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christianisme - Page 2

  • Genèse 26. Un puits, une pièce et des voeux de changement

    Genèse 26

    26.11.2000
    Un puits, une pièce et des voeux de changement

    Gn 26 : 12-25 + 32-33        Luc 15 : 8-10

    Il y a des jours... Il y a des jours, où l'on se sent complètement vide, sans ressort, sans énergie, sans élan.
    Il y a des jours... Il y a des jours, où tout semble gris, sans relief, tout semble bouché, on se sent piégé au fond d'un trou, au fond ... ? Au fond d'un puits qui a été comblé de terre. Le puits semble desséché, bouché, inutile.
    Il y a des événements dans la vie, des accidents, des ruptures, des séparations, des deuils qui mettent nos fontaines à sec, qui comblent nos puits, qui nous éloignent de nos sources.
    C'est l'histoire d'Isaac qui nous est racontée ce matin. Il a été béni de Dieu, il reçu tout ce qui peut combler un homme — ne se dit-on pas parfois : "n'ai-je pas tout pour être heureux ? N'ai-je pas tout pour être heureuse ?" — et pourtant, après la mort de son père, Abraham, Isaac découvre que les puits dont il a hérité ont été comblés. Il ne donnent plus d'eau. Ils sont secs.
    Chacune, chacun d'entre nous a reçu un puits, source d'eau vive, source d'énergie vitale, au fond de lui-même.
    L'évangile, en relisant l'Ancien Testament, affirme même que l'effigie de Dieu a été gravée en nous (Mt 22:21), comme est frappée sur chaque pièce d'argent l'effigie de celui qui émet la monnaie. Deux images pour dire une même réalité : le puits, source de vitalité; la pièce de monnaie : image de Dieu, source de tout amour, gravée au fond de nous.
    Une pièce et un puits. Un puits et une pièce. Ces deux mots ensemble me font immanquablement penser à ces lieux touristiques où les gens ne peuvent s'empêcher de jeter une pièce de monnaie dans le puits, la fontaine ou le bassin qui s'ouvre devant eux. Ils le font pour faire un voeu.
    Ce voeu que l'on ne dit pas à haute voix, mais dont on espère la réalisation, c'est l'espérance de quelque chose de nouveau dans notre vie, l'espérance d'un changement ou d'une délivrance. C'est le souhait de pouvoir commencer à creuser ce puits pour retrouver la source qui est toujours au fond, avec son eau, au fond de nous-mêmes, mais qui est temporairement inaccessible.
    C'est le souhait de descendre en soi — jetant derrière soi (hors du puits) tout ce qui nous encombre, tout ce qui nous fait mal, tout ce qui pèse sur nos épaules — regrets, remords, rancunes, révoltes — pour retrouver la pièce qui est au fond de nous.
    Il faut du temps pour désensabler le puits, pour le vider. Il faut du temps, mais ce n'est pas le temps qui creuse ! Souvenez-vous de la femme qui recherche sa pièce de monnaie. Elle allume une lampe pour y voir clair dans sa vie, elle prend un balai pour évacuer tout ce qui encombre et visite tous les recoins de son âme. Un vrai travail, mais un travail qu'on ne fait pas tout seul.
    Ce travail de recherche — autant du berger qui cherche sa centième brebis, que de la femme qui cherche sa pièce, ou du père qui cherche le contact avec ses deux fils (tous dans Luc 15) — c'est un travail que Dieu fait avec nous, que Dieu fait en nous.
    Le berger, la femme, le Père, Isaac, ce sont aussi bien des figures de Dieu qui cherche à retrouver et à redonner vie à notre être intérieur, que des images de nous-mêmes à la recherche de l'essentiel qui habite au fond de nous-mêmes.
    Cet essentiel qui habite au fond de nous-mêmes, nous savons qu'il est là, qu'il vit et qu'il n'aspire qu'à être découvert, à être exhumé et à reprendre vie pour devenir à nouveau source, source d'énergie dans notre existence.
    Cet essentiel — qui demeure au fond du puits qui nous a été donné — est une pièce de monnaie tout à fait exceptionnelle, telle qu'on n'en trouve dans aucune banque. Cette pièce a deux faces. Non pas un côté face avec un visage et un côté pile avec un nombre. Cette pièce a deux faces, deux visages.
    D'un côté, il y a notre propre visage, ce visage qui nous révèle mystérieusement, qui dit qui nous sommes, tels que nous sommes, visage humain et absolument unique, personnel, singulier, exceptionnel.
    De l'autre côté, il y a un autre visage, unique et humain, le visage que Dieu a pris en son fils unique, devenu pleinement humain en prenant sur lui la souffrance et les malheurs de nos existences.
    Deux visages si semblables sur une même pièce, enfouis au fond de nous-mêmes, en attente d'être retrouvés, réunis en un seul, réconciliés. Une réconciliation qui devient source de vie et de joie pour tous.
    Il y a des jours... Il y a des jours, où l'on peut tenir cette pièce dans la main et sentir la force qui émane de ces deux visages réunis.
    Il y a des jours... Il y a des jours, où l'on peut sentir l'apaisement et la joie d'avoir retrouvé l'essentiel en soi, la source d'eau vive et son propre visage qui se reflète dans celui de Dieu, au fond du puits, désensablé.
    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2007

     

    Selon une idée d'Origène :

    « Chacune de nos âmes contient un puits d'eau vive, il y a en elle (...) une image de Dieu enfouie. C'est ce puits que (...) les puissances adverses ont obstrué de terre. * (...) Mais maintenant qu'est venu notre Isaac (le Christ), accueillons son avènement et creusons nos puits, rejetons-en la terre (...) : nous trouverons en eux l'eau vive, cette eau dont le Seigneur dit : « Celui qui croit en moi, des fleuves d'eau vive jailliront de sa poitrine » (Jn 7:38). (...)
    Car il est là, le Verbe de Dieu, et son opération actuelle est d'écarter la terre de votre âme à chacun, pour faire jaillir votre source. Cette source est en vous, et ne vient pas du dehors, car « le Royaume de Dieu est en vous » (Lc 17:21). Ce n'est pas au dehors mais chez elle, que la femme qui avait perdu sa pièce de monnaie la retrouva : elle avait allumé sa lampe, elle avait balayé sa maison (...) et c'est là qu'elle retrouva sa pièce de monnaie. (Lc 15:8)
    Quant à vous, si vous allumez votre lampe, si vous vous servez de l'illumination du Saint-Esprit, si vous « voyez la lumière dans sa lumière » (Ps 36:10), vous trouverez la pièce de monnaie en vous. Car c'est en vous que se trouve l'image du roi céleste. Quand Dieu fit l'homme au commencement, il le fit à son image et ressemblance (Gn 1:26); et il n'imprima pas cette image à l'extérieur mais au-dedans de l'être humain. (...) Faites resplendir en vous maintenant « l'image de l'homme céleste ». (...) L'artisan de cette image est le Fils de Dieu. Artisan d'une telle valeur que son image peut bien être obscurcie par la négligence, mais non pas détruite par le mal. L'image de Dieu demeure toujours en toi. »

    * Origène fait allusion à Gn 26:15-25 : Isaac doit creuser une deuxième fois les puits creusés déjà par son père Abraham parce que les Philistins les avaient bouchés et comblés de terre.

    Homélie sur la Genèse XIII, 3-4, in Olivier Clément, Sources, Les mystiques chrétiens des origines, Stock, Paris, 1982, p. 118, trad. O. Clément.
    Extrait publié dans : Soyons l'âme du monde, Textes choisis des chrétiens des premiers siècles. Les Presses de Taizé, 1996, pp. 46-48

  • 1 Samuel 16. Dieu choisit celui qui a tendance à être exclu.

    1 Sam 16 : 4-13    8.11.98
    Dieu choisit celui qui a tendance à être exclu.       
    1 Sam 16 : 4-13    Ps 118 : 1-4 + 21-23    1 P 2 : 4-6


    Le roi Saül a fortement déplu à Dieu. Aussi, Dieu décide-t-il de préparer la succession de Saül. Il charge le prophète Samuel de désigner, d'oindre le futur roi. Étonnamment, Dieu n'annonce pas à Samuel le nom du futur roi, il lui dit seulement de quelle famille il fait partie. A Samuel de découvrir lequel des huit fils de Jessé Dieu s'est choisi !
    C'est ce processus de choix qui me semble important, porteur d'indications précieuses pour nous, pour réfléchir au thème de l'exclusion. Vous savez que le thème de la Campagne d'automne de l'EPER (entraide protestante) est le refus de l'exclusion : Exclu... c'est exclu !
    Dans notre vie quotidienne, nous sommes constamment confrontés à des situations où nous devons faire des choix. Et chaque fois que nous choisissons quelque chose, nous excluons autre chose. Le choix et l'exclusion vont de pair... Parler de l'exclusion, c'est aussi parler de nos choix et vice versa. On ne peut pas ne pas choisir (parce qu'on ne peut tout avoir), on ne peut donc pas non plus éviter d'exclure !
    Ce que nous avons à faire, c'est penser à nos critères de choix et d'exclusion. Pourquoi choisir ou exclure cela ? Quelles sont les conséquences de mes choix et de mes exclusions ? A première vue, lorsqu'il est question de produits, de marchandises, cela n'a pas beaucoup d'importance. Sauf lorsqu'on se met à penser à qui les produit, qui est derrière les marchandises que nous consommons, de quelle façon sont-elles  fabriquées ?
    En effet, la question du choix et de l'exclusion se manifeste de manière plus vive, plus cruciale lorsqu'il s'agit de personnes. Et ce sont bien les personnes que vise la Campagne de l'EPER.
    Revenons donc à Samuel qui doit exécuter le choix de Dieu. Il prépare une cérémonie pour oindre le nouveau roi et il invite tous les fils de Jessé. Au premier coup d'oeil, il repère l'aîné, Eliab. Voilà un garçon brillant, un homme bien fait, il a belle allure, il ferait un roi plein de prestance ! Ce doit être lui, se dit Samuel. Mais Dieu lui souffle que non. Et tous les fils de Jessé présents défilent. Mais le futur roi n'est pas parmi eux. Surprise, panique... Y en a-t-il un autre ? Oui, il y en a bien encore un, mais il est aux champs. C'est le petit dernier... on y a pas pensé... il est encore jeune... un peu rêveur... musicien...
    Pourquoi David est-il aux champs ? Pourquoi n'est-il pas présent, alors que toute la famille avait été appelée à participer à cette cérémonie. Je vois deux réponses possibles :
    1) David n'a tout simplement pas reçu le message, l'invitation. Personne ne pensait que ce petit ("ce petit prétentieux, cet espèce de vaurien" dira Eliab, le frère aîné au chapitre suivant : 1 S 17:28) méritait d'être invité à cette cérémonie d'adultes. Samuel est venu chercher quelqu'un pour une mission d'importance. Aux yeux de la famille, cela ne pouvait pas concerner David. Il a été exclu d'office, automatiquement par sa famille. "Tiens on n'avait pas pensé à toi !", "Tu es trop petit, toi!". Voilà des paroles d'exclusion qui peuvent faire mal.
    2) David a reçu le message, il a entendu, comme les autres que Samuel cherchait quelqu'un pour une mission importante, mais il a pensé : "cela ne peut pas me concerner, moi !","je suis trop petit, trop jeune, ou trop inexpérimenté". David a intériorisé le message familial, au point que plus personne n'a besoin de lui dire quoi que ce soit : le message s'imprime tout seul.
    David, ou vous, ou moi, s'exclut par lui-même, parce qu'il n'a pas confiance en lui-même, parce qu'il n'est pas conscient de sa valeur. De quand date la dernière confirmation de sa valeur qu'il ait reçue ?
    Que ce soit par une exclusion extérieure ou intérieure, David est d'abord absent, exclu. Mais le voeu de Dieu, c'est qu'on l'envoie chercher. En effet, celui que tout le monde écartait, c'est celui que Dieu s'est choisi.

    "La pierre que les bâtisseurs avaient écartée est devenue (par la volonté de Dieu) la pierre principale" (Ps 118:22)
    Celui qui allait être écarté, c'est celui qui va recevoir l'onction, qui va être oint. Ce terme "oint" se dit CHRIST en grec. Jésus le Christ, fils de David est celui qui a été rejeté par tous sur la croix, mais que Dieu s'est mystérieusement choisi pour se révéler.
    Dieu ne suit donc pas les modes, les apparences comme les hommes. En effet, Dieu dit à Samuel:

    "Je ne juge pas de la même manière que les hommes; les hommes s'arrêtent aux apparences, mais moi je vais jusqu'au fond des coeurs." (1 S 16:7)
    Dieu nous regarde au-delà de nos façades, de nos masques, des attitudes que nous nous donnons. Il voit jusqu'au fond de nous-mêmes et il voit ce qu'il y a de plus humain en nous, de plus aimable en nous.
    C'est ainsi qu'il peut faire d'Israël son peuple, des habitants de Villars-Ste-Croix et Bussigny son Eglise. Dieu ne rassemble pas ceux qui semblent les meilleurs, les plus talentueux, les plus qualifiés comme le ferait un patron d'entreprise. Non, Dieu va chercher ceux qui n'ont pas été désirés, ceux qui ont été mis de côté, exclus d'office, pour les rassembler et en faire son peuple, parce qu'il sait qu'en chacun de nous il y a un être de valeur qui va pouvoir déployer ses talents comme David contre Goliath.
    Ayant été rappelés des champs pour devenir des rois, comme David, nous pouvons à notre tour regarder toute personne avec un nouveau regard — qui vient de Dieu — qui embrasse tout le monde, et voir en chacun un être digne de valeur et pleinement aimable.
    La Campagne de l'EPER — Exclu... c'est exclu ! — nous invite à adopter le même regard que Dieu, le regard de l'inclusion, de l'accueil afin que l'oublié, le rejeté ait une vraie place parmi nous.
    Amen
    © 2007, Jean-Marie Thévoz

  • Luc 14. Nous n'avons pas à gagner notre place dans la vie, elle nous est donnée.

    Luc 14    23.9.2007
    Nous n'avons pas à gagner notre place dans la vie, elle nous est donnée.
    Jn 13:33-35    Luc 14:15-22

    Chers catéchumènes, chers parents, chers paroissiens,
    Je suis heureux de vous voir rassemblés dans cette église. Vous avez répondu à notre invitation de commencer le catéchisme par ce culte et de la prolonger par un repas. Nous sommes en train de vivre la parabole que Jésus a racontée et que nous venons d'entendre.
    En juin, j'ai envoyé 104 invitations à participer au catéchisme et aujourd'hui, vous êtes 26 à être là pour le commencer. Sur quatre envois, j'ai reçu trois refus et une acceptation, comme dans la parabole. Mais je ne vais pas m'attarder sur les excuses de ceux qui ne voulaient pas venir. Nous sommes-là pour nous réjouir avec vous qui avez répondu positivement à cette invitation !
    Cette parabole de Jésus nous parle de la vie et de la réalité, de la vie réelle, de celle que nous vivons. Mais en nous parlant de la vie, Jésus veut aussi nous parler de Dieu et de la place qu'il occupe dans la vie et dans notre vie.
    Jésus compare le Royaume de Dieu à une invitation à un festin. D'abord, c'est quoi le Royaume de Dieu ? Le Royaume de Dieu, c'est une façon de parler de l'univers tel que Dieu le souhaite. C'est le monde dans lequel Dieu voudrait que l'on puisse vivre. Ce n'est pas un monde virtuel comme Second Life, ce n'est pas non plus le paradis qui ne se trouverait qu'après la mort. C'est un monde à l'intérieur de notre monde présent, un espace où on essaie de vivre avec d'autres règles et codes que dans le monde que nous voyons. 
    Comment fonctionne le monde autour de nous ? Souvent comme la jungle, c'est la loi du plus fort. Un monde dur, où il faut se faire sa place, se bagarrer, se vendre, lutter pour qu'on ne nous marche pas sur les pieds ou qu'on nous respecte. Un monde où l'on doit faire ses preuves, faire de bons résultats, de bonnes notes, réussir, être plus forts ou meilleurs que les autres. Un monde où il faut faire gagner son équipe. Qu'est-ce qu'il est exigeant !
    Qu'est-ce que c'est difficile d'être à la hauteur de ce qu'on attend de nous ! On peut même avoir l'impression qu'on ne nous pardonnera pas nos erreurs, nos faiblesses, nos défaillances. Il faut gagner ou passer pour un looser.
    En même temps, ce monde nous montre plein de trucs pour réussir et être heureux. Il faut porter telle marque de vêtements pour plaire aux copains, il faut avoir le dernier natel ou X-box pour se faire remarquer par les autres et ne pas passer pour un nul. Il faut se faire belle, essayer le maquillage avant les autres copines, porter le T-shirt le plus petit possible, écouter la bonne musique pour être acceptée par les autres. Et encore, ce n'est pas gagné d'avance parce que la mode change d'un jour à l'autre…
    Cette vie-là, ça ressemble à un jeu de Super-Mario : il faut attraper tous les bonus possibles et surmonter tous les obstacles pour réussir, sinon on perd sa vie.
    L'idée principale de ce monde, c'est que vous partez sans rien dans la vie et qu'il faut tout gagner au fur et à mesure.
    L'idée principale dans le monde de Dieu, au contraire, c'est que Dieu nous a entièrement équipé au départ et que ce que vous avez, vous ne pouvez ni le perdre, ni vous le faire voler.

    C'est difficile à croire puisqu'on naît tout nu, tout fragile et complètement dépendant de ses parents. Mais le bébé : il vit et il a déjà la force de la vie en lui. Les parents sont là pour l'aider à développer ce qui est déjà en lui : la confiance dans la vie. Chacun naît avec toute l'estime de soi dont il a besoin pendant toute sa vie.
    Bien sûr, il arrive — presque toujours — que cette estime de soi, elle se couvre de poussière au cours du temps. Elle est là, mais on doit la déterrer, la dépoussiérer, la retrouver au fond de soi-même.
    Cette estime de soi, elle est dans l'invitation que Dieu nous a donnée. Dieu nous invite à nous servir de cette confiance qu'il nous fait, de cette estime de soi qu'il nous a donnée pour profiter du festin de la vie.
    Mais beaucoup ne s'en servent pas. Ils trouvent d'autres choses à faire. Ils oublient que la vie est un festin à croquer et ils s'emploient à faire toutes sortes de choses pour gagner ce qu'ils ont déjà en eux-mêmes, sans le savoir.
    Nous avons tous reçu l'invitation : Vis ta vie. Mais beaucoup n'en font rien. Ils restent passifs devant la vie, ils font ce qu'on leur demande de faire, sans chercher quel sens a la vie. Mais quelques-uns deviennent actifs et cherchent à répondre à cette invitation, à prendre leur vie en main, à chercher le sens de la vie et le sens qu'ils peuvent donner à leur propre vie.
    En nous donnant cette invitation, cette vie, Dieu nous dit : "Tu n'as pas besoin de gagner cette vie, tu n'as pas besoin de prouver — à toi ou aux autres — que tu la mérites : je te la donne, tu l'as, elle est à toi." "Tu es déjà aimé" et tu n'a rien à faire de plus pour exister, pour te faire valoir. Voilà l'idée fondamentale du monde de Dieu.
    Après cela, comme on n'a plus à se préoccuper de se faire accepter, on a de l'énergie pour se tourner vers les autres, pour les aimer. C'est pourquoi Jésus nous a dit "aimez-vous les uns les autres, comme je vous ai aimés." Cela devient possible, parce que nous n'avons pas besoin de gagner l'amour des autres, il nous est déjà donné.
    C'est à la découverte de cet amour, de cette liberté que vous allez vous engager dans le catéchisme. Peut-être que quelques parents suivront ce chemin en parallèle. Jésus ne disait-il pas à la fin de sa parabole, après avoir été chercher de nouveaux participants à son festin : "il y a encore de la place…"
    Amen
    @ Jean-Marie Thévoz, 2007

  • 1 Corinthiens 10. Un choix à faire

    1 Co 10

    26.9.1999
    Ouverture du catéchisme : Un choix à faire
    2 Rois 4 : 38-41    1 Co 10 : 23-26    Mt 13 : 47-48

    Chers catéchumènes, chers parents, Chères paroissiennes, chers paroissiens,
    Vous êtes plutôt : Swisscom ou Sunrise. Nokia ou Panasonic. PDC ou radical. Cardinal ou Campari. Yes or No ? Voilà les choix que nous proposent les affiches publicitaires qu'on voit maintenant dans nos rues.
    Combien de choix sommes-nous appelés à faire tous les jours ? Des petits choix qui ne portent pas à conséquences, jusqu'à des choix qui nous engagent, certains choix pour l'existence entière... Nous vivons dans une société du choix, dans une société où il faut constamment choisir. Et nous voulons du choix, nous préférons la carte au menu. Ne voyons pas cela sous un angle négatif, cela nous donne du pouvoir, une possibilité d'exercer notre liberté.
    Le problème, c'est aussi que les choix deviennent de plus en plus complexes : que choisir ? Vous voulez plutôt du boeuf ou du poulet pour midi ? 
    "La soupe est empoisonnée" crient les convives autour de la marmite du prophète (2 R 4: 40). Voilà, en ce temps lointain, la famine régnait dans ce pays. Un homme a été chargé de faire à manger. Alors, il est parti dans la campagne, voir ce qu'il pourrait trouver à manger. La première chose qui ressemblait à un légume lui a convenu. Il en a fait son menu.
    Choisir comporte donc aussi des risques. Celui qui va à la cueillette des champignons les soumet à un spécialiste avant de les manger. Le tri de ce qui est bon ou mauvais pour nous est essentiel. Nous commençons à regarder de près ce que nous mettons dans notre assiette, et par les temps qui courent cela vaut mieux, même si c'est plutôt difficile avec le peu d'informations qu'on nous donne. Nous contrôlons aussi bien que faire se peut le contenu de notre assiette.
    Mettons-nous la même attention à vérifier ce que notre cerveau avale ? Ce qui nourrit notre esprit ou notre âme ? Nous avons vu qu'à la source de la vache folle et du poulet à la dioxine, il y avait une course effrénée au profit, sans égard pour les consommateurs. En est-il différemment avec la publicité, avec les films ou les idéologies qui nous matraquent, dans la rue ou sur nos écrans ?
    Mon idée n'est pas qu'il faudrait commencer à censurer, à interdire, etc. Par contre, il est urgent de réfléchir à notre façon de choisir et peut-être même : apprendre à faire des choix.
    *    *    *
    Le christianisme est une religion de la liberté. Cela a commencé avec la liberté des personnes dans le judaïsme, avec la libération des hébreux et la sortie d'Egypte. Ceux qui ont vu le film "Le prince d'Egypte" voient de quoi je parle. Cette libération s'est accompagnée du don de la loi, comme mode d'emploi et de sauvegarde de cette liberté. La loi énonce en premier lieu des repères pour que je sois protégé. Ainsi, l'interdit de tuer est d'abord l'interdit vis-à-vis des autres de me tuer, donc le droit de vivre pour exercer ma liberté. Ensuite, la réciproque est évidente.
    Vous avez entendu l'apôtre Paul dire "Tout est permis, mais tout n'est pas utile, tout n'est pas constructif" (1 Co 10:23) C'est une liberté énorme que donne Paul dans un monde plein de tabou, notamment alimentaires. Le but de la loi n'est pas l'obéissance à la loi, mais le respect de tout humain. C'est un bouleversement dans le monde gréco-romain où les limites étaient les dieux, de placer l'être humain au centre. Aujourd'hui aussi c'est un bouleversement sérieux de dire : c'est le respect de l'être humain qui doit être le repère central de toute activité humaine. On est plus habitué à entendre parler des contraintes de l'économie, de la concurrence, de la survie de l'entreprise, au point qu'on place ces contraintes au-dessus du sort de l'être humain.
    *    *    *
    Chers catéchumènes,
    Vous entrez dans l'adolescence, un âge où l'on est confronté à de nombreux changements et à de nombreux choix. Vous allez devoir trier parmi tout ce que le monde vous propose. Vous allez réaliser que toutes les propositions ne sont pas offertes dans votre intérêt, mais visent d'autres intérêts que les vôtres. Vous pouvez vous préparer, apprendre à faire ces choix, comme un spécialiste apprend à distinguer les champignons qui se mangent de ceux qui empoisonnent. Vous pouvez vous préparer en faisant un premier choix qui guidera les choix suivants. Ce premier choix, c'est : vais-je construire ma vie avec ou sans Dieu ? Vais-je construire ma vie avec les repères, le soutien et l'amour que Dieu donne ou vais-je construire ma vie seul, selon mes intuitions, en créant ma propre loi.
    Vous allez commencer le catéchisme pour découvrir cette offre de Dieu de construire une vie avec lui pour guide et compagnon. Je suis réaliste, ce n'est pas la seule proposition de style de vie que vous recevez, mais j'espère que ce temps de catéchisme vous permettra de collecter suffisamment d'informations pour faire votre choix, un choix libre et informé.
    Depuis votre naissance, il y a une place pour vous, — une place réservée — dans le coeur de Dieu. Il a des projets de bonheur et de vie heureuse pour vous. Profitez de ce temps de catéchisme pour venir à sa rencontre, à sa découverte et enraciner votre vie dans du solide.
    Amen
    © Jean-Marie Thévoz, 2007

  • Matthieu 13. N'arrachez pas l'ivraie de peur que vous ne déraciniez le blé avec elle

    Matthieu 13

    20.9.98
    N'arrachez pas l'ivraie de peur que vous ne déraciniez le blé avec elle       
    Célébration oécuménique

    Rom 14 : 1-8    Mt 13 : 24-30


    Frères et soeurs en Christ,
    Vous avez entendu cette parabole que Jésus a raconté pour enseigner ses disciples. Quel titre lui donnez-vous ? Formulez le titre dans votre tête et retenez-le ! Vous y êtes ? Les deux titres les plus probables sont : "le bon grain et l'ivraie" ou "l'ivraie et le bon grain". L'ordre qu'on a choisi dans sa tête peut révéler notre optimisme ou notre pessimisme sur le monde.
    Le mal était-il là dès le commencement du monde ? = "l'ivraie et le bon grain" ou n'est-il que second dans le monde ? = "le bon grain et l'ivraie". Jésus dans sa parabole établit un ordre très important. En premier, le maître sème du bon grain, ensuite vient en cachette, de nuit, l'ennemi qui sème l'ivraie. Finalement, après la moisson le bon grain est engrangé alors que l'ivraie est brûlée.
    La séquence est donc : bon grain — ivraie — bon grain. Le mal n'est là ni au début, ni à la fin, il n'est ni l'alpha, ni l'oméga, seul le Christ est l'alpha et l'oméga. Le mal n'est là que comme une parenthèse encadrée, limitée par Dieu.
    Le problème, c'est que nous vivons dans cette parenthèse et qu'il est difficile de la considérer comme peu de chose. Il est donc normal de prendre le mal au sérieux. Mais le risque est de ne voir que lui, de se laisser submerger et de perdre espoir... ou de se voir investi de la mission d'éradiquer le mal. C'est la première idée des serviteurs : "Veux-tu que nous allions l'arracher ?" (Mt 13:28). Et là Jésus nous livre la vision que Dieu a du monde: "Non, de peur qu'en ramassant l'ivraie vous ne déraciniez le blé avec elle" (Mt 13:29).
    Dieu interdit tout tri par les humains, pendant le temps présent. Ce sera un travail qu'il confiera à d'autres : "les moissonneurs", "à la fin des temps". Maintenant, ce n'est pas notre travail, nous ne sommes pas équipés pour cela. "Ne croyons pas disposer du désherbant que Dieu lui-même n'a pas voulu employer" (Alphonse Maillot).
    Je pense que cette parabole peut être lue à trois niveaux.
    1) Elle exprime, en condensé, l'histoire du monde, l'histoire du salut. La création est bonne, le mal s'est glissé mystérieusement dans le monde, comme un ennemi, et il est là maintenant. Il est intimement entremêlé au bien. L'être humain est incapable de faire le tri. Ce tri est réservé à Dieu. Le mal rencontré est un mélange de mal commis et de mal subi dont personne n'est entièrement à l'origine. Le mal ne vient pas forcément de l'homme. L'être humain n'est pas responsable de tout le mal qui arrive, il y a une part mystérieuse qui nous échappe. En conséquence, la vertu ou la bonne conduite des hommes ne sauvera pas le monde.
    2) Le deuxième niveau est celui des institutions. Toute institution humaine est un champ où le bon grain et l'ivraie sont mêlés. Aucune ne peut se proclamer pure et juger sa voisine, aucune ne peut faire le tri dans ses membres. L'apôtre Paul nous donne de bons conseils lorsqu'il nous dit : "Que celui qui mange de tout ne méprise pas celui qui ne mange pas de tout, car Dieu l'a accueilli" (Rom 14:3). L'unité ne se fait pas par l'uniformité des pratiques, mais par la référence au seul Dieu qui accueille chacun. Chacun a de bonnes raisons personnelles d'agir comme il le fait.

    3) Le troisième niveau est celui des personnes, de soi-même. Acceptons que le bon et le moins bon est mélangé en nous-mêmes. Nous sommes nés dans un monde où nous n'avons pas reçu que du bon. Nous avons aussi été touchés par des événements qui nous ont fait du mal et dont nous souffrons. Il ne nous est pas demandé d'arracher cela et de le jeter loin. C'est le travail de la grâce de Dieu, au temps voulu par lui. Mais il nous promet la guérison de ces blessures.
    Le bon grain et l'ivraie sont mélangés également chez ceux qu'on côtoie, et là, je pense que nous sommes appelés à recevoir et appliquer le même regard que Dieu. Cherchons à voir chez chacun le bon grain qui est en lui et laissons Dieu s'occuper de l'ivraie.
    C'est fou ce que notre attitude envers quelqu'un peut être transformée lorsque nous sommes persuadés qu'il y a quelque chose d'aimable en lui, en elle, que je suis appelé à découvrir.
    Il y a en chacun, en chacun de vous, en chacun des membres de votre famille, chez vos collègues, etc., une semence merveilleuse qui développe son fruit et que Dieu connaît déjà. Cet être précieux, Dieu veille dessus, c'est pourquoi il interdit qu'on désherbe, qu'on éradique, qu'on exclue, de peur que cet être soit touché aussi.
    Regardez le monde, les institutions, les personnes avec les yeux de Dieu. Libérez-vous du rôle du juge qui doit opérer le tri (c'est l'oeuvre que Dieu confiera aux moissonneurs). Concentrez-vous sur le bon, le bien, le beau. Regardez les gens pour trouver le trésor qui est en chacun et pour découvrir en votre prochain la présence même de Dieu.
    Amen
    © Jean-Marie Thévoz, 2007

  • Matthieu 18. "Devenez comme des enfants !"

    Matthieu 18

    13.9.98
    "Devenez comme des enfants !"       
    Mt 7 : 7-12    Mt 18 : 1-5


    Chères paroissiennes, chers paroissiens,
    Aujourd'hui, nous accueillons des enfants qui vont commencer ou poursuivre le culte de l'enfance. Pour certains, c'est peut-être un peu nouveau de se trouver dans cette église. Il y a beaucoup de choses à découvrir dans une église. Ce matin, j'aimerais attirer votre attention sur les deux vitraux que vous pouvez voir. (Dialogue avec les enfants sur ce qu'ils voient). Le vitrail de gauche montre une scène de la parabole du fils prodigue, lorsque le père accueille son fils à bras ouverts. Sur celui de droite, on voit Jésus qui bénit des petits enfants que leurs mères lui présentent. Les évangiles soulignent à quel point Jésus se souciait des enfants.
    Dans le récit que vous venez d'entendre, c'est à un enfant que Jésus fait appel lorsque ses disciples se disputaient entre eux pour savoir qui était le plus grand. Pour régler leur dispute, ils se tournent vers Jésus. Ils espèrent probablement qu'il va les départager. "Qui est le plus grand dans le Royaume de Dieu ?", ce qui signifie : qui est le plus grand aux yeux de Dieu ?
    Jésus ne tombe pas dans le piège de désigner l'un ou l'autre de ses disciples. Cela risquerait de créer une bagarre ou de diviser le groupe.
    Jésus, alors, appelle un enfant et le place au milieu d'eux et il leur dit de changer leur état d'esprit pour devenir comme un enfant. Alors Dieu les accueillera tous.
    Jésus ne fait pas un calcul de grandeur ou de quantité. Il ne fait pas de comparaison des qualités et des défauts de chacun. Dieu ne fait pas ces calculs, cette comptabilité. Dieu regarde ce qu'il y a dans notre coeur. Dieu regarde notre attitude fondamentale, notre être profond. Il cherche l'enfant en nous.
    "Devenez comme des enfants !" Qu'est-ce que cela veut dire ? Jésus avait déjà dit la même chose à Nicodème qui lui avait répondu  qu'il ne pouvait pas retourner dans le ventre de sa mère ! Nous tous, adultes, nous nous sentons investis de responsabilités, nous ne pouvons pas les abandonner pour redevenir insouciants comme des enfants ! Nous avons un travail, nous ne pouvons pas aller jouer ! Nous faisons des choses sérieuses et importantes, nous ne pouvons retourner à la sieste !
    Et puis, qu'est-ce que l'enfant a que nous n'ayons pas ? N'avons-nous pas l'impression que c'est quand même mieux d'être adulte que d'être enfant ? Ne disons-nous pas à nos enfants : "Quand tu seras grand alors tu pourras..." L'enfance ne serait que le chemin qui mène au but : être grand, responsable, travailleur...
    Jésus, cependant, pense autrement ! Il y a dans l'enfance une qualité que l'adulte doit retrouver pour "entrer dans le Royaume de Dieu" comme dit Jésus. Dans notre recherche de cette qualité, on peut écarter tout ce qui paraît faire de l'enfance, un âge d'or, c'est un mythe de ce XXe siècle.
    En fait, c'est un travail énorme de grandir, de découvrir le monde, d'être confronté à l'inconnu, d'être si petit dans un monde si grand, d'être si dépendant de ses parents. L'enfant, c'est celui qui n'a pas le pouvoir. Pas le pouvoir de répliquer au mal, de se défendre adéquatement, de trier le vrai du faux dans ce qu'on lui dit.
    L'enfance peut être très heureuse dans son ensemble, mais elle est tout de même parsemée de situations difficiles et blessantes. Ainsi, personne ne sort-il intact de son enfance pour vivre sa vie d'adulte. Cette vie d'adulte est marquée par ces blessures qui restent souvent profondément enfouies et méconnues. Ces blessures conditionnent souvent longtemps nos comportements relationnels.

    Aussi Jésus nous invite-t-il à retrouver en nous notre être d'enfant, ce qui consiste en deux choses :
    1) reconnaître comment l'enfant en nous a été blessé, pour le guérir
    2) reprendre contact avec l'enfant créatif et plein d'énergie qui se cache derrière l'enfant blessé.
    Bien sûr, sous le terme "enfant" on parle de l'Etre fondamental qui nous habite et que nous sommes. Retrouver cet Etre véritable qui est en nous-mêmes, c'est retrouver la clé du Royaume de Dieu, comme le promet Jésus. Et si on lit attentivement le dernier verset de ce récit (Mat. 18:5) "Celui qui reçoit cet enfant, me reçoit moi-même", on constate que Jésus s'identifie même avec cet enfant en même temps blessé et créateur de vie. Cela est tout à fait analogue à sa destinée. Ce Jésus crucifié, c'est celui que Dieu a ressuscité. Cet enfant (blessé) en nous, c'est celui qui ressuscite aussi en nous lorsque nous reconnaissons sa souffrance et sa parenté avec nous.
    Ce Dieu qui ressuscite Jésus est le Père qui fait vivre son Fils. La relation que nous avons au Père, n'est pas une infantilisation de l'être humain. C'est une relation nourricière. Dieu est ce Père qui fait revivre en nous l'enfant, qui en prend soin, qui l'entoure de sa tendresse. Comme le père du fils prodigue et comme Jésus qui accueille tous les enfants que l'on voit sur les vitraux de cette église de Bussigny.
    Amen
    © Jean-Marie Thévoz, 2007

  • Jean 15. Donner de l'amour — pas n'importe lequel — à nos enfants

    Jean 15

    2.9.2007
    Donner de l'amour — pas n'importe lequel — à nos enfants
    Ga 5 : 22-26    Jn 15 : 9-13


    Chères familles, chères paroissiennes, chers paroissiens,
    Ces baptêmes ont été accompagnés et nourris d'une part d'un texte sur l'amour entre parents et enfants / enfants et parents et d'autre part par un verset biblique choisi pour E. : "Le fruit de l'Esprit est : amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, fidélité, douceur et maîtrise de soi." (Ga 5:22-23)
    Personne ne s'étonne que l'amour soit au cœur de la relation parents-enfants (en tout cas tant que les enfants sont petits). L'amour est aussi au centre de la relation entre Dieu et les êtres humains. Le christianisme est entièrement centré sur la notion d'amour, un amour qui circule entre Dieu et Jésus, un amour que Dieu éprouve pour tous les humains. Un amour que Dieu met au centre de ses commandements : "Tu aimeras le Seigneur ton Dieu" (Dt 6:5); "Aime ton prochain comme toi-même" (Luc 10:27); "Aimez-vous les uns les autres, comme je vous aime" (Jn 15:12); "Dieu est amour" (1 Jn 4:8); "Le fruit de l'Esprit, c'est l'amour…" (Ga5:22).
    Et pourtant à voir comment va le monde, on ne peut pas dire que l'amour soit au centre, soit le moteur de nos comportements ! En fait, l'amour est bien plus difficile à vivre qu'on ne le pense. En fait, une multitude de comportements se travestissent derrière ce vocabulaire.
    Il y a des "je t'aime" qui veulent dire "aime-moi" aussi bien que "je vais te dévorer." Il y a les "si tu m'aimais vraiment, alors…" — je vous laisse compléter la phrase — qui ne sont que des formes de chantage ou de manipulation. Il y a des "j'aimerais être aimé(e)" paralysé par la peur. Il y a des "on ne peut pas m'aimer" découragés voir désespérés.
    Combien de personnes ne peuvent pas se laisser aimer ? Le mécanisme est souvent assez simple, mais très retort : La personne est sûre qu'elle a un défaut intérieur qui la rend impossible à aimer. Celui qui lui dirait "je t'aime" ne peut pas être cru ou crédible tant qu'il ne connaît pas ce redoutable défaut. Mais celui qui le connaîtrait ne pourrait définitivement plus l'aimer. Mieux vaut donc refuser d'être aimé(e) plutôt que dévoiler son secret.
    L'amour commence donc par l'acceptation de soi-même, l'acceptation de la possibilité d'être aimable, puis l'acceptation d'être effectivement aimable puisque déjà aimé. C'est ce que Dieu nous affirme (et nous rappelle dans le baptême) : je t'aime avant que tu en sois conscient.
    Se savoir aimé ouvre les portes à aimer les autres. Aimer ceux qu'on trouve aimables dans un premier temps. Puis — c'est une grande étape sur le chemin de la sagesse et de la croissance personnelle, trouver aimables ceux que l'on croise dans la vie, de sorte à pouvoir aimer tout le monde… Mais peut-on aimer tout le monde ? (C'est ce dont nous parle la parabole du bon samaritain, Luc 10).
    Là, il est important de regarder un peu le vocabulaire. Notre langue française est assez pauvre. On dit aussi bien "aimer son conjoint" que "aimer la salade" ce qui embrouille les choses. La langue du Nouveau Testament, le grec, connaît trois mots principaux pour dire "amour."
    Le premier mot est "eros" qui veut dire désirer, désirer prendre, désirer s'accaparer, posséder. C'est l'amour possessif, autant celui de l'avare que celui de l'amant.
    Le deuxième est "philo" qui est l'attachement émotionnel, l'amour-affinité, l'amitié, l'intérêt pour quelque chose. C'est un amour où l'on partage un même goût. Vous connaissez les philatélistes qui collectionnent les timbres-poste, les colombophiles qui élèvent des pigeons ou la philosophie qui est l'amour de la sagesse ou de la pensée.
    Enfin, le terme le plus fréquent dans le Nouveau Testament est le mot "agapè" qui est l'amour altruiste, c'est-à-dire l'élan vers l'autre pour répondre à ses besoins à lui. L'amour qui fait grandir l'autre, qui donne de l'espace à l'autre, qui lui permet de devenir lui-même.
    La Bible reconnaît l'existence de ces trois formes d'amour, elle n'en disqualifie aucune, mais elle nous avertit que ces trois formes d'amour n'ont pas les mêmes destinataires, ni les mêmes rôles, ni les mêmes origines.
    L'amour-désir est destiné au conjoint et ne doit pas être dirigé vers ses enfants, cela mènerait à l'inceste.
    L'amour-affinité intervient quand les parents jouent à des jeux avec leurs enfants. Et il faut de la complicité et de la joie dans les relations parents-enfants, mais pas seulement.
    L'amour nécessaire dans l'éducation, c'est de l'amour-agapè, c'est-à-dire la préoccupation prioritaire du développement de l'enfant. Si le parent qui doit dire "non" à l'enfant pour parer à un danger a peur de ne plus être aimé de son enfant et renonce, ce parent veille à son bien être personnel et pas à celui de l'enfant. Il ne l'aime par pour lui-même, mais pour soi, pour ce qu'il reçoit de son enfant, il est dans l'amour-affinité, pas dans un amour altruiste et nuit à son enfant.
    Lorsque Jésus dit : "Je vous aime comme le Père m'aime" puis "aimez-vous les uns les autres comme je vous aime" il décrit la juste circulation de l'amour qui est celui de la cascade d'eau dans la fontaine romaine. L'eau de la vasque supérieure s'écoule dans la vasque intermédiaire puis dans le bassin.
    C'est aux parents qu'il revient de donner de l'amour à leurs enfants. Si les parents ont besoin d'amour, ce qui est bien compréhensible, ils ont à le chercher en dessus d'eux-mêmes, chez leurs parents ou auprès du Père qui est dans le ciel.
    Qu'en est-il de l'origine de ces formes d'amour ? Si l'amour-désir est le fruit du corps, de la pulsion de survie, si l'amour-affinité est le fruit du cœur, de l'élan social, l'amour-agapè est le fruit de Dieu, le fruit de l'Esprit et répond à une aspiration spirituelle.
    Dans son langage imagé, Jésus avait dit, dans l'Evangile de Jean, avant le passage que nous avons entendu sur l'amour : "Je suis le cep et vous êtes les sarments" (Jn 15:5). Une façon de nous dire que nous avons besoin d'être reliés à la sève de la vie pour donner la vie à nos enfants, d'être reliés à la source de l'amour, pour donner à nos enfants cet amour qui fait grandir.
    Ne laissons pas dépendre notre vie et notre amour de la pluie et du beau temps, plaçons-nous sous la cascade de l'amour de Dieu pour que notre fontaine soit abondamment alimentée et que cet amour puisse rejaillir sur nos enfants. De cette façon, ils pourront grandir et s'émerveiller de la beauté de la vie.
    Amen
    © Jean-Marie Thévoz, 2007

  • Jean 6. Jésus appelle la foule qui cherche du pain à chercher à "être" plus qu'à "faire".

    Jean 6

    1.9.2002
    Jésus appelle la foule qui cherche du pain à chercher à "être" plus qu'à "faire".
    Es 55 : 1-4    Rm 12 : 9-18    Jn 6 : 22-29

    La foule qui a été nourrie de pains et de poissons par Jésus se met à sa recherche, le lendemain. Peut-être — pense-t-elle — y a-t-il occasion, en le retrouvant, d'être à nouveau nourrie gratuitement. Alors la foule cherche Jésus. Mais Jésus est parti après ses disciples sur l'autre rive du lac. La foule cherche Jésus et cherche à savoir comment il a pu passer sur l'autre rive.
    Ce récit illustre la recherche des humains. Dans notre vie, ne sommes-nous pas tous à la recherche de quelque chose ? Que recherchons-nous — au fond — dans la vie ? Notre quotidien est plein de petites recherches — aussi nécessaires qu'envahissantes ! Comme la foule, nous nous demandons : "Qu'allons-nous manger ?" Pas tellement : " Aurons-nous à manger ?" que "Qu'y aura-t-il ou que mettre au menu ?"
    Nous avons aussi d'autres recherches : Comment avancer dans son travail ? Qui inviter chez soi ? Que faire tel soir pour s'occuper ? Que cherchons-nous lorsque nous allumons la TV, ou choisissons une vidéo à louer ?
    En quoi notre choix contribue-t-il à nous rendre heureux, à nous satisfaire ? Est-ce que cela nous satisfait d'ailleurs ou est-ce que cela nous divertit juste un moment de nos soucis ? Je ne cherche pas à poser des jugements sur telle ou telle activité, je m'interroge aussi moi-même sur mes choix, sur mes occupations, ce que j'y cherche et ce que j'y trouve ! De temps en temps quelque chose vient remplir une de nos aspirations, nous avons trouvé quelque chose qui nous fait du bien et nous essayons de ne pas la perdre, de la rechercher davantage.
    La foule avait tout à coup trouvé une satisfaction dans le pain reçu de Jésus et essaie de le suivre, de ne pas le perdre. Mais voilà qu'il a disparu. Les gens mènent l'enquête et finissent par le retrouver de l'autre côté du lac. "Mais où étais-tu passé ? Comment es-tu arrivé là ?" demandent les gens à Jésus.
    Ils se rendent bien compte qu'il y a en Jésus un aspect mystérieux, c'est un faiseur de miracles, il se déplace bizarrement, c'est un homme à ne pas lâcher. Mais Jésus se rend compte que les gens le suivent pour de mauvaises raisons. Jésus a peut-être l'impression qu'il les trompe s'il les laisse croire qu'il est venu pour les soulager des tâches ménagères et du travail. S'il les a nourris, ce n'est pas pour qu'ils abandonnent le travail et leurs maisons, c'est pour leur délivrer un message qui vient de Dieu.
    Jésus n'est pas venu pour faire croire aux gens que la vie pratique serait plus facile, que nous serions débarrassés des corvées, voire des souffrances de l'existence. Il est venu nous dire — de la part de Dieu — que l'essentiel de la vie se trouve ailleurs, et qu'il ne faut pas épuiser ses forces dans le périssable, le provisoire ou l'éphémère.
    A travers la multiplication des pains, Jésus veut donner un signe visible qui nous parle d'une réalité invisible mais primordiale. Il existe une réalité qui ne s'autodétruit pas, une réalité durable qui peut nous combler. La multiplication des pains nous renvoie à cette promesse d'Esaïe :

    "A quoi bon dépenser de l'argent pour un pain qui ne nourrit pas, à quoi bon vous donner du mal pour ne pas être satisfaits ? Si vous voulez m'écouter, vous aurez à manger quelque chose de bon, vous vous régalerez de ce qu'il y a de meilleur. Accordez-moi votre attention et venez jusqu'à moi. Ecoutez-moi, et vous revivrez." (Es 55:2-3).
    Il y a une nourriture qui nourrit, qui satisfait, qui ne nous laisse pas sur notre faim. Jésus attire l'attention de la foule — et la nôtre — sur le risque de se laisser complètement envahir par le souci quotidien de nos recherches routinières et de manquer l'essentiel de la vie. Il nous invite à chercher ce qui est durable, ce qui ne peut jamais nous être ôté, et cela n'est pas de l'ordre du matériel.
    Jésus oppose ce qui est périssable, mortel, voué à la destruction, à ce qui est porteur de vie, à tout jamais, pour toujours, ce qui est durable, ce qu'on traduit généralement par "éternel".
    La foule comprend cela et demande alors à Jésus : "Comment s'y prendre ? Que devons-nous faire pour y avoir accès ?" Et Jésus répond simplement : "Croyez en celui qui m'a envoyé" (Jean 6 : 29). Réponse simple, trop simple peut-être et qui nous laisse sur notre faim ! Nous demandons "Que faut-il faire ?" Et Jésus répond "Il n'y a rien à faire, il faut être, être dans une relation de confiance avec Dieu!"
    Dans la vie quotidienne, nous passons notre temps à faire des choses, et tout ce qui est fait de nos mains peut être défait. Jésus nous invite alors à être, parce que l'être est ce qui s'oppose au néant et à la mort. Etre soi-même, être face à Dieu, être sous le regard bienveillant de Dieu, être dans un état de confiance face à Dieu. Voilà le chemin qui nous est ouvert, vers la paix, vers une satisfaction durable de nos aspirations. Dieu nous invite à être et à faire croître notre être en sa présence, pour soi et pour ceux qui nous entourent.
    Souvent, ce sont les événements tragiques de la vie, une maladie, la perte de son travail ou un deuil qui nous replacent devant les choix essentiels. N'attendons pas ces moments tragiques — qui sont le plus souvent remplis de regrets — pour développer notre être et passer du temps avec nos proches. Prenons le temps, dès maintenant, pour entendre l'appel de Jésus à être et à faire confiance.
    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2007

  • Matthieu 25. Dieu fait le premier geste de la confiance

    Matthieu 25

    27.8.2000

    Dieu fait le premier geste de la confiance

    1 Jean 4 : 16-19    Mt 25 : 14-30

    Chères paroissiennes, chers paroissiens,
    Jésus aimait exprimer les réalités de son Père à travers des paraboles. De simples explications auraient pu nous faire croire que le Royaume de Dieu appartenait au domaine de ce qui se voit, de ce qui se touche, s'explique, alors qu'il est question de réalités qui sont au-delà des apparences, qui appartiennent à l'essence des choses, au domaines des relations essentielles. Cette parabole aussi essaie de nous parler de la vie essentielle, de la vie relationnelle au-delà des apparences, de la réalité des relations que Dieu entretien avec nous, avec tous les êtres humains. Qu'apprend-on de Dieu ? Qu'apprend-on de nous dans cette parabole ?
    Au premier abord cette parabole nous raconte une histoire de jugement, un jugement sévère même. La sévérité du jugement contredit ce que Jésus nous dit d'habitude de l'amour du Père pour nous. Dans un premier temps, je vous propose de prendre acte qu'il y a un jugement dans cette parabole, le temps de comprendre le début de la parabole, ce qui nous éclairera finalement sur le sens de ce jugement.
    Avec un groupe de catéchumènes, nous avons lu seulement la première partie de cette parabole,  jusqu'au départ du maître. Puis je leur ai demandé d'imaginer et de jouer la suite de la parabole. Tous, sans exception, ont abouti à une conclusion où les serviteurs devaient rendre des comptes, et où ils étaient récompensés ou punis, selon ce qu'ils avaient fait. Le jugement est vraiment une composante humaine ! L'idée de jugement, d'appréciation de nos actes est ancrée profondément en nous. Quelqu'un doit finalement nous indiquer, pensons-nous, si nous sommes des gens biens ou si notre vie a un sens, une valeur. Et bien souvent, nous sommes les premiers a porter un jugement sur nous-mêmes et rarement de manière positive... Il y a une sorte de nécessité du texte qui conduit au jugement, comme un roman policier ne peut finir sans la découverte du meurtrier.
    Revenons au travail des catéchumènes. Un des groupes ne connaissait pas du tout, préalablement, cette parabole et il a inventé un fin très instructive pour nous : Un premier serviteur garde la somme précieusement et se fait féliciter au retour du maître. Les deux autres se servent des biens remis pour faire des affaires et s'enrichir. Ils se font sévèrement réprimander pour avoir osé utiliser des biens qui ne leur appartenaient pas mais leur était seulement prêté.
    Voilà qui met en lumière un aspect de la parabole qui manifeste des visions tout à fait différentes du maître de la parabole : Le maître des catéchumènes a peur du risque, il ne fait pas confiance dans ses serviteurs. A l'opposé le maître que nous décrit Jésus fait confiance, il remet tout son capital à ses serviteurs en leur laissant toute liberté d'agir. Le maître leur donne le libre choix, ce qu'on appelle le libre arbitre. En cela, il les élève du rang de serviteur, d'esclave au rang d'hommes libres et responsables. Cette élévation de l'être humain à la liberté et à la responsabilité n'est pas le résultat de leur travail, mais un préalable que Dieu pose. Dieu fait le premier le geste de la confiance en associant les humains à ses affaires, plus encore, en leur confiant tout et en se retirant, pour leur laisser les mains libres.
    La parabole ose dire que le maître se retire pour laisser les humains libres. Lorsque des parents veulent apprendre à leur enfant à faire du vélo, il y a un moment où il faut enlever les petites roues et lâcher l'enfant, lui faire confiance. Sans cela, il n'apprendra jamais.
    L'avenir du monde est entre nos mains, parce que Dieu nous l'a confié. La conduite de nos vies est entre nos mains, parce que Dieu nous l'a confié. La responsabilité de notre famille, de nos affaires, de notre paroisse est entre nos mains, parce que Dieu nous l'a confié.  A partir de là, nous avons à choisir notre propre attitude : Allons-nous vivre dans la confiance en la bonté de ce mandat ou allons-nous vivre dans la crainte, dans la peur de se tromper, de ne pas être à la hauteur, d'être jugé ?
    Si nous remontions à la racine de chacune de nos décisions dans notre vie, que trouverions-nous ? La confiance en la bonté de Dieu et en la beauté de la vie, ou la peur de la perte, du risque, de la punition ou de l'échec ?
    Le troisième serviteur a choisi cette voie de la peur du risque et de l'échec, parce qu'il voyait en Dieu un être dur, qui juge et qui condamne. Cette peur le paralyse. En enterrant son talent il nie la confiance du maître en lui. Il fait de son présent un temps vain et inutile jusqu'au retour du maître. En gelant son avoir, ce serviteur tue l'espoir que son maître plaçait en lui. L'attente anxieuse des comptes, du jugement entraîne le serviteur à se dérober à sa vocation. C'est à cette mentalité — agir sans risque et donc sans faute pour être en ordre avec celui qu'on craint — c'est à cette mentalité que Jésus s'en prend. Celui qui a peur du jugement alors que le Seigneur place en lui toute sa confiance n'est pas digne d'entrer dans le Royaume.
    Ainsi, malgré sa fin en forme de jugement, cette parabole ne cherche pas à créer une terreur du jugement pour obtenir quelque chose de nous. Au contraire elle est une invitation à laisser tomber sa peur du jugement, sa crainte de Dieu pour s'ouvrir à la liberté offerte, une invitation à recevoir pleinement la confiance qui est placée en nous.
    En effet, la crainte du troisième serviteur constitue l'opposé de ce que Dieu veut créer en nous, comme nous le rappelle l'épître de Jean : ''L'amour parfait exclut la crainte. Ainsi, l'amour n'est pas parfait chez celui qui a de la crainte, car la crainte est en rapport avec une punition" (1 Jean 4:18). 
    Celui qui choisit — dans sa vie actuelle — de vivre dans la peur se place lui-même dans des conditions de vie qui ressemblent à un enfer.
    Celui qui choisit la confiance et vit d'elle est déjà entré — dans sa vie actuelle — dans la joie de Dieu.
    Amen

    © Jean-Marie Thévoz, 2007

  • Esther III - Un message pour les nations

    Esther 8

    29.7.2007

    Esther III - Un message pour les nations

    Esther 7:10—8:8    Esther 8:9-17    Esther 9 : 1-23


    Chers Amis,
    Voilà le dénouement du livre d'Esther. Le machiavélique vizir Haman a été démasqué et pendu. Le décret d'extermination des juifs a été contré par un décret miroir enjoignant les juifs à infliger à leurs ennemis le sort que ceux-ci leur réservait. Le retournement est complet, les victimes triomphent de leurs agresseurs et instituent une fête commémorative. Voilà un happy end digne des films holiwoodiens !
    Cependant, pour un livre biblique, cette fin nous laisse avec un goût d'amertume. Quand même, 75'800 morts et faire la fête… On aurait pu s'attendre à quelque chose de plus pacifique, une fin sous forme de pardon ou au moins d'armistice.
    Cela nous choque que ces juifs puissent ainsi "avec la bénédiction biblique" tuer leurs adversaires ! Vous êtes choqués par cette autorisation de vengeance ? L'êtiez-vous autant par le décret d'extermination ? Je crois que c'est le premier message du livre envers les nations : nous interroger sur notre capacité à nous scandaliser. De quoi nous scandalisons-nous lorsque nous lisons le journal ? Davantage des résistants qui tuent ou de l'armée d'occupation qui oppresse ? Davantage des jeunes qui commettent des incivilités ou des cols blancs qui ruinent une entreprise prestigieuse et parlent seulement d'erreurs de management ?
    Dans le livre d'Esther, soyons d'abord scandalisés par la volonté de génocide, avant celle de self-défense ! Et puis, rappelons-nous que nous lisons un roman qui met en scène une partie de réalité et une partie de fiction. Que ce roman essaie d'exprimer les espoirs d'un peuple : qu'on le laisse vivre tranquille et que les persécutions s'arrêtent !
    Que celui qui n'a jamais lu un roman policier leur jette la première pierre. Lorsque nous lisons un roman policier, ce n'est pas pour nous réjouir du meurtre, mais pour voir finalement la justice triompher dans l'arrestation et la condamnation de l'assassin. Souvent — dans les films — celui-ci tombe sous les balles de la police. Nous n'en faisons pas tout un plat, c'est du roman. C'est du roman qui nous aide à penser que dans ce monde violent, la justice peut gagner. Il en est de même dans le livre d'Esther.
    Si nous restons encore un peu choqués, réalisons que le rédacteur ne met pas les deux tueries au même niveau. Si le premier et le second décret s'expriment dans des termes presque identiques (3:13; 8:11) il est permis de "tuer les hommes, les femmes, les enfants et piller leurs biens," il est bien spécifié que les juifs n'ont tué que des hommes et n'ont pas pillé leurs biens. Il y a une retenue, comme l'application d'un droit dans la guerre, qui distingue cet acte de défense d'une extermination ou d'une vengeance libre.
    Il y a aussi un côté réaliste, parfois le mal ne peut être éradiqué que par un autre mal. C'est une pente très dangereuse qui a réussi lors de la 2e guerre mondiale, mais a échoué dans toutes les guerres depuis lors.
    Comme le livre d'Esther est un roman et non pas la relation de faits historiques, il est avisé d'en faire une lecture allégorique ou symbolique. C'est ce qu'a très bien compris l'écrivain de théâtre Jean Racine.* Il a écrit une sorte d'opéra — on dirait aujourd'hui une comédie musicale — sur le livre d'Esther, essayant d'éclairer le roi Louis XIV sur la situation religieuse dans son royaume et l'amener à être plus tolérant envers les jansénistes et les huguenots qui étaient persécutés pour leur foi.
    Le livre d'Esther est un plaidoyer pour la tolérance religieuse mais aussi l'expression de la lutte, du combat entre la justice et le mal. Qui triomphera ? Le livre d'Esther est rempli de retournements où la justice, l'intégrité, la loyauté sont constamment menacés de succomber aux assauts du mal. Mais c'est un livre d'espoir, un plaidoyer pour la victoire — fragile, mais têtue — de la justice.
    Comment la justice pourrait-elle triompher sans que le mal soit détruit ? C'est plus tardivement que l'on a été amené à faire la distinction entre le mal et le malfaiteur. En théologie chrétienne, on dit que Dieu veut la mort du péché, mais pas celle du pécheur. C'est ce qui nous a amené à vouloir et pouvoir abolir la peine de mort, mais sans abolir le jugement et la peine.
    Dans le livre d'Esther l'exécution des ennemis est la forme que prend le jugement contre le mal. C'est une façon de dire qu'il n'y a pas de justice visible tant qu'il n'y a pas eu de jugement sur le mal. Le triomphe de la justice doit se marquer d'une façon ou d'une autre dans la réalité. Il est difficile pour nous les humains de nous en remettre uniquement à une justice céleste qui ne déploierait pas ses effets sur la terre déjà. Nous le voyons très clairement dans les pays qui ont été traumatisés par une dictature, surtout si elle a réussi à mettre en place son auto-amnistie, comme au Chili ou en Argentine.
    Les victimes crient pour que justice soit rendue, c'est-à-dire qu'il y ait des procès devant des tribunaux et que des peines — même symboliques (aucune peine de toute façon ne peut amener réparation, aussi sévère soit-elle) — soient infligées. Acceptons que le livre d'Esther se situe dans un temps d'avant les tribunaux internationaux puisqu'ils n'ont été mis en place qu'à partir du XXe siècle.
    Le livre d'Esther manifeste aussi une attente messianique. Il décrit un idéal symbolique — qui appartient à la fin des temps humains — mais auquel on peut aspirer dès maintenant : que la justice soit plus forte que le mal, que Dieu nous délivre du mal afin que la vie soit la fête qu'elle devrait être.
    C'est dans ce sens-là que ce livre d'Esther instaure une fête : fête de délivrance, fête du triomphe de la justice, du triomphe de Dieu qui sauve son peuple. Pour les juifs, c'est la fête de Pourim, nom qui vient des dès jetés par Haman pour déterminer la date de l'extermination (Esther 3:7).
    Cette fête est une fête joyeuse, une sorte de festival du rire et de la joie. On y raconte des blagues, on fait des plaisanteries, on s'échange des petits cadeaux et on y fait des dons aux pauvres pour que ce jour soit joyeux pour tout le monde.
    Le livre d'Esther fête donc, dans la joie, l'équipe qui a gagné dans le match justice contre mal. Dieu est vainqueur, il a sauvé son peuple.
    Alléluia.

    * Racine, Œuvres complètes, tome I, Bibliothèque de la Pléiade, 1999.
    Michel Le Guern, Sur l'Esther de Racine, in Lumière & Vie, 260, oct-déc 2003, pp.49-56.

    Sur Pourim, voir le site très complet : http://www.jafi.org.il/education/french/fetes/pourim/index.html

    © Jean-Marie Thévoz

  • Esther 3 - II - Un message pour les juifs en exil

    Esther 3

    22.7.2007

    Esther II - Un message pour les juifs en exil

    Esther  3 : 1-11    Esther  4: 12-16    Jean 15 : 18-20


    Chers Amis,
    Nous continuons notre exploration du livre d'Esther, ce récit qui présente, sous une forme romancée, une réalité trop souvent vécue par les juifs : l'exil et les persécutions.
    Au moment de sa rédaction, le Royaume d'Israël n'existe plus, le peuple vit sous domination grecque et une grand partie des juifs vit en exil, en diaspora : en Orient (Babylone, Perse) en Egypte (Alexandrie) et sur le pourtour méditerranéen.
    Le livre d'Esther condense en une histoire des situations qui se répètent dans divers lieux : des familles juives essaient de vivre leur foi et leurs traditions en terre étrangère. Ce livre d'Esther a de nombreux points communs avec le livre de Daniel qui montre aussi un juif qui essaie de respecter la Loi, la Torah, ce qui amène tracasseries et persécutions. Comment vivre sa foi, obéir à la Torah, préserver ses coutumes, tout en vivant en bonne harmonie avec la population indigène ?
    Le livre d'Esther nous propose deux modèles en parallèle : l'attitude de Mardochée et celle d'Esther. Mardochée a la même attitude que Daniel. Il représente le pratiquant convaincu qui affiche sa foi et sa pratique. Jamais il ne se prosternera devant un autre homme — serait-ce le premier ministre — quoi qu'il lui en coûte.
    On aime bien ce type de personnage chez nous; cela nous rappelle Guillaume Tell qui brave le bailli autrichien. Mais on déteste aussi ce personnage — lorsque nous sommes dans le rôle de l'indigène et qu'un étranger se permet de demander un voile pour sa fille ou un minaret pour sa mosquée.
    Mardochée, c'est lui. Touchant pour sa rectitude et sa loyauté à son Dieu, mais agaçant au possible de ne pas accepter les coutumes locales et l'assimilation. Cette attitude droite, mais provocante, va amener la persécution, pas seulement contre le seul Mardochée, mais contre l'entier du peuple juif. Cela en vaut-il la peine s'interrogent, au cours des siècles, les rabbins eux-mêmes ?
    De l'autre côté, il y a le personnage d'Esther, la cousine de Mardochée qui — cachant sa religion — a été choisie comme reine par le roi Xerxès. Elle a adopté, paradoxalement sur le conseil de Mardochée, le profil bas, la clandestinité. Elle cache sa foi.
    Le rédacteur affiche donc deux modèles de conduite et à aucun moment ne pose de jugement, n'indique de préférence. Ce sont deux modèles parallèles qui ont chacun leur raison d'être, leurs avantages et leurs inconvénients. Je trouve remarquable qu'ils coexistent simplement. Dans notre pensée occidentale, cartésienne, logique et tellement binaire, nous voudrions trancher, déclarer l'un meilleur que l'autre. Ah, l'emprise de la pensée unique !   Là, non, entre Esther et Mardochée, chacun doit se déterminer selon sa conscience, sa situation, ses capacités.
    En fait, c'est égal. En fin de compte, lorsque la situation de crise surgit, qu'on aie adopté l'une ou l'autre position, il vient un moment où l'on doit se dévoiler et agir. C'est ce qui arrive à Esther. Lorsqu'elle apprend l'existence du décret d'extermination, elle va agir et dévoiler son identité au roi de manière à sauver son peuple. Il y a toujours un temps où l'identité est révélée par la nécessité de la situation. Chacun doit prendre ses responsabilités ou perdre son identité. Esther se dévoile donc.
    Il est frappant de voir dans la résistance de Mardochée qu'il 'y a aucune explication à son refus de se prosterner. La seul "explication" qu'il donne est  : "Je suis juif" (Esther 3:4). C'est aussi sur ce seul "titre" que les rafles se déroulaient sous le régime nazi. Il n'était pas question de savoir si ces juifs étaient pratiquants ou non, libéraux ou orthodoxes, de gauche ou de droite. L'antisémitisme ne s'explique pas par une pratique, par des attitudes, par des qualités ou des défauts des juifs, mais il se décrète, comme le fait le ministre Haman.
    Ainsi, "le juif" représente cette insupportable limite opposée à la toute-puissance humaine : en signalant que cette aspiration au pouvoir total est une usurpation d'un pouvoir qui n'appartient qu'à Dieu seul. En tant que peuple à qui Dieu a confié la Loi, la Torah, le peuple juif est devenu porteur et représentant de cette limite à tout abus de pouvoir.
    Celui qui veut abuser du pouvoir à son profit ne peut supporter ce rappel incessant de sa transgression. C'est le cas de Haman, le vizir du roi Xerxès. C'est pourquoi le texte rattache Haman — par sa généalogie — à Agag, le roi amalécite, l'ennemi de Saül. Les Amalécites avaient aussi été le peuple qui s'était opposé au passage sur leurs terres des hébreux sortis d'Egypte pour se rendre dans le pays de Canaan. Amaleq, Agag, Haman sont les représentations de la haine de la Loi, loi qui garantit le droit, le droit de chacun, mais aussi de la veuve et de l'orphelin.
    Le livre d'Esther nous rappelle qu'il y a une lignée du mal qui peut ressurgir à chaque époque et contre tous ceux qui prennent la défense des sans-voix ou des opprimés, en réaffirmant les limites que les puissants ne doivent pas dépasser.
    Ce mal a fait d'innombrables victimes : les juifs persécutés sous les perses, les grecs, les romains; Jésus lui-même; les chrétiens martyrs; les juifs à nouveau persécutés, mais par les chrétiens, jusqu'à la Shoa; plus proche de nous, Ghandi, Martin Luther King ou Mgr Romero; des chrétiens persécutés sous le régime soviétique ou dans certains pays musulmans.
    Le livre d'Esther rappelle à tous les lecteurs de la Bible le prix qu'il peut en coûter de témoigner de sa foi, de la dignité de tout être humain quel qu'il soit, y compris les combattants, y compris les présumés terroristes.
    La question que je me pose est de savoir si nous, chrétiens, avons assez lu le livre d'Esther ? Pourquoi, encore aujourd'hui, les juifs sont-ils davantage interpellateurs des pouvoirs extrêmes que les chrétiens ? Nous avons le même Dieu et la même exigence de respect de chaque être humain ! Pourtant, il me semble que bien des pouvoirs oppressants se développent chez nous, que ce soit des pouvoirs économiques ou les pouvoirs de surveillance issus de la lutte anti-terroriste.
    Où est notre pouvoir d'interpellation en tant que chrétiens ? Sommes-nous des croyants cachés comme Esther ? Mais nous réveillerons-nous au moment nécessaire ? Ne devraient-ils pas se lever quelques Mardochées, quelques provocateurs pour nous ouvrir les yeux afin de voir dans quelles situations nous nous prosternons jusqu'à terre devant des pouvoirs dont nous espérons tirer aussi quelques profits ou avantages ? Notre Eglise vaudoise est-elle trop assimilée qu'elle en perd son identité et avec elle, un à un, ses membres ?
    Je vous laisse ces questions que je me pose. Je n'ai pas moi-même des réponses à chacune d'elles, mais je pense que nous devrions y réfléchir sérieusement si nous ne voulons pas simplement nous dissoudre dans la pensée unique actuelle.
    Amen
    © Jean-Marie Thévoz, 2007

  • Romains 8. La justification par la foi (II) : Nous sommes libérés du souci de nous-mêmes.

    Romains 8

    9.11.2003

    La justification par la foi (II) : Nous sommes libérés du souci de nous-mêmes.

    Rm 8 : 1-4    Eph 5 : 1-2 + 8-11


    Chères paroissiennes, chers paroissiens,
    Dimanche dernier, dimanche de commémoration de la Réforme, j'ai parlé de la signification de la justification par la foi du chrétien. Le terme "justification par la foi" signifie que notre valeur — aux yeux de Dieu et des humains — ne dépend pas de nos succès ou de nos échecs, de ce que nous faisons ou ne faisons pas, mais provient de Dieu lui-même, de son amour inconditionnel pour nous.
    Nous ne sommes plus sous la pression de l'exigence inatteignable de la Loi ou des contraintes sociales, des impératifs de modes ou du regard des autres.
    L'exigence de faire quelque chose pour être quelqu'un aux yeux de Dieu ayant disparu, se pose la question : cela ne conduit-il pas au laisser-aller, au désengagement, voire ouvre la porte à toute immoralité ?
    Historiquement, le protestantisme ne s'est pas engagé dans cette voie-là — au contraire ! On a suffisamment reproché au protestantisme sa rigueur, son sérieux, son puritanisme, son sens des responsabilité, voire la culpabilisation de ses fidèles. Comme si l'exigence qui a été chassé par la porte était revenue par la fenêtre !
    Comment a-t-on pu obtenir autant de rigueur, de responsabilisation et d'engagement, tout en ayant congédié l'exigence ?
    Je vais passer par un exemple, un peu terre à terre, mais que tous connaissent, celui de la circulation routière. Se passer de la peur du gendarme et obtenir les mêmes résultats, c'est le rêve de la prévention routière. Comment faire pour que les automobilistes respectent, par exemple, les limitations de vitesse ? On peut multiplier les contrôles, les amendes, etc... jusqu'à ce que chacun ait compris qu'il y a trop de risques de se faire prendre et punir. Ou alors... faire comprendre à chacun qu'il y va de sa propre vie (de son salut) et que la loi est là — non pour l'embêter — mais pour son avantage. Faire de l'automobiliste un être responsable, non par contrainte, mais par choix personnel.
    Je reviens à la théologie. Avec la justification par la foi en Jésus-Christ, Dieu, qui représente la loi, offre à l'être humain de le regarder non pas comme celui qui contraint, mais comme celui qui sauve, celui qui nous est favorable. La foi est une conversion de notre regard sur Dieu. A travers Jésus-Christ, Dieu s'offre comme celui qui est toujours de notre côté, le Dieu amour et non pas le Dieu juge, accusateur. A travers le crucifié, Dieu nous montre qu'il n'est pas un maître, un chef ou un tyran, mais qu'en s'abaissant, il nous hisse à sa hauteur. C'est pourquoi nous ne sommes plus appelés ses serviteurs, mais ses amis (Jn 15:15).
    Dieu a fondamentalement changé notre statut. La parabole du fils perdu et retrouvé (prodigue, Luc 15) l'exprime admirablement. Le fils se considère comme un misérable, lorsqu'il a perdu tout le bien reçu de son père. Il considère que son père ne peut le recevoir que comme un serviteur. Mais le regard du père est autre. Jamais le fils ne sera serviteur, il a toujours sa place d'héritier, quoi qu'il arrive !
    Le serviteur est celui qui obéit, par crainte du maître. L'obéissance est une motivation externe, extérieure (comme la peur du gendarme pour l'automobiliste). Mais la motivation de l'employé change lorsqu'il devient un associé dans l'entreprise. Confiez des responsabilités à quelqu'un et il n'obéira plus parce qu'il le doit, mais parce qu'il le veut, parce qu'il a choisi d'assumer ces responsabilités. L'associé est mu par une motivation interne, il sait pourquoi, pour qui il travaille. Paul appelle cette motivation interne le Saint-Esprit. C'est lui qui nous meut lorsqu'il nous habite.
    Dieu a donc fait de nous des partenaires, des associés, des amis, même ! Dieu donne à l'être humain les clés du Royaume (Mt 16:19), c'est-à-dire le pouvoir de pardonner. Ce statut et cette responsabilité sont donnés également à tous les chrétiens, c'est ce qu'on appelle le sacerdoce universel.
    Pour évoquer ce changement de statut, Paul parle d'un passage de l'obscurité à la lumière :

    "Vous étiez autrefois dans l'obscurité; mais maintenant, par votre union avec le Seigneur, vous êtes dans la lumière" (Eph 5:8).
    Pourquoi ce changement est-il un passage à la lumière ? Parce qu'il y a une illumination à découvrir que Dieu n'est pas tel qu'on le pensait et à découvrir que nous sommes aussi autres que nous ne le pensions.
    Dans la justification par Dieu de notre être et de notre place, il y a une véritable libération ! Nous sommes libérés du souci de nous-mêmes. Libérés du souci de gagner notre propre valeur. Libérés du souci d'affirmer notre être. Libérés du souci de défendre notre place. Notre valeur, notre être, notre place sont garantis par Dieu lui-même.
    Alors, nous pouvons nous dé-préoccuper de nous-mêmes ! Nous pouvons abandonner toutes ces petites questions insidieuses qui reviennent sans cesse et nous taraudent : est-ce que j'en ai assez fait ? Suis-je assez bien ? Ne va-t-on pas découvrir qui je suis derrière les apparences que je me donne ? Tout cela est effacé, écarté. Que d'énergie libérée !
    Dé-préoccupés de nous-mêmes, nous avons de l'énergie pour nous tourner vers les autres, pour prendre en mains les tâches que Dieu nous confie dans la gestion de son Royaume. Et cette fois, nous ne faisons pas cela pour... plaire à Dieu, pour me faire bien voir, mais parce que... j'ai été promu par Dieu au rang d'associé, d'ami, parce que je suis reconnaissant, parce que j'ai à coeur de faire découvrir cette libération à d'autres autour de moi qui plient sous les exigences du paraître, de la mode, de l'efficacité, etc..., tous nos esclavages modernes.
    Comme Paul le dit (et on commence à comprendre mieux son vocabulaire) :

    "Maintenant donc, il n'y a plus de condamnation pour ceux qui sont unis à Jésus-Christ. Car la loi de l'Esprit Saint, qui donne la vie par Jésus-Christ, t'a libéré de la loi du péché et de la mort. Dieu a accompli cela pour que les exigences de la loi soient réalisées en nous qui vivons non plus selon notre propre nature, mais selon l'Esprit Saint." (Rm 8:1-2+4)
    Vivre selon l'Esprit Saint, c'est donc vivre avec la nouvelle image de Dieu que l'Esprit Saint nous révèle lorsque nous voyons le Christ sur la croix : un Dieu d'amour. C'est donc vivre libérés, dé-préoccupés de nous-mêmes. C'est donc vivre portés par l'amour de Dieu qui nous nourrit et nous réconcilie avec ceux qui nous entourent.
    Amen
    © Jean-Marie Thévoz, 2007