir le monde autrement, à l’aulne de cette révélation.
    Jésus nous offre cette nouvelle vision du monde : nous ne sommes pas seul, il vit avec nous, il nous accompagne, nous soutient, nous relève. Il nous encourage, il nous relève, il nous appelle ! C’est ce que disent les disciples à Barthimée « Prends courage, lève toi, il t’appelle. »
    Cette guérison de la vue est le commencement d’une transformation intérieure complète. Au début du récit, Barthimée était assis au bord du chemin, prostré dans son manteau, attendant passivement les aumônes. Après sa rencontre avec Jésus, Barthimée se met en route pour suivre le chemin de Jésus, transformé, transfiguré.
    Ayez courage, ayez confiance, relevez-vous en saisissant la main que Jésus vous tend, il vous appelle, écoutez-le.
    C’est lui qui va faire tomber les murailles de Jéricho dans lesquelles vous êtes enfermés. C’est lui qui va faire tomber les remparts de tristesse, de chagrin, qui vous coupent des autres. C’est lui qui va faire surgir la lumière dans vos vies. C’est lui qui ouvre un chemin sous vos pas.
    Amen
    © Jean-Marie Thévoz, 2015

  • 2 Rois 5. Femmes de la Bible (V) : la « jeune fille » de Naaman

    2 Rois 5
    2.8.2015
    Femmes de la Bible (V) : la « jeune fille » de Naaman

    2 Rois 5 : 1-17      Marc 4 : 30-32

    Télécharger le texte : P-2015-08-02.pdf


    Chères paroissiennes, chers paroissiens,
    Dans notre série sur les femmes peu connues de la Bible, nous nous penchons ce matin sur une bien modeste personne, une petite jeune fille. Celui qui nous raconte cette histoire où elle intervient ne lui donne même pas de nom, comme si elle n’avait pas d’importance. Et pourtant, sans elle, il n’y aurait rien à raconter. Elle est à l’origine de tout ce qui se passe dans ce récit.
    Il s’agit de la petite jeune fille qui est au service de la femme du général syrien Naaman. Reprendre dans toutes mes phrases ce descriptif serait fastidieux, aussi ai-je décidé de lui donner un nom. Nous allons l’appeler Amielle.
    Amielle est une israélienne qui vit dans la famille du général syrien Naaman. Le récit nous dit qu’elle a été faite prisonnière en Israël par une bande armée et ramenée en Syrie chez le général. Il est difficile de savoir quel âge elle a. Le texte utilise deux mots « fille» et « petite ». Mais le mot fille désigne aussi Ruth (revenue avec sa belle-mère Naomi) lorsqu’elle va glaner dans les champs de Booz. Ce mot de « fille » peut donc désigner n’importe quelle femme jusqu’à son mariage. Cependant, la mention de « petite » laisse penser que c’est une jeune adolescente ou une pré-adolescente. Elle a donc vécu en Israël et elle a été arrachée à sa famille, à sa culture, tout en en gardant un souvenir aigu et précis. Elle se souvient de son culte au Dieu d’Israël et du prophète Elisée qui siège dans le royaume du Nord, en Samarie.
    On voit que la situation politique et militaire entre la Syrie et Israël du Nord est tendue. Il y a des escarmouches et des razzia. Il y a une méfiance dans les relations politiques entre les deux Etats, cela se voit à la réaction du roi d’Israël lorsqu’il reçoit la lettre du roi de Syrie. Il se demande tout de suite où est le piège, où est le traquenard dans cette demande de guérison.
    Mais revenons à Amielle. Elle vit dans cette famille, soit comme une fille adoptée, soit comme une aide, comme une servante. Aucun vocabulaire ne fait référence à de l’esclavage. Amielle est « devant» la maîtresse de maison, comme Naaman est « devant » le roi et sera plus tard « devant » le prophète. On voit là un rapport de respect, rapport hiérarchique certainement, mais pas un rapport de soumission humiliante. C’est pourquoi Amielle peut librement parler à la maîtresse de maison. Amielle est touchée par la souffrance du général, par le contraste marqué dans le texte entre ses états de service — un vrai héros — et sa maladie.
    Alors que — comme jeune fille enlevée à ses proches — elle pourrait s’enfermer dans la rancune, dans la haine et dans la « schadenfreude » (se réjouir de la souffrance d’autrui), Amielle est attentionnée, compatissante, bienveillante. Elle offre son aide, à partir des ressources qu’elle a: elle se souvient du prophète Elisée qui porte la Parole de Dieu et peut soulager les souffrances. Elle en parle à sa maîtresse, qui en parle à son mari, qui en parle au roi.
    À partir de la parole timide d’une adolescente, c’est tout une machine qui se met en marche. Les rouages de l’administration et de la diplomatie produisent une lettre d’introduction et de demande. On frôle même l’incident diplomatique quand le roi d’Israël craint un piège. Heureusement le prophète Elisée est mis au courant et il remet les choses en ordre, il va s’occuper lui-même du cas.
    Il rédige l’ordonnance et la fait porter au général. Celui-ci est vexé ! Quoi ! il n’a pas droit à une consultation ? (voir la prédication) Il trouve ridicule la prescription que lui fait le prophète. Il est décidé à tout laisser tomber et à rentrer chez lui. On est à un cheveu de l’échec complet. Ce sont ses serviteurs qui le raisonnent : « N’auriez-vous pas suivi l’ordonnance si on vous avait demandé quelque chose de très compliqué ? Ne soyez pas rebuté par la simplicité. Essayer au moins ! »
    Ce retour à la simplicité est intéressant, parce qu’il nous renvoie — comme si c’était le thème de ce récit — aux mots tout simples d’Amielle. Quelques mots tout simples, même dit en passant, un geste d’amitié spontané, un signe donné au bon moment peut illuminer une journée, changer l’obscurité en lumière. Une parole de quelqu’un qui me semblait tellement peu important, auquel on ne prête d’habitude même pas l’oreille, peut être la parole qui nous faut entendre, les mots les plus importants de la journée.
    Et en effet, le sort de Naaman, le général syrien est totalement bouleversé, changé, à la suite des quelques mots qu’Amielle a glissé à sa maîtresse. Elle ne se doutait probablement pas de ce qu’elle allait mettre en marche. Mais elle l’a fait. Elle a prononcé ces mots, elle a transmis le message qui lui tenait à cœur. Elle a cherché dans ses racines, dans ses souvenirs, elle a puisé dans ses ressources, dans sa culture, elle s’est souvenue du Dieu d’Israël et elle en a témoigné, elle a dit ce qu’on pouvait en attendre.
    Ce témoignage a conduit Naaman à reconnaître la grandeur du Dieu d’Israël. C’est pourquoi il demande d’emporter de la terre d’Israël sur deux mulets, pour créer chez lui — à son retour — une petite enclave qui lui rappellera Israël, où il pourra rendre son culte au Dieu d’Israël, peut-être guidé dans ses paroles liturgiques et dans ses gestes par Amielle.
    Tout geste compte, toute parole compte et produit des effets inattendus, sans commune mesure, comme la plus petite graine peut produire un arbre dans lequel les oiseaux viennent nicher.
    Amen


    © Jean-Marie Thévoz, 2015

  • Jean 5. Jésus, l’ambassadeur de Dieu auprès des humains

    Jean 5
    30.3.2014
    Jésus, l’ambassadeur de Dieu auprès des humains

    Jean 5 : 1-30
    Téléchargez la prédication : P-2014-03-30.pdf


    Chères paroissiennes, chers paroissiens,
    Les Evangélistes ne sont pas des conteurs. Ils ne cherchent pas à nous raconter des histoires. S’ils nous transmettent des récits, c’est pour nous présenter une personne, pour nous faire découvrir la personne de Jésus, le Christ.
    Tous les récits, tous les épisodes, toutes les narrations, tous les discours des évangélistes sont orientés vers la présentation de la personne de Jésus, pour le faire découvrir et nous faire découvrir le lien qui l’unit à Dieu.
    C’est aussi ce que l’évangéliste Jean fait à travers ce récit autour de la guérison de cet homme à la piscine de Bethzatha. Un récit en trois parties (1-9 la guérison ; 10-18 la polémique ; 19-30 l’enseignement de Jésus).
    1) Premièrement donc, la rencontre et la guérison, qui ressemblent tout à fait aux guérisons qu’on trouve dans les autres évangiles. Jésus se préoccupe du sort d’un malheureux et il le guérit, grâce à la puissance divine que Dieu lui a confiée.
    2) Ensuite, comme souvent dans les autres évangiles, la polémique surgit parce que la guérison a eu lieu le jour du sabbat. Ici, cependant, ce n’est pas le fait que la guérison ait eu lieu le jour du sabbat qui pose problème : mais c’est le fait que l’homme guérit porte sa natte ! On retrouve toute l’ironie de l’évangéliste Jean. Voilà un homme relevé de son handicap après 38 ans de misère et on lui reproche de porter sa natte.
    Dans notre canton on dirait « c’est du pinaillage ! » C’est une perte totale de perspective. C’est une incapacité à faire la différence entre le détail et l’essentiel. Mais c’est bien ce que reproche Jésus aux autorités religieuses : pinailler sur les détails et manquer l’essentiel : « Malheur à vous pharisiens, vous payez la dîme sur la menthe et les herbes aromatiques, mais vous négligez la justice et l’amour de Dieu. » (Luc 11:42).
    A partir de là, la polémique glisse vers l’essentiel : qui est le vrai interprète de la volonté de Dieu ? Jésus dit aux pharisiens, à propos de cette guérison, « mon Père est continuellement à l’œuvre et moi aussi je suis à l’œuvre » (Jn 5:17). Jésus pose une similitude d’action entre le Père et lui. Aussitôt, il lui est reproché de se faire l’égal de Dieu — là le texte utilise le mot grec « iso » comme dans « isotherme » en météo qui dit des températures égales.
    3) C’est à ce moment que commence l’enseignement de Jésus : « En véritié, en vérité, je vous le dis… (v.19) tout ce que le Père fait, le Fils le fait également. » (v.20). Et là, le texte utilise le mot « homo » comme dans le mot « homogène » qui signifie que tous les éléments sont semblables ou équivalents. Ici, Jésus et Dieu sont équivalents.
    Ainsi, Jean passe de la similitude (v.17) à l’égalité (v.19) puis à l’identité (v.20) entre le Fils et le Père. Et c’est bien le message que l’évangéliste veut faire passer. Il y a identité entre le Fils et le Père.
    Cette identité, Jean l’affirme plus encore lorsqu’il écrit : « Celui qui n’honore pas le Fils, n’honore pas le Père qui l’a envoyé. » (v.23). Deux éléments dans cette phrase : a) il y a identité de culte entre le Père et le Fils, honorer égale rendre un culte ; b) la relation entre le Père et le Fils est marquée par cet envoi. 
    On trouve 41 fois dans l’Evangile selon Jean le concept que Jésus est envoyé par le Père ou que Jésus est celui que le Père a envoyé. Pour comprendre cette relation Père - Fils comme en parle Jean, il faut comprendre ce que signifiait, au temps de Jésus, cette notion d’Envoyé.
    Il faut penser à un roi qui envoie un ambassadeur. Un ambassadeur à qui le roi a expliqué la mission et donné plein pouvoir pour négocier. Lorsque cet ambassadeur arrive dans l’autre pays, il est reçu avec les honneurs qui sont dus, non à son rang propre, mais au rang du roi qui l’envoie. Si on veut honorer le roi, on honore son ambassadeur.
    Lorsque l’ambassadeur parle, il transmet la parole du roi qui l’envoie. Si l’ambassadeur signe un traité, sa signature à valeur de signature du roi. L’ambassadeur et le roi ne sont pas les mêmes personnes, mais ce que demande le roi, l’ambassadeur le transmet, et ce que décide l’ambassadeur engage le roi. Il y a donc différence de personnes, mais identité de vue et de pouvoir.
    C’est cette analogie que l’évangéliste Jean met en avant chaque fois qu’il répète (41 fois) que Jésus est celui que Dieu a envoyé. Ainsi, Jésus dit les paroles de son Père, il accomplit les œuvres du Père (v.17,19,36), il fait la volonté de son Père (v.30). C’est pourquoi honorer Jésus, c’est honorer celui qui l’a envoyé (v.23). C’est pourquoi croire en Jésus, c’est croire en celui qui l’a envoyé (v.24) et par là, recevoir la vraie vie.
    Comme envoyé dans le monde, comme ambassadeur du roi des cieux, Jésus accomplit l’œuvre de Dieu. L’évangéliste Jean découpe l’activité de l’envoyé en trois étapes.
    A. Une première étape qu’on trouve dans le prologue de l’Evangile selon Jean (Jn 1) où l’envoyé existe auprès de Dieu et pré-existe à sa mission.
    B. Une deuxième étape où le Fils accomplit l’œuvre de Dieu. On a vu qu’il l’accomplit par des signes (comme le signe de Cana ou des guérisons), des signes qui marquent la bienveillance de Dieu à l’égard des humains et la volonté de leur donner la vraie vie. Nous verrons encore dimanche prochain, à travers l’épisode du lavement des pieds, comment Jésus accomplit l’œuvre de Dieu.
    C. Enfin, la troisième étape est l’élévation de l’envoyé, élévation que nous verrons s’accomplir lors de la Passion de Jésus pendant la semaine sainte.
    Après les noces de Cana qui illustraient la vraie vie que Dieu veut offrir aux humains, après les marchands chassés du Temple qui illustrait comment Jésus fait table rase de la religion ancienne et enfermante, Jésus se présente comme celui qui a été envoyé par Dieu pour nous guérir de toutes les entraves qui nous empêchent de marcher à sa suite et qui nous empêchent de croire qu’il est bien celui que Dieu nous a envoyé. « Celui qui honore le Fils, honore le Père » (v.23) « celui qui écoute ma parole, dit Jésus, et qui croit en celui qui m’a envoyé, celui-là reçoit la vraie vie » (v24).
    L’évangéliste Jean montre donc à ses lecteurs, nous montre à nous, le chemin qui conduit à Dieu. En apprenant à connaître son Envoyé, le Christ, nous découvrons Dieu lui-même. En croyant en Jésus, nous recevons la vraie vie de Dieu.
    Amen
    © Jean-Marie Thévoz, 2014