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bible - Page 38

  • Jean 2. Jésus transforme l'eau de nos vies en vin

    Jean 2
    10.10.1999
    Jésus transforme l'eau de nos vies en vin
    Exode 17 : 1-7 Jean 2 : 1-11


    Chères paroissiennes, chers paroissiens,
    Vous venez d'entendre deux récits de miracles que j'aimerais mettre en parallèle ce matin. Bien sûr, lorsqu'on parle de miracle, cela fait tout de suite difficulté, parce que la première question qu'on se pose — dans ce siècle éclairé, logique et cartésien — c'est : Comment cela s'est-il passé ? Quel est le truc ? On court toujours le risque de prendre le miracle pour un tour de magie, même sans trucage puisque Dieu est tout-puissant !
    En fait, aujourd'hui, on n'a plus accès à ce qui s'est passé. Il est trop tard pour faire une enquête ! Aussi, je vous propose de ne pas nous aventurer sur le chemin de "qu'est-ce qui s'est vraiment passé?" mais de nous interroger plutôt sur la question : "Mais qu'est-ce que Jean a bien voulu nous dire en nous racontant cette histoire ?
    Je voudrais que nous passions de la recherche du merveilleux à la recherche du sens. En fait, Jean nous y invite lui-même par le vocabulaire qu'il utilise. Dans son évangile, il ne parle jamais de miracles, il parle de signes et le signe est là pour donner du sens. Plutôt que dans une enquête, entrons dans la quête du sens. Et le sens va se déployer en entrant dans le monde symbolique. Déplaçons-nous de la lecture à l'interprétation.
    Qu'est-ce que Jean a voulu nous dire ? Et bien, il le dit lui-même, à la fin de son récit : "Jésus fit apparaître ainsi sa gloire, et ses disciples crurent en lui" (Jn 2:11). L'important est qu'à travers cet événement, ce soit la présence, bien plus l'action, l'effet de l'action de Dieu qui soit visible. Dans les deux signes donnés, celui de Moïse et celui de Jésus, l'effet de l'action de Dieu, c'est que son peuple (ou les invités) voient leur soif étanchée après avoir passé par un temps de manque.
    Les deux récits ont la même structure. On commence par une situation qui est déclarée bonne (même si pour l'Egypte, les hébreux se mentent à eux-mêmes!). La situation évolue vers le manque, manque d'eau au désert, manque de vin à la fête. Puis la situation est transformée — par une intervention de Dieu — et la situation de chacun en est améliorée, mieux, renouvelée.
    Notez bien la remarque du maître de cérémonie au marié :
    "Tout le monde sert d'abord le meilleur vin, puis quand les invités ont beaucoup bu, on sert le moins bon. Mais toi, tu as gardé le meilleur vin jusqu'à maintenant." (Jn 2:10)
    Cette transformation, due à l'intervention de Dieu fait sortir de l'habitude, des dictons et des plaintes de chacun : "tout se dégrade", "ce n'est plus comme avant", "de notre temps", "aujourd'hui, voyez ces jeunes"... Non, aujourd'hui, le vin est meilleur qu'hier ! Aujourd'hui, l'eau du rocher vaut mieux que la pseudo-sécurité de l'Egypte.
    Ces deux signes nous parlent de ce que nous vivons, de ce que nous avons vécu et pouvons vivre. Ce sont des paraboles de la vie. Il y a eu un commencement, une enfance, une adolescence — était-ce plutôt l'Egypte ou les noces ? peu importe. En effet, peu importe quand cela arrive, cela finit toujours par arriver : la vie est dure, la vie est injuste et un jour on est frappé, on passe par l'épreuve, on souffre de frustration, de manque. Cela peut arriver au travers du travail, à l'intérieur du couple, dans la relation à ses enfants, par la maladie ou le deuil... cela arrive. Et souvent nous réagissons comme les hébreux, par Massa et Meriba, Querelle et Epreuve.
    La bonne nouvelle de l'évangile, (déjà en germe dans l'Ancien Testament) est de nous montrer que si l'épreuve du manque est inévitable (les hébreux se sont trouvés en Egypte sans que ce soit leur faute, le vin s'est mis à manquer) ce n'est pas la fin du chemin.
    Dieu ne nous laisse pas dans ce marasme. Dieu a des projets pour nous, pour nous sortir de là. Il nous montre que ce temps de manque peut devenir une occasion de grandir, d'évoluer, de cheminer, pour en sortir renouvelé et enrichi.
    Comprenez-moi bien, le message de ces deux récits n'est pas : il faut passer par des épreuves pour progresser. Ça c'est une théorie qui veut consoler à bon compte, mais qui est désespérante. Le message de Jean est inverse : lorsqu'on n'échappe pas aux coups durs de la vie, Dieu intervient d'une façon qui nous dépasse complètement et nous offre une "guérison", une "évolution" qui est meilleure que la situation première dont nous venions.
    Le meilleur vin est servi après le manque, telle est la gloire que Dieu manifeste. Telle est l'action, tel est l'effet de la présence de Jésus dans nos vies.
    Amen

    © 2006, Jean-Marie Thévoz

  • 9.10.06 / Ecclésiaste 11."Jette ton pain à la surface des eaux…"

    Ecclésiaste 11
    9.10.2006
    "Jette ton pain à la surface des eaux…"
    Eccl. 11 : 1-6 Marc 4 : 26-29

    "Jette ton pain à la surface des eaux…" (Eccl. 11:1) (Ecclésiaste = Qohélet dans la TOB)
    Cette phrase de l'Ecclésiaste m'est venue à l'esprit après être tombé sur le même mot, le même jour, dans deux livres très différents. Ce mot qui est venu à moi par ces deux canaux différents, c'est le mot "régenter."
    Je l'ai rencontré dans le livre "Voyages" de Michael Crichton*1. Cet écrivain est l'auteur de la série TV "Urgences." Son livre "Voyages" est une autobiographie où il raconte son parcours, son évolution, sa quête spirituelle. Et il raconte dans l'un de ses voyages sa rencontre avec des villageois de Pahang en Malaisie. Un cerf était arrivé dans ce village quelques années auparavant. Le cerf tuaient les chèvres qu'élevaient les habitants, mais ils avaient accepté le cerf et, du coup, ils avaient cessé de manger leur mets favori. Pour Michael Crichton, il aurait fallu faire quelque chose, trouver une solution, changer la réalité etc., jusqu'à cette prise de conscience : "Les événements s'étaient chargés de me rappeler que j'avais des limites — des limites assez grandes, dans l'ordre général des choses — et que même si je le pouvais, il ne rimait à rien d'essayer de tout régenter." (p.215)
    Ce mot "régenter" je l'ai retrouvé le même jour dans "Les âges de la vie" de Christiane Singer*2. A propos de l'âge adulte elle écrit ceci : "le seul pouvoir auquel il (= l'adulte) puisse prétendre : [est] non celui de régenter les choses, mais de les pénétrer, de les connaître de l'intérieur et de les reconnaître (…)." (p.152)
    Ces deux auteurs, américain pour le premier, française pour la seconde, arrivent au même constat : nous nous épuisons, notre société s'épuise à vouloir tout régenter, tout contrôler (ou faire semblant de contrôler). Et ce contrôle se fait au détriment de la rencontre, au détriment du foisonnement de la vie, au détriment de l'imprévu des relations. C'est en écho à cela que m'est venue à l'esprit cette phrase de l'Ecclésiaste : "Jette ton pain à la surface des eaux…" (Qo 11:1)
    Jusqu'à ce jour je n'avais jamais compris cette sentence. Elle n'avait pas de sens pour moi. Comme conseil cela semble même absurde ! "Jette ton pain à la surface des eaux et avec le temps tu le retrouveras." « Même pôs vrai ! » dirait Titeuf. L'eau va engloutir le pain, ou ce seront les canards, les cygnes et les mouettes qui viendront le manger !
    Alors — si cette phrase veut dire quelque chose — que signifie-t-elle ? La traduction de la Bible en français courant remplace carrément cette phrase par une sorte de commentaire : "Engage-toi dans une affaire, même en courant des risques, un jour tu peux y retrouver ton compte." Voilà qui est pragmatique et qui colle bien avec le néo-libéralisme de notre XXIe siècle. Mais l'Ecclésiaste veut-il vraiment nous dire de nous précipiter pour investir dans le capital risque ? Je sais que le Sage qu'est l'Ecclésiaste est souvent terre-à-terre, mais de là à donner des conseils financiers, j'en doute. Jésus aussi a parlé finance (le débiteur impitoyable (Mt 18 :23-34), l'économe infidèle (Luc 16 :1-9), le paiement de l'impôt à César (Mc 12 :14-17)…) mais c'était toujours pour nous apprendre quelque chose sur les relations humaines et la relation à Dieu. Je crois que là aussi il faut transposer, quitter la finance pour entrer dans les relations humaines.
    Dans ce passage, le Sage dépeint quelques attitudes humaines avec des sortes de maximes ou de slogans très courts*3.

    v.1 "Jette ton pain à la surface des eaux, plus tard tu le retrouveras" c'est la confiance dans la vie, dans le destin.
    v.2 "Donne à sept, à huit même, on ne sait jamais sur terre ce qui peut arriver" c'est la mutualité, la réciprocité.
    v.3 "Les nuages chargés se déverseront sur la terre. Si sous le vend du sud ou sous le vent du nord l'arbre tombe. Là où est tombé l'arbre, là il reste" c'est le poids de la réalité, les limites incontournables qui conduisent à la fatalité.
    v.4 Si tu t'inquiètes du vent, tu ne sèmeras jamais. Si tu scrutes les nuages, tu n'auras pas de récolte" c'est l'expression de la peur qui paralyse.
    v.5 Tu ne sais pas la route du vent, tu ne sais pas où sont les os dans le ventre d'une femme enceinte, ainsi tu ne sais pas ce que Dieu fait, lui qui fait tout" c'est le non-savoir de l'homme face à l'œuvre de Dieu.
    Autant de maximes, autant d'attitudes face à la vie, au destin. Mais il y a aussi une invitation, au début des vv.1 et 2 et à la fin avec le v.6 "Dès le matin sème la semence, jusqu'au soir ne laisse pas reposer ta main. Tu ignores ce qui réussira, ceci, cela, ou les deux à la fois ?" Face à la fatalité et aux contraintes de la réalité (v.3), face à la peur paralysante (v.4), face à l'appréhension d'un avenir incertain (v.5) le Sage invite à la confiance (v.1), à la réciprocité (v.2) et au faire teinté de lâcher prise (v.6). L'action a son sens en elle-même, ce sens ne dépend pas de son résultat. Une action peut ne pas atteindre son but, cela n'a pas d'importance, c'est le chemin qui compte. L'important, c'est de semer, le reste en nous appartient pas, le reste ne se laisse pas régenter. C'est ce que nous dit Jésus dans la parabole de la semence qui pousse toute seule (Mc 4:26-29).
    Le Sage nous invite à ne pas avoir peur des incertitudes, il nous pousse même à "surfer" sur le non-savoir (v.5). On ne sait pas, mais finalement tout est entre les mains de Dieu, qui fait tout. C'est donc l'occasion de lui faire confiance, de miser sur Lui qui — dans ce qui nous échappe — donne tout de même un sens. Régenter, contrôler, c'est prendre le risque de limiter les chances que Dieu intervienne dans l'imprévu, dans les coïncidences, par le hasard des situations et des chemins. Régenter, contrôler, c'est se fermer à la possibilité de rencontres imprévues, de surprises. Le sage — tout en connaissant le poids du réel et des contraintes — nous invite à faire confiance en la vie, en la générosité de la vie, en nous permettant des actes dont nous ne contrôlons pas le devenir.
    "Jette ton pain à la surface des eaux." Maintenant, cette phrase peut déployer, révéler son sens. Pour cela nous devons la décortiquer comme une noix et voir ce que chacun des mots renferme, chercher le deuxième sens des mots.
    Commençons par la fin :
    - les eaux. On trouve les eaux dans le poème de la création. Elles représentent le chaos primordial : "l'esprit de Dieu planait sur la surface des eaux"" (Gn 1:2). On les retrouve dans le déluge, porteuses de mort. On les retrouve avec la passage de la Mer des Roseaux s'ouvrant pour laisser passer les hébreux et s'abattant sur l'armée du pharaon. Les eaux, c'est donc la mort.
    - à la surface de… c'est exactement la même expression que dans Gn 1:2. C'est littéralement "contre la face, contre le visage. Il y a une forte opposition.

    Jusque là, la phrase se transforme en "Jette ton pain contre la face de la mort." Il faut encore traduire la première partie de la phrase.
    - le pain. Dans l'évangile de Jean, Jésus dit : "Je suis le pain descendu du ciel" (Jn 6:51) et aussi "Je suis le chemin, la vérité et la vie" (Jn 14:6). Le pain est la base de la vie, la vie terrestre. On peut donc remplacer pain par vie.
    - jeter. On va encore remplacer "jeter" pour que la traduction soit complète, enlever le côté "se débarrasser de" tout en gardant le côté dynamique. Optons pour "lancer", comme lancer un projet.
    Cela donne finalement : "Lance ta vie contre la face de la mort" qui peut aller aussi bien dans le sens de "Vis ta vie en faisant un pied de nez à la mort" ou "Lance-toi à l'assaut de la mort."
    Vivre, c’est le contraire de se laisser à aller à la fatalité, à l'inquiétude face au risque ou à l'ignorance. Vivre vraiment, c'est se lancer à l'assaut de tout ce qui tue la vie, combattre tout ce qui tue nos relations, écarter tout ce qui nous ferme à la rencontre, toutes les gènes de déranger les autres, de les bousculer. Jésus disait : "Celui qui cherchera à sauver sa vie la perdra, et celui qui la perdra la retrouvera" (Lc 17:33). C'est la même chose ! Jette ton pain à la surface des eaux, lance-toi dans la vie !
    Amen


    *1 Michael Crichton, Voyages, Paris, Robert Laffont, 1998 (Pocket 10524)
    *2 Christiane Singer, Les âges de la vie, Paris, Albin Michel, 1990 (Espaces libres 8)
    *3 citations selon la traduction : La Bible nouvelle traduction, Paris Bayard, 2001

    © 2006, Jean-Marie Thévoz

  • 2 Rois 5. L'histoire de Naaman, parabole du baptême

    2 Rois 5
    11.10.98
    L'histoire de Naaman, parabole du baptême
    2 Rois 5 : 1-17 Luc 17 : 11-19



    Ah ! ... Les réactions des gens en matière de religion sont vraiment imprévisibles !
    Vous avez entendu l'histoire de cet homme : Naaman. C'est un personnage haut placé — le général en chef du roi de Syrie. Il a donné la victoire à son pays — contre Israël d'ailleurs. C'est un héros national — pourtant, il est malheureux, il souffre, il est lépreux.
    Sur les conseils d'une fillette, avec une lettre de recommandation de son roi, il part chercher la guérison de sa maladie, le soulagement de ses maux au coeur du pays ennemi. Il doit être bien désespéré (ou alors est-il naïf ?) pour se laisser conseiller par une fillette et entreprendre un tel voyage. Et on l'imagine, descendre de Damas en Syrie, arriver en Galilée, près du lac, puis traverser la Samarie en direction de la capitale.
    Tiens, c'est exactement le même chemin qu'est en train d'emprunter Jésus, des siècles plus tard, lorsqu'il rencontre ce groupe de lépreux !
    Naaman arrive chez le roi, avec sa demande et sa lettre d'introduction. Mais le roi est paniqué, il croit que Naaman arrive pour lui tendre un piège. Heureusement, le prophète Elisée, le successeur d'Elie prend les choses en mains — à distance. Il convoque le général syrien chez lui.
    Mais lorsque Naaman est à la porte de la maison d'Elisée, il ne voit pas Elisée en personne, il reçoit seulement un message par l'entremise d'un serviteur. Un message très simple :
    "Va te plonger sept fois dans l'eau du Jourdain. Alors tu seras guéri et purifié" (2 R 5:10).
    Oh la la ! Naaman n'apprécie pas ! Il est furieux. Lui, le général en chef, le héros, il n'a même pas droit à une visite, un entretien, une prière, une imposition des mains ? On lui donne une simple ordonnance et sans consultation, sans auscultation ! Et qu'est-ce qu'il y a sur cette ordonnance ? "Prendre un bain chaque jour pendant sept jours."
    Naaman a fait près de 300 km. Est-ce pour ça ? De qui se moque-t-on ? Il est prêt à faire demi-tour, à rentrer au pays, quitte à rester désespéré. Pourtant, il va rester et exécuter l'ordonnance. Qu'est-ce qui le retient, qu'est-ce qui le fait changer d'avis ? Une parole pleine de bon sens de son serviteur :

    "Maître, si le prophète t'avait ordonné quelque chose de difficile, de compliqué, ne l'aurais-tu pas fait ? (2 R 5:13)
    L'être humain est imprévisible en matière de religion : plus c'est compliqué, plus c'est dur, plus c'est culpabilisant, plus il trouve que c'est sérieux, valable et véridique. Mais voilà, Dieu propose le contraire. Dieu n'a probablement pas son MBA. Il a fait les choses simplement : il offre tout, tout de suite, il s'offre lui-même, tout simplement, et il attend. Il attend notre réponse.
    Cette histoire de Naaman a souvent été lue comme une parabole du baptême. Dieu offre la vraie vie à ceux qui acceptent le baptême. La guérison spirituelle est offerte à tous, comme aux dix lépreux que Jésus rencontre. Il n'y a pas de conditions, c'est facile, c'est gratuit. Naaman en tant qu'il est à la fois un héros et un lépreux est le reflet de toute l'ambiguïté de la condition humaine. Tous nous sommes des héros et des lépreux, tous nous avons en nous la possibilité du bonheur et du malheur. Et Dieu nous offre, à travers un geste tout simple, à travers l'eau du baptême de nous tourner vers lui et de lui répondre.
    La réponse de Naaman va être de reconnaître qu'Elisée est le prophète du vrai Dieu :

    "Maintenant, je sais que sur toute la terre, il n'y a pas d'autre Dieu que celui d'Israël" (2 R 5:15).
    Voilà sa façon de confesser sa foi. Il ajoutera un autre geste : il chargera ses mulets de terre d'Israël pour y faire son lieu de culte, pour marquer son appartenance au peuple d'Israël.
    Parmi les dix lépreux guéris par Jésus, un homme confesse aussi sa foi en louant Dieu à haute voix et en faisant demi-tour pour revenir vers Jésus. Celui-ci a pris sa guérison au sérieux et saisi l'offre complète de Dieu. Tous ont été guéris, mais c'est à lui seul que Jésus peut confirmer : "Ta foi t'a sauvé" (Luc 17:19).
    L'offre de Dieu est généreuse, elle est abondante, elle est sans condition. Mais... la réaction des êtres humains face à ce cadeau de Dieu est imprévisible ! Recevoir paraît trop facile — ne serait-ce pas un piège comme le pense le roi d'Israël lorsqu'il reçoit la lettre de recommandation de Naaman? Recevoir paraît trop facile et pourtant, il n'y a qu'à dire MERCI.
    Qu'allez-vous faire de ce cadeau (le baptême) que vous avez demandé pour votre enfant ?
    Qu'allez-vous faire / qu'avez-vous fait de ce cadeau que vous avez reçu lors de votre propre baptême ?

    Amen

    © 2006, Jean-Marie Thévoz

  • Luc 10. Le bon Samaritain : prendre la perspective du blessé

    Luc 10
    4.10.98
    Le bon Samaritain : prendre la perspective du blessé
    Deut. 6 : 4-7 1 Jean 4 : 7-10 Luc 10 : 25-37


    "Que dois-je faire pour recevoir la vie éternelle? " Telle est la question qu'un maître de la loi vient poser à Jésus. Qui, aujourd'hui se soucie de son salut, de la vie éternelle ? Est-ce une préoccupation qui vous agite, qui mobilise votre énergie, qui guide vos choix journaliers ? Si le salut et la vie éternelle ne concerne que ce qui se passe après la mort, je pense que vous êtes peu à vous en préoccuper. Le sujet peut attendre quelques années... et je ne vous donne pas tort !
    Cependant, je pense que ces termes et la question du maître de la loi ne concernent pas des choses lointaines, mais une préoccupation que nous avons tous : Qu'est-ce qui est essentiel dans la vie ? Qu'est-ce qui va me rendre heureux ? Où est le bonheur ? Dès maintenant, pour aujourd'hui. Ces questions-là nous préoccupent, au moins sur certains plans pratiques : comment être heureux en famille, avec qui vais-je faire ma vie, quel métier dois-je choisir, etc. ?
    Jésus renvoie la question au maître de la loi. A lui de répondre. Et en bon connaisseur de la loi, de l'Ancien Testament, le maître de la loi extrait les textes que Jésus lui-même aurait choisi. On ne peut mieux faire ! Il résume toute la volonté de Dieu en deux phrases. Aussi Jésus le félicite-t-il et lui recommande simplement de mettre cela en pratique; le bonheur est dans ce double amour. Mais le maître de la loi se retrouve avec une contradiction sur les bras. Il pense en terme de loi, de commandement, et voilà que sa réponse lui ordonne d'aimer. On est là en plein paradoxe. Peut-on aimer sur ordonnance ?
    Insatisfait par cette réponse de Jésus, trop simple et trop paradoxale en même temps, le maître de la loi relance le débat. S'il s'agit d'aimer, qui dois-je aimer ? Et là, Jésus se met à raconter une histoire, l'histoire du bon Samaritain.
    Cette histoire je l'avais souvent lue ou entendue et elle me mettait toujours mal à l'aise. Je me demandais toujours, en l'entendant, qui de ces trois personnages j'étais ou j'allais être dans la vie. Est-ce que je réussirai à être un bon Samaritain ? Est-ce que j'y arriverai, est-ce que je serai assez bien, à la hauteur ? Je n'avais pas assez d'énergie à mettre dans ce rôle. Cette histoire me paralysait.
    Un jour, cependant, j'étais avec quelqu'un qui m'écoutait avec une attention particulière, cette attention qui permet de se confier et de regarder en soi, sans peur, avec vérité. Ce jour-là, j'ai vu les blessures laissées par mon enfance. Et un peu plus tard, cette histoire de Jésus m'est revenue en mémoire, mais complètement transformée. Je me suis vu dans l'homme blessé, au bord du chemin, voyant des gens qui passaient et se détournaient, indifférents à ma souffrance. Et d'autres qui se sont arrêtés. Ces personnes-là sont devenues mes prochains et ont formé ensemble le visage de Dieu pour moi. Depuis ce moment, j'ai senti renaître en moi les ressources et l'énergie de me tourner vers les autres. J'ai vu qu'aimer ne pouvait pas être un devoir, seulement une chance fantastique, une liberté offerte. Un chemin vers la vraie vie.
    Pour répondre à la question "Qui est mon prochain ?" Jésus ne propose pas un choix entre trois sortes de malheureux. Il nous invite à prendre la perspective du blessé et à chercher à partir de là qui est venu à son secours.
    N'importe lequel de ces trois hommes aurait pu s'arrêter. Un seul l'a fait. Pourquoi celui-ci plutôt que les deux autres ? Pourquoi le Samaritain, plutôt que le prêtre ou le lévite ? Le texte ne nous donne que deux indices, mais ils me semblent suffisant pour poser une hypothèse. L'homme était Samaritain et il a eu profondément pitié. Les Samaritains étaient des faux-frères ou des frères ennemis pour les juifs. Le Samaritain qui voyage en Judée est victime de rebuffades, de vexations, d'exclusions. Il est mal-aimé et il souffre de cette situation. Victime lui-même, le Samaritain est à même de percevoir la souffrance d'une autre victime, celle du blessé au bord du chemin.
    Le Samaritain ressent en lui la souffrance de l'autre, il ne peut y rester indifférent. Il obéit donc à ce signal, il ouvre son coeur et se met à aimer dans le concret en prenant soin du blessé. Le Samaritain a été blessé, il est capable de reconnaître un autre blessé qui a besoin de lui, comme le Christ blessé à mort sur la croix est capable de comprendre les détresses que nous traversons.
    Jésus, en terminant sa rencontre avec le maître de la loi, l'invite à faire de même, c'est-à-dire à découvrir en lui-même l'être blessé, afin d'être capable d'aller par les chemins et de reconnaître celui qui va devenir son prochain. Cette façon d'aimer est l'accomplissement de la loi.
    L'Eglise devait être le lieu de rassemblement de ceux qui se sont reconnus blessés et aimés, soignés, après quoi la mission de se tourner vers les autres devient facile.
    "Toi, va et fais de même" dit Jésus. Cette phrase veut dire : Vois où tu as été blessé par la vie, reçois l'amour qui peut guérir cette blessure et fait de cette blessure guérie ta force, ton terrain d'action ! La blessure guérie est un détecteur sûr et sensible des blessures semblables, elle sera un guide sûr à la rencontre de ton prochain.
    "Toi, va et fais de même" dit Jésus. Si tu es blessé, viens recevoir ta part d'amour.
    Si tu es guéri, va à la rencontre de ton prochain.
    Amen

    © 2006, Jean-Marie Thévoz

  • Matthieu 20. A nos manques, Dieu répond par l'abondance de ses dons

    Matthieu 20
    22.9.2002
    A nos manques, Dieu répond par l'abondance de ses dons
    Ps 145 : 13-21 Es 55 : 6-9 Mt 20 : 1-16

    Chères paroissiennes, chers paroissiens de nos communautés,
    Nous sommes invités — ce matin — à méditer sur cette parabole bien connue des "ouvriers de la 11e heure" et sur les paroles du prophète Esaïe qui rapporte des propos qui semblent sévères de la part de Dieu :
    "Vos pensées ne sont pas mes pensées, vos projets ne sont pas mes projets" (Es 55:8).
    Ces paroles sont comme une remise au pas de l'être humain, une remise en place, à sa juste place, de l'humain par Dieu. Il semble que — dans ces paroles — Dieu veuille nous rappeler toute la distance qu'il y a entre lui et nous, une distance aussi grande que celle qui sépare la terre du ciel, entendez : une distance infinie.
    Je pense qu'il faut prendre cette distance au sérieux, et reconnaître que nos systèmes de pensées ne sont pas ceux de Dieu, que nos projets de société ne sont pas ceux de Dieu, que nos idées sur la réalité ne sont pas celles de Dieu. Mais le prophète ne parle pas d'une distance infranchissable, qui serait une séparation de Dieu ! En effet, Esaïe a commencé son apostrophe en disant que Dieu "se laisse trouver" et "qu'il est maintenant près de nous" (Es 55:6).
    La distance entre Dieu et nous existe, mais elle n'est pas là où on la pense. La distance n'est pas une affaire kilométrique, elle est une affaire d'attitude ! Le prophète nous invite à ne pas créer nous-mêmes notre propre distance vis-à-vis de Dieu en projetant sur lui nos manières de penser.
    Cessons d'attribuer à Dieu nos raisonnements, nos sentiments, notre façon de considérer les choses. Dieu a sa propre façon d'agir, de raisonner, de considérer les situations. Et c'est ce qui est illustré dans la parabole des "ouvriers de la 11e heure."
    Jésus commence par dire : "Voici à quoi ressemble le Royaume des cieux." Comprenons aujourd'hui que cela signifie : "Je vais vous illustrer la façon de penser et d'agir de mon Père." Et que voit-on ? Un maître généreux. Non seulement il remplit son contrat en donnant la somme convenue, mais il arrondit vers le haut le salaire de tous.
    Évidemment, en terme de salaire horaire, c'est inéquitable ! Mais il faut savoir qu'une pièce d'argent par jour est la somme nécessaire pour nourrir sa famille ce jour-là. Le maître ne se préoccupe pas de savoir si son geste crée des inégalités, il est préoccupé par le sort de chaque ouvrier. Il veut que chacun puisse vivre et nourrir sa famille.
    Et le maître agit ainsi quoi qu'en pensent ceux qui l'observent. Les pensées des mécontents, des jaloux le laissent indifférent. "Etes-vous jaloux parce que je suis bon ?" dit-il seulement. Là est bien la question; là est bien la distance qui sépare les humains de Dieu !
    Lorsque nous voyons Dieu à notre image, nous projetons sur lui nos exigences de "bon droit", de rétribution. Nous projetons sur lui notre peur de manquer, notre angoisse d'être moins bien lotis que notre voisin. Ces pensées ne sont pas celles de Dieu. Et nous n'avons pas à les projeter sur lui.
    Hélas, trop souvent, en tant qu'Eglises, nous projetons cette image de Dieu aux yeux de nos concitoyens. Nous créons nous-mêmes la distance avec Dieu en plaçant des obstacles sur le chemin de ceux qui veulent s'approcher de Dieu. Combien de fois nos jugements rapides ou quelques mots critiques renvoient une personne à sa solitude ou son désarroi ? Combien de fois nos préjugés nous retiennent-ils d'offrir à quelqu'un le sourire ou la main tendue qui lui feraient du bien ? Combien de fois nos peurs ou nos rigidités institutionnelles mettent-elles un frein à l'oecuménisme ? Là où Dieu ouvre les bras pour accueillir tous les humains, nous mettons des obstacles, des barrières.
    Au lieu d'imaginer un Dieu à notre image, apprenons à nous réjouir de la bonté du Père, à nous réjouir de sa générosité et de l'abondance de biens qu'il donne à tous. C'est à nous d'adopter Dieu pour modèle, c'est le retournement auquel le prophète Esaïe nous invite et nous exhorte.
    Oui, nous avons peur du manque, peur de l'injustice. Oui, nous sommes envahis par la jalousie, mais Dieu n'est pas semblable. A notre manque il répond par l'abondance de ses dons. A notre peur de l'injustice, il répond par la réhabilitation des victimes et le soins de nos blessures. A notre jalousie, il répond que tous ses biens nous sont déjà donnés en Jésus-Christ (Luc 15:31).
    A nous de recevoir vraiment les paroles du prophète :

    "Tournez-vous vers le Seigneur,
    maintenant qu'il se laisse trouver.
    Faites appel à lui,
    maintenant qu'il est près de vous." (Es 55: 6)
    Tout ce dont Dieu dispose, il nous l'a déjà donné, apprenons à puiser à cette source pour être comblé de plénitude.
    Amen

    © 2006, Jean-Marie Thévoz

  • 24.9.06 / 2 Corinthiens 5. L'ancien état de choses a disparu, le nouvel état de chose est là.

    2 Corinthiens 5
    24.9.2006
    L'ancien état de choses a disparu, le nouvel état de chose est là.
    Mt 13:44 / 2 Co 5 : 17-19

    Chers catéchumènes, chers parents, chers paroissiens,
    Je vais demander aux adultes de faire un effort pendant mon message, c'est de se replonger dans leur enfance ou leur adolescence pour écouter ce que je vais dire. Comme cela vous serez au même niveau que les catéchumènes, même si c'est avec un peu plus de conscience.
    Je vais commencer par vous jouer un petit dialogue entre une mère et son fils.

    — Allo, Maman ? Je cherche mes souliers de marche et je ne les trouve pas !
    — Allo chéri, je vais t'aider, va dans la pièce qui est à côté de l'escalier, ils doivent être dans l'armoire.
    — J'y suis, mais il n'y a pas d'armoire, juste un bahut.
    — Comment ça ? Tu ne peux pas être près du bahut, il est dans une autre pièce, va vers l'armoire, elle est blanche.
    — Bon alors, je change de pièce. J'ai trouvé une armoire, mais elle est brune.
    — Tu fais quoi ? T'as pas mis tes lunettes ou t'es bête ? Cherche l'armoire blanche !
    — Je cherche, mais je ne vois pas d'armoire blanche.
    — T'es complètement idiot, tu ne peux pas la manquer, elle est si grande. A part : J'ai fait quoi pour avoir un gosse aussi nul ?
    — Mais j'essaie de la trouver. J'ai passé dans toutes les pièces, mais je ne la trouve pas.
    — Mais t'es où enfin ? T'es sûr que tu ne t'es pas trompé de maison ?
    — Mais non, je suis chez nous, à la cave.
    — Mais l'armoire blanche n'est pas à la cave ! Quelle cloche tu fais. Elle est au rez, à côté de l'escalier de la cave.
    Pourquoi, je vous raconte cette histoire ? Parce que je crois qu'on vit à la cave avec le plan du rez-de-chaussée, et que cela crée beaucoup de mal-entendus dans la vie ! On reçoit des informations de toute part et elles ne concordent pas avec ce qu'on vit, avec notre expérience.
    Il s'en suit qu'on en tire des conclusions et ces conclusions sont fausses, mais c'est quand même là-dessus qu'on bâtit notre vie quand on est enfant.
    Le garçon, dans notre histoire, peut tirer deux sortes de conclusions. D'un côté : "je suis débile" puisque les adultes savent ce qu'ils font et ce qu'ils disent. De l'autre : "ma mère est complètement folle", mon expérience était juste, l'armoire n'était pas là, donc je dois me méfier de tout ce que j'entends.
    Que l'on choisisse l'une ou l'autre variante pour construire sa vie — "je suis nul" ou "les autres ne sont pas fiables" — on part sur une base faussée.
    Si l'on est honnête avec soi-même, on doit tous constater qu'on vit dans cette cave. Quelques-uns d'entre vous ont peut-être réalisé depuis un certain temps qu'ils vivaient dans une cave et en sont sortis : vous êtes bienheureux ! Mais on ne peut sortir de la cave que parce qu'on se rend compte que ce qu'on habite est la cave et pas le rez. Sortir de la cave n'est cependant pas facilité dans notre société.
    En effet, beaucoup d'acteurs de notre société ont des avantages à nous maintenir à la cave. En effet, c'est désagréable de vivre à la cave, c'est-à-dire dans la solitude par manque d'amour, ou dans la peur par méfiance envers les autres (ces autres pourraient découvrir que nous sommes nuls malgré les efforts que nous faisons pour le camoufler) ou vivre dans la tristesse de n'être pas appréciés tels quels.
    Face à cette détresse, tous les vendeurs s'empressent de nous vanter le nouvel écran super-géant qui nous fera passer de super-soirées et comblera notre solitude ou pour nous vendre les cigarettes ou l'alcool qui nous ferons oublier que nous sommes malheureux.
    Lorsque l'apôtre Paul parle de tout cela, il l'appelle "l'ancien état de choses" (c'est la cave) et il propose "un nouvel état de choses" (c'est le rez, l'étage à la lumière du jour). Il dit : "Dès que quelqu'un est uni au Christ, il est un être nouveau : l'ancien état de choses a disparu, le nouvel état de chose est là." (2 Co 5:17). Cela ressemble à un tour de passe-passe, mais c'est différent.
    A la cave — pour reprendre notre dialogue — le fils se voit à travers les yeux de sa mère qui le dénigre, le dévalorise, détruit son estime de soi. Le fils intègre ces jugements de valeur et se croit effectivement nul, inadéquat, incapable.
    Mais tout cela repose sur un mal-entendu ! C'est parce qu'il est à la cave et que sa mère parle du rez qu'il ne trouve pas. Il ne peut pas trouver ses chaussures. Il n'y a aucune faute de la part de l'enfant, il n'y a aucune incompétence de sa part, aucune inadéquation de sa part. Mais personne ne le lui dit, personne n'exprime — alors — de la compassion pour sa situation d'échec. Personne n'est là pour lui expliquer la vérité de la situation : il n'y a pas de coupable, il n'y a pas de juge, il n'y a donc pas de condamnation. Il n'y a qu'un mal-entendu sur l'étage.
    La vie du Christ, et sa mort, — ce que vous allez découvrir en vivant le catéchisme — met le doigt sur ce mal-entendu. Le Christ nous dit : Je ne suis pas venu pour juger, mais pour vous montrer que Dieu fait tout pour dire son amour et réconcilier l'être humain avec Lui.
    Le Christ est venu pour montrer quel regard Dieu a sur tous les êtres humains : un regard d'amour qui connaît le mal-entendu de départ et voit chacun tel qu'il est : en quête, en recherche de bonheur, mais aussi en situation d'échec.
    "L'ancien état de choses a disparu." Dieu nous fait sortir de la cave et émerger à la lumière, à l'étage qui correspond aux indications du plan. Le nouvel état de choses est là, c'est une nouvelle création. Nous pouvons nous regarder avec les yeux de Dieu et nous voir comme des personnes qui faisons toutes de notre mieux, des personnes dignes d'être aimées et capables d'aimer en retour.
    Dieu nous accepte tels que nous sommes, "il nous a réconcilié avec Lui par le Christ (…) sans tenir compte de nos fautes" (2 Co 5:18-19), de nos erreurs, de nos échecs. C'est lui-même qui nous sort de la cave pour nous amener à l'étage de la vie, de la vraie vie.
    Comme celui qui découvre un trésor dans un champ (Mt 13:44), nous pouvons troquer sans hésiter toutes les choses anciennes contre ce nouveau trésor, cette nouvelle vie.
    Reste une question. Dois-je faire quelque chose pour emprunter cet escalier et monter à la lumière ? Oui, tout simplement accepter d'avoir été accepté par Dieu. Accepter que la base de ma nouvelle vie soit : "Je suis pleinement aimé de Dieu." Il n'y a rien d'autre à faire.
    Sur cette base, je peux me sentir adéquat, pleinement reconnu et je n'ai plus besoin de me méfier des autres. Je suis accepté tel que je suis par Dieu, je peux donc m'accepter moi aussi tel que je suis et vivre une nouvelle vie.
    Amen

    © 2006, Jean-Marie Thévoz

  • 1 Rois 3. Dieu est comme le web de la pensée...

    1 Rois 3
    24.9.2000
    Dieu est comme le web de la pensée...
    1 Rois 3:4-13 Mt 22:34-40

    Chers catéchumènes, chers parents, chers paroissiennes et paroissiens,
    Par ce culte, nous voulons marquer le début du catéchisme de 34 jeunes de Bussigny et Villars-Ste-Croix. C'est un événement important dans la vie de la paroisse, dans la vie de ces 33 familles (il y a des frères et soeurs qui commencent ensemble) et dans la vie de ces jeunes.
    Par ce culte, puis par le catéchisme, vous les jeunes, et par ricochet vous leurs familles, vous allez être confronté à la "question de Dieu". Y a-t-il quelqu'un au-dessus de nous ? Sommes-nous seul à affronter la vie ? Le mal l'emporte-t-il sur le bien dans ce monde ? Comment puis-je réussir ma vie ? Serais-je aidé, soutenu ? Peut-on être heureux dans notre monde ? Que puis-je, que vais-je faire de ma vie ?
    Des questions qui se poseront de façon pratique à vous les jeunes, dans le cours de votre scolarité, dans le cours de votre vie affective et familiale, dans le cours de votre vie sentimentale et amoureuse.
    Vous allez passer par le chemin de Salomon qui nous est décrit dans la Bible. Vous allez progressivement découvrir que vous êtes de plus en plus maître de votre vie, de votre existence. Vous devenez roi - reine d'un nouveau domaine avec la question : comment faire pour être heureux ?
    Et comme Salomon, vous allez recevoir cette question de Dieu : "Voyons, que pourrais-je te donner ? Demande-le moi !" (1 R 3:5) Vous avez droit à un voeu ! Quel est votre rêve ? Quel est votre besoin essentiel ? Il ne s'agit pas ici de demander du beau temps pour votre prochain pique-nique ! Il s'agit de votre vie ! Qu'est-ce qui est essentiel pour réussir sa vie ? Quelle est votre idée d'une vie réussie ? Dieu est prêt à vous conduire à la réalisation de votre rêve de vie !
    Bien sûr, on peut se dire, dans sa tête : du temps du Roi Salomon, Dieu parlait peut-être aux hommes, mais aujourd'hui, c'est dépassé, à qui Dieu parle-t-il aujourd'hui ? Mais la question n'est pas "A qui Dieu parle-t-il ?" mais "Qui l'écoute ? Qui reconnaît la voix de Dieu dans la masse de messages qui nous parviennent ?" Dieu parle constamment aux humains par des signes.
    Observez que Dieu "parle" à Salomon au travers d'un songe, d'un rêve. Que faites-vous de vos rêves, le matin ? Savez-vous à quel point ils sont importants, porteurs de vérités intérieures, réponses à vos questions profondes ?
    Beaucoup de monde doute que Dieu puisse nous parler dans nos rêves, parce que nous avons une vision trop limitée de Dieu. Notre imagination nous présente des images réduites de lui. Imaginez-le comme une énergie positive répandue dans l'univers.
    Vous connaissez internet, le web, la toile. Avec un ordinateur, on peut s'y brancher et communiquer avec le monde entier, y faire des rencontres, dialoguer, poser des questions et recevoir des réponses. Dieu est comme le web de la pensée. L'ordinateur, c'est votre cerveau, pas besoin de matériel compliqué ou coûteux. Les messages, c'est votre pensée. Les rêves ou les sentiments que vous éprouvez, ce sont les e-mails, les SMS que vous recevez. Allez-vous ouvrir votre boîte aux lettres ou laisser dormir vos messages et les ignorer ?
    Dans le temps, depuis des centaines, même des milliers d'années, des personnes à l'écoute ont reçu des messages et les ont mis par écrit. Ces écrits ont été rassemblés dans un gros manuel qu'on appelle la Bible. C'est l'expérience d'hommes et de femmes qui sont allés régulièrement relever leur boîte aux lettres pour être en liaison avec ... Dieu.
    Lorsqu'un homme a essayé de condenser, de résumer au plus court les expériences de ces hommes et de ces femmes sur le chemin de la vie, à la quête du bonheur, cela a donné ceci :

    "— Tu dois aimer le Seigneur ton Dieu de tout ton coeur, de toute ton âme et de tout ton esprit. C'est là le commandement le plus grand et le plus important. Et voici le second commandement qui lui est semblable : Tu dois aimer ton prochain comme toi-même." (Mt 22:37-39)
    Pourquoi la clé du bonheur est-elle dans un commandement et pas dans une affirmation telle que : "Tu seras heureux le jour où... tu auras ton permis ... tu auras trouvé ton conjoint... etc. ? La clé du bonheur est dans un commandement : "Tu aimeras..." pour vous dire que votre destin est entre vos mains, votre destin, votre bonheur ne dépend pas des autres, mais de vous. Il dépend du moment où l'on commence à faire circuler l'amour autour de soi. Ne faites pas dépendre votre bonheur du premier pas de l'autre, faites vous-mêmes le premier pas !
    Vous avez remarqué que la Bible dit qu'aimer Dieu c'est la même chose qu'aimer quelqu'un ! Cela devient clair lorsqu'on pense Dieu comme cette énergie positive, porteuse d'amour, répandue dans l'univers. Aimer Dieu, c'est utiliser cette énergie positive en faveur de quelqu'un.
    Il y a là un trésor disponible, c'est ce trésor que Dieu met à disposition de Salomon. C'est ce trésor que Dieu met à votre disposition, pour que vous puissiez trouver le bonheur dans votre vie.
    Amen

    © 2006, Jean-Marie Thévoz

  • Matthieu 18. Le pardon, un fusible dans la chaîne du mal

    Matthieu 18
    12.9.1999
    Le pardon, un fusible dans la chaîne du mal
    Ez 33 : 7-9 Rm 13 : 8-10 Mt 18 : 15-20

    Chères paroissiennes, chers paroissiens,
    Aujourd'hui, j'aimerais vous parler du pardon. S'il est une chose, une action qui caractérise tout le ministère de Jésus, c'est sa capacité de pardonner. C'est aussi ce qui lui a été vivement reproché ! Car le pardon, le fait de pardonner les péchés, avait toujours été une prérogative de Dieu lui-même, de Dieu seul.
    Lorsqu'au début de son ministère — devant un parterre de théologiens — Jésus pardonne ses péchés au paralytique (Mt 9:1-7), cela engendre une vive discussion. Jésus marche sur les plates-bandes de Dieu, lui reprochent ses adversaires. L'être humain peut bien pardonner une offense, mais pas un péché.
    Jésus va renverser ces subtilités de théologiens, il annonce le pardon de Dieu à tous et affirme la capacité de chacun, de chaque homme, de chaque femme à pardonner, à délier les liens du mal avec un extrême efficacité. En effet, vous l'avez entendu, Jésus affirme que ce que nous délions, pardonnons, sur la terre, sera délié, pardonné, dans le ciel. La portée de notre pardon est illimitée !
    Ces paroles de Jésus sur le pardon : "Si ton frère se rend coupable à ton égard, va le trouver..." (Mt 18 : 15) montrent que l'initiative est entre les mains de celui qui a subi du mal, un tort. L'offensé n'a pas à attendre un geste de celui qui l'a blessé, il peut prendre l'initiative. Le but de cette initiative est de gagner un frère, de restaurer la relation.
    Examinons un peu le chemin qui va de l'offense au pardon. En réalité, c'est un double chemin, celui que parcourt l'offensé, celui qui a été blessé, et celui que parcourt celui qui a blessé, fait du tort. Au départ, ils sont ensemble au moment où l'un blesse et l'autre est blessé. Comme vous le savez, cela peut se produire de toutes sortes de manières, Tout à coup, le mal est fait, la parole blessante a surgi et fait son oeuvre.
    Jésus ne cherche pas à établir des responsabilités, à trouver un coupable. On se rappellera — dans le texte qui vient juste avant le nôtre, celui de la brebis perdue — que la brebis s'est égarée sans qu'on cherche à savoir si c'était la faute de la brebis, du chien ou du berger. Le mal est fait, point. L'un a subi le mal, l'autre a commis le mal, le mal est là.
    Vient alors une phase de prise de conscience, phase essentielle autant pour l'un que pour l'autre. Réaliser le mal subi, sa nature, où cela nous touche, nous blesse, est une étape nécessaire à notre guérison. Réaliser le mal qui a été commis et ce qui échappe à celui qui l'a fait. Sur la croix, Jésus réalisait le mal qu'il subissait, mais il a demandé à Dieu : "Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu'ils font !" Qui sait vraiment le mal qu'il fait, qu'il commet, toute son étendue ?
    On fait rarement le mal volontairement, délibérément, mais plutôt par lâcheté, par peur, pour se défendre ou poussé par des forces internes qu'on ne s'explique pas. Cela n'excuse pas le mal commis, mais cela aide à le comprendre et de là, à le pardonner. Pardonner, c'est renoncer à penser que l'autre est simplement méchant, pour envisager qu'il souffre aussi, qu'il n'est pas si libre qu'il ne le pense, qu'il est peut-être lié par le mal qu'il commet.
    Le pardon, c'est la possibilité d'une double libération. Pour l'offensé, c'est lâcher prise de sa colère, lâcher sa position de victime, lâcher sa position de dépendance face à l'agresseur, le quitter, l'abandonner pour redevenir soi.
    Pour l'agresseur, c'est le délier de ce mal qu'il a commis, c'est-à-dire cesser de l'enfermer dans son acte pour considérer qu'il y a d'autres forces en lui qui peuvent le faire sortir du cercle du mal. S'il réalise cela, l'agresseur pourra entamer une vie nouvelle, qui passe par la repentance, la réparation et conduit à la réconciliation.
    Le mal — comme nous l'apprennent beaucoup d'études savantes, mais aussi la simple actualité du Kosovo — est une chaîne, un enchaînement de mal subi qui conduit à une vengeance qui engendre une violence en retour et qui n'a plus de raison de finir. Le pardon est comme un fusible qui rompt cet enchaînement, cette propagation du mal.
    En tant qu'Eglise de Jésus-Christ, — Eglise de celui qui a démasqué ce mécanisme sur la croix et a opposé à cette violence son pardon — en tant que disciples, nous avons à apprendre à pardonner, comme Dieu pardonne.
    Encore un mot sur une phrase bizarre de ce texte :

    "Si celui qui t'a offensé refuse d'écouter l'Eglise, qu'il soit pour toi comme le païen et le collecteur d'impôts" (Mt 18:17).
    Cette phrase a souvent été comprise comme une condamnation de l'offenseur et une invitation à ne plus avoir de contact avec lui. C'est une erreur, car pour Jésus (l'ami des païens et des collecteurs d'impôts, lui reprochait-on, Mt 11:19) cette phrase signifie plutôt : "Qu'il soit pour toi comme pour moi, l'objet de toute ton attention, comme le berger à l'égard de la brebis perdue." Le but de la démarche du pardon est de "gagner un frère", un interlocuteur amical, une personne avec laquelle on peut renouer.
    Dieu ne nous demande pas d'être parfaits, irréprochables et purs, il nous demande de nous accepter les uns les autres, tels que nous sommes, en nous pardonnant mutuellement le mal que nous subissons ou commettons.
    Amen

    © 2006, Jean-Marie Thévoz

  • Marc 4. Lorsque la tempête frappe, Jésus est à nos côtés

    Marc 4
    6.9.1998
    Lorsque la tempête frappe, Jésus est à nos côtés
    Ps 65 : 2-9 Col 1 : 15-20 Mc 4 : 1-2a + 35-41

    Chères paroissiennes, chers paroissiens,
    Vous avez entendu le récit dit "de la tempête apaisée". Pendant toute la journée, Jésus s'est tenu là, debout dans une barque, face à la foule rassemblée sur le rivage. Il leur racontait de petites histoires, des paraboles : la parabole du semeur, la parabole de la lampe, la parabole de la semence qui pousse toute seule, la parabole de la graine de moutarde.
    Après cette journée d'enseignement et de récits, Jésus se retire avec ses disciples. Et ce soir-là, les disciples se demandent : "Mais qui est cet homme ?" Le récit de la tempête apaisée apporte une certaine réponse à cette question. Pour comprendre cette réponse, abordons le récit par la fin, en remontant le temps.
    "Qui est cet homme pour que même le vent et l'eau lui obéissent ?" Les disciples avaient pu penser que Jésus était un bon conteur... ou plus que cela ? Ils pouvaient même penser qu'il était un prophète... parce qu'il parlait bien de Dieu, ou plus que cela ? Avec cet épisode de la tempête, ils peuvent découvrir encore un aspect de l'identité de Jésus.
    Cette intervention sur la tempête est là pour nous montrer le lien entre Jésus et Dieu. Dans le Ps 65, on nous montre que la puissance de régner sur les éléments déchaînés et de pouvoir les apaiser est une prérogative de Dieu seul. Si seul Dieu peut apaiser une tempête et que Jésus le fait, alors Jésus a un lien extrêmement étroit avec Dieu.
    Pourquoi est-il si nécessaire de montrer que Jésus est en lien étroit avec Dieu ou comme le dit l'apôtre Paul que "Le Christ est l'image visible du Dieu invisible"? Pourquoi est-ce si nécessaire ? Parce que Jésus fait des choses qui ne semblent pas venir de Dieu, ou plus précisément qui ne collent pas avec la représentation habituelle ou intuitive de Dieu.
    A un Dieu éloigné des hommes, Jésus oppose un Dieu proche. A un Dieu tout-puissant, mobilisateur des forces de la nature, il oppose un Dieu qui se trouve dans des signes humains, à peine perceptibles. A un Dieu juge qui distribuerait peines et récompenses, Jésus oppose un Dieu qui prend part aux souffrances humaines (Jésus meurt sur la croix). Jésus propose une nouvelle vision du visage de Dieu, ce visage est présent dans ce récit.
    Lorsque la tempête frappe — et c'est là une image de nos vies — donc quand nous sommes ballottés par les difficultés et les souffrances de la vie, Jésus n'est pas au sec et en sécurité sur le rivage. Il est là, dans la barque, à nos côtés. Il est là, solidaire et souffrant avec nous.
    Certes, on nous le montre qui dort ! Mais on nous le montre aussi se réveillant à l'appel de ses disciples ! Il ne faut pas hésiter à réveiller Jésus lorsqu'on veut l'avoir à notre côté ! Dieu a trop de respect pour nous, pour intervenir lorsque nous ne le souhaitons pas, lorsque nous ne le demandons pas. C'est à nous de le réveiller, de le ressusciter dans nos vies pour l'avoir à nos côtés. Il est là tout proche, prêt à répondre à notre appel.
    Les disciples ont réveillé Jésus. Pourtant, dans le bilan final d'après la tempête, Jésus leur reproche un manque de foi. Pourquoi ? C'est très étrange ! Dans la difficulté, ils ont eu recours à Jésus. N'est-ce pas la foi qu'on nous enseigne au catéchisme ? Je crois que la foi n'a pas tellement à faire avec ce que les disciples ont fait ou pas fait, mais à leur façon de voir et penser Dieu. C'est dans la question que les disciples posent à Jésus que se cache un manque de foi : "Maître, nous allons mourir, cela ne te fait-il rien?" (Mc 4:38) Cela t'est-il égal ? Es-tu indifférent à notre sort ?
    Penser que Dieu est indifférent au sort des humains, à notre sort personnel (lorsque nous sommes pris dans la tempête), c'est méconnaître l'amour que Dieu a pour chacun de nous, c'est passer à côté du message que Jésus nous répète constamment : Dieu est proche de nous.
    Dieu n'est pas indifférent à nos drames (collectifs ou personnels), il vit à nos côtés, il souffre à nos côtés, il est présent à nos côtés pour que nous puissions vivre et espérer.
    Dieu est proche, n'hésitons pas à le réveiller pour jouir de sa présence.
    Amen

    © 2006, Jean-Marie Thévoz

  • Luc 7. L'année de faveur du Seigneur

    Luc 7
    12.10.97
    L'année de faveur du Seigneur
    Lév. 25 : 8-19 Col. 3 :12-14 Luc 7 : 36-50

    Chères paroissiennes, chers paroissiens,
    Au début septembre, j'ai commencé une suite de prédications en partant des paroles du prophète Esaïe lues par Jésus lors de sa première prédication à Nazareth :

    "L'Esprit du Seigneur est sur moi,
    il m'a choisi pour apporter la Bonne Nouvelle aux pauvres.
    Il m'a envoyé pour proclamer la délivrance aux prisonniers
    et le don de la vue aux aveugles,
    pour libérer les opprimés,
    pour annoncer l'année où le Seigneur manifestera sa faveur." Luc 4:18-19.
    Aujourd'hui, nous sommes arrivés à la dernière phrase : "Annoncer l'année où le Seigneur manifestera sa faveur", une année de grâce, de bienveillance de Dieu envers nous.
    Cette année de faveur à une histoire dans l'Ancien Testament. Dans le livre du Lévitique est décrit un système économique très spécial. Un premier cycle de sept ans est introduit, où la septième année, l'année sabbatique est une année de repos pour le sol. Pendant six ans tout le monde travaille, sème et récolte, la septième année est une année de repos. A ce premier cycle se superpose un deuxième cycle de sept fois sept ans, soit 49 années au total. L'année qui suit, soit la 50e est le Jubilé, l'année du Seigneur. Lors de cette 50e année, on rétablit les prersonnes dans leurs biens, dans leurs terres ou dans leur liberté pour celles qui ont été asservies pour n'avoir pas pu payer leurs dettes. Ce système économique présuppose une situation de départ équitable et juste et un monde très stable, au moins démographiquement.
    Cet astucieux système économique n'a jamais été mis en place en Israël, mais il témoigne d'une tentative d'orgdonner le monde économique à la volonté divine tout en laissant de la place à la liberté humaine et en tenant compte de certaines réalités :
    Ce système laisse une liberté de commerce et d'entreprise aussi grande que possible à tous pendant le cycle de 49 ans. Il ne laisse cependant pas croître les inégalités jusqu'à un point de rupture ou de non retour grâce à l'année du Jubilé qui instaure une redistribution. Enfin il tient compte du fait que la réalité est marquée par la dégradation des relations et des conditions de vie, en l'absence d'une lutte contre l'entropie naturelle ou sociale.
    Jésus nous dit : "Aujourd'hui s'accomplit cette parole d'Esaïe : l'année du Seigneur, de la restauration, c'est maintenant." Pourtant Jésus n'est pas venu accomplir une révolution économique, comme il n'est pas venu pour chasser les Romains de Palestine. Il vient restaurer notre être, pas nos avoirs. Jésus est venu remplacer — dans nos modes relationnels — l'économie de marché fondé sur la pénurie, par l'économie du Royaume fondée sur l'abondance. C'était-là la Bonne Nouvelle annoncée aux pauvres.
    Le départ équitable qui est donné à tous à la naissance, c'est de vivre dans l'abondance de l'amour. Il existe une légende juive qui dit que Dieu enseigne toute la Torah à chaque bébé dans le ventre de sa mère, de sorte qu'il sache à quel point il est aimé et capable d'amour. A la naissance, cependant, un ange pose son doit sur la bouche du nouveau-né pour qu'il se taise et laisse chacun découvrir par sa présence ce qu'il a déjà appris. La petite gouttière que nous avons entre le nez et la lèvre est la trace du doigt de l'ange.
    Chaque enfant naît avec l'amour et le pardon de Dieu dans son coeur, avec une capacité d'aimer à l'infini. Ensuite, malheureusement, la situation se dégrade. Les détresses subies nous aliènent et le mal prend de l'ampleur dans nos vies et limitent nos capacités d'aimer, comme dans le Lévitique. La situation voulue au départ se dégrade. Chacun vit — sans que ce soit la faute de personne — des événements pénibles, tristes, frustrants, parce que la vie est dure, la société injuste et qu'il est impossible d'obtenir tout ce que nos désirs souhaitent.
    Comme le pharisien ou comme la femme au parfum, nous sommes poussés, renfermés dans des rôles, des fonctions. Nous accumulons des dettes sous forme de culpabilités et perdons nos libertés, en façonnant nos stratégies relationnelles.
    Jésus vient nous libérer de nos propres enfermements, de nos dettes, de nos culpabilités, detout ce qui nous paralyse. C'est ainsi que se réalise la parole d'Esaïe : "Dieu libère les captifs et renvoie en liberté les opprimés". Jésus vient nous délivrer du péché.
    Voilà, le mot est lâché : le péché. C'est Jésus qui le prononce lorsqu'il dit à la femme "Tes péchés sont pardonnés". Le péché, c'est l'ensemble des choses qui dégradent la situation de départ pendant les 49 ans du cycle du Lévitique, jusqu'à ce que Dieu rétablisse la justice et l'équité pendant la 50e année.
    Jésus ne parle du péché que lorsqu'il parle du pardon, lorsqu'il libère (la femme adultère) ou qu'il compatit et guérit (le paralytique). Pour Jésus, le péché originel n'existe pas. La seule chose qui existe pour Jésus, c'est le pardon originel.
    Constamment, Jösus veut nous guérir de notre aveuglement qui nous fait voir le péché seulement comme les actes mauvias, les fautes, le mal que nous commettons et qui conduit à être jugé et à juger les autres, à être accusé et à accuser (à être lapidé ou à lapider Jean 8). Il veut nous redonner la vue sur la détresse, sur la souffrance ressentie, sur la dégradation des relations pour que nous puissions ressentir et compatir, "nous réjouir avec ceux qui se réjouissent, pleurer avec ceux qui pleurent".
    L'année de faveur du Seigneur que Jésus réalise, c'est le retour à l'état de personne pardonnée, aimée. Dieu nous offre aujourd'hui d'être restaurés dans cet état premier par le pardon, ce pardon qui permet d'aimer et d'agir comme la femme au parfum. Jésus déclare à Simon, le pharisien qui se croit juste : "Je te le déclare : le grand amour que cette femme a manifesté, poruve que ses nombreux péchés ont été pardonnés." (Luc 7:47)
    Les nombreux péchés de cette femme proviennent des nombreuses occasions de souffrir, d'être méprisée, d'être discriminée qu'elle a pu vivre. Le péché n'est pas souvent un acte délibéré, un délit prémédité, organisé et commis de sang froid. Plus souvent, c'est une simple réaction, réaction de défense par laquelle on tente de survivre, ou une réaction dans le sens d'une répétition, répétition du mal que nous avons subi, à la façon dont ces personnes qui ont été battues dans leur enfance, se mettent également à battre leur conjoint ou leurs enfants. Comment pourraient-elles agir différemment si elle n'ont jamais vécu dans un autre système relationnel, si elles n'ont jamais eu l'occasion d'expérimenter d'autres façons d'entrer en relation avec les autres, qu'elles ne connaissent pas d'autres règles du jeu ?
    Avec l'année de faveur du Seigneur, Jésus nous offre lacompréhension pour tout ce que nous avons éprouvé et subi. En pardonnant, il prononce la parole libératrice que la femme au parfum attend : tu n'a rien fait de mal, tu es innocente, je te déclare non coupable et te restaure dans ta dignité première. Comme Jésus a dit à la femme : "Ta foi t'a sauvée, va en paix", il nous dit à nous aussi aujourd'hui : "Ta foi t'a sauvée, va en paix".
    Amen.

    Fait partie de la suite Prédication de Jésus à Nazareth : Luc 4 / Esaïe 58 / Luc 10 / Luc 7.

    © 2006, Jean-Marie Thévoz

  • Luc 10. Comment Jésus rend la vue aux aveugles

    Luc 10
    Comment Jésus rend la vue aux aveugles
    Dt 6 : 20-25 Luc 10 : 22-24 1 Jean 2 : 7-11

    Chères paroissiennes, chers paroissiens,
    Aujourd'hui, nous allons voir comment Jésus rend la vue aux aveugles.
    Vous vous souvenez que Jésus avait annoncé son programme d'action à Nazareth en citant Esaïe:

    "L'Esprit du Seigneur est sur moi,
    il m'a choisi pour apporter la Bonne Nouvelle aux pauvres.
    Il m'a envoyé pour proclamer la délivrance aux prisonniers
    et le don de la vue aux aveugles,
    pour libérer les opprimés,
    pour annoncer l'année où le Seigneur manifestera sa faveur." Luc 4:18-19.

    Jésus annonce donc qu'il va faire voir les aveugles ! Que signifie être aveugle et retrouver la vue ? Essayez de fermer les yeux. Que percevez-vous de ce qui vous entoure ? Comment est le monde ? A part les bruits, le monde s'arrête au bout des bras... Que manque-t-il ? Plusieurs dimensions, les couleurs, le chatoiement de la lumière ...
    Un aveugle, qui n'aurait jamais vu et qui voit, découvre un monde tout neuf, une perception toute nouvelle, une dimension supplémentaire à un monde qu'il connaissait sous un autre mode. C'est une révélation.
    C'est cette révélation dont Luc dit qu'elle a été faite aux petits-enfants, pas aux sages et aux intelligents. Cette révélation, elle est pour ceux qui ne sont pas aveuglés par la raison, le calcul (de leurs intérêts), la logique du monde.
    Qu'est-ce que cette révélation ? Luc nous donne deux pistes. La première, c'est la suite du texte. Juste après avoir déclaré "Heureux ceux qui voient" vient l'histoire du Bon Samaritain. La seconde piste, il faut aller la chercher plus loin dans l'évangile. Luc ne mentionne qu'une seule guérison d'aveugle dans son Evangile, et il la place juste après qu'il ait annoncé la monté à Jérusalem pour y souffrir et y mourir (lire Luc 18 : 31-38). "Aie pitié de moi", comme si l'aveugle était le seul à pouvoir voir que Jésus est celui qui comprend et qui tourne sa compassion vers ceux qui le lui demande. Comme si la souffrance de Jésus ne pouvait être regardée, vue pour ce qu'elle est, qu'après une guérison, après un miracle qui nous ouvre les yeux.
    Le Bon Samaritain, c'est l'histoire d'un homme qui se laisse toucher par la souffrance de celui qui gît au bord du chemin. La souffrance du Christ sur la croix nous conduit à reconnaître la victime, là où on nous présente un coupable. Jésus a été jugé coupable et condamné par les hommes. Il n'existe de chréstiens que parce que des êtres humains y ont vu une injustice, une victime souffrant injustement.
    La révélation, le nouveau regard offert par Jésus, c'est celui de la compassion, de l'empathie, de l'amour du prochain.
    "Aimez-vous les uns les autres" nous rappelle Jean. C'est un vieux commandement s'il sa'git simplement de ne pas faire du tort à autreui (1 Jean 2:8). C'est un commandement nouveau, comme le dit Jean, si on le comprend comme une invitation à voir la souffrance des autres, comme le Bon Samaritain qui s'identifie au blessé.
    Le judaïsme avait bien compris le lien entre la compassion et le souvenir de ses propres souffrances. "Lorsque un étranger viendra s'installer dans votre pays, ne l'exploitez pas... vous devez l'aimer comme vous-mêmes. Rappelez-vous que vous aussi avez été des térangers en Egypte." (Lév. 19:33-34).
    La compassion ne peut venir que par le souvenir de notre propre souffrance. Comment pourrais-je "souffrir avec" (c'est le sens des mots 'sympathie', 'compassion', 'condoléances') si je suis fermé à ma propre souffrance , si je n'ose pas soulever le couvercle de ma propre misère ? Si je dois me protéger contre de douloureux souvenirs, je vais rester enfermé dans ma propre forteresse, je ne peux pas m'ouvrir à l'autre et compatir.
    Etre guréi de son aveuglement, c'est gagner un nouveau regard sur le monde, y percevoir une nouvelle dimension, de nouvelles couleurs.
    • c'est voir le mal subi (ce que ressentent les autres) avant de voir le mal commis (voir le Christ souffrant et non le Jésus coupable)
    • c'est passer d'un regard qui juge à un regard qui compatit (voir que le blesssé au bord du chemin de la vie est d'abord une victime et non un imprudent coupable de sêtre mis dans cette situation).
    Je crois que cela a été révélé aux petits enfants, aux tous-petits. Ils ont une façon si paerspicace de saisir l'humeur dans laquelle vous êtes, ils ont une façon si touchante de venir pour vous consoler s'ils vous voient tristes. Ils voient mieux que nous avec toute notre intelligence, ils perçoivent directement les sentiments. Ils voient la souffrance et ils compatissent.
    Nous pouvons retrouver cette vision du monde et des gens. Jésus, comme Messie souffrant, est venu nous ouvrir la voie, nous indiquer le chemin vers ce tout-petit qui survit en nous. Jésus l'a dit à Nicodème : Il faut "naître de nouveau".
    Fermons à nouveau les yeux, mais cette fois pour imaginer, pour essayer de se représenter la guérison, le recouvrement de la vision du coeur.
    Jésus nous ouvre à un monde nouveau, où nous percevons dans nos rencontres ce que ressentent les gens derrière les mots qu'ils nous disent. Jésus nous ouvre les yeux et nous apprend à voir avec le coeur, à retrouver les yeux de l'empathie, de la compassion, pour aaccueillir, comprendre, aimer ceux qui sont autour de nous.
    Amen.

    Fait partie de la suite Prédication de Jésus à Nazareth : Luc 4 / Esaïe 58 / Luc 10 / Luc 7.

    © 2006, Jean-Marie Thévoz

  • Esaïe 58. Le jeûne que Dieu préfère, c'est la libération des captifs

    Esaïe 58
    21.9.1997
    Le jeûne que Dieu préfère, c'est la libération des captifs
    Es 58:6-11 Gal 5:13-14 Lc 6:6-11

    (Cette prédication fait suite à celle sur Luc 4 du 7.9.1997)

    Chères paroissiennes, chers paroissiens,
    Aujourd'hui, je continue la ligne commencée il y a 15 jours. Lors de sa première prédication à Nazareth, Jésus avait lu ce passage du livre d'Esaïe :
    "L'Esprit du Seigneur est sur moi,
    il m'a choisi pour apporter la Bonne Nouvelle aux pauvres.
    Il m'a envoyé pour proclamer la délivrance aux prisonniers
    et le don de la vue aux aveugles,
    pour libérer les opprimés,
    pour annoncer l'année où le Seigneur manifestera sa faveur." Luc 4:18-19.
    et il avait ajouté: Aujourd'hui ces paroles sont accomplies !
    Aujourd'hui j'aimerais développer cette parole d'Esaïe que cite Jésus :
    "Il m'a envoyé pour proclamer la délivrance aux captifs."
    Comme nous vivons aujourd'hui le Jeûne fédéral, j'ai rappelé un autre texte d'Esaïe qui lie directement le jeûne et la libération des captifs :
    "Le jeûne tel que je l'aime, dit le Seigneur, le voici, vous le savez bien : c'est libérer les homme injustement enchaînés, c'est les débarrasser du joug qui pèse sur eux, c'est rendre la liberté à ceux qui sont opprimés, bref, c'est supprimer tout ce qui les tient esclaves." Esaïe 58:6
    Le jeûne, au temps d'Esaïe comme au temps de Jésus et plus tard était au coeur de la pratique religieuse.
    Jeûner c'est aborder différemment la faim et ce qui nous alimente, la nécessité et ce dont nous dépendons. Jeûner, c'est casser (pour un temps) le lien de dépendance (à la nourriture et pourquoi pas à la TV ou à la fumée, etc.), c'est prendre conscience de nos automatismes et de nos vrais besoins, du manque qui se creuse (au ventre) et du manque de l'autre qui ne jeûne pas forcément volontairement.
    Le jeûne n'est pas qu'affaire d'alimentation. On peut transposer cela dans nos relations. Nous avons tous faim de statut, d'image ("Je suis devenue transparente pour lui, il ne me voit plus"), de reconnaissance, d'affection, de tendresse, d'amour.
    Nous avons tous un appétit (légitime) pour cela, car c'est indispensable à la vie !
    Pour satisfaire cette faim, nous avons nos petites stratégies. Certaines sont innocentes, d'autres sont exaspérantes pour ceux qui les subissent.
    On connaît tous quelqu'un qui ne cesse de se plaindre, de montrer comme il est une victime impuissante. Cette façon d'être avec les autres est une stratégie pour obtenir de l'attention, de la commisération, de la reconnaissance.
    D'autres stratégies passent par diverses formes de prises de pouvoir et autres manipulations.
    Ces stratégies sont d'autant plus manipulatrices qu'elles ont été acquises tôt dans un environnement affectivement frustrant.
    Dès la naissance, tout enfant a un appétit relationnel. Si ses demandes directes sont généralement satisfaites, il continuera de dire ses besoins clairement et directement.
    Mais si ses demandes directes ne reçoivent pas de réponses, l'enfant va penser qu'il fait "faux" et cherchera d'autres voies plus détournées, voire franchement manipulatrices. Il va se battre par tous les moyens pour survivre affectivement.
    Nous sommes tous liés par cette faim affective parfois exacerbée par des carences vécues. Nous grandissons liés à ces stratégies. Ces stratégies satisfont un temps notre faim, mais elles ne nous rassasient pas. Devenus adultes, nous sommes limités par ces stratégies mises en place dans la petite enfance. Elles nous limitent, elles nous enferment, parfois nous oppriment. Souvent elles nous empêchent d'aimer et d'être aimés. Nous en sommes devenus captifs.
    Lorsque Jésus annonce la libération des captifs (pour aujourd'hui), il ne parle pas de vider les prisons. Mais il parle de cette libération intérieure des chaînes qui nous retiennent d'être aimés et d'aimer.
    Jésus veut nous rendre notre liberté, la même liberté dont il usait lorsque les pharisiens cherchaient à l'entraîner dans un conflit ou un piège.
    On voit dans le récit de la guérison de l'homme à la main paralysée (Luc 6:6-11) comment Jésus ne se laisse pas enfermer dans une situation programmée par d'autres. Il ne se met pas sur la défensive, il n'a pas besoin de devenir agressif pour s'imposer, simplement il suit sa ligne, il guérit.
    Etre rendu libre, c'est possible. C'est un chemin ouvert à tous, qui passe par plusieurs étapes.
    D'abord reconnaître que l'amour que l'on recherche, dont on a faim, existe et qu'il est disponible. Il n'est pas nécessaire d'écraser les autres pour l'obtenir.
    Ensuite, reconnaître que nos stratégies viennent des détresses que nous avons subies. (Ce sont ces liens provenant de la méchanceté ou de l'injustice dont parle le prophète Esaïe.) Nous ne faisons que répéter ce qui nous a fait tant souffrir.
    Enfin, pour savoir ce que nous avons subi, il faut faire un retour en soi-même, vers son passé, et y découvrir nos manques, nos carences.
    Si nous avons beaucoup souffert dans notre existence, ce chemin ne peut peut-être pas être suivi en solitaire, il nécessite une écoute attentive et compassionnelle.
    Esaïe disait : le jeûne tel que Dieu l'aime, c'est libérer les captifs.
    On peut dire aujourd'hui :
    La pratique religieuses que Dieu aime :
    - c'est créer, dans l'Église, un environnement relationnel où chacun puisse se sentir écouté et aimé,
    - c'est créer, à la maison, un climat où les enfants puissent recevoir l'affection dont ils ont besoin pour grandir,
    - c'est apprendre à recevoir l'Amour qui vient du Père pour se sentir assez riche et suffisamment libre pour le répandre autour de soi.
    Amen.

    Fait partie de la suite Prédication de Jésus à Nazareth : Luc 4 / Esaïe 58 / Luc 10 / Luc 7.

    © 2006, Jean-Marie Thévoz